Concours Ad@ptez une classique : Les résultats de l’édition 2025

Par David Dusart,

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L’édition 2024-2025 du concours Ad@ptez une classique est terminée et les gagnants et gagnantes sont désormais connus ! Découvrez ci-dessous les productions choisies par le jury et récompensées lors d’une cérémonie au Centre Daily-Bul :

– Alice Constant, Jeanne Ledain, Juliette Wijnen, Melissa Genova, Sophia Maglioni, Rania Meziani et Fany Alessandro, élèves du Collège Saint-Barthélémy de Liège, avec un court-métrage adapté du Carrousel des maléfices de Jean Ray ;

– Emma Schmidt, Maïssane Abid, Lina Bounja, Ines Hamsou, Sara Aid Mehdi et Kiara Payot, élèves du Collège Sacré-Cœur de Jette, avec un rap adapté du Grand Nocturne de Jean Ray ;

– Mathéo Brun, Luana Collart, Salomon Coulon, Mathieu Dick, Julien Eloir, Robin Henry et Eva Sohy, élèves de l’Institut Notre-Dame du Sacré Cœur de Beauraing, avec une pièce de théâtre adaptée d’Un mâle de Camille Lemonnier  ;

– Clara Frédéric et Romane Jacques, élèves du Collège Saint-Remacle de Stavelot, avec une bande annonce adaptée du Grand Nocturne de Jean Ray ;

– Juliette Dedecker, élève de l’Institut Sainte-Anne de Florenville, avec un article de journal adapté du Carrousel des maléfices de Jean Ray.

Félicitations aux gagnant.e.s !

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Littérature de jeunesse

Par administrateur,
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Albums cartonnés richement illustrés, romans en plusieurs chapitres, histoires en rimes ou en prose, illustrations colorées ou non, la littérature de jeunesse se décline sous différents formats, styles et genres littéraires.

Si la littérature de jeunesse concerne un public clairement identifié : « les jeunes », elle est certainement un des domaines où ce public défini est le plus difficile à cerner et le plus changeant au fil du temps. En fonction de l’âge des lecteurs, mais aussi de leur niveau de lecture, de leurs envies, de leur imaginaire, de leurs besoins, … Comment conseiller ceux-ci ? Et comment s’y retrouver parmi la masse de contenus disponibles en littérature de jeunesse ?

Nous vous proposons une sélection de contenus de qualité, classés par tranche d’âge. Les âges sont indiqués à titre indicatif, avant toute chose, il convient de s’intéresser à l’enfant et à sa pratique de lecture (lecteur débutant, confirmé, autonome) plus qu’à son âge officiel.

Les propositions ci-dessous concernant les jeunes adolescents (12 et +) et les adolescents et jeunes adultes (15 et +) présentent des livres qui, bien qu’ils ne soient probablement pas classés au rayon jeunesse d’une bibliothèque ou d’une librairie, peuvent convenir à ces tranches d’âges, que ce soit par les sujets traités, le vocabulaire utilisé ou l’univers convoqué.

Nos suggestions en littérature de jeunesse :

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Les jeunes pousses, graines d’auteurs et d’autrices en BD

Par David Dusart,
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Elles sont au nombre de 10, 10 « jeunes pousses » en bande dessinée.

Ce qui les rassemble : un sens du dialogue, un certain amour pour l’absurde ou une attention à la beauté des petites choses.

Partez à la découverte de cette sélection des talents d’aujourd’hui, explorez ces univers singuliers !

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Les nouveautés « printanières » en littérature jeunesse

Par David Dusart,

© Almudena Pano

Les jours rallongent, de nouveaux titres éclosent sur les rayonnages.
Découvrez les nouveautés en littérature jeunesse pour la période du 1er février au 30 avril 2025.

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« Collectionner l’image », une exposition des ATI aux Brasseurs

Par David Dusart,

Fin 2024, s’est tenue aux Brasseurs à Liège, l’exposition Collectionner l’image. Organisée par les Ateliers du Texte et de l’Image (ATI), elle regroupait 151 œuvres originales de 43 auteur·rices – illustrateur·rices de Fédération Wallonie-Bruxelles et des dizaines de livres à feuilleter. Une exposition ambitieuse pour rendre compte de la richesse et du foisonnement de la scène belge francophone de littérature jeunesse et graphique. 

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© Maxence Dedry

© FW-B Jean-Michel Roekens

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© FW-B Jean-Michel Roekens

LA COLLECTION

Les ATI partagent et font vivre une collection exceptionnelle de livres – le Fonds Michel Defourny – sous formes de rencontres, de conférences, de visites, de formations, d’expositions et de publications à destination des professionnel·les et futur·es professionnel·les du livre, de l’image et de l’enfance ainsi qu’aux secteurs socio-culturel et psycho-médico-social et aux publics fragilisés qui ont peu accès aux livres. Les ATI offrent un lieu ressource autour des littératures jeunesse et graphique et des enjeux qui leur sont rattachés.

Depuis 2022, les ATI ont commencé une collection d’œuvres originales, achetées directement aux auteur·rices – illustrateur·rices. L’ambition est de créer une collection la plus exhaustive possible de la scène de l’illustration en Fédération Wallonie Bruxelles. On y retrouve pêle-mêle des artistes déjà fort reconnu·es et d’autres plus confidentiel·les ou récemment publié·es. Pour ce qui est de la teneur des œuvres collectées, on trouve des peintures à la gouache, à l’acrylique, à l’aquarelle, au pastel gras, au crayon de couleur, du dessin, du collage, des dessins à la carte à gratter mais aussi des œuvres textiles et des carnets de recherches.

Les critères pour entrer dans la collection sont bien définis : Il faut être originaire ou résident·e en Fédération Wallonie Bruxelles et avoir publié au moins un livre illustré à compte d’éditeur. Une même enveloppe est proposée à chaque artiste. Les œuvres choisies font l’objet d’un dialogue, d’une concertation entre l’artiste concerné et les ATI. Brigitte Van den Bossche, coordinatrice des ATI et chargée de la constitution de cette collection explique que la vocation première est de « patrimonialiser pour valoriser » les œuvres et le travail des illustrateur·rices. Ces achats, subventionnés annuellement par le Service général des Lettres et du Livre de la Fédération Wallonie-Bruxelles, permettent de composer peu à peu un fond représentatif et étoffé de cette scène spécifique. La collecte de ces deux premières années a permis de donner une légitimité aux ATI comme fond patrimonial et de créer un appel d’air pour les dépôts et les dons. Les artistes ont en effet également la possibilité de mettre en dépôt leurs travaux aux ATI, ce qui permet un développement des œuvres inventoriées, et offre une conservation et une protection idéales.

La collection est évolutive et comptait fin 2024, 43 artistes dont 2/3 de femmes, proportion justement représentative dans le domaine de l’illustration.

Pour la première fois, et dans une volonté de faire sortir la littérature jeunesse de ses frontières strictes, cette riche collection d’originaux sortait des tiroirs protégés des ATI pour se donner à voir généreusement à l’espace d’art Les Brasseurs.

L’EXPOSITION

L’illustration a tendance à être cantonnée par le grand public à la littérature jeunesse. Brigitte Van den Bossche préfère parler de littérature par l’image et de littérature graphique pour tenter d’ouvrir le champ de réflexion sur ce médium foisonnant et aux contours flous. L’album ‘’dit’’ jeunesse peut être un outil intergénérationnel et universel, une ressource de médiation infinie pour accéder et interagir avec des publics très divers. L’illustration jeunesse et graphique doit être regardée pour ce qu’elle est : une somme d’images contemporaines variée, mouvante et qui raconte beaucoup de notre époque, des idées, des besoins et des combats qui la traversent.

En accueillant l’exposition Collectionner l’image, le centre d’art contemporain Les Brasseurs, situé en plein cœur de Liège, permet à cette scène imagée de s’inscrire dans un cadre plus large, d’ouvrir la discussion, de casser les frontières préconçues et de lui redonner toute la place qu’elle mérite.

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© Maxence Dedry

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© Maxence Dedry

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© Maxence Dedry

On entre aux Brasseurs rue du pont. Le lieu a son caractère avec son sol en mosaïques de ciment, son grand escalier central et ses mezzanines aux rambardes de fer forgé. Sur toute la surface du rez-de-chaussée, sont disposés en diagonales de larges panneaux de bois clair. L’installation invite à la déambulation. Il n’y a pas de sens de visite prédéfini, on peut se laisser guider par ce qui agrippe notre œil.

Chaque panneau est consacré à un·e artiste et on y trouve plusieurs dessins originaux (au moins deux par personne), encadrés ou sous verre ainsi qu’un livre à consulter, dans lequel on trouvera bien souvent une page avec le dessin correspondant à l’original que l’on a sous les yeux. Des liens narratifs se tissent entre les images exposées. Parfois, on trouve un carnet de recherches dans lequel on guette le crayonné, le processus du travail en cours, on voit ce que nous racontent les marges et les détails infimes sur des images que l’on a parfois vues cent fois dans un livre.

Pour Brigitte Van den Bossche, il était nécessaire de dé-hiérarchiser les œuvres, de juxtaposer les artistes émergent·es et les grands noms de l’illustration pour que de nouveaux dialogues se créent et que le plus important soit l’ensemble, la collection dans son entièreté.

Pour penser cette scénographie singulière, ainsi que la signalétique et la communication, les ATI se sont associés à Maud Dallemagne et Benjamin Dupuis, artistes visuels, graphistes et enseignant·es. La volonté était forte, dès le départ, de sortir d’un accrochage mural, système classique de monstration du dessin pour penser un système d’organisation modulable, qui ne hiérarchiserai pas les œuvres exposées. L’équipe a longuement réfléchi à l’aide d’une maquette au cinquantième, à l’agencement des œuvres, leur répartition sur les panneaux et la disposition des modules dans l’espace.

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© Benjamin Dupuis

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© Benjamin Dupuis

Pour la conception et la fabrication des panneaux et de leurs fixations, Maud et Benjamin se sont entourés de l’architecte designer liégeois Jean François Bodson de DesignWithGenius. L’usinage très minimaliste des panneaux de bois, a été réalisé par les Ateliers de l’Avenir, entreprise de travail adapté, et es fixations métalliques ont été fabriquées par Laser One à Thimister-Clermont.

La plupart des œuvres originales exposées ont été créées dans le cadre d’un livre de littérature jeunesse. Posés sur des tiges métalliques vissées dans les panneaux de bois, les livres peuvent être manipulés, feuilletés, lus. À la page correspondante aux originaux que l’on a sous les yeux, un feuillet papier faisant office de cartel avec des informations sur l’auteur·rice et son travail. Ce singulier marque-page amène les visiteur·euses à se questionner sur la reproduction des images. Comment adapte-t-on pour l’impression sur papier des images pensées et créées à la main ? Que fait-on des nuances difficiles voire impossibles à reproduire avec des techniques d’impressions classiques ? C’est pour prendre conscience de ces arrangements éditoriaux inhérents à toute publication que la scénographie même de l’exposition nous incite à regarder les images de plus près. Les originaux et leur reproduction éditée.

En plus d’avoir réfléchi à la scénographie et à la signalétique, Maud Dallemagne et Benjamin Dupuis ont conçu et mis en page l’affiche de l’exposition. Toujours dans une volonté de ne pas mettre en avant un·e exposant·e plus qu’un·e autre, décision a été prise de créer une affiche sans aucun élément présent dans l’exposition qu’elle promeut. La travail plastique de Maud consiste à glaner des images pour les découper et les agencer dans des collages. Elle a conçu ainsi le visuel de l’affiche, pour refléter la collection éclectique d’œuvres montrées dans l’exposition. Benjamin, s’est chargé du graphisme, notamment en sélectionnant une typographie de Benoît Bodhuin, la BallPill, qui évoque les éléments d’un jeu de construction pour enfant, en référence directe avec la scénographie, conçue comme un Meccano grandeur nature. Trois couleurs vives ont été choisies pour l’affiche : du jaune, un bleu roi et un argenté qui brille sur les grands formats imprimés sur papier.

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© Benjamin Dupuis

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© Maud Dallemagne et Benjamin Dupuis

Concevoir une exposition d’une telle ampleur requiert un certain nombre de compétences diverses et travailler en équipe permet bien souvent une plus grande justesse pour imaginer un dispositif de monstration en adéquation avec le concept de ce qui est donné à voir. La forme sert le fond. Quand tous les éléments d’une exposition sont pensés avec intelligence et précision comme ici, la réception auprès des publics ne peut être que meilleure.

L’exposition Collectionner l’image, qui est restée visible cinq semaines, a remporté un franc succès. Des centaines de visiteur·euses d’horizons multiples se sont rendus aux Brasseurs

pour découvrir la richesse et la variété de l’illustration jeunesse et graphique de FW-B. Fidèle à ses missions initiales, les ATI ont accueilli en visites commentées de nombreux étudiant·es du supérieur artistique et pédagogique, des bibliothécaires, des enseignant·es et des animateur·rices en centres socio culturel ainsi que des groupes de publics fragilisés, ayant habituellement un accès réduit aux lieux de culture: centres d’accueil de jour pour personnes en souffrance psychologique, groupes de personnes migrantes en alphabétisation.

Dans leurs missions quotidiennes, les ATI mettent un point d’honneur à transmettre, créer des ponts, mettre en relation. La médiation est la clé de voûte nécessaire à la réalisation de ces objectifs et cette exposition Collectionner l’image était un moyen, sous une nouvelle forme, de mener à bien ce projet. Mission accomplie ! Aura-t-on la chance de voir cette collection voyager bientôt ? On l’espère !

LE CATALOGUE

Parallèlement à l’exposition, un riche catalogue illustré a été produit. Co-édité par les ATI et l’Atelier du Livre de Mariemont, et rédigé par plusieurs auteur·rices, il se compose de textes scientifiques qui mettent en avant la variété de la littérature belge francophone.

Chacun des 43 artistes exposée·es dans Collectionner l’image bénéficie de quelques pages de présentation avec une citation personnelle, des repères bi(bli)ographiques, une analyse poétique de la démarche de chacun·e et une reproduction des images exposées.

Le livre se clôture sur un répertoire des lieux d’enseignement, de création et d’exposition dédiés à la littérature jeunesse et graphique en Belgique. Tisser des liens. Toujours.

Pauline Rivière


Exposition Collectionner l’image aux Brasseurs – Du 12.11 au 14.12.2024

Les artistes

Martina Aranda, Jeanne Ashbé, Étienne Beck, Mathilde Brosset, Anne Brouillard, Anne Brugni, Geneviève Casterman, Sarah Cheveau, Anne Crahay, Kitty Crowther, Thisou Dartois, Fanny Dreyer, Claude K. Dubois, Peter Elliott, Jean-Luc Englebert, Noémie Favart, Loïc Gaume, Bernadette Gervais, Sara Gréselle, Anne Herbauts, Benoît Jacques, Émile Jadoul, Louis Joos, Valentine Laffitte, Thomas Lavachery, Pascal Lemaître, Marie Mahler, Vincent Mathy, José Parrondo, Chloé Perarnau, Catherine Pineur, Rascal, Lisbeth Renardy, Françoise Rogier, Mélanie Rutten, Élisa Sartori, Marine Schneider, Émilie Seron, Valfret, Michel Van Zeveren, Giulia Vetri, Aurélie William Levaux, Gaya Wisniewski

 

  • Scénographie : Maud Dallemagne Benjamin Dupuis, avec la participation Designwithgenius
  • Catalogue Collectionner l’image
  • Co-édition : ATI et Atelier du Livre de Mariemont
  • Rédaction: Patrick Corillon, Brigitte Van den Bossche, Michel Defourny, Sofiane Laghouati, Nadia Corazzini
  • Graphisme : Jeremy Joncheray Signes du quotidien

 

LES ATELIERS DU TEXTE ET DE L’IMAGE

www.lesati.be

[Centre de Littérature de jeunesse et Littérature graphique] c/o Fonds Patrimoniaux de la Ville de Liège
Îlot St-Georges
Féronstrée, 86
B-4000 Liège
brigitte.vdb@lesati.be

 

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Bande dessinée

Par administrateur,
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On ne peut pas le nier : ce que représente aujourd’hui le secteur de la bande dessinée franco-belge doit tout, historiquement, au succès phénoménal de Tintin dès le début des années 1930. Sans Hergé et Le Petit Vingtième, qui sait comment aurait pu évoluer ce secteur ? Toutefois, sans un autre phénomène, celui des imprimeurs-éditeurs, typique de la Wallonie, Tintin n’aurait peut-être jamais quitté les pages de son quotidien.

Deux imprimeurs, deux familles. Les Dupuis à Charleroi, les Casterman à Tournai. Et une même approche industrielle. Pour avoir du travail, pour faire tourner les machines, rien de mieux que de devenir son propre fournisseur. L’imprimeur devient donc éditeur. Casterman publiera les albums de Tintin. Et Dupuis, ceux qui seront issus de son magazine de bande dessinée créé à la toute fin des années 1930 : Spirou. Avant d’en arriver là, Dupuis passe par la multiplication des titres de presse. Bonne Soirée, Moustique et Spirou en sont les plus emblématiques avant guerre. Et ces titres réclament — Spirou plus encore que les autres — des dessinateurs pour en remplir une part de contenu. Après la Seconde Guerre mondiale, un troisième acteur, Raymond Leblanc, vient grossir les rangs de ces tout nouveaux éditeurs de bande dessinée. Il fonde le magazine Tintin et les Éditions du Lombard, qui publieront les albums des héros du journal à l’exception de ceux déjà sous contrat avec Casterman : Tintin, Blake et Mortimer, Alix, etc. L’émulation entre les deux grands magazines de bande dessinée qu’a si bien racontée Hugues Dayez dans son livre Le Duel Tintin-Spirou donnera naissance à une extraordinaire génération d’auteurs : Hergé, Jacobs, Jacques Martin, Raymond MacherotJijé, Franquin, Morris, Will, Peyo, Tillieux, etc. La liste est longue. Et ces magazines eux-mêmes entreront plus tard en concurrence avec de nouveaux venus en France : Pilote, d’abord, sous la houlette de Goscinny, qui révélera par exemple Giraud, mais aussi, ensuite, dans les années 1970, Métal Hurlant et toute la vague SF des Humanoïdes Associés où François Schuiten fera ses premières armes, puis Fluide glacial. Enfin, une réponse belge viendra de Casterman avec (À SUIVRE), le magazine créé par Jean-Paul Mougin et Didier Platteau qui permettra à la BD de passer à l’âge adulte et consacrera Comès, Schuiten et Peeters, Geluck, Boucq et tant d’autres.Mais aujourd’hui, pas loin d’un siècle après les balbutiements de cette véritable naissance de la bande dessinée franco-belge, que reste-t-il de ce paysage éditorial ? Pas grand-chose. Faisons le bilan des maisons d’éditions historiques. Casterman appartient au groupe français Madrigall. Dupuis a été racheté plus d’une centaine de millions d’euros au groupe d’Albert Frère en 2004, lui-même l’ayant racheté aux héritiers du fondateur. Depuis, la maison de Marcinelle qui publie toujours le magazine Spirou appartient au groupe franco-belge Média Participations, dont l’ancrage principal est français. Elle a été la dernière à rejoindre ce pôle qui avait déjà réussi à absorber Le Lombard et qui s’est fondé autour de la maison Dargaud. Des trois éditeurs historiques, plus aucun n’est belge. Ou à tout le moins, s’ils conservent un ancrage important en Belgique, c’est flanqués d’une belle-mère parisienne. Alors, la bande dessinée belge, mythe ou réalité ? De nombreux créateurs sont toujours actifs chez nous. Et certains, comme François Schuiten, Hermann, Yslaire, Frank Pé, et quelques autres, font partie des grands noms du neuvième art.

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Les nouveautés en bande dessinée de cet hiver 2025

Par David Dusart,
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Illustration sur le thème des nouveautés bd de l'hiver

© Geoffrey Delinte

Nouveau rendez-vous ! 4 fois par an, découvrez les nouveautés (hors rééditions) en BD.

Ci-dessous, les nouvelles parutions des auteurs et des autrices de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour la période du 1er janvier au 31 mars 2025.

(si un titre venait à manquer, n’hésitez pas à nous contacter : info@objectifplumes.be)

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Écrire un roman : Conversation avec Thomas Lavachery

Par David Dusart,
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thomas lavachery vidéo

Ecrire un roman. Conversation avec Thomas Lavachery. Un film de Nicolas Moins.

Ce court métrage (20’) proposé par la Fédération Wallonie-Bruxelles témoigne de l’expérience de création du romancier

pour la jeunesse Thomas Lavachery : son cadre familial, ses sources d’inspiration littéraires, et sa méthode de travail.

Thomas Lavachery est lauréat du grand prix triennal de littérature jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2018-20121.

En 2024, il a publié L’artisanat du roman. Initiation à l’écriture créative, aux éditions l’école des loisirs.

Film en langue française, avec deux versions de sous-titrage, français et anglais.

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Les nouveautés de cet hiver en littérature jeunesse

Par David Dusart,

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© Marine Schneider

L’hiver est à nos portes. Quoi de plus beau et doux que faire de belles découvertes bien au chaud ?

Découvrez les nouveautés en littérature jeunesse pour la période du 1er novembre 2024 au 31 janvier 2025.

 

 

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Les Espiègles – Le palmarès complet

Par administrateur,
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L’histoire des prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Initiés sous d’autres formes dès 1924 pour certains d’entre eux, les prix littéraires de la Communauté française, puis de la Fédération Wallonie-Bruxelles récompensent des autrices et auteurs de langue française et de langue régionale. À partir de 2006, la Fédération Wallonie-Bruxelles attribue également des prix en littérature jeunesse et, puis en bande dessinée, à partir de 2017. En 2023, les prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles changent d’identité et sont renommés Les Espiègles.

L’Espiègle de la première œuvre en littérature générale

Remis chaque année, il récompense alternativement un recueil de poésie ou un roman. Jusqu’en 2022, ce prix se nommait Le prix de la première oeuvre en langue française avant d’être renommé Espiègle de la première œuvre en littérature générale.

L’Espiègle de la première œuvre en littérature de jeunesse

Attribué depuis 2019 et remis chaque année, ce prix récompense une première oeuvre en littérature jeunesse. Jusqu’en 2022, ce prix se nommait Le prix de la première oeuvre en langue française avant d’être renommé Espiègle de la première œuvre en littérature de jeunesse.

L’Espiègle de la première œuvre en bande dessinée

Attribué depuis 2019 et remis chaque année, ce prix récompense une première œuvre en bande dessinée. Jusqu’en 2022, ce prix se nommait Le prix de la première oeuvre en langue française avant d’être renommé Espiègle de la première œuvre en bande dessinée.

L’Espiègle de la première œuvre en langue régionale

Attribué depuis 2017 et remis chaque année, ce prix récompense une nouvelle inédite d’une autrice ou d’un auteur n’ayant pas encore publié de livre en langue régionale. Jusqu’en 2022, ce prix portait le nom de Prix de la première œuvre en langue régionale avant d’être renommé en 2023 Espiègle de la première œuvre en langue régionale.

Une partie de ces œuvres ont été éditées dans Fragments de vie : quelques nouvelles en langues régionales.

L’Espiègle de la bande dessinée

Remis depuis 2017 dans le cadre du BD Comic Strip Festival (anciennement Fête de la BD), le Prix Atomium – Fédération Wallonie-Bruxelles salue le travail d’un auteur ou d’une autrice dont l’oeuvre est particulièrement innovante. Depuis 2023, ce prix est également nommé Espiègle de la bande dessinée. L’auteur ou l’autrice primée l’est donc deux fois : une fois en septembre lors du Comic Strip Festival, une seconde fois en novembre lors de la cérémonie des Espiègles.

L’Espiègle de littérature de jeunesse

Remis tous les trois ans, ce prix récompense un auteur ou une autrice pour l’ensemble de son oeuvre. Jusqu’en 2023, ce prix portait le nom de Grand Prix triennal de littérature de jeunesse  avant d’être renommé en 2023 Espiègle de littérature de jeunesse.

L’Espiègle de poésie en langue française

Remis tous les trois ans, ce prix récompense un recueil de poésie. Jusqu’en 2020, ce prix portait le nom de Prix triennal de poésie avant d’être renommé en 2023 Espiègle de poésie.

L’Espiègle de poésie en langue régionale

Remis tous les trois ans, ce prix récompense un recueil de poésie en langue régionale. Jusqu’en 2020, ce prix portait le nom de Prix triennal de poésie en langue régionale avant d’être renommé en 2023 Espiègle de poésie en langue régionale.

L’Espiègle de théâtre en langue française

Remis tous les trois ans, ce prix récompense une pièce de théâtre écrite en langue française. Jusqu’en 2020, ce prix portait le nom de Prix triennal de théâtre avant d’être renommé en 2023 Espiègle de théâtre en langue française

L’Espiègle de théâtre en langue régionale

Jusqu’en 2021, ce prix portait le nom de Prix triennal de théâtre en langue régionale avant d’être renommé en 2024 Espiègle de théâtre en langue régionale.

L’Espiègle de prose en langue française

Jusqu’en 2024, ce prix portait le nom de Prix triennal de théâtre en langue française avant d’être renommé en 2023 Espiègle de théâtre en langue française.

L’Espiègle de prose en langue régionale

Jusqu’en 2022, ce prix portait le nom de Prix triennal de prose en langue régionale avant d’être renommé en 2025 Espiègle de prose en langue régionale.

L’Espiègle de l’essai

Remis tous les trois ans, ce prix récompense un essai en langue française écrit par un auteur ou une autrice belge. Jusqu’en 2020, ce prix portait le nom de Prix triennal de l’essai avant d’être renommé en 2023 Espiègle de l’essai.

 L’Espiègle du couronnement de carrière en littérature générale

Remis tous les 5 ans, ce prix récompense un auteur ou une autrice pour l’ensemble de son œuvre en littérature générale. Jusqu’en 2024, ce prix portait le nom de Prix quinquennal de littérature avant d’être renommé en 2025 Espiègle du couronnement de carrière en littérature générale.

En savoir plus

Les Espiègles sur le site Langues, Lettres & Livre

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Une sélection de livres de jeunesse pour les 13 ans et plus

Par David Dusart,
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Le nombre de titres publiés dans le domaine de la littérature de jeunesse ne cesse de croitre. Trouver son chemin dans cette production foisonnante n’est pas toujours aisé. Afin d’accompagner les lectrices et les lecteurs dans leurs découvertes et dans leurs choix, le Service général des Lettres et du Livre édite et diffuse différentes sélections réalisées par des bibliothécaires, libraires, enseignants et autres professionnels du livre.
La présente publication est issue d’une collaboration entre le Service général des Lettres et du Livre et le Service PECA de l’Administration générale de la Culture. Elle met en valeur cinquante livres destinés aux adolescents à partir de 13 ans, dans une grande diversité de genres : de la poésie, des romans et romans graphiques, des albums de bande dessinée, du théâtre, des documentaires, ainsi que quelques « objets littéraires non identifiés » qui, à coup sûr, susciteront la curiosité et la réflexion.

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Les Espiègles 2024

Par administrateur,
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Les prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles ont été décernés ce lundi 25 novembre 2024 lors d’une cérémonie à l’Opéra royal de Wallonie-Liège.

Les Espiègles 2024 : le palmarès

La Fédération Wallonie-Bruxelles entend apporter un soutien concret à la création et aux auteurs et autrices : dotations, bourses, mises à l’honneur, rencontres publiques, résidences, interventions en milieu scolaire, publications…

Les prix guident aussi les lecteurs ou lectrices de poésie, d’essai, de littérature, de bande dessinée ou de littérature jeunesse face au foisonnement de la production littéraire francophone. Ambassadeurs des talents, Les Espiègles de la Fédération Wallonie-Bruxelles permettent de découvrir de nouvelles pépites belges hors des sentiers battus et d’éclairer leurs auteurs et autrices en leur donnant une visibilité méritée.

Les lauréats des 9 prix remis lors de cette édition 2024 :

L’Espiègle de théâtre en langue française (ex aequo) :

Céline Delbecq pour À cheval sur le dos des oiseaux, Lansman

Marie Darah pour Depuis que tu n’as pas tiré, MaelstrÖm reEvolution

L’Espiègle de théâtre en langue régionale :

Nicole Goffart pour Li vwès dès sondjes

 

L’Espiègle de littérature de jeunesse : 

Bernadette Gervais 

L’Espiègle de la première œuvre en littérature générale :

Éléonore de Duve pour Donato, Corti

L’Espiègle de la première œuvre en langue régionale :

Jean Colot pour Vîve li progrès !

L’Espiègle de la première œuvre en littérature de jeunesse :

Charlotte Pollet pour Tout le monde a un teckel sauf moi, Biscoto

L’Espiègle de la première œuvre en bande dessinée :

Adlynn Fischer pour L’été du vertige, La ville brûle

L’Espiègle de la bande dessinée – Prix Atomium de la Fédération Wallonie-Bruxelles :

Ce prix a déjà été attribué lors du BD Comic Strip Festival, au mois de septembre 2024. Il a été décerné à l’autrice Léonie Bischoff

L’Espiègle du rayonnement des littératures belges (Prix Leo Beeckman) 

Le Prix est attribué à l’association Les mal coiffés.

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Les titres publiés dans le cadre de la Fureur de lire

Par administrateur,
photos des plaquettes

Dans le cadre de l’opération Fureur de lire , des textes et récits courts d’auteurs ou d’illustrateurs issus de Wallonie et de Bruxelles sont édités et distribués gratuitement. Poésie, texte illustré, bande dessinée ou nouvelle : les genres, les contenus et le type de lecteurs auxquels s’adressent ces histoires sont très variés.

photos des plaquettes light

Les plaquettes 2024 :

RENARDY Lisbeth : La chanson des ours (2024) – (4 ans et +)
THIRY, Marcel : Traversées (2024) – (12 ans et +)
DE MEEUS Célestin : Treize treizains : De Gibraltar à Jaroslaw  (2024) – (15 ans et +)
BOURLARD Charlotte : Derrière les fagots (2024) – (12 ans et +)
SIEL Ina : Ciré jaune (2024) – (12 ans et +)
DELINTE Geoffrey : La Saint-Grégoire (2024) – (6 – 8 ans)
DEFRECHEUX Nicolas : Lèyîz nos-åmes bin tchôdes : Laissez nos âmes bien chaudes (2024) – (15 ans et +)

Tous les titres parus, classés par auteurs/illustrateurs :

Découvrez la brochure présentant l’ensemble des titres disponibles. Des exemplaires-papier de ces titres peuvent être commandés gratuitement en écrivant à fureurdelire@cfwb.be

Les versions numériques sont accessibles ci-dessous : cliquez sur le titre pour afficher la version PDF. Si vous voulez en apprendre plus sur l’auteur, cliquez sur son nom pour afficher sa page sur Objectif plumes. Des lectures complètes et des extraits sonores sont aussi disponibles. Ils sont signalés dans la liste ci-dessous par le picto 🎧.

Certains titres sont exploités dans des fiches ou des dossiers pédagogiques dédiés. Ils sont signalés par le picto 🎓

A.
ADAMEK André-Marcel : L’arche (2001) – (15 ans et +)
ANCION Nicolas : Le chien brun et la fleur jaune de Chine (1997) – (9 – 11 ans)
ANDRIAT Frank : Écris ta source (2005) – (9 -11 ans)
ARMAND Romane et SCARDONI Éléonore : Battre les airs autant qu’il le faut (2020) – (6 – 8 ans)

B.
BABA Luc : Fragments imaginaires du journal d’Abraham Stoker (1847-1912) (2006) – (15 ans et +)
BALDACCHINO Isabelle : Comment j’ai survécu sous la glace pendant quatre jours après une avalanche (2014) – (15 ans et +)
BALTHAZAR Flore : Maria (2018) – (9 ans et +) 🎓 consulter la fiche pédagogique
BARBEZ Daniel : El bonheur du jour = Le bonheur du jour (2023) – (12 ans et +)
BARONIAN Jean-Baptiste : Le Chopin (2002) – (15 ans et +)
BERENBOOM Alain : Le retour de Nat Tiengo (2003) – (12 ans et +)
BERGÉ Geneviève : Grand-père (1998) – (15 ans et +)
BERTRAND Alain : Le vélo du coiffeur (1998) – (12 ans et +)
BLASBAND Philippe : Quand j’étais sumo (2000) – (15 ans et +)
BOFANE In Koli Jean : Rencontre au sommet (2011) – (15 ans et +)
BOLOGNE Jean-Claude : La bonne conscience (2002) – (15 ans et +)
BOTEVA-MALO Tania : Les chaussures sales (1997) – (17 ans et +)
BOURLARD Charlotte : Derrière les fagots (2024) – (12 ans et +)
BRADFER Philippe : Le miroir aux alouettes (2010) – (15 ans et +)
BROSSET Mathilde : Abel et Nour (2021) – (3 ans et +)
BRUNE Elisa : Penser c’est autre chose (2002) – (17 ans et +)

C.

CAREME MauricePoèmes de Maurice Carême (2018) – (9 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique
CHARNEUX Daniel : Darjeeling (2009) – (15 ans et +)
COLIZE Paul : Distorsions harmoniques (2014) – (17 ans et +)
COLLECTIF : Onze poèmes d’aujourd’hui (2008) – (12 ans et +)
COLLECTIF : Poésies belges (2021) – (15 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique
COLLECTIF : Rencontres anarchiques (2008) – (17 ans et +)
COLLECTIF : Résonances d’enfance (2004) – (9 – 11 ans)
COLLECTIF : Résonances (2004)
COLLECTIF : Sources (2005) – (15 ans et +)
COLLECTIF : Onze poèmes pour fêter Ulenspiegel (2017) – (15 ans et +)
COLOT Marie : Il neige en moi (2021) – (15 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique
COPPEE Benoît : Les Stabilo’s de Luz (2009) – (12 ans et +)
CORAN Pierre : Le miroir de Venise (2002) – (15 ans et +)
CORNETTE Jean-Luc : Les lémuriens (2016) – (6 ans et +)
COSTERMANS Dominique : Citrons amers (2003) – (17 ans et +)

D.
DAMAS Geneviève : Sultan (2013) – (15 ans et +) 🎧 écouter le texte
DARTEVELLE Alain : Post mortem (2002) – (17 ans et +)
DAXHELET Sophie : Hauteurs (2013) – (2 ans et +)
DE CHANGY, Valérie : Vingt ans. Pour toujours (2011) – (17 ans et +) 🎧 écouter un extrait
DE DECKER Jacques : Un soir d’été qui commence (2003) – (15 ans et +)
DE GREEF Sabine : Mémoire d’oiseaux (2017) – (2 ans et +)
DE KEMMETER Philippe : La recette (2016) – (2 ans et +)
DE MEEUS Célestin : Treize treizains : De Gibraltar à Jaroslaw  (2024) – (15 ans et +)
DE RADIGUES Max : Je veux danser comme Gene Kelly (2013) – (12 ans et +) 🎓 consulter la fiche pédagogique
DEBROUX Thierry : Demain est un autre jour (2006) – (15 ans et +)
DEFRECHEUX Nicolas : Lèyîz nos-åmes bin tchôdes : Laissez nos âmes (2024) – (15 ans et +) 🎧 écouter le texte
DELAIVE Serge : À cause d’un miroir (2008) – (17 ans et +)
DELINTE Geoffrey : La Saint-Grégoire (2024) – (6 – 8 ans)
DELPERDANGE Patrick : Un boulot pour l’été (2010) – (12 ans et +)
DERLEYN ZoéPeau de rousse (2018) – (15 ans et +) 🎧 écouter un extrait 🎓 consulter la fiche pédagogique
DESMET Neil Mémento (2011) – (4 ans et +)
DEUTSCH Xavier : Les arbres (2001) – (9 – 11 ans)
DEVOLDER Eddy : Henri Michaux (2005) – (17 ans et +)
DIEUDONNÉ Adeline : Alika (2020) – (15 ans et +) 🎧 écouter le texte 🎓 consulter la fiche pédagogique
DOPAGNE Jean-Pierre : Sables galants (2005) – (15 ans et +)
DREYER Fanny Les pensées de Suzie (2018) – (2 ans et +) 🎓 consulter la fiche pédagogique
DUCATTEAU Florence : Les lutins des mers (2010) – (9 – 11 ans)
DUCHATEAU André-Paul : Le téléphone (2021) – (12 ans et +)
DUJEU Fidéline : Les nuages ne sont pas roses (2013) – (15 ans et +) 🎧 écouter le texte
DUMONT Agnès : Cent cinquante grammes de Christophe Colomb (2014) – (17 ans et +) 🎧 écouter le texte
DUPUIS Patrick : Une brune tempérée (2015) – (15 ans et +)

E.

EDINGER Sandra :  Chéssoi  (2022) – (3-4 ans) 🎓 consulter le dossier pédagogique
ELLIOTT Peter : Mais ça va pas, non ! (2023) – (3-4 ans)
EMMANUEL, François : L’invitation (2019) – (15 ans et +)
EMOND Paul : Presque (1998) – (15 ans et +)
ENGEL Vincent : Alexis (1999) – (15 ans et +)

F
FAVART Noémie : La course d’Odilon (2019) – (4 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique
FLAMANT Ludovic : Poèmes idiots pour enfants intelligents (2010) – (6 – 8 ans) 🎧 écouter le texte
FONTENEAU Pascale : Le poète (1999) – (15 ans et +)

G.
GHEUR Bernard : Trois enfances (1999) – (17 ans et +)
GILLIARD EmileSu lès spalesdo novia djoû – Sur les épaules du jour nouveau (2022) – (15 ans et +)
GÖRGÜN Kenan : Limite période dépassée (2007) – (15 ans et +) 🎧 écouter le texte
GRÉSELLE Sara : Roquet’roll (2020) – (3 – 4 ans)
Gudule : Le diable et le bûcheron  (2000) – (9 – 11 ans)
GUERLAN Julie : Première communion (2006) – (12 ans et +)
GUNZIG Thomas : Elle mettait des cafards en boîte (1997) – (15 ans et +) 🎧 écouter le texte

H.
HANOTTE Xavier : Sur la place (2001) – (12 ans et +)
HAUMONT Thierry : Une grimace à la courbe parfaite (2001) – (15 ans et +)
HARPMAN Jacqueline : Amours, toujours (2022) – (15 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique   
HOEX Corine : Pas grave (2015) – (12 ans et +) 🎧 écouter un extrait 
HORGUELIN Thierry : L’enquête (2013) – (15 ans et +) 🎧 écouter un extrait

J.
JANZYK Véronique : La Poule (2016) – (15 ans et +)
JAUNIAUX Jean : Tranchée (2014) – (15 ans et +)
JOB Armel : Le parfum de la vie (2003) – (15 ans et +)
JOIRET Maud : Interludes marins (2023) – (15 ans et +)

K.
KAVIAN Eva : Le voisin sur les rails (2004) – (17 ans et +)
KOSMA Edgar : Vingt ans de l’autre côté (2011) – (15 ans et +)

L.
LAFFITTE Valentine : Grandir (2018) – (2 ans et +)
LALANDE Françoise : Un amour comme ça (2004) – (12 ans et +)
LAMARCHE Caroline : La mouche (1997) – (17 ans et +) 🎧 écouter un extrait
LAMBERT Michel : Notre favori (1998) – (15 ans et +)
LAMBERT Stéphane : Le tour de la question (2009) – (17 ans et +)
LANERO ZAMORA Katia Oasis (2017) – (15 ans et +) 🎧 écouter un extrait 🎓 consulter la fiche pédagogique
LAVACHERY Thomas : Jim Benett (2006) – (12 ans et +) 🎧 écouter le texte 🎓 consulter la fiche pédagogique
LEE Aurélia Jane : Dépêche-toi d’aimer (2007) – (12 ans et +)
LE FORT Ariane : Dimanche (2004) – (12 ans et +)
LEMAITRE Pascal Etre bon (2018) – (9 – 11 ans) 🎓 consulter le dossier pédagogique
LÉVY-MORELLE Anne : Fureur divine (1997) – (17 ans et +)
LIMET Yun Sun : Nulle part où aller (2012) – (17 ans et +)
LISON-LEROY Françoise : Le coureur de collines (2000) – (9 – 11 ans) 🎧 écouter un extrait
LOGIST Karel : Avec Méthode et Cyanure (2007) – (15 ans et +)
LOODTS Benoît (texte) et LOODTS Fabienne (ill.) : Le livre (2008) – (4 ans et +)

M.
MABARDI Véronika : Heureuse, toujours (2019) – (15 ans et +)
MAES Dominique : Le jour de la Révolution joyeuse (2008) – (15 ans et +)
MALINCONI Nicole : Venant du cœur (2005) – (17 ans et +)
MARCHAL Nicolas : La mort d’Elvis Presley – (15 ans et +)
MARSILY Noémie : Pied de poule (2015) – (3 – 4 ans) 🎓 consulter la fiche pédagogique
MAUBILLE Jean : Super pouvoir (2015) – (2 – 3 ans)
MAZZOCCHETTI Jacinthe : Margot (2015) – (17 ans et +)
MERTENS Pierre : La tentation de ne pas se suicider (2004) – (17 ans et +)
MEUR Diane : Les frères siamois (2003) – (9 – 11 ans)
MOENECLAEY Valérie : La maison de Peter (2007) – (15 ans et +)
MONFILS Nadine : Télé de mes amours (2008) – (12 ans et +)
MONSIEUR IOU : Petite balade dans la Fagne (2019) – (6 ans et +) 🎓 consulter la fiche pédagogique
MUNOZ Alain : Les dominos (2016) – (9 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique

N.
NDWANIYE Joseph : Le rêve (2013) – (15 ans et +)
NORAC Carl : Merwan, le prince du vent (1999) – (12 ans) 🎧 écouter le texte
NORGE : Des poèmes de Norge (2019) – (12 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique
NOTHOMB Amélie : Légende peut-être un peu chinoise (1998) – (12 ans et +)
NYS-MAZURE Colette : Sans y toucher  (2000) – (15 ans et +)

P.
PEIGNY Réjane : Le petit jardinier en son potager (2006) – (12 ans et +)
PIERLOOT Mathieu : La boum de John-John (2019) – (9 ans et +) 🎧 écouter un extrait 🎓 consulter le dossier pédagogique
PIRLET Marc La brèche (2009) – (15 ans et +)
PIROTTE Emmanuelle : Le temps des épées (2023) – (15 ans et +)
PITZ Nicolas : La tempête magique (2014) – (6 – 8 ans) 🎓 consulter la fiche pédagogique
PLATTEAU Stefan : Mille et une torches (2022) – (12 ans et +)
POLET Grégoire : Tu ne tueras point – (2023) – (12 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique
PONCELET Jean-Sébastien : Jo (2017) – (15 ans et +) 🎓 consulter la fiche pédagogique

Q.
QUERTON Jean-Philippe : La maison étroite (2017) – (17 ans et +)
QUIRINY Bernard : Le viking de la 6e Avenue – (15 ans et +)

R.
RAUCY Claude : La gomme de Keryann (2010) – (6 ans et +)
RAUCY Claude : Rédaction pour un lundi (1998) – (9 – 11 ans)
RAY Jean : Le gardien du cimetière (2020) – (12 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique
RENARDY Lisbeth : La chanson des ours (2024) – (4 ans et +)
RICHARD Jacques : Grandeur Nature (2016) – (15 ans et +) 🎧 écouter le texte
RINGELHEIM Foulek : La vengeance de Madame Ferrage (2007) – (17 ans et +)
ROBBERECHT Thierry : Rendez-vous avec l’ogre (2009) – (12 ans et +) 🎧 écouter le texte
ROGIER Françoise Trois malins petits cochons (2014) –  (3 – 4 ans)
ROLAND Nicole : Paysage d’hiver (2012) – (17 ans et +)
RUTTEN Mélanie : Cher Féodor (2009) – (4 ans et +)

S.
SAENEN Frédéric : Franck (2012) – (17 ans et +)
SANTOLIQUIDO Giuseppe : Jusqu’au bout du rêve (2016) – (17 ans et +) 🎧 écouter le texte
SARTORI Elisa : À tous les livres non lus (2022) – (12 ans et +)
SCARDONI Éléonore et ARMAND Romane  : Battre les airs autant qu’il le faut (2020) – (6 – 8 ans) 🎓 consulter la fiche pédagogique
SEMPOUX André : La route circulaire (2000) – (15 ans et +)
SERON Eléonore (texte) et SERON Emilie (ill.) : Aloïs (2007) – (4 ans et +)
SIEL Ina : Ciré jaune (2024) – (12 ans et +)
SIX Nina : Le grand bassin (2023) – (9 – 11 ans) 🎓 consulter la fiche pédagogique
SLUSZNY Marianne : À vous qui aurez 20 ans en 14 – (15 ans et +)
SNYERS Damien : Ploucs, magie et hamster nain (2021) – (12 ans et +)
SOLOVKINE Aïko : Kadogo (2019) – (17 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique 🎧 écouter le texte
STERNBERG Jacques : Contes glacés (2023) – (12 ans et +) 🎧 écouter les textes

T.
THIRY, Marcel : Mains d’oeuvre (1999) – (17 ans et +)
THIRY, Marcel : Traversées (2024) – (12 ans et +)
TIRTIAUX Bernard : Je ne songeais pas à Rose (2002) –  (15 ans et +)
TORREKENS, Michel : L’herbe qui souffre (2000) – (17 ans et +)

V.
VAN ACKER Christine : Seul dans la cour (2015) – (15 ans et +)
VAN BELLE Anita : Tape-dur (2001) – (15 ans et +)
VANDAMME Régine : La fin du chemin (2006) – (15 ans et +)
VAN HOOF Camille : Prémonitions (2020) – (12 ans et +) 🎓 consulter la fiche pédagogique
VELGHE Anne : Une rencontre (2012) – (3 – 4 ans)
VERNES Henri : L’œil d’émeraude (2020) – (12 ans et +) 🎓 consulter le dossier pédagogique 🎧 écouter le texte
VERMEIRE Thomas : La maison dans ma rue (2022) – (6-8 ans) 🎓 consulter la fiche pédagogique
VIRELLES, Patrick : La boule de bleu (2004) – (17 ans et +)

W.
WAUTIER David : L’étape du Tour de France (2021) – (6 – 8 ans) 🎓 consulter la fiche pédagogique
WILLIAM LEVAUX Aurélie : Je traverse la rue, je trouve du travail  (2022) – (15 ans et +)   
WILWERTH Evelyne : En tandem violet (2001) – (12 ans et +)
WILWERTH Evelyne : Six morts (2010) – (17 ans et +)
WOUTERS Nicolas : Elle ne parlait jamais du Congo (2017) – (12 ans et +) 🎓 consulter la fiche pédagogique

 

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Les finalistes des Espiègles 2024

Par David Dusart,
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Les Espiègles, prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles, récompensent chaque année des auteurs et autrices belges francophones actifs en littérature générale, jeunesse, bande dessinée et des auteurs et autrices écrivant dans une langue régionale de la Fédération Wallonie-Bruxelles (wallon, picard, gaumais, etc).

Les lauréats et lauréates seront dévoilés lors d’une cérémonie à l’Opéra royal de Wallonie-Liège, le 25 novembre 2024.

Les prix remis cette année sont :  

  1. L’Espiègle de la première œuvre en langue française
  2. L’Espiègle de la première œuvre en langue régionale
  3. L’Espiègle de la première œuvre en littérature de jeunesse
  4. L’Espiègle de la première œuvre en bande dessinée
  5. L’Espiègle de théâtre en langue française
  6. L’Espiègle de théâtre en langue régionale
  7. L’Espiègle de littérature de jeunesse
  8. Le prix Atomium – Fédération Wallonie-Bruxelles / Espiègle de la bande dessinée, qui a déjà été attribué lors du BD Comic Strip Festival, le 6 septembre 2024. Il a été décerné à Léonie Bischoff
  9. L’Espiègle du rayonnement des littératures francophones à l’étranger (Prix Léo Beeckman)

À l’occasion de la Fête de la Fédération Wallonie-Bruxelles, les finalistes de 6 des 9 prix de cette édition 2024 ont été dévoilés. * Les 3 autres prix ne donnent pas lieu à des finalistes.

L’Espiègle de théâtre en langue française

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L’Espiègle de théâtre en langue régionale

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L’Espiègle de la première œuvre de littérature en langue française

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L’Espiègle de la première œuvre de littérature en langue régionale

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L’Espiègle de la première œuvre en littérature de jeunesse

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L’Espiègle de la première œuvre en bande dessinée

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Informations pratiques :

La cérémonie des Espiègles aura lieu le lundi 25 novembre à l’Opéra royal de Wallonie-Liège, à 19h30. L’entrée se fera sur invitation.

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Découvrez les nouveautés de cette rentrée en littérature jeunesse

Par David Dusart,
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© Marine Schneider

Doucement, les feuilles des arbres vont changer de couleurs. C’est l’heure de découvrir les nouveautés pour la période du 1er aout au 31 octobre.

 

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Rentrée littéraire 2024

Par David Dusart,
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C’est une tradition, et chaque année, nous l’attendons.
Voici les nouvelles publications en littérature générale éditées entre le 15 aout et le 15 octobre.

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Masterclasse avec Anne Crahay

Par administrateur,
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Anne Crahay collectionne les petits papiers : papiers cozo, papiers cotton, papiers tachés, papiers qui trainent. Les ciseaux filent, les formes s’assemblent, et sur la feuille blanche, déjà une histoire à naître.

Les images d’Anne Crahay ont été sélectionnées aux Awards de la Foire du Livre de Bologne en 2010 et 2022.

Pour cette masterclasse, l’illustratrice dialogue avec Frédéric Hainaut, illustrateur et réalisateur de films d’animation.

Cette masterclasse a eu lieu le 5 avril 2024, dans le cadre de la Foire du Livre de Bruxelles. Elle a fait l’objet d’une captation vidéo.

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La Petite Fureur : sélection 2024-2025

Par David Dusart,
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La Petite Fureur est un concours pour promouvoir la lecture chez les enfants et mettre en valeur les auteurs, illustrateurs et traducteurs de Wallonie et de Bruxelles.

La Petite Fureur est un concours littéraire organisé par la Fédération Wallonie-Bruxelles à destination des enfants de 3 à 15 ans. Un jury de professionnels établit une sélection de livres dans les différentes catégories d’âge. Ces livres sont soit signés par des auteurs, autrices et/ou illustrateurs, illustratrices belges, soit traduits par des traducteurs ou traductrices belges.

Aux enfants participants, il est demandé de choisir l’un des ouvrages de la sélection et de le prolonger par un dessin, collage, poésie, chanson, adaptation théâtrale… Le concours rencontre ainsi un triple objectif. du côté de l’enfant, il suscite le plaisir de la lecture et développe la créativité. Et du côté des auteurs, illustrateurs et traducteurs, il est un outil de promotion de la création en Fédération Wallonie-Bruxelles.

Les inscriptions sont actuellement ouvertes jusqu’au 12 mars 2025 via le formulaire en ligne

Sélection 2024-2025 :

3-5 ans

À contresens / Jean-Yves Casterman / les 400 Coups, 2023

À l’eau ! / Heejin Park et Charlotte Gryson (traduction) / CotCotCot éditions, 2024

Miettes moineau ribouldingue / Anne Herbauts / Esperluète éditions, 2023

6-8 ans

Nuit de chance / Sarah Cheveau / La Partie, 2023

À la lisière / Nina Neuray / La Partie, 2024

Buffalo Kid / Rascal (texte), Louis Joos (illustration) / Pastel, L’école des loisirs, 2023

9-11 ans

Collections / Victoire de Changy (texte) et Fanny Dreyer (illustration) / La Partie, 2023

La clé de Jacqueline / Eva Kavian (texte) / Oskar éditeur, 2023

Le silence de Rouge / Mathieu Pierloot (texte) et Giulia Vetri (illustration) / Versant Sud Jeunesse, 2023

12-13 ans

L’art de ne pas lire / Elisa Sartori / CotCotCot éditions, 2024

NEB / Caroline Solé (texte) et Gaya Wisniewski (illustration) / L’école des loisirs, 2024

Le sourire du singe / Ludovic Flamant (texte) et Hideki Oki (illustration) / Esperluète Éditions, 2023

14-15 ans

Vivian Maier : claire-obscure / Marzena Sowa (scénario) et Emilie Plateau (dessin) / Dargaud, 2024

HeLa / Aliénor Debrocq (texte) / Lansman éditeur, 2023

Jusqu’ici tout va bien / Nicolas Pitz, d’après le roman de Gary D.   Schmidt / Rue de Sèvres, 2024

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L’été arrive ! Découvrez les nouveautés en littérature jeunesse

Par David Dusart,
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© Marine Schneider

Oui oui ! L’été arrive: le soleil va chasser les nuages et, quelle que soit la couleur du ciel, les nouveautés en littérature jeunesse pour la période du 1er mai au 31 juillet sont à découvrir ci-dessous.

 

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À nos Amours : Une sélection pour la Foire du Livre 2024

Par David Dusart,
Visuel à Nos Amour (c) Elisa Sartori
Visuel à Nos Amour (c) Elisa Sartori

© Elisa Sartori

Avec cette sélection, nous lançons une ode à nos amours en littérature belge ! De la vie sentimentale et romantique jusqu’aux passions plus abstraites, les amours qui nous animent tout au long de notre vie se déclinent forcément au pluriel. Amours passés, amour(s) présent(s), si l’on y regarde bien l’amour concerne aussi tous les domaines de la vie : la famille, les amis mais aussi le travail, les loisirs. Faut-il le distinguer de la passion ? du plaisir ? L’extraire de la routine ? Comment préserver l’amour ? Et qui serions-nous sans nos amours ? Cette sélection ne propose pas de réponse mais invite – avec amour ! – les lecteurs et lectrices à cheminer autour de cette thématique.

Cette sélection est à découvrir physiquement sur le stand de la Fédération Wallonie-Bruxelles (n° 201), pendant toute la durée de la Foire du Livre de Bruxelles !

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Les jeunes pousses : graines d’illustrateurs et d’illustratrices jeunesse

Par administrateur,
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Dans cette sélection, vous pourrez découvrir onze « jeunes pousses », c’est-à-dire onze jeunes illustrateurs et illustratrices. Les critères pour faire partie de cette sélection sont les suivants :

  • être illustrateur ou illustratrice jeunesse
  • avoir moins de 40 ans et vivre en Wallonie ou à Bruxelles
  • avoir publié en  2022 ou en 2023 chez un éditeur professionnel un premier album ou roman illustré en littérature de jeunesse
  • avoir maximum 3 livres jeunesse, publiés chez un éditeur professionnel, entre janvier 2022 et janvier 2024
  • présenter une maîtrise technique et le développement d’un univers/ imaginaire personnel.

Par ailleurs, plusieurs des  « jeunes pousses » présentées dans cette sélection ont bénéficié de bourses en littérature de jeunesse octroyées par la Fédération Wallonie-Bruxelles, font partie de sélections ou sont lauréates de prix.

Télécharger la brochure des jeunes pousses en PDF

 

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C’est le printemps ! Découvrez les nouveautés en littérature jeunesse

Par David Dusart,
Printemps par Marine Schneider

© Marine Schneider

À la croisée de deux saisons, découvrez les nouveautés en littérature jeunesse qui bourgeonnent ici et là.

Ci-dessous, les sorties pour la période du 1er février au 30 avril.

 

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Littérature au présent : Cinquante et un

Par David Dusart,

Cinquante

En 2004, 51 auteurs belges francophones contemporains ont accordé un entretien autour de leur œuvre, cité leurs références littéraires, lu un extrait choisi.

Entretiens et lectures représentent près de 16 heures d’archives filmées.

Les entretiens :

 

Les lectures :

 

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Rencontre : « Loïc Gaume, celui qui n’a jamais arrêté de jouer »

Par David Dusart,
Loic Gaume Cover

Loic Gaume Cover Bdef

À l’occasion de la parution de « Classiques au carré » et dans le cadre de l’exposition « Contes au carré» – présentée du 23 sept. au 30 déc. 2023 au Delta à Namur – est organisée une rencontre entre l’auteur-illustrateur Loïc Gaume et Camille Gautier, son éditrice aux Éditions Thierry Magnier. La discussion revient sur le processus, ainsi que sur leur collaboration autour des albums «au carré».

Discussion modérée par Anne Quévy, spécialiste en littérature jeunesse et responsable du cursus illustration à l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles.

Anne Quévy – Nous n’avons qu’une heure et il me semble qu’il y a tellement de choses à dire autour du travail de Loïc Gaume que nous aurons trop peu de temps pour en faire le tour. Nous tenterons donc de passer d’une maison à l’autre, de celles qu’il dessine à celles qu’il construit dans ses livres en espérant retrouver le chemin de la nôtre à la fin. J’aurais donné comme titre à cette rencontre : «Loïc Gaume, celui qui n’a jamais arrêté de jouer». Moi aussi, j’aime jouer et je me suis amusée à extraire de ses dessins ce qui pourrait redessiner son parcours. Ce schéma reprend, par étapes, les maisons devant lesquelles il s’est arrêté ou dans lesquelles il est entré. Il me semble que cette mise en image nous permettra de mieux comprendre son travail. Quand on joue, il faut toujours suivre un mode d’emploi. Il y a des règles. Le truc un peu particulier avec Loïc, c’est qu’il s’amuse à définir ses propres règles et puis, il choisit de les respecter ou non. Comme le Petit Poucet, il a semé des petits cailloux qui l’ont emmené d’une maison à l’autre. Ce sont ces petits cailloux que vous apercevez, ici, reliant différents lieux de passage. Suivons le chemin, suivons Loïc. Première étape : un jeu de kapla®. J’ai imaginé que, dans son enfance, Loïc avait dû être attiré par ces petites unités qui, s’empilant les unes sur les autres, permettent d’inventer des constructions et de les réinterpréter à l’infini. C’est bien un jeu, mais un jeu qui nécessite de réfléchir. Entrer dans un jeu, c’est comme entrer dans un livre : il faut parfois fournir un petit effort parce que les choses nous résistent. Il faut se prêter au jeu : jouer et réfléchir, observer et prendre note, construire et déconstruire pour mieux reconstruire ensuite. Construire c’est donner du sens.

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Ribambelles, Éditions Les Détails, 2014

 

Entrer dans un jeu, cest comme entrer dans un livre : cela nécessite de réfléchir, il faut parfois fournir un petit effort parce que les choses nous résistent.

Il y a aussi l’idée de donner du sens à ce que l’on fait. En préparant cette rencontre, je suis retournée voir les publicités faites pour le jeu kapla® : « Le but à atteindre est simple ET complexe, le jeu permet de réaliser une construction réelle ET imaginaire ». Vous voyez qu’il y a déjà deux choses qui semblent s’opposer : le simple et le complexe. D’un côté une construction se référant au réel et de l’autre une construction imaginaire voire utopique. S’agit-il là de notions qui s’opposent franchement ? Je n’en suis pas certaine. Pour moi, c’est un peu comme les deux faces d’une même pièce. Il me semble que c’est plutôt de l’ordre du contraste : le clair n’existe que parce l’obscur existe. Tout le travail de Loïc s’est construit et joue sur cette notion de contraste ! Dire beaucoup tout en résumant au maximum. Réduire les moyens pour optimiser le «dire». J’essayerai d’entrer dans son travail en pointant ce jeu des contrastes auquel il est passé maître. Les bonnes pratiques en illustration, tout comme en écriture, se nourrissent souvent de cette question du contraste, du choix entre deux (ou plusieurs) manières de raconter. Reprenons cette idée avec l’exemple suivant : vous avez là, le dessin d’une des maisons autour du parc Josaphat. De ces maisons, Loïc a fait une série, il a pris des notes, puis les a reproduites dans un ouvrage, un leporello «Ribambelles». La représentation de cette maison est très détaillée, mais a-t-il pu TOUT dessiner ? Certainement pas, il a fallu faire des choix. On est bien dans le contraste : entre dessin documentaire et dessin d’interprétation.

Construire cest donner du sens.   

Il a aussi dessiné des piers anglais – des estacades. Là aussi, il a listé, il a dessiné un nombre de piers qui s’ajoutent les uns aux autres. On est toujours dans l’idée de la construction réelle et imaginaire, du kapla®. J’imagine que son intérêt pour les constructions de briques lui vient certainement de l’enfance et de ce jeu. Un jour, il s’est dit qu’il allait dessiner des maisons, et puis il a voulu les réunir dans des livres qui permettraient à d’autres de les regarder. Ensuite, il s’est inventé/ construit une petite maison d’édition pour fabriquer ses livres tels qu’il les avait rêvés. Les Détails, c’est une toute petite maison d’édition, mais des projets merveilleux y ont vu le jour. Et il a continué à dessiner, à faire tous ces petits dessins auxquels des dialogues se sont ajoutés dans des bulles. Le dessin toujours et, en même temps, le désir de regarder le plus attentivement possible et celui de résumer, d’interpréter à sa manière, de laisser place au récit sous-entendu dans les images. Tout cela a été le terreau pour commencer à raconter d’autres histoires – des contes – et d’imaginer les rassembler dans un volume. Pour ce projet, sa petite maison, Les Détails, semblait un peu petite et Loïc est allé sonner chez Thierry Magnier. C’est Camille Gautier qui lui a ouvert la porte.

Le dessin toujours et, en même temps, le désir de regarder le plus attentivement possible et celui de résumer (…) de laisser place au récit sous-entendu dans les images. Tout cela a été le terreau pour commencer à raconter dautres histoires – des contes.   

Après tout ce chemin parcouru, je me suis demandé si Loïc aurait de nouveau l’envie de se remettre à jouer avec des briques : il m’a répondu que oui, la brique l’intéresse de nouveau… Les petits cailloux qu’il a semés jusqu’à présent l’ont emmené d’une brique à une autre. Avant qu’on entame la discussion avec Camille, je voulais revenir sur la formation artistique de Loïc. Ce qui, d’une certaine manière, l’a construit. Loïc a fait des études en arts appliqués à Besançon. Il a ensuite choisi de continuer son parcours à l’ENSAV Cambre, école où il donne cours actuellement. La Cambre, on le sait, est l’héritière du Bauhaus, un lieu où l’on conçoit des objets utiles en leur donnant une dimension esthétique. La traduction de Bauhaus est : «la maison de la construction». Je voulais te poser cette première question : pourquoi as-tu suivi un parcours tourné vers les arts appliqués plutôt qu’un parcours orienté vers les arts plastiques ?

Loïc Gaume – Les arts appliqués mêlent création et contraintes, ce qui englobe ce qu’on appelle plus communément design. Cela me permettait de continuer vers le design graphique, j’étais aussi très attiré par les livres pour enfants. J’ai toujours dessiné, c’est la base de ce que je fais aujourd’hui : tout devait déjà être lié dans mon esprit.

Anne Quévy – Je trouve en effet que c’est le type de formation qui correspond exactement à ce que tu as produit par la suite : des images de communication utiles qui permettent de mieux dire et de mieux comprendre le monde. Penser le livre y trouve sa place : l’objet-livre et sa matérialité. Nous sommes bien avec quelqu’un qui a deux «casquettes», à nouveau : l’artiste et l’artisan. Un artisan du livre, du papier, du format et de l’objet lui-même – qu’il découpe et déploie – et en même temps, un auteur qui joue avec les mots et invente des histoires.

Tes premiers récits, les as-tu écrits quand tu étais étudiant à La Cambre ?

Loïc Gaume – Il s’agit d’histoires du quotidien. Ces récits sont venus d’une envie de raconter, alors que j’étais, en effet, étudiant, mais cela ne m’a jamais quitté : je continue aujourd’hui à les dessiner, d’une autre manière évidemment. Les cahiers d’inventaires que j’ai édité, dont tu parlais, sont venus par la suite.

Anne Quévy – Il s’agit de livres où le format, l’objet lui-même, est devenu quelque chose de très important. À partir du moment où tu as décidé de te tourner vers une plus grande maison d’édition où on allait pouvoir diffuser tes livres à plus grande échelle, tu as gardé, me semble-t-il, cette préoccupation de jouer sur la conception du livre en tant qu’objet.

Camille Gautier – Quand Loïc est arrivé avec le projet d’album « Catastrophes ! », « Contes au carré » existait déjà, en termes de chronologie, c’est donc le deuxième livre publié avec Thierry Magnier. Pour celui-ci, il y avait la contrainte des découpes dans chaque page, et donc celle des éléments qui se lisent d’un côté et de l’autre de la page.

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Catastrophes ! Éditions Thierry Magnier, 2018

 

Anne Quévy – Premier livre chez Thierry Magnier avec un texte de fiction inédit, même si pour «Contes au carré», ta «réécriture» des textes préexistants fait de toi un auteur à part entière. Au départ de «Catastrophes!», il y des maquettes en papier, des recherches en volume ?

Loïc Gaume – C’est bien cela : j’ai comme dessiné avec un cutter directement dans des papiers de couleur en poussant la contrainte jusqu’à imbriquer chacune des scènettes les unes aux autres. Pour le publier avec Camille, j’ai dû simplifier le projet en retirant les éléments de papier relevés pour ne conserver que les découpes. Le principe de ce récit en randonnée est resté.

Anne Quévy – C’est vraiment intéressant parce que Loïc profite pleinement de la matérialité du livre, le jeu des découpes, des fenêtres et de la réinterprétation des couleurs.

Camille Gautier – Jusqu’au texte qui devient aussi une image dans ce livre là. On avait des contraintes techniques parce qu’on ne fait pas de pop-ups, qui nécessitent un savoir-faire et une technicité particulière. On avait vraiment envie de continuer avec Loïc, de le suivre dans ses projets, mais pas sous la forme de pop-up. De cette contrainte est née l’idée pour Loïc d’utiliser la découpe seule.

Anne Quévy – Finalement, Loïc, toi qui aimes les exercices sous contrainte, tu t’es amusé à trouver d’autres solutions pour que cela fonctionne, tu t’es pris au jeu de développer le propos à partir d’une nouvelle règle. On ne peut que le constater : tout ton travail est conçu comme un terrain de jeu et d’exploration. En ce sens, tu es un peu l’héritier de l’Oulipo, de ces auteurs qui ont développé un travail d’écriture en s’imposant des contraintes. Georges Perec, pour ne citer que lui, s’est amusé à lister des faits, des lieux etc… On trouve aussi énormément de listes dans ton travail, des choses qui s’alignent les unes derrière les autres. J’avais retrouvé une citation de Georges Perec dans « Penser/classer » : Il y a dans toute énumération deux tentations contradictoires ; la première est de tout recenser, la seconde doublier tout de même quelque chose ; la première voudrait clôturer définitivement la question, la seconde la laisser ouverte. Cette phrase me semble résumer ton travail. Quand et pourquoi s’arrêter de chercher ? Doit-on faire des choix et lesquels ? Quel élément pourra clôturer une série ou une énumération ?

En ce sens, Loïc est un peu lhéritier de lOulipo, de ces auteurs qui ont développé un travail d’écriture en simposant des contraintes.

Camille Gautier – À la question du Comment est ce que l’on s’arrête, souvent, c’est moi qui ai le mauvais rôle, sinon on pourrait faire durer le travail indéfiniment ! Même si c’est un vrai plaisir de jeu. Mais sans quoi, on aurait pu faire le double de contes ou de romans.

Anne Quévy – Au départ, est-ce Loïc qui arrive avec une masse de propositions, et toi qui élagues ?

Camille Gautier – Il arrive avec des listes très précises d’abord, et des envies déjà bien poussées. Mon métier d’éditrice est d’écouter ses envies, de les accompagner. Ensuite, on discute – que ce soit sur les contes, les mythes ou les romans pour enfants – de ce qui nous paraît indispensable. On a tous des contes préférés, et l’envie de les voir dans la liste, des regrets forcément aussi pour les choses qui passent à la trappe. On échange, c’est vraiment un ping-pong assez fort et permanent pendant toute cette partie là, justement, sur les choix des titres d’abord puis après sur les choix des mots, des phases. Mais en tout cas, au départ, on part de listes.

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Carnet pour Classiques au carré

Anne Quévy – Loïc, je pense aussi aux récits que tu dessines chaque jour : tu y racontes des petits faits du quotidien.

Loïc Gaume – L’attention est en effet portée sur des détails, des situations. Ces récits ont un effet grossissant, ils font passer des choses minimes en événements. C’est à la fois lié et opposé à ce que je fais avec les albums «au carré».

Anne Quévy – C’est à nouveau ce contraste que je trouve intéressant. Ce besoin de faire les deux : synthétiser – extraire ce qu’on appelle la substantifique moelle – et d’un autre côté, déborder comme s’il n’y avait pas assez place. C’est aussi bavard dans tes carnets que concis dans tes albums. Tout cela est très complémentaire : sans doute que tu ne peux arriver à cette « réduction » de la langue que parce que tu t’autorises à bavarder dans tes carnets.

Loïc Gaume – Dans mes carnets, il y a un plaisir à être un peu bavard, mais malgré tout avec cette idée de montrer le moins possible: les décors sont relativement succincts – il n’y en a parfois pas – et l es phrases s’apparentent, pour certaines, à des bribes de conversation.

Anne Quévy – Dans tes carnets, il saute aux yeux que l’observation et le dessin prennent une bonne partie de ton temps. Tu es une éponge visuelle : regarder, observer, décrire et dessiner encore et encore. Je pense qu’il n’y a pas moyen de faire le travail que tu fais si tu ne dessines pas énormément. Tu es toujours en train d’observer de toutes petites choses et, en même temps, d’autres beaucoup plus grandes, tu passes du minuscule au grandiose. Et c’est assez amusant de voir comment tu t’attaches à ce qui est bref – le résumé d’une histoire – et à ce qui prend du temps à se raconter – l’histoire elle-même. Ce qui me semble important aussi, dans la somme de dessins de tes carnets, c’est cette idée d’accumuler, de garder trace de quelque chose. Être le témoin et le passeur, c’est ce que je retrouve dans ta série «au carré» : nous avons un fonds culturel que l’on ne veut pas voir disparaître. Alors on raconte ces histoires-là, autrement, pour ne pas oublier. Camille, qu’est-ce que Loïc avait en main quand il est arrivé chez toi ?

Camille Gautier – Notre première rencontre date d’avant Thierry Magnier, de 2012. À cette époque-là, j’étais assistante éditoriale aux éditions Autrement jeunesse, qui n’existent plus. Loïc nous avait présenté « Contes au carré » au début de ce projet. Le projet m’avait beaucoup plu mais je n’étais pas à un poste qui fait que l’on choisit les projets. Après, j’ai travaillé en freelance pendant trois ans avant d’arriver chez Thierry Magnier comme éditrice. Je n’avais pas oublié ce projet, j’ai donc rappelé Loïc, le projet avait aussi évolué entre-temps de son côté, mais le principe des quatre cases et du résumé était là, le format aussi. Tous les éléments les plus importants étaient déjà fixés. Ce qu’on a retravaillé, c’est le choix des contes, les textes.

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Contes au carré (troisième édition) et Classiques au carré, Éditions Thierry Magnier, 2023

 

Anne Quévy – Ce qui est un peu étonnant – ce n’est pas un secret – c’est qu’il l’avait proposé un peu partout et qu’aucun éditeur ne l’avait retenu.

Camille Gautier – J’ai eu de la chance que personne ne l’ait pris !

Anne Quévy – Qu’est-ce qui t’a vraiment séduite dans son travail ?

Camille Gautier – Ce qui m’a séduit, c’est que je trouvais que cela ne ressemblait à rien d’autre qui ait été publié, et qu’il avait une écriture visuelle très forte. J’aimais beaucoup ce principe du jeu. Dans l’édition jeunesse, il y a eu, à un moment, beaucoup de contes détournés mais jamais de contes revisités de cette manière. C’est que c’était là, une très bonne idée. Je trouvais que c’était fait de façon tellement, à la fois heureuse, ludique et en même temps d’une simplicité assez évidente. C’est cela qui m’a convaincue. Et même si dans notre catalogue, on a très peu de contes, j’ai proposé le projet à Thierry Magnier, il a été séduit par cette évidence là lui aussi, et par le fait que le principe marchait, tout paraissait fluide, car Loïc en avait déjà réalisé une série assez conséquente.

Loïc Gaume – Oui, je pense que j’en avais écrit plus de la moitié, je me suis pris au jeu, mais je voulais aussi être certain que l’idée fonctionne et soit pertinente sur un ensemble conséquent de contes.

Anne Quévy – Je relève ce que tu dis : en faire plusieurs pour voir si l’idée fonctionne. Souvent deux ou trois ne suffisent pas, c’est quand on commence à en faire un certain nombre que l’on voit si l’idée s’épuise ou pas.

Loïc Gaume – Nous avons fonctionné de la même manière avec « Classiques au carré » pour évaluer la pertinence de se frotter cette fois à des romans, pour certains de quatre cent pages. À ce moment, le projet aurait pu s’arrêter à l’idée. Je crois en avoir écrit une petite dizaine avant de les faire lire à Camille.

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Classiques au carré, Éditions Thierry Magnier, 2023

 

Anne Quévy – Tu dis avoir « écrit », ce qui dans une forme si courte reviendrait à dire « résumer ». J’ai toujours pensé qu’il fallait plutôt parler «d’interprétation» de récits existants. Nous avions échangé à ce propos avant cette rencontre et tu m’avais dit que tu ne pensais pas avoir « réinterpréter » les textes.

Loïc Gaume – En effet, car pour moi, cela signifie que la voix de l’auteur prend le dessus sur le texte d’origine, alors que quand j’écris «au carré», je retranscris l’histoire. Finalement, après réflexion et en me penchant sur la définition, je crois qu’il y a bien réinterprétation car – tout comme illustrer est interpréter – je donne une version personnelle de ces textes en les passant au peigne fin. Je les interprète aussi en choisissant les axes par lesquels je les raconte parce que chaque roman, chaque conte, est traité d’une manière différente selon ma lecture. Ce n’est pas objectif puisque je choisis de me focaliser sur certains personnages mais pas tous, sur certains déplacements, lieux et événements… Si on reprend l’exemple de «Croc blanc», ce sont les changements de propriétaires et les différents stades de Croc blanc qui conduisent le récit. Pour «Robinson Crusoé», c’est l’arrivée de différents personnages sur l’île que j’ai observée. Donc, chaque roman est relu différemment. C’est donc bien une manière de réinterpréter ces œuvres.

Camille Gautier – Il existe de nombreuses versions de certains contes. Outre les interprétations audiovisuelles que peut en faire Disney par exemple, tu avais vraiment cette volonté, par exemple dans «Cendrillon», que dans la dernière case, les deux méchantes belles-sœurs soient punies et aient les yeux crevés parce que c’est dans le conte original. Donc, rien que par les choix que tu as opérés, il y a interprétation. Au regard du cheminement, on aurait pu commencer «la série» par les romans et les classiques de la littérature jeunesse, mais je pense que cela s’est fait progressivement et que tu as pu te frotter aux romans parce que tu avais déjà commencé à opérer tous ces choix avec les contes. Les romans demandaient encore plus de travail, de choix, et ont été plus difficiles à traiter parce que la matière des histoires était déjà beaucoup plus denses. Je pense notamment du point de vue de la narration : dans les contes, avec ce «Il était une fois», il y a toujours un narrateur externe. Alors que dans les romans, il est question de différents types de narrateurs. C’était bien plus complexe, je trouve, à opérer et cela a du sens que cela se soit fait dans cet ordre.

Loïc Gaume – Mon envie au départ était d’embrasser la littérature jeunesse dans son ensemble, sans différenciation entre contes, romans et albums. Ce n’est qu’après avoir constaté que l’ensemble des contes était déjà très riche, que des romans comme « Alice au Pays des merveilles » ont été écartés. Je les ai réécrits plus tard pour « Classiques au carré ». J’aurais aimé qu’il y ait les albums comme « L’histoire de Babar » mais cela paraissait moins pertinent du fait qu’ils sont illustrés.

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Classiques au carré, Éditions Thierry Magnier, 2023

 

Anne Quévy – Une chose qui m’a intriguée, Loïc, est qu’il semble plus facile de réduire un conte à trois images plutôt qu’à quatre. Certain.e.s d’entre vous connaissent peut être la classification des 31 fonctions ou actions significatives que Vladimir Propp a rassemblé dans son ouvrage «Morphologie du conte». Propp rassemble ces fonctions en trois catégories : 1. une situation de départ, 2. un événement met en péril l’équilibre initial, 3. résolution/dénouement. Une sorte de triangle : on part, on se bat, on revient victorieux, qu’il semblerait plus simple de représenter en trois cases.

Loïc Gaume – Cette composition en quatre cases s’est faite assez intuitivement. Je pourrais creuser et me demander pourquoi, mais cela me semblait certainement le plus commode et suffisant pour raconter à la fois dans l’économie, tout en ayant l’espace pour raconter l’ensemble. J’étais assez éloigné des schémas narratifs abordés lorsqu’on étudie les contes, c’est leur séquentialisation et le potentiel narratif de ces histoires connues qui m’importaient.

Anne Quévy – Il y a cette difficulté du stéréotype dans les contes. Les clichés. Je me fais un peu l’avocate du diable : en regardant les contes, je me disais, qu’à l’époque actuelle, avoir des stéréotypes qui s’affichent de manière aussi forte dans la représentation ne passe pas toujours bien. Une princesse doit-être nécessairement être blonde et avoir de longs cheveux ? Mais, d’un autre côté, comment faire pour ne pas échapper à cette forme de stéréotype qui permet d’identifier rapidement les personnages ? Là, se situe peut-être la différence entre stéréotype et archétype. Loïc, en préparant cette rencontre, me disait d’ailleurs que les personnages des romans ne se définissent pas de la même manière que ceux des contes. Dans les romans, on a de vraies personnalités, ils et elles sont «vivant.e.s» et ne se contentent pas d’être les véhicules d’une action.

Loïc Gaume – Les enfants de « La guerre des boutons » ou de « Peter Pan » – hormis les Garçons perdus – sont identifiés parce qu’ils ont un nom, contrairement aux personnages de contes qui sont nommés par une caractéristique physique ou de taille : Boucle d’or ou Petit Poucet. Dans les contes, les personnages n’ont presque pas de sentiments, ils sont les vecteurs d’une action, ils jouent un rôle précis, ils ont une fonction : le héros ou l’héroïne, l’adversaire… il s’agit bien d’un archétype, ou d’un type de personnage. Quant à ce que l’on pourrait juger de stéréotypes, il faut penser aux repères pour l’enfant : Barbe bleue, pour être perçu comme tel, ne peut pas être fluet et délicat. Une princesse ne sera pas crédible à la lecture qu’en fait un enfant, sous les traits d’une marâtre. Il me semble avoir pas mal bouleversé les socles traditionnels des contes : la narration et la séquentialisation, les pictogrammes et les formes de couleurs… ce qui a ébranlé au début les plus conservateurs, mais pour ce qui est des repères de lecture, je les ai conservés, aussi pour rester en accord avec les récits d’origine d’Andersen et des frères Grimm.

Anne Quévy – Parmi tous les moments possibles à illustrer/raconter, il faut faire des choix. J’imagine que cela donne lieu à de nombreuses discussions entre vous…

Camille Gautier – Oui, on en discute pas mal avant. On est souvent d’accord, c’est pour cela que l’on aime travailler ensemble et que c’est fort agréable, mais c’est vrai que c’est des vraies discussions d’enjeux. Pour « Contes au carré », c’était moins le cas parce que, tu l’as dit tout à l’heure, Loïc, il y a une forme d’évidence dans les choix des découpages. Pour les romans, cela a effectivement été bien plus compliqué d’être objectif. C’était un exercice fastidieux de relire autant de classiques avec notre subjectivité. On a essayé de faire ce travail de recension. Quelles étapes sont indispensables, comment faire rentrer tout cela sans que cela ne paraisse être forcé au chaussepied… Donc, c’est vrai que c’est beaucoup (beaucoup) de discussions. Je crois qu’on aime cela tous les deux et qu’on arrive toujours à résoudre les « nœuds » que l’on peut rencontrer !

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Contes au carré, Éditions Thierry Magnier, 2016

 

Loïc Gaume – Il n’y a pas de règle pour synthétiser, je procède beaucoup par rapprochements ou associations d’idées avec les actions, les personnages ou leurs déplacements. Le fil de l’histoire doit être fluide. Je garde toujours en tête qu’il s’agit bien d’une histoire que lit l’enfant. S’il peut s’amuser à lire les raccourcis opérés, il ne doit pas ressentir l’exercice de style que cela représente. Même si écrire «au carré» est un défi d’écriture du fait du calibrage à la virgule près, des cent quatre-vingt signes pour chaque case.

Camille Gautier – Et en même temps, l’enjeu était de ne pas avoir une langue aseptisée.

Anne Quévy – Pour les romans, il était impossible de restituer la langue de chaque auteur, tout en gardant une cohérence entre tous les textes. Une langue propre à Loïc qui, tout en s’entendant, laissait encore entendre le texte initial. Autrement dit : une écriture qui trouve sa place en dépit de cet exercice très contraignant du «condensé».

Une langue propre à Loïc qui, tout en sentendant, laisse encore entendre le texte initial.

Camille Gautier – Chaque mot est soigneusement retenu. Nous préférons un mot plus précis et qui permet d’englober une idée, même s’il est moins évident. Je me souviens de certains textes pour lesquels c’est moi qui proposait que nous nous «autorisions» parfois un petit adjectif supplémentaire pour incarner. C’est un dosage d’équilibriste, mais aussi un échange très agréable à faire, on est vraiment dans un travail millimétré.

Anne Quévy – J’ai envie de m’arrêter sur ce moment d’échange entre vous et de vous entendre sur cette question de la réécriture. Une histoire c’est le fond et la forme, l’enjeu est ici de remplacer la puissance de la langue, les variations de rythme par une autre proposition. Je trouve intéressant de constater que, si un auteur a voulu installer un temps long, une forme de suspension entre deux parties d’un roman, toi, tu fais le choix de réduire l’écart. N’est-ce pas une sorte de trahison ? Ne perd-on pas le rythme initial du récit ?

Loïc Gaume – Il ne s’agit, en aucun cas, de trahir le texte, mais de le raconter autrement. C’est une autre voix qui le raconte, il n’est donc pas question de calquer l’écriture de Jules Verne pour réécrire « Voyage au Centre de la Terre » ou celle de Roald Dahl pour « Matilda ». Cela n’empêche pas d’avoir un style soutenu.

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Camille Gautier – Les récits faits par Loïc ne se substituent pas aux récits originaux. Pour moi, ils sont comme des petits bonbons si je peux me permettre la métaphore gastronomique : on en goûte un et puis, une fois qu’on a mis la main dedans, on a envie de tous les goûter. C’est aussi une invitation à redécouvrir ces textes. Ces récits sont une matière vivante modelable, qu’il ne faut pas à tout prix sacraliser. Évidemment pour « Classiques au carré » c’est un peu différent car ces romans classiques sont liés à des auteurs identifiés, mais pour « Contes au carré » et « Mythes au carré », on a justement toute la latitude des conteurs pour s’approprier ces histoires.

Anne Quévy – On est presque dans le registre de la caricature ou de la parodie, d’où la dimension humoristique. En effet, nous ne lisons pas les textes originaux mais les tiens ne veulent pas les effacer non plus. Il est important de pouvoir dire qu’il y a eu une réécriture et que cette réécriture n’est pas anonyme.

Loïc Gaume – Il y a un aspect révélateur dans le fait de retirer. Cela permet aussi de prendre du recul sur ces titres que l’on connaît en partie. Soustraire certaines couches fait sauter aux yeux certains aspects de l’œuvre. L’idée de ce fil narratif sur lequel va reposer «mon» récit vient au moment de la lecture du roman ou du conte original. Une lecture attentive pendant laquelle je prends les notes qui deviendront les textes.

Anne Quévy – On a donc une composition en quatre cases, un peu comme dans une bande dessinée. On n’est pas dans du linéaire mais bien dans du tabulaire: on lit la première et la dernière image en même temps, le début et la fin sont lisibles simultanément. Quatre cases qui ressemblent à un petit théâtre avec personnages qui entrent et sortent, toujours de profil à la manière des Égyptiens. On entre, on sort et parfois on revient dans un autre récit, ce principe est très amusant !

Loïc Gaume – Ce n’est pas faux. Certains déplacements m’ont sauté aux yeux avec la lecture du «Grand Meaulnes» par exemple: Augustin Meaulnes est constamment en fuite, à la recherche de quelque chose. C’est ce que je fais ressortir. Cela a été un des textes les plus compliqués à résumer et le seul pour lequel j’avais brouillé la chronologie dans la première version, cela me permettait de sauter des étapes pour en raconter plus.

Anne Quévy – Je pense que le fait d’avoir ces quatre cases qui s’offrent simultanément à la vue du lecteur participe au plaisir des enfants non lecteurs de textes mais lecteurs d’images : l’intégralité de l’histoire s’offre à eux en un coup d’œil. Ici encore, on retrouve le plaisir du jeu offert au lecteur. L’enfant ne lira pas forcément les images dans l’ordre, de gauche à droite et de haut en bas, mais il pourra en retrouver le fil à partir de ce qu’il en connaît. Quelque chose qui ressemble à un puzzle. L’enfant se retrouve dans la position du démiurge et il adore cela ! Nous parlions tantôt de l’importance que tu accordes à cet objet qu’est le livre dans sa conception et sa fabrication. De belles couvertures toilées comme les livres de mon enfance, composées sur le même principe de la suggestion des quatre cases. J’ai remarqué que, sur la couverture de la nouvelle édition de «Contes au carré», les pictogrammes et le texte n’étaient plus imprimés en doré mais en rose mat. La couleur de la toile, quant à elle, est toujours bleue.

Loïc Gaume – En effet, en matière de fabrication, nous sommes limités, avec Camille, à la gamme des couleurs existantes car il s’agit d’un tissus conçu spécifiquement pour l’édition. La contrainte est aussi dans la fabrication. Même chose pour l’encre. À l’occasion de la sortie de «Classiques au carré», la couverture de la nouvelle édition de «Contes au carré» a changé et « Pinocchio » et « La chèvre de monsieur Seguin » ont migré des contes aux romans et deux nouveaux contes ont fait leur entrée « Le Roi grenouille » et « Jorinde et Joringel ».

Anne Quévy – Et le format ?

Camille Gautier – Loïc avait ce format en tête, il convenait très bien, il a quelque chose d’assez intime. La couverture toilée est quelque chose qui coûte assez cher en fabrication, mais elle s’est imposée assez vite dans l’idée d’un recueil ; on souhaitait réaliser un bel objet, précieux mais pas non plus intimidant. Très vite on a su que c’était ça qui nous semblait le plus cohérent. Pour la maquette, on a travaillé avec un graphiste qui s’appelle Aurélien Farina, fondateur de Paper! Tiger!, qui a rejoint notre duo.

Anne Quévy – Le choix qui a été fait de placer une image emblématique plutôt qu’un texte en quatrième de couverture ajoute un plus esthétique et ludique à l’objet. Un autre petit détail très chic : le tranchefil qui redessine une ligne de la même couleur que les pictogrammes de couverture ! Et pour finir, un petit clin d’oeil : prenez le temps de lire les colophons qui se trouvent à la fin ou au début des livres édités chez Thierry Magnier : ils sont toujours en rapport avec le contenu du livre. Une petite coquetterie de l’éditeur qui s’amuse à nous surprendre là où nous ne l’attendions pas. Dans « Classiques au carré », on peut lire Imprimé au Pays imaginaire en référence à « Peter Pan ».



Article complet disponible sur la page l’auteur du site des éditions Thierry Magnier.

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Une sélection de livres de jeunesse pour les 9 – 12 ans

Par David Dusart,
Sélection Jeunesse Peca
Sélection Jeunesse Pecalow

 

Une liste de livres à destination des enfants de 9 à 12 ans.
Pour cheminer dans le PECA (Parcours d’Éducation Culturelle et Artistique)

Le nombre de titres publiés dans le domaine de la littérature de jeunesse ne cesse de croitre. Trouver son chemin dans cette production foisonnante n’est pas toujours aisé. Afin d’accompagner les lectrices et les lecteurs dans leurs découvertes et dans leurs choix, le Service général des Lettres et du Livre propose cette sélection de cinquante livres destinés aux enfants âgés de 9 à 12 ans. Suivant l’ordre alphabétique des titres, elle présente pour chaque ouvrage une brève notice bibliographique, une présentation succincte et des mots-clés. Ces derniers sont rassemblés dans un index final qui facilite le repérage des titres associés à telle ou telle thématique.

Explorer des récits et des images, se confronter à différents imaginaires, s’ouvrir à de nouvelles visions du monde, rêver et créer à leur contact, autant de possibilités qui sont au cœur de la littérature jeunesse.
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Littérature générale

Par administrateur,
sélection générale seo

Née en 1830 seulement, la Belgique a une histoire littéraire relativement courte. Avec Maurice Maeterlinck, Georges Simenon, Hergé ou Amélie Nothomb, elle compte pourtant quelques-uns des auteurs les célèbres de la Francophonie d’hier et d’aujourd’hui. La diversité et la qualité des productions en littérature belge concernent tous les genres littéraires : le roman, la bande dessinée, la nouvelle, l’essai, la poésie ou le théâtre.
Écrite aussi bien par des auteurs de toutes origines vivant en Wallonie ou à Bruxelles que par des écrivains belges établis à l’étranger, voire par des auteurs flamands qui, pour des raisons personnelles ou historiques, ont choisi d’écrire en français, la littérature belge francophone est aussi multiculturelles que la société belge elle-même. Elle se développe par ailleurs dans le voisinage immédiat d’un autre territoire francophone : la France, pays à la population 15 fois supérieure à celle des Francophones de Belgique et à l’histoire littéraire prestigieuse et multiséculaire. La production littéraire belge a été constamment influencée par son grand voisin, qu’il exerce un pouvoir d’attraction sur des écrivains désireux d’être reconnus et publiés à Paris ou qu’il cristallise le rejet d’auteurs soucieux d’affirmer leur spécificité.
En Belgique, l’industrie du livre s’est essentiellement développée dans l’entre-deux-guerres. Ses fleurons : la bande dessinée, le fantastique, la science-fiction, le policier ou le surréalisme.

Pour un parcours des littératures belges francophones d’hier et d’aujourd’hui, voici quelques suggestions de lecture (hors littérature jeunesse et bande dessinée).

Nos suggestions :

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Nos sélections en BD

Par David Dusart,
Prix Bd Seo 768x392

Prix Bd Seo 768x392

Plusieurs fois par an, nous mettons à jour la sélection bande dessinée proposée sur Objectif plumes. Cette sélection de 6 titres met en avant des ouvrages récemment parus, et d’autres, plus anciens.

Retrouvez ci-dessous l’ensemble des titres qui ont déjà été mis en avant via cette sélection.

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Les nouveautés « automne-hiver » en littérature jeunesse

Par David Dusart,
Hiver Ns 2023 Bannerlj
Hiver Ns 2023

Les nouveautés d’hiver en littérature de jeunesse | © Nina Six

Alors que les journées raccourcissent et qu’approchent les fêtes de fin d’année, découvrez les nouvelles parutions en littérature jeunesse pour la période allant de novembre 2023 à janvier 2024.

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Les finalistes des Prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2023

Par David Dusart,
Banner Prix Tirennal De Poésie 2023 Finalistes

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Les Prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles récompensent chaque année des auteurs et autrices belges francophones actifs en littérature générale, jeunesse, bande dessinée et des auteurs écrivant dans une langue régionale de la Fédération Wallonie-Bruxelles (wallon, picard, gaumais, etc).

Pas moins de 9 prix seront remis cette année :

  1. le prix triennal de poésie en langue française 
  2. le prix triennal de poésie en langue régionale 
  3. le prix triennal de l’essai en langue française 
  4. le prix de la première œuvre en langue française 
  5. le prix de la première œuvre littérature en langue régionale
  6. le prix de la première œuvre en littérature de jeunesse 
  7. le prix de la première œuvre en bande dessinée 
  8. le prix Atomium – Fédération Wallonie-Bruxelles, qui a déjà été attribué lors du BD Comic Strip Festival, au mois de septembre 2023. Il a été décerné à l’auteur Pierre Bailly, pour l’ensemble de sa carrière.
  9. le prix Léo Beeckman, prix du rayonnement des Lettres francophones

La cérémonie de remise des prix aura lieu le lundi 20 novembre. Les autrices et auteurs lauréats seront connus dans la soirée.

À l’occasion de la Fête de la Fédération Wallonie-Bruxelles, nous avons le plaisir de dévoiler les finalistes de 6 des 9 prix remis lors de cette édition 2023.

Prix triennal de poésie en langue française 2023 : les finalistes

Banner Prix Tirennal De Poésie 2023 Finalistes Léger

Le jury de ce prix triennal de poésie en langue française souhaite également mentionner Tout peut commencer à trembler de Lucien Noullez (éditions de Corlevour). Le livre était en lice avant le décès du poète et a été très largement apprécié par l’ensemble du jury. Le prix triennal de poésie ne pouvant être décerné à titre posthume, l’ouvrage ne figure pas dans la liste des finalistes.

Prix triennal de l’essai en langue française 2023 : les finalistes

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Prix triennal de poésie en langue régionale 2023 : les finalistes

Banner Prix Tirennal De Poésie En Langue Regionale 2023 Finalistes Web

Prix de la première œuvre en littérature de jeunesse 2023 : les finalistes

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 Prix de la première œuvre en bande dessinée 2023 : les finalistes

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Prix de la première œuvre en langue française 2023 : les finalistes

Banner Prix Première Oeuvre Française 2023 Finalistes Web

 

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La Fureur de Lire

Par administrateur,
Fureurlire Bannièrefb Ninasix

Fureurlire Bannièrefb Ninasix Light

Comme chaque année, à la mi-octobre, la Fureur de lire prend ses quartiers en Wallonie et à Bruxelles en vue de sensibiliser le grand public à la lecture.

Pour cette édition 2023, la Fureur de lire met le cap au nord. Découvrez des autrices et auteurs nordiques, les maîtres du suspens qui vous font frissonner. Fêtez la collection Espace Nord qui édite depuis 40 ans des auteurs de la littérature belge. Plongez dans Les contes glacés, délicieusement effrayants, de l’auteur Jacques Sternberg. Il vous suffit de fixer le cap vers l’une des villes, en Wallonie et à Bruxelles, qui organisent une animation autour de la lecture. Vous trouverez dans ce programme des activités de tous types, pour tous les âges : des rencontres, des lectures, des expositions, des ateliers, des concours…

Télécharger le programme complet (PDF)

 

Les plaquettes de la Fureur de lire

Photos Des Plaquettes

Des récits d’auteurs belges pour tous les publics. Chaque année, sept nouveaux titres à découvrir dans les lieux organisateurs d’activités durant la Fureur de lire et disponibles gratuitement sur simple demande via fureurdelire@cfwb.be

  • Mais ça va pas, non ! de Peter Elliott, album (dès 3 ans) : Bouli Hibou, Bogdan Lapin et Yvette Pivert sont voisins. Ce n’est pas facile de vivre proches les uns des autres sans être dérangé… À moins qu’un événement inattendu permette un changement de point de vue ? 🎬 regarder la vidéo
  • Le grand bassin de Nina Six, BD (dès 10 ans) : un dernier moment piscine entre deux amies et l’occasion de dresser le portrait de quelques nageurs typiques et atypiques, de situations courantes et de réflexions exclusivement liées à la baignade publique. 🎬 regarder la vidéo
  • Le temps des épées d’Emmanuelle Pirotte, nouvelle (dès 16 ans). Depuis cette découverte archéologique majeure survenue deux ans et demi plus tôt sur l’île d’Ulva, Ben n’est plus le même homme. C’est à se demander qui est mort et qui est vivant dans cette histoire qui réunit deux vies éloignées de plus de dix siècles. 🎬 regarder la vidéo
  • Contes glacés de Jacques Sternberg, nouvelles (dès 12 ans) : douze textes courts parfois absurdes et souvent délicieusement effrayants issus du recueil éponyme paru chez Mijade en 2009. En partenariat avec la collection Espace Nord et la BiLA  🎧écouter la plaquette Contes glacés 🎬 regarder la vidéo
  • Interludes marins de Maud Joiret, poésies (dès 16 ans) : une succession de tableaux poétiques, à la fois métaphoriques, sensuels, philosophiques, inspirés par la mer et ses mouvements. 🎬 regarder la vidéo
  • Tu ne tueras point de Grégoire Polet, nouvelle (dès 13 ans) : que sait-on exactement de Marcel, ancien flic de la brigade Couvreur de la police montée et fan de sport ? Les photos encadrées aux murs du salon, feu sa femme Marcelle, pour quel parti il vote, les bières trappistes qu’il boit ? Scruté et haï à son insu, Marcel sera-t-il l’objet d’une vengeance méditée de longue date ?
  • Le bonheur du jour de Daniel Barbez, nouvelle en picard tournaisien, avec traduction française (dès 13 ans). :  Mauricette se lève à six heures et quitte la chambre. Sa tête ne connait plus le chemin. Ses jambes savent encore. La cuisine, le jardin, la remise, l’escalier, le grenier ; pas à pas, elle parcourt la maison, à la recherche de quelque chose qu’elle reconnaîtra
Le parcours de lecteurs et de lectrices : des livres à ramener à la maison

Le Parcours offre aux enfants un livre à différents moments de leur vie : un livre est diffusé à la naissance par l’ONE, et deux autres sont offerts aux élèves de 3 ans et 6 ans ainsi qu’à leurs enseignants et enseignantes avec la médiation des bibliothèques publiques. Chaque livre est accompagné de documents d’exploration.

C’est le petit qui monte d’Emile Jadoul (0-2 ans, via l’ONE)


C’est le petit qui monte a été créé par Emile Jadoul suite à la collaboration entre la Fédération Wallonie-Bruxelles et l’ONE. Il est offert, par l’intermédiaire des consultations ONE, à tous les parents d’un nouveau-né afin de les inciter au plaisir de la lecture dès le plus jeune âge. Il est édité en collaboration avec les éditions Pastel, L’école des loisirs.

Ribambelle de Mathilde Brosset (pour les 3 ans, via les bibliothèques publiques)


Ribambelle est un album de Mathilde Brosset, publié en collaboration avec les éditions Versant Sud Jeunesse. La distribution et médiation est destinée aux élèves de 1ère maternelle et à leurs enseignants par les bibliothèques publiques.

Toute une montagne de Marie Colot et Françoise Rogier (pour les 6 ans, via les bibliothèques publiques)


Toute une montagne est un album écrit par Marie Colot et illustré par Françoise Rogier. Il est édité en collaboration avec les éditions À pas de loups. La distribution et la médiation est assurée vers les élèves de première primaire et leurs enseignants par les bibliothèques publiques. Avec le soutien du PECA.

 

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La collection Espace Nord célèbre ses 40 ans d’existence

Par David Dusart,
Actu Espace Nord Visuel

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La collection Espace Nord célèbre ses 40 ans d’existence.

Retrouvez le numéro spécial que Le Carnet et les instants a consacré à cet anniversaire et à la richesse de la collection.

Découvrez les 7 vidéos réalisés à cette occasion :

Malika Madi nous parle de « Le mauvais genre » de Laurent de Graeve

Alain Berenboom nous parle de « Délires » d’André Baillon

Giuseppe Santoliquido nous parle de « Tempo di Roma » d’Alexis Curvers

Laurence Vielle nous parle de « La ville à voile » de Paul Willems

Isabelle Wery nous parle de « Sous dialyses » de Charline Lambert

Jan Baetens nous parle de « Les petits dieux » de Sandrine Willems

Nicole Malinconi nous parle de « Circuits » de Charly Delwart

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La littérature jeunesse fait sa rentrée

Par David Dusart,
Automne Ns

Automne Ns

Découvrez ci-dessous les nouveautés en littérature jeunesse publiées entre le 1er aout et le 31 octobre.
Romans, albums, théâtre, … 1000 sources d’émerveillement pour les 0 – 15 ans !

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Nouveautés à emprunter sur Lirtuel

Par administrateur,
Sélection Lirtuel23

En collaboration avec Lirtuel, nous vous proposons une liste de titres d’auteurs et autrices belges disponibles en prêt numérique. Tous les ouvrages présentés ci-dessous ont été publiés en 2023.

Vous utilisez déjà Lirtuel ? Si un livre de la liste ci-dessous vous intéresse, cliquez sur la fiche du titre en question et dans la colonne de droite, sélectionnez « Emprunter cette œuvre sur Lirtuel ».

Vous n’êtes par encore utilisateur de Lirtuel ? Rendez-vous sur cette page pour vous créer un compte

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Les Prix de la Fédération Wallonie-Bruxelles en langues régionales

Par administrateur,

Prix triennal de littérature de jeunesse

Prix de la première œuvre en littérature de jeunesse

 

Tous les prix de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Outre les prix en littérature jeunesse dont le palmarès est dévoilé ci-dessus, il existe également des prix en littérature générale et en littérature jeunesse.

Consulter le palmarès des prix de la Fédération Wallonie-Bruxelles en littérature générale

Consulter le palmarès des prix de la Fédération Wallonie-Bruxelles en bande dessinée

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Rentrée littéraire 2023

Par David Dusart,
Design Sans Titre (1)

Design Sans Titre
Il s’agit là d’une tradition : la fin de l’été et le début de l’automne voit, la plupart des maisons d’édition, publier leurs nouveautés.
Découvrez ci-dessous les nouveautés pour la période du 15 aout au 15 octobre.

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La Petite Fureur : sélection 2023

Par administrateur,
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Bannière Karine Pf
La Petite Fureur est un concours pour promouvoir la lecture chez les enfants et mettre en valeur les auteurs, illustrateurs et traducteurs de Wallonie et de Bruxelles.

La Petite Fureur est un concours littéraire organisé par la Fédération Wallonie-Bruxelles à destination des enfants de 3 à 15 ans. Un jury de professionnels établit une sélection de livres dans les différentes catégories d’âge. Ces livres sont soit signés par des auteurs, autrices et/ou illustrateurs, illustratrices belges, soit traduits par des traducteurs ou traductrices belges.

Aux enfants participants, il est demandé de choisir l’un des ouvrages de la sélection et de le prolonger par un dessin, collage, poésie, chanson, adaptation théâtrale… Le concours rencontre ainsi un triple objectif. du côté de l’enfant, il suscite le plaisir de la lecture et développe la créativité. Et du côté des auteurs, illustrateurs et traducteurs, il est un outil de promotion de la création en Fédération Wallonie-Bruxelles.

Les informations concernant les inscriptions et les demandes de chèque-livres seront prochainement en ligne sur Fureurdelire.be

Sélection 2023 :

3-5 ans

L’anniversaire d’écureuil de Geneviève Casterman (CotCotCot)
Montre-toi, montagne ! de David Wautier (Le Diplodocus)
Règlobus de Pierre Alexis (La Partie)

6-8 ans

Nos amies les bêtes de Marie Colot (texte) et Françoise Rogier (illustrations) (À pas de loups)
La femme qui attendait un enfant et l’homme qui attendait un garçon de Alain Serge Dzotap (texte) et Anne-Catherine De Boël (illustrations) (Pastel, l’école des loisirs)
Mariedl de Laura Simonati (Versant Sud Jeunesse)

9-11 ans

Norman c’est comme normal à une lettre près de Marie Henry (Lansman Éditions)
La luciole et autres histoires d’animaux de Toon Tellegen (texte), Carll Cneut (illustrations) et Charline Peeters (traduction) (Pastel, l’école des loisirs)
Monstres de Stéphane Servant (texte) et Nicolas Zouliamis (illustrations) (Thierry Magnier)

12-13 ans

Par-delà les sentiers de Jérôme Eeckhout (Alice Éditions)
Comment j’ai disparu dans la jungle de Simon van der Geest (texte) et Maurice Lomré (traduction) (La Joie de lire)
La longue marche des dindes de Kathleen Karr (texte) et Léonie Bischoff (illustrations) (Rue de Sèvres)

14-15 ans

L’étourbillon de Flore Servais (Alice Éditions)
Junk Food d’Arthur Croque (texte) et Émilie Gleason (illustrations) (Casterman)
Les pissenlits de Nina Six (Sarbacane)

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L’été sera doux pour les jeunes lecteurs

Par David Dusart,
Ete Banner Op

Ete Banner Op

À lire et à regarder, à feuilleter et à découvrir. Plongez dans les parutions en littérature jeunesse s’étalant du 1er mai au 31 juillet 2023.

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Almudena Pano, prix de la première œuvre en littérature jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Par administrateur,

Récompensée pour Histoire en morceaux, paru chez Versant Sud en 2021, l’autrice-illustratrice a obtenu en 2022 le Prix de la première œuvre en littérature de jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Elle a aussi obtenu deux autres bourses de la FWB.

Almudena Pano

© FWB – Jean Poucet

Avec son amie et complice Elisa Sartori, elles créent de superbes fresques au sein de l’association 10emeArte. Almudena Pano est devenue autrice-illustratrice de livres pour enfants et de bandes dessinées, participe à des expositions et travaille en tant que graphiste.

Qui êtes-vous ? Comment en êtes-vous arrivée à ce métier ?


Je suis une Espagnole, née dans un petit village au cœur des Pyrénées où mes parents tenaient un hôtel dans lequel j’ai travaillé dès l’âge de 8 ans, sans ja- mais connaître de « vacances ».

Après m’être orientée vers la branche artistique lors de mes secondaires à l’École d’Art de Huesca, j’ai pour- suivi mon parcours académique en suivant une formation supérieure en Graphisme dans la même école.

Puis, je suis partie à l’Université Complutense de Madrid pour étudier la Publicité et les Relations publiques. Arrivée par Erasmus, j’ai achevé ces études à la VUB de Bruxelles pour la cinquième et dernière année.

L’été suivant, j’ai décroché un poste de graphiste et d’assistante dans la section culturelle de l’Institut Cervantes. J’ai été confrontée au monde de la publicité, bien différent de mes valeurs qui m’amènent à vouloir toucher les gens, à les faire rire et réfléchir. Contribuer à construire un monde aussi superficiel à mes yeux m’éloignait de celles-ci.

J’ai donc repris des études en choisissant un domaine dans lequel je pouvais mélanger communications et arts graphiques, c’est-à-dire l’illustration. J’ai alors passé trois merveilleuses années au sein de l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles où j’ai fait la connaissance d’Anne Quévy, professeure responsable de l’Atelier d’illustration.

J’ai eu des boulots alimentaires me permettant d’apprendre le français et je suis devenue maman.

10emeArte

Nourrissant une belle complicité, j’ai créé avec Elisa Sartori un collectif artistique, « 10emeArte », dédié à la conception et à la réalisation de fresques. Nos œuvres sont présentes dans l’espace
public, dans des espaces privés, commerces, bars, salles de concert… Trois fresques pour le parcours Street Art de Bruxelles, le parcours Street Art de Mons. Pour le Picture Festival, il y a deux ans, nous avons réalisé une fresque devant Bozar. Nous avons répondu à un appel à projets pour l’Ancienne Belgique et le Cirque royal. Une oeuvre de l’AB (une toile) va être vendue aux enchères afin d’aider une association de sans-abri. Autre projet : un plafond de cinq cents mètres carrés dans un tunnel ; il s’agit d’une des fresques qui font partie du parcours Street Art de Bruxelles.

Un premier album ? Sa genèse ?

           Extrait de l’album Histoire en morceaux | © Almuneda Pano – Versant Sud Jeunesse

Une petite fille joue au foot et casse un vase dans la maison. Sa maman ne la gronde pas mais va le réparer avec elle, avec de la colle et de la poudre d’or. La pratique japonaise dénommée kintsugi m’a inspirée pour faire une métaphore. Je souhaitais évoquer par ce biais le processus de casse et de reconstruction que chacun·e peut connaître dans sa vie durant laquelle on connaît beaucoup de moments à surmonter. Ce sont de ces moments qui nous font grandir et qui construisent la personne qu’on devient, et c’est pour cela qu’il faut les accueillir. On devient plus compréhensif avec les autres et avec soi-même.

Cet album permet différents niveaux de lecture, et moi-même, pendant que je le faisais, je voyais d’autres lectures que je n’avais pas vues, comme au niveau sociétal : on détruit la nature et il faut qu’on la reconstruise. Ça m’est venu à l’esprit lors que je dessinais les motifs du vase, un paysage avec des animaux. Les notions de temps et d’espace sont aussi importantes pour moi. Par petites touches, page après page, je montre le temps qui passe car c’est un processus long. En matière d’espace, tout se passe dans la maison, puis la fillette sort et le lecteur s’aperçoit que quelque chose se passe de l’intérieur vers l’extérieur. Cette petite fille vit tout un travail intérieur. On est toujours en changement vers autre chose.

Je voulais aussi montrer les sentiments, les émotions de chaque passage à travers les images. Quand la fille va jeter son ballon, on sait que quelque chose de mal va se passer. La mère arrive avec son manteau et son livre. C’est comme la savante qui sait. L’image est très posée, presque comme un lac calme avec des canards. Le calme re- vient après l’agitation. Un bel exemple : l’image du lit montre une couverture avec une mer qui semble révoltée ; ce qui représente l’état émotionnel de la fillette. Complicité mère-fille. Dans chaque passage, les sentiments sont importants.

Le rapport texte-image

J’accorde beaucoup d’importance au rapport texte-image. Le prochain album sera totalement différent. Ce qui m’intéresse le plus, c’est de faire passer un message ; chaque œuvre a un ton. L’image doit accompagner ce ton. Je réalise un travail avec les couleurs, les techniques pour faire cela. Ce travail de recherche est ce qui m’intéresse le plus. On n’a pas la même façon de s’habiller pour aller travailler ou participer à une fête. Chaque œuvre a sa propre façon de s’habiller. D’où je change ma façon de faire en jouant avec le texte et l’image.

Des influences japonisantes et la technique du kintsugi
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      Extrait de l’album Histoire en morceaux | © Almuneda Pano – Versant Sud Jeunesse

La pratique du kintsugi explique vraiment bien le message que je voulais passer. Dans celle-ci, le vase cassé est réparé en portant les marques de cassures qui sont recouvertes d’or. J’ai re- pris la technique de la reconstruction de l’objet. À la fin, la mère trouve l’objet plus beau qu’avant, pour tout ce qu’elles ont vécu autour de cette reconstruction… comme l’objet reconstruit par le kintsugi devient plus beau par les cassures dorées.

On vit dans une société où tout doit être parfait. L’être humain ne doit pas avoir de cheveux blancs, de rides ou de cicatrices. Ce sont les signes d’une vie vécue, qui font nos individualités, pas des traces honteuses dont on doit se débarrasser. Ce vase, avec ses cassures, raconte sa vie et son histoire aussi. Ce vase est tombé et le fait de le reconstruire devient une histoire en soi.

Je connaissais déjà la pratique du kintsugi. J’ai repensé à celle-ci pour réaliser une métaphore à travers les images, qui évoluent selon l’influence des estampes japonaises.

Des projets ?

Oui. L’obtention de deux bourses de la Fédération Wallonie-Bruxelles a été une aide économique pour mon travail. Le premier projet s’intitule Gloria et sortira au printemps 2023. Il s’agit d’un roman graphique pour un public grands ados-adultes de 220 pages qui a reçu une bourse d’aide à la BD. Il paraîtra l’an prochain chez un éditeur parisien, Rue de l’échiquier.

Celui-ci abordera le sujet difficile de l’inceste, en partant d’une histoire vraie et en montrant les dangers de cette pratique néfaste, en mettant en scène une fille qui travaille dans un centre de mineurs et la vie des trois enfants qu’elle gère, dont un schizophrène et deux ayant subi des violences sexuelles. J’espère que cette BD permettra d’atteindre des gens concernés mais qui n’ont pas envie de consulter un ouvrage de type anthropologie de l’inceste.

Le deuxième projet est plus poétique et s’appellera La vie est un cirque. Je dois encore trouver un éditeur pour celui-ci, que je souhaite réaliser en risographie, en travaillant sur les images. J’ai imaginé un présentateur de cirque, avec la vie qui s’exprime à travers une série de personnages du monde du cirque. Chacun d’entre eux s’explique avec des rimes et une musicalité dans le texte.

Un troisième projet dont le contrat est signé avec l’éditeur Cotcotcot concerne notre collectif 10emeArte où le duo Almudena PanoElisa Sartori réalisera les illustrations sur un texte de Lisette Lombé pour une collection artistique. La publication est prévue pour septembre 2023.


© Isabelle Decuyper, LECTURES•CULTURES N°30, Novembre-Décembre 2022

 

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Sélection « Osons l’imaginaire »

Par David Dusart,

© Anna Gru

Dans le cadre de la Foire du Livre 2023, nous « osons l’imaginaire » et la sélection présentée ici en repousse encore un peu plus les limites.
Une partie de cette sélection est à découvrir sur le stand de la Fédération Wallonie-Bruxelles (n° 245)

Les ouvrages mis en avant ici sont rassemblés autour de quatre thématiques :

  • Les créatures
  • Les fêlures
  • Les aventures
  • Le futur

Les titres sélectionnés sont en rapport avec l’imaginaire et entretiennent une relation plus étroite avec l’une des quatre thématiques citées ci-avant. Il s’agit d’ouvrages récents (parus après 2021), disponibles en librairie et qui ont été écrits et/ou illustrés par des auteurs ou autrices belges.

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Quelques nouveautés pour faire venir le printemps

Par David Dusart,

Les nouveautés du printemps en littérature de jeunesse | © Nina Six

De belles histoires, des illustrations qui font rêver et voyager. Découvrez ici les parutions en littérature jeunesse s’étalant du 1er février 2023 au 30 avril 2023.

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Auteurs en classe

Par administrateur,

Grâce à la Fédération Wallonie-Bruxelles, les enseignants et enseignantes de tous niveaux peuvent inviter gratuitement un auteur ou une autrice belge francophone (ou qui réside en Belgique) dans leurs classes. Bande dessinée, album jeunesse, roman, nouvelle, poésie, essai : tous les genres littéraires sont représentés. Une rencontre autour de la découverte d’un livre qui donne ou entretient le goût des élèves pour la lecture !

Les demandes pour Auteurs en classe sont à nouveau ouvertes uniquement pour des rencontres ayant lieu avant le 4 juillet 2025

  • dans le primaire et le maternel,seuls les projets de rencontres pour la bande dessinéepeuvent être déposés. Les rencontres hors bande dessinée ne peuvent pas pour l’instant être traitées.
  • dans le secondaire, le supérieur et pour les publics alpha, tous les projets de rencontres peuvent être déposés à condition que la rencontre ait lieu avant le 4 juillet 2025.

Les demandes de rencontres ayant lieu en 2025 après le 4 juillet ne sont actuellement pas acceptées. Les dossiers reçus ne seront pas traités. L’ouverture des inscriptions pour les rencontres de la deuxième partie de l’année 2025 sera annoncée ultérieurement sur cette page. 

5 étapes pour inviter un auteur ou une autrice en classe :  
  1. L’enseignant ou l’enseignant choisit une autrice ou un auteur. L’invité doit être répertorié comme disponible pour « Auteurs en classe » dans Objectif plumes. L’enseignant ou l’enseignante contacte l’auteur ou l’autrice et lui soumet son projet de rencontre en classe sur base de la lecture d’un ou plusieurs livres.  
  2. Ensemble, ils conviennent d’une date et d’un horaire de rencontre.  
  3. L’enseignant ou l’enseignante introduit une demande auprès d’Auteurs en classe via le formulaire en ligne. Ce dépôt de projet doit être fait au moins 3 semaines avant la rencontre. Tous les enseignants qui introduisent une demande doivent avoir lu et approuvé le document Droits et devoirs de l’auteur et de l’enseignant (PDF).  
  4. Une fois la validation reçue, l’auteur ou l’autrice et l’enseignant ou l’enseignante préparent la rencontre.
  5. Au plus tard un mois après la rencontre, l’auteur ou l’autrice transmet sa déclaration de créance à « Auteurs en classe ».   
Vous ne savez pas qui inviter ? Vous avez besoin de conseils ?  

Ecrivez-nous à auteursenclasse@cfwb.be ou via le formulaire de contactAttention, nous sommes actuellement dans l’attente du recrutement d’une nouvelle personne responsable des rencontres dans le fondamental (hors bande dessinée). Par conséquent, si votre demande concerne une rencontre ou un renseignement pour l’enseignement fondamental (hors bande dessinée), celle-ci ne pourra pas être traitée. 

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La nouvelle belge d’aujourd’hui

Par administrateur,

NOUVELLE ET ROMAN

Esthétiquement, la nouvelle est quasi toujours rapprochée du roman, auquel elle est comparée. Dans le « petit sottisier de la nouvelle » qu’il alimentait régulièrement sur son site internet, le chercheur belge et grand spécialiste de la nouvelle René Godenne cite notamment cet extrait éclairant :

Adoptons une définition de la nouvelle qui peut faire l’unanimité : un roman en raccourci.[1]

Opinion largement répandue, elle réduit la nouvelle à n’être pas un genre en soi, mais seulement le satellite d’un autre, plus prestigieux : le roman, dont elle ne formerait qu’une variante brève, une ébauche – un roman au souffle court. La nouvelle serait en quelque sorte au roman ce que le court-métrage est au long-métrage : une œuvre de jeunesse, un premier pas hésitant, en attendant la réalisation de la grande œuvre. Les concours de nouvelles, très nombreux aujourd’hui, alimentent malgré eux cette croyance : ils sont souvent destinés aux auteurs amateurs et désignent dès lors la nouvelle comme un genre accessible à tous.

Romancier et nouvelliste, Éric-Emmanuel Schmitt recourt lui aussi à la comparaison entre roman et nouvelle, mais pour prendre le contrepied de l’opinion courante. Dans son recueil de nouvelles Concerto à la mémoire d’un ange, il théorise ainsi le genre qu’il pratique :

La nouvelle est une épure de roman, un roman réduit à l’essentiel.
Ce genre exigeant ne pardonne pas la trahison.
Si l’on peut utiliser le roman en débarras fourre-tout, c’est impossible pour la nouvelle. Il faut mesurer l’espace imparti à la description, au dialogue, à la séquence. La moindre faute d’architecture y apparaît. Les complaisances aussi.[2]

Presque toujours comparée au roman, la nouvelle lui est aussi associée en matière de prix littéraires. On l’ignore parfois, mais les Goncourt, Renaudot, Médicis, Femina ou le Rossel peuvent aussi bien récompenser un recueil de nouvelles qu’un roman. Un bref parcours des palmarès de ces prix révèle toutefois la portion congrue réservée à la nouvelle. Le Rossel, par exemple, a couronné, au cours des trente dernières éditions, trois ouvrages qui s’apparentent à des recueils de nouvelles : Le jour du chien de Caroline Lamarche en 1996, Contes carnivores de Bernard Quiriny en 2008 et Argentine de Serge Delaive en 2009.

Du côté du Goncourt, on retiendra que Charles Plisnier est non seulement le premier lauréat belge (et premier lauréat non-français) du prix, mais est aussi le premier auteur récompensé pour un recueil de nouvelles, Faux passeports. C’était en 1937 ; le prix est décerné depuis 1903. Significativement, l’Académie Goncourt a créé en 1974 le Goncourt de la nouvelle. Destiné à mettre le genre en lumière par une catégorie dédiée, il signale aussi en creux la difficulté à faire exister la nouvelle lorsqu’elle est en compétition avec le roman.

MAISON D’EDITION ET COLLECTIONS

Le déficit de reconnaissance de la nouvelle a des conséquences économiques : les éditeurs sont généralement peu friands d’un genre qui ne se vend pas bien auprès du public. En Belgique francophone, toutefois, des maisons d’édition font la part belle à la nouvelle, via des collections dédiées, voire en publiant exclusivement des nouvelles. Tanguy Habrand et Pascal Durand constatent que l’édition de niche est l’une des tendances de l’édition littéraire actuelle à Bruxelles et en Wallonie et y voient deux explications possibles : « Il est difficile de démêler ce qu’il entre de spécifiquement belge ou de modalement lié aux possibilités de la microédition dans l’émergence presque spontanée de ces structures très spécialisées[3] ».

 

Les éditions Quadrature

Établies à Louvain-la-Neuve et animées par une équipe de passionné-e-s, les éditions Quadrature ont été fondées en 2005 et publient exclusivement des recueils de nouvelles. Publiant peu, la maison d’édition parie sur la qualité, tant dans le choix des projets édités que dans la réalisation matérielle de ceux-ci.

Les éditions Quadrature

Au catalogue : une cinquantaine d’auteurs pour une septantaine de livres. Des nouvellistes belges et français ; des nouvelles de tous genres ; des nouvellistes qui ont débuté dans la maison d’édition, comme Isabelle Baldacchino ou Aliénor Debrocq (passée au roman pour ses derniers livres) ; des auteurs confirmés, publiés par d’autres maisons lorsqu’ils pratiquent d’autres genres littéraires, comme Dominique Costermans ou Kenan Görgün.

Le travail sur la nouvelle réalisé par Quadrature est reconnu dans le monde francophone, la maison d’édition étant régulièrement présente lors d’événements internationaux dédiés au genre et dans des sélections de prix littéraires. En Belgique, on se souviendra que le recueil de nouvelles de Zoé Derleyn, Le goût de la limace, figurait parmi les cinq finalistes de l’édition 2017 du Rossel – exploit double, dans le cadre d’un prix qui récompense peu les recueils de nouvelles et les livres publiés en Belgique.

Deux collections aux éditions Ker

Les éditions Ker publient de la littérature générale, des romans pour la jeunesse et des essais. En 2017, elles ont lancé la collection « Belgiques ». Le concept : chaque volume est un recueil de nouvelles signé par un auteur belge francophone, qui y raconte ses images et représentations de la Belgique. Le pluriel du titre de la collection, qui insiste sur la pluralité, la multiplicité des facettes, appelle par nature le recueil de nouvelles, qui réuniten un même ouvrage des textes aux tonalités et angles différents.

Les auteurs rassemblés dans la collection sont eux aussi une preuve de sa diversité. Une vingtaine d’ouvrages ont été publiés jusqu’à présent, signés notamment par Frank Andriat, Véronique Bergen, Luc Dellisse, Jean Jauniaux, Françoise Lalande, Myriam Leroy, Giuseppe Santoliquido ou Michel Torrekens.

Les éditions Ker abordent aussi la nouvelle dans la collection « Double jeu ». La dimension mosaïque prévaut ici encore, mais d’une autre façon : les recueils publiés rassemblent des nouvelles de différents auteurs et autrices autour d’une thématique commune. Destinés en priorité à un public adolescent, ils abordent sous différents angles des questions qui font débat : le terrorisme et la radicalisation dans Le peuple des Lumières (2015), le populisme ou le racisme dans L’heure du leurre (2017), la crise climatique dans Les bâtisseurs (2019), ou encore le difficile respect de la vie privée à l’heure des réseaux sociaux dans #balancetavie (2019).

« Opuscule » des éditions Lamiroy

Les nouvelles ne se publient quasiment qu’en recueil, qu’il soit individuel ou collectif. La raison en est d’abord économique. Le coût de fabrication d’un livre de peu de pages est quasi identique à celui d’un livre long. Or le lecteur souhaite en avoir pour son argent.

Dans le paysage éditorial, les éditions Lamiroy se singularisent avec la création de la collection « Opuscule ». La petitesse et la brièveté sont au cœur du projet, comme le nom l’indique. Chaque volume comporte une seule nouvelle, très courte. La collection s’étoffe rapidement : un nouveau livre est publié chaque semaine, en papier et en numérique. Une autre innovation des éditions Lamiroy est de proposer un abonnement à « Opuscule ».

Les écrivains du catalogue sont nombreux. L’éditeur a d’abord misé sur des auteurs « maison » : Thierry Coljon, Carlos Vaquera et Adeline Dieudonné (dont le seule-en-scène Bonobo Moussaka a été publié chez Lamiroy avant le succès de La vraie vie) signent quelques-uns des premiers volumes d’Opuscule. Ils ont été rapidement rejoints par d’autres, plumes confirmées ou auteurs novices.

Le succès est au rendez-vous et la collection connait dès lors des déclinaisons. Les hors-séries rassemblent plusieurs nouvelles sur un thème unique ; « Crépuscule » se spécialise dans le polar et « Adopuscule » rassemble des nouvelles destinées au public adolescent.

 

Marginales : une revue pour la nouvelle

Marginales, une revue belge consacrée à la nouvelle

Fondée en 1945 par Albert Ayguesparse, la revue Marginales a cessé de paraître en 1991, avant de renaître en 1999 sous l’impulsion de Jacques De Decker (1945-2020). Elle marque de nouveau une pause en 2021, mais est relancée en 2022, sous la houlette de Vincent Engel, dans une version principalement numérique. Chaque numéro propose un ensemble de textes brefs, majoritairement des nouvelles, d’auteurs différents, autour d’une thématique qui résonne avec l’actualité.

Les contributeurs, belges et étrangers, sont nombreux et se renouvellent dans le temps : Claude Raucy voisine avec Luc Dellisse, Véronique Bergen, Liliane Wouters ou Eva Kavian.

 

Chez d’autres éditeurs

Sans lui dédier nécessairement une collection, plusieurs autres maisons d’édition généralistes réservent une place sinon large du moins appréciable à la nouvelle publiée en recueil. C’était notamment le cas des éditions Luce Wilquin, qui ont cessé leurs activités. Y ont été publiés des recueils de Dominique Costermans (Nous dormirons ensemble, Y a pas photo), de Patrick Dupuis (Enfin seuls, Passés imparfaits, Nuageux à serein) ou Emmanuèle Sandron (Sarah Malcorps, Je ne te mangerai pas tout de suite).

La collection « Plumes du coq » des éditions Weyrich, collection littéraire principale de l’éditeur, accueille elle aussi plusieurs recueils de nouvelles, inédits (L’été sous un chapeau de paille d’Alain Bertrand ; Sept histoires pas très catholiques d’Armel Job ; Au diable ! de Ziska Larouge ; Ceux que nous sommes de Christine Van Acker) ou rééditions (L’année dernière à Saint-Idesbald de Jean Jauniaux).

Même politique attentive à la nouvelle aux éditions M.E.O., où l’on retrouve notamment des recueils de Ben Arès (Les jours rouges), Daniel Simon (À côté du sentier ; Ce n’est pas rien), Liliane Schraûwen (Ailleurs ; Exquises petites morts) et Evelyne Wilwerth (La nacelle turquoise), chez Traverse (Lorenzo Cecchi, La solitude des anges gardiens ; Luc Dellisse, Le sas ; Daniel Fano, Privé de parking (Micro-fictions)…) ou au Cactus inébranlable (Lorenzo Cecchi, Protection rapprochée ; Anne-Michèle Hamesse, Ma voisine a hurlé toute la nuit et Le neuvième orgasme est toujours le meilleur ; Jean-Philippe Querton, T’as des nouvelles de Jpé ?…).

Enfin, on notera que la maison d’édition Marque belge a remporté en 2018 le prix de la première œuvre de la Fédération Wallonie-Bruxelles (prix pour lequel tous les genres littéraires concourent ensemble) avec un recueil de nouvelles : Pitou et autres récits d’Henri de Meeûs.

DES PRIX DÉDIÉS À LA NOUVELLE

Au dynamisme éditorial de la nouvelle en Belgique francophone répond la relative attention des prix littéraires au genre. Certes, plusieurs récompenses sont ouvertes indifféremment aux romans et aux recueils de nouvelles – ce qui aboutit invariablement à la quasi-absence des seconds au palmarès. C’est le cas du prix Rossel, du prix Marcel Thiry (qui récompense un roman ou recueil de nouvelles une édition sur deux, l’autre étant consacrée à la poésie), du prix de littérature Charles Plisnier (consacré une année sur trois au roman et à la nouvelle, en roulement avec la poésie et le théâtre), ou encore du prix triennal de la prose de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

D’autres prix évitent toutefois de mettre en concurrence les nouvelles avec les romans. Ainsi, le prix Emma Martin de l’A.E.B.récompense successivement un recueil de poèmes, un roman, un recueil de contes ou de nouvelles. Décerné jusqu’en 2019, le prix Franz De Wever de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique récompensait quant à lui alternativement un recueil de poèmes, un essai ou un recueil de nouvelles d’un auteur de moins de 40 ans.

Siège des éditions Quadrature, la ville d’Ottignies-Louvain-la-Neuve est un centre de rayonnement de la nouvelle francophone. En 1994, elle a accueilli le « colloque-festival » l’Année nouvelle, organisé par Vincent Engel. Elle a décerné, de 1992 à 2013, le prix Renaissance de la nouvelle. Porté par les pouvoirs communaux ottintois et animé par Michel Lambert et Carlo Masoni (1921-2010), le prix récompensait chaque année un recueil de nouvelles francophone. Après une interruption de sept ans, la Ville a relancé un prix dédié au genre : le prix de la nouvelle – Ville d’Ottignies Louvain-la-Neuve a connu une première édition en 2021, consacrée aux nouvellistes belges ; dès la deuxième édition, le prix s’est ouvert à l’ensemble de la Francophonie.

TENDANCES ACTUELLES

La nouvelle forme un ensemble protéiforme. La brièveté même se révèle un critère inopérant, une nouvelle pouvant aller de quelques lignes, voire quelques mots, à une centaine de pages. Une longue nouvelle n’est donc pas forcément plus courte qu’un bref roman.

Parmi les textes publiés sous la bannière « nouvelle », plusieurs types ou sous-genres émergent néanmoins. Toujours pratiquée aujourd’hui, la nouvelle classique – celle des maîtres francophones du genre, Maupassant et Mérimée – est la nouvelle-histoire, qui suit un schéma narratif traditionnel : situation initiale – bouleversement – péripéties – situation finale avec résolution.

La nouvelle-instant a émergé plus récemment. La nouvelle-histoire développe une portion plus ou moins longue de la ligne du temps, selon un axe horizontal. La nouvelle-instant, au contraire, évoque un bref moment, dont elle explore les ramifications profondes. La logique est plutôt verticale dans ce cas.

La nouvelle à chute est pour sa part tout entière tendue vers la conclusion, qui, prenant le lecteur par surprise, en renverse le sens et place l’ensemble du récit dans une perspective nouvelle.

Récit de fiction, la nouvelle est également traversée par certains courants littéraires. L’histoire de la littérature fantastique belge montre que les grands fantastiqueurs ont souvent pratiqué la nouvelle : Franz Hellens, Jean Muno, Thomas Owen, Gérard Prévot, Jean Ray, Jacques Sternberg étaient tous aussi et surtout nouvellistes. Aujourd’hui, la nouvelle séduit toujours les auteurs de la mouvance fantastique, comme l’illustrent notamment Anne Richter (1939-2019) (La promenade du grand canal, Talus d’approche, 1995, rééd. L’âge d’homme, 2012 ; L’ange hurleur, L’âge d’homme, 2008 ; Le chat Lucian et autres nouvelles inquiètes, L’âge d’homme, 2010), Carino Bucciarelli (Dispersion, Encre rouge, 2018 ; Petites fables destinées au néant, Traverse, 2022) et Bernard Quiriny (Contes carnivores, Seuil, 2008, prix Rossel et prix Marcel Thiry ; Histoires assassines, Rivages, 2015 ; Vies conjugales, Rivages, 2019), voire plus occasionnellement Liliane Schraûwen (Ailleurs, M.E.O., 2015) ou Thierry Horguelin (Nouvelles de l’autre vie, L’oie de cravan, 2016). Dans le domaine de la SF et de l’anticipation aussi, la nouvelle est très présente. Alain Dartevelle (1951-2017) est l’un des nouvellistes remarquables dans cette mouvance, avec les recueils Amours sanglantes (L’âge d’homme, 2011), Narconews et autres mauvaises nouvelles du monde (Murmure des soirs, 2011) ou Toy boy et autres leurres (Academia, 2017).

L’histoire récente de la nouvelle belge francophone porte aussi la trace d’une veine érotique relativement présente. Emmanuelle Pol s’y est essayée dès son premier livre, La douceur du corset (Finitude, 2009). Elle abandonne ensuite la nouvelle pour le roman, tout en creusant le sillon érotique dans son deuxième livre, L’atelier de la chair (Finitude, 2011). Elle revient à la nouvelle en 2023 avec Les bracelets d’amour (Finitude). D’Evelyne Wilwerth, on notera Hôtel de la mer sensuelle (Avant-propos, 2015). En 2015, Corinne Hoex signe le troublant Valets de nuit (Les Impressions nouvelles, 2015) auquel François Emmanuel a offert le pendant l’année suivante avec 33 chambres d’amour (Le Seuil, 2016).

 

Anthologies et recueils collectifs : des panoramas de la nouvelle d’aujourd’hui

Plusieurs initiatives éditoriales ont vu le jour ces dernières années, qui offrent un panorama des nouvellistes et de la nouvelle belge actuelle.

Depuis 1997, le Ministère de la Communauté française, devenue Fédération Wallonie-Bruxelles publie chaque année, dans le cadre de la Fureur de lire, des plaquettes présentant chacune une nouvelle d’un auteur belge (l’opération s’est depuis lors élargie à la bande dessinée et à l’album pour la jeunesse). D’accès gratuit et largement distribuée sur le territoire belge francophone, la collection ainsi façonnée offre un intéressant reflet de la littérature belge de ces années, et en particulier de la production de nouvelles.

Pour les 30 ans de la Fureur de lire, en 2021, vingt-deux de ces plaquettes ont été rassemblées dans un recueil, Fenêtres sur court, 400e volume de la collection « Espace Nord ». Il ne s’agit pas de la première anthologie du genre parue dans la collection patrimoniale. Celle-ci avait en effet précédemment accueilli Nouvelles belges à l’usage de tous, florilège établi par René Godenne, reprenant des nouvelles parues depuis les débuts de la Belgique jusqu’à nos jours.

D’autres recueils collectifs rassemblent quant à eux des nouvelles spécialement écrites pour l’occasion. Les éditions françaises Magellan & Cie ont intégré à leur collection de recueils de nouvelles de différents pays et régions un Nouvelles de Belgique. Il rassemble des textes courts d’auteurs dont plusieurs pratiquent surtout la littérature dite de genre (polar, thriller, SF…) : Patrick Delperdange, Kenan Görgün, Katia Lanero Zamora, Nadine Monfils, Aiko Solovkine et la traduction d’une nouvelle de l’Équatorien Alfredo Noriega. Plusieurs de ces auteurs ont contribué au recueil Bruxelles noir, dirigé par Michel Dufranne pour les éditions Asphalte. Contrairement au précédent, ce livre se revendique de la littérature noire. Les textes sont signés Barbara Abel, Emilie de Béco, Paul Colize, Jean-Luc Cornette, Patrick Delperdange, Kenan Görgün, Edgar Kosma, Katia Lanero Zamora, Nadine Monfils, et l’auteur néerlandophone Bob Van Laerhoven.

 

PARCOURS DE NOUVELLISTES

On l’a dit : la nouvelle est un genre marqué à la fois par une proximité, réelle ou supposée, avec le roman et par sa précarité économique. Conséquence directe : peu d’auteurs sont des nouvellistes purs, la plupart pratiquant aussi d’autres genres littéraires, et singulièrement le roman. Examen du parcours de quelques nouvellistes actuels.

 

Nouvellistes exclusifs ou à titre principal

Malgré les difficultés liées au genre, certains auteurs pratiquent la nouvelle de manière privilégiée ou même exclusive. C’est le cas des autrices Dominique Costermans et Agnès Dumont et de l’auteur Tristan Alleman

Écrivain discret, Tristan Alleman explore avec constance les possibilités de la forme (très) brève, aux confins de la poésie et de la nouvelle. Travaillant avec différentes maisons d’édition (Traverse, Le chat polaire, Le cactus inébranlable), il a obtenu le prix Gauchez-Philippot 2020 pour Fugitives (Traverse, 2018).

Dominique Costermans a publié son premier recueil de nouvelles, Des provisions de bonheur, aux éditions Luce Wilquin en 2003. Elle s’est depuis lors imposée comme l’une des grandes nouvellistes d’aujourd’hui. Elle s’est aventurée une seule fois sur le terrain du roman avec Outre-mère (Luce Wilquin, 2017), restant fidèle au genre court. Si la majorité de son œuvre a été publié chez Luce Wilquin, deux recueils ont paru chez Quadrature (Petites coupures et En love mineur) et un autre chez Weyrich (Les petits plats dans les grands). L’autrice saisit des instants de vie, y évoque l’enfance et le passé, entre nostalgie et humour.

Toute l’œuvre de nouvelliste d’Agnès Dumont a été publiée chez Quadrature. Depuis Demain, je franchis la frontière (2008), ce sont cinq recueils qui ont vu le jour. L’autrice a exploré les terres du roman policier, avec Le gardien d’Ansembourg chez Luc Pire et Une mort pas très catholique, Neige sur Liège puis Le trou du diable tous trois co-écrits avec Patrick Dupuis chez Weyrich. La nouvelle reste toutefois son genre de prédilection et lui a notamment valu le prix Georges Garnir 2011 de l’Académie royale de langue et littérature françaises de Belgique pour J’ai fait mieux depuis.Thierry Horguelin est lui aussi un adepte de la nouvelle. Il travaille tantôt l’écriture à contrainte, tantôt la littérature de genre (fantastique, policier…), jouant avec les références littéraires. Parmi ses recueils : Le voyageur de la nuit (L’oie de cravan, 2005), La nuit sans fin (L’oie de cravan, 2009).

Auteur de trois recueils publiés aux éditions du Tripode (Les pas perdus, 2018, L’éternité, brève, 2019 et Après l’éternité : postcombustion, 2022), Étienne Verhasselt semble lui aussi avoir trouvé sa manière dans la nouvelle.

 

De la nouvelle au roman

Étant donné le rapport de force entre le roman et la nouvelle, on ne s’étonnera pas que plusieurs auteurs qui ont commencé par la nouvelle soient ensuite passés au roman. C’est par exemple le cas d’Aliénor Debrocq. Après deux recueils de nouvelles remarqués publiés chez Quadrature (Cruise control, 2013 et À voie basse, 2017), elle s’essaie au roman, d’abord chez Luce Wilquin (Le tiers sauvage, 2018), puis aux éditons ONLiT (Cent jours sans Lily, 2020) et, plus récemment aux éditions du Rouergue (Maison miroir, 2022)

Vincent Engel a d’abord été un auteur de nouvelles (Légendes en attente, 1993, La vie malgré tout, 1994), avant de passer au roman – non sans revenir parfois à la nouvelle (Opera mundi, Le grand miroir, 2009 ; Belgiques, Ker, 2017).

L’œuvre littéraire de Thomas Gunzig a d’abord été celle d’un nouvelliste. Son premier recueil, Situation instable penchant vers le mois d’août, date de 1993 et a paru aux éditions Jacques Grancher. Il publie encore plusieurs recueils avant de passer au roman en 2001, avec Mort d’un parfait bilingue (Au diable vauvert), qui lui vaut le prix Rossel. Il alterne alors recueils de nouvelles et romans, mais délaisse le genre court depuis 2009 et son dernier recueil Assortiment pour une vie meilleure (Au diable vauvert, 2009). De romans en nouvelles, mais aussi dans ses pièces de théâtre et ses chroniques, ce polygraphe a bâti une œuvre singulière, à l’humour corrosif et à l’imagination débridée.

 

Du roman à la nouvelle

Patrick Dupuis est l’un des rares exemples du parcours inverse. S’essayant d’abord au roman (Le conseiller, 1993, Le maître immobile, 1996), il trouve ensuite dans la nouvelle son genre de prédilection (Ceux d’en face, 2003, Nuageux à serein, 2009, et Passés imparfaits, 2012). Il s’est toutefois récemment replongé dans le roman (policier), en duo avec une autre nouvelliste, Agnès Dumont, pour Une mort pas très catholique (Weyrich, 2020),Neige sur Liège (Weyrich, 2021) et Le trou du diable (Weyrich, 2022)

 

Romanciers et nouvellistes

D’autres auteurs pratiquent la nouvelle et le roman simultanément. Caroline Lamarche, Michel Lambert, Jacques Richard et Liliane Schraûwen passent du roman à la nouvelle et de la nouvelle au roman, qui pratiquant un peu plus l’une, qui fréquentant un peu plus l’autre. Leur travail est également reconnu dans les deux genres.

Caroline Lamarche façonne depuis une trentaine d’années une œuvre où le roman voisine avec la nouvelle. Dans le domaine de la nouvelle, précisément, elle explore les différentes formes du genre. Son premier livre est un recueil de nouvelles : J’ai cent ans, paru chez L’âge d’homme en 1995. Son deuxième livre, Le jour du chien (Minuit, 1996) se lit aussi bien comme un roman construit sur une série de variations que comme un recueil de nouvelles. Il vaut à l’autrice le prix Rossel. Dans la maison un grand cerf (Gallimard, 2017, prix triennal de prose de la Fédération Wallonie-Bruxelles) se structure également comme un ensemble de variations – plaçant l’ouvrage entre le récit et le recueil de nouvelles. Dans un recueil de facture plus classique, Nous sommes à la lisière (Gallimard, 2019), Caroline Lamarche évoque au plus près la condition animale et son rapport à l’humanité. L’ouvrage a été salué par le Goncourt de la nouvelle.

Après un premier recueil de nouvelles, De très petites fêlures, paru en 1987 (L’âge d’homme), Michel Lambert a publié un roman, Une vie d’oiseau, qui lui a valu le prix Rossel. Il a ensuite pratiqué les deux genres, s’adonnant principalement à la nouvelle depuis les années 2010. L’auteur travaille essentiellement la nouvelle-instant ; il saisit ses personnages dans un moment de mélancolie, ou lors d’une rencontre inattendue, qui font resurgir toute leur histoire et les laissent prêts à basculer.

Après deux récits parus aux éditions Albertine, La plage d’Oran (2010) et Petit traitre (2012), l’écrivain et plasticien Jacques Richard est passé à la nouvelle et a publié deux recueils aux éditions Zellige : L’homme peut-être (2014) et Scènes d’amour et autres cruautés (2015), qui laissent parler tout son talent de styliste. Il revient ensuite au roman. En 2020, il passe à nouveau au format court avec Nues (Onlit) avant de revenir au roman (La course, Onlit, 2022)

Autrice d’essais et de livres pour la jeunesse, Liliane Schraûwen est aussi et surtout romancière et nouvelliste. Depuis le début des années 1990, elle pratique les deux genres parallèlement. Publiées aux éditions Luce Wilquin (Instants de femmes, 1997 ; Le jour où Jacques Brel…, 1999), chez Quadrature (Race de salauds, 2005), M.E.O. (Ailleurs, 2015 ; Exquises petites morts, 2020) ou Zellige (À deux pas de chez vous, 2016), ses nouvelles déclinent tantôt une veine fantastique, tantôt une thématique érotique, tantôt encore des faits divers.

À ces quelques exemples, on pourrait encore ajouter celui de Jacques De Decker (1945-2020). Bien qu’ayant surtout écrit pour le théâtre – des œuvres originales, des adaptations et des traductions, il a pratiqué la nouvelle et le roman à parts égales et simultanément. Son dernier recueil de nouvelles, Modèles réduits, quintessence de son art de nouvelliste, a été publié en 2010 à La Muette.

 

Nouvellistes occasionnels

Plusieurs romanciers pratiquent occasionnellement la nouvelle, comme une sorte d’à-côté de leur œuvre. Amélie Nothomb indique n’écrire des nouvelles qu’à l’occasion de commandes[4]. La plupart de ces textes sont disséminés dans des recueils collectifs ou revues. Un seul recueil personnel a été publié, Brillant comme une casserole, paru chez l’éditeur belge La Pierre d’Alun (avec des illustrations de Kikie Crêvecoeur), alors que ses romans sont publiés aux éditions Albin Michel. La situation d’Armel Job est assez similaire. Alors que ses romans paraissent chez Robert Laffont, son recueil de nouvelles Sept histoires pas très catholiques a été publié aux éditions Weyrich, dans la collection « Plumes du coq ».

Publié chez Albin Michel comme Amélie Nothomb, Éric-Emmanuel Schmitt est principalement romancier et auteur de théâtre. Les nouvelles sont plus rares dans son œuvre, mais ses recueils sont publiés chez son éditeur principal, et semblent donc s’inscrire davantage dans le continuum de son œuvre (Odette Toulemonde et autres histoires, 2006 ; La rêveuse d’Ostende, 2007 ; Concerto à la mémoire d’un ange, 2010 ; Les deux messieurs de Bruxelles, 2012 ; La vengeance du pardon, 2017). Bien que nouvelliste occasionnel, Schmitt a remporté le Goncourt de la nouvelle en 2010 pour Concerto à la mémoire d’un ange.

Romancier, Grégoire Polet a publié à ce jour deux recueils de nouvelles : Soucoupes volantes (2021), paru chez Gallimard comme son œuvre romanesque, et un volume de la collection « Belgiques » des éditions Ker. Soucoupes volantes lui a valu le prix de la nouvelle – Ville d’Ottignies Louvain-la-Neuve, dont il est ainsi devenu le tout premier lauréat. Interviewé à l’occasion de ce prix, l’auteur a commenté la différence entre roman et nouvelles dans son œuvre : « C’est très différent d’écrire une nouvelle, c’est une joie plus rapide, plus intense. Mais j’aime beaucoup le roman : on peut avoir plusieurs amours. […] [La nouvelle et le roman] C’est une autre disposition d’esprit, presque une autre discipline. C’est comme si on monte sur un ring de boxe ou un terrain de foot, ce n’est pas la même chose. Sur le terrain de foot, tu sais que tu vas jouer longtemps, tu te prépares pour un truc de longue haleine. Sur le ring de boxe, c’est à la vie à la mort en quelques minutes »>[5]

Geneviève Damas est tout d’abord une autrice de théâtre. Elle est venue au roman en 2011, avec Si tu passes la rivière (Luce Wilquin). Un genre qu’elle n’a cessé de pratiquer depuis lors (tout en publiant encore du théâtre). Après le succès de son premier roman (prix Rossel, prix des Cinq continents de la francophonie), elle a publié un unique recueil de nouvelles, Benny, Samy, Lulu et autres nouvelles (Luce Wilquin, 2014).

Quant à Antoine Wauters, il a commencé par la poésie avant de se tourner résolument vers le roman, passant pour l’occasion des éditions Cheyne aux éditions Verdier. Après plusieurs romans salués par la critique (Nos mères, 2014, Pense aux pierres sous tes pas et Moi, Marthe et les autres, 2018, Mahmoud ou la montée des eaux, 2021), il s’octroie un détour par le recueil de nouvelles au début de l’année 2022 avec Le musée des contradictions (éditions du Sous-sol), avec une reconnaissance immédiate puisque le livre lui a valu le Goncourt de la nouvelle 2022.

Un seul recueil aussi pour les romanciers Christopher Gérard (Osbert et autres historiettes, L’âge d’homme, 2014) et Xavier Hanotte (L’architecte du désastre, Belfond, 2005), qui sont ensuite revenus au roman, confirmant qu’il est leur forme de prédilection.

 

* * *

La nouvelle est aujourd’hui un genre assez méconnu et peu prisé du grand public. Elle est pourtant pratiquée par de nombreux auteurs qui assurent la diversité et le renouveau du genre. Ils sont soutenus par quelques maisons d’édition qui s’aventurent avec conviction sur ce terrain « de niche ».


[1] Cahiers Simenon 6. Le Nouvelliste et le conteur, 1993, p. 39, cité dans René Godenne, « Petit sottisier de la nouvelle », URL : http://renegodenne.be/?p=712

[2] Éric-Emmanuel Schmitt, Concerto à la mémoire d’un ange, Paris, Albin Michel, 2010, p. 209.

[3] Pascal Durand et Tanguy Habrand, Histoire de l’édition en Belgique XVe-XXIe siècle, Bruxelles, Les Impressions nouvelles, 2018, p. 511.

[4] « Amélie Nothomb : de la musique avant toute chose », dans Le Carnet et les Instants n° 196, octobre-décembre 2018, URL : https://le-carnet-et-les-instants.net/archives/amelie-nothomb-de-la-musique-avant-toute-chose/

[5] Les « Soucoupes volantes » dans le firmament de la nouvelle », propos recueillis par Jean-Claude Vantroyen, dans Le Soir, 12/10/2021, URL : https://www.lesoir.be/400071/article/2021-10-12/les-soucoupes-volantes-dans-le-firmament-de-la-nouvelle

 


© Nausicaa Dewez, septembre 2020 (article mis à jour en janvier 2023)

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Le fantastique en Belgique

Par administrateur,
Le fantastique en Belgique

 © Romain Renard

Doit-on parler de fantastique belge ou de fantastique en Belgique ? Autrement dit, y a-t-il suffisamment de caractères propres à ce qui s’écrit en Belgique dans l’esprit de la littérature de l’étrange pour que l’on puisse la distinguer de ce qui se fait dans les domaines littéraires étrangers ? Et le genre est-il significativement plus représenté en Belgique ? La question divise les commentateurs.

Convenons ici d’une définition minimale : le fantastique est un art à la limite du réalisme, où se pose la question du surnaturel, celui-ci intervenant dans le réel le plus souvent de façon terrible. Une hésitation du personnage et du lecteur quant au sens des événements est un autre critère déterminant.

 

Affiche de l’exposition Fantastique Jean Ray, en 2019 à la Maison Autrique | © E. Schréder – Maison Autrique

Comment expliquer l’efflorescence du genre en Belgique ? Certains pointent la situation particulière de l’institution littéraire belge, en périphérie du domaine français. Ne pouvant pas prétendre facilement à une place dans les genres et les pratiques reconnues comme légitimes en France, les créateurs belges se seraient tournés vers des genres à moins grande légitimité et moins valorisés, comme le fantastique ou la littérature policière. Néanmoins, cette affirmation, si elle paraît en partie fondée, doit être relativisée, car elle ne prend pas en compte que la plupart des écrivains ne se sont pas illustrés que dans le fantastique. Cette tendance serait renforcée par le fait que le Belge et singulièrement l’écrivain vit un problème d’identité qui l’empêcherait de s’affirmer légitimement. Il est vrai que la question de l’identité nationale et culturelle se pose avec insistance jusqu’à nos jours et le questionnement sur l’identité est central dans le fantastique. Des commentateurs insistent en outre sur le fait qu’un certain nombre d’écrivains de l’étrange sont des Flamands francophones ou sont marqués par la culture flamande, accentuant cette fragilité identitaire.

 

AVANT LE FANTASTIQUE

S’épanouissant au XXe siècle, le fantastique est relativement tardif en Belgique, par rapport à la France ou au domaine anglo-saxon. Cela s’explique par les conditions de son émergence ; les caractéristiques propres de la vie littéraire belge au XIXe siècle ont joué un rôle dans le développement ultérieur du fantastique.

La fin du XIXe siècle en Belgique voit l’efflorescence d’un riche courant symboliste. Ce symbolisme postule l’existence d’une dimension supérieure, surnaturelle, que l’art doit faire entrevoir. Les symbolistes belges sont fortement influencés par le romantisme allemand et sa propension à la suggestion du surnaturel et du fantastique. Ainsi, Maurice Maeterlinck (1862-1949) évolue de l’évocation suggérée d’une dimension supérieure à la concrétisation de celle-ci qu’il explore par le biais de recherches ésotériques. L’on ne peut cependant pas parler de fantastique, en l’absence d’interaction de cette dimension avec la réalité et de doute sur l’explication.

À la même époque, dans la volonté de contribuer à construire un sentiment d’unité nationale, d’autres écrivains vont s’intéresser au folklore et recueillir le fond légendaire de nos régions. Ces légendes font une large place au merveilleux et aux superstitions, mais ne relèvent pas à proprement parler du fantastique, ces croyances étant acceptées sans qu’elles ne mettent en cause le réel. Elles ont cependant contribué à mettre à la disposition des futurs fantastiqueurs un état d’esprit ainsi que des situations narratives et des thèmes. Elles alimentent aussi une littérature fantastique populaire dont certains écrivains s’inspireront.

Paradoxalement, et c’est là sans doute une réelle spécificité, le réalisme tel qu’il se développe en Belgique va avoir une influence marquante. Dans leur volonté de créer une identité littéraire belge, de nombreux écrivains vont vouloir développer une langue particulière, un français différent de celui pratiqué en France. Cette langue se caractérise par une exubérance verbale, par une propension à l’hyperbole et à l’exagération et par la création d’images fortes. Ces formules pourront être prises au pied de la lettre et ce qui n’était qu’image pourra devenir réalité tangible, ouvrant la voie à une littérature du paroxysme, tant dans la perception que dans l’expression.

Sur ce terreau vont se développer deux façons de concevoir le fantastique, l’un classique, « extérieur », représenté par Jean Ray et l’autre plus intérieur, le « fantastique réel », assumé par Franz Hellens.

 

JEAN RAY ET LE FANTASTIQUE « EXTERIEUR »

Jean Ray (1887-1964) est marqué par les auteurs anglo-saxons, H.-G. Wells, Edgard Allan Poe ou Arthur Conan Doyle, auteurs reconnus pour lesquels le fantastique n’est pas un genre mineur, mais bien une part légitime de leur production ; il est aussi influencé par le « merveilleux scientifique » tel qu’il se développe en France. Il a l’ambition de s’imposer dans le domaine français en proposant un fantastique au niveau littéraire exigeant. En témoigne son premier recueil, Les contes du whisky (1925), où il mène des expériences narratives originales. Le livre est bien accueilli mais une condamnation judiciaire va discréditer l’auteur. S’il connaît deux retours en grâce, dans les années 40 et au début des années 60, il sera cependant toujours contraint de se partager entre une production alimentaire et une production plus littéraire, les deux s’influençant. Il publie sous de nombreux pseudonymes, dont celui de John Flanders. Les années 40 voient la publication de textes majeurs, comme Malpertuis, Le grand Nocturne et Les cercles de l’épouvante.

1943 – Première édition

Son fantastique est qualifié d’« extérieur », c’est-à-dire que le monde réel est brutalement marqué par l’irruption dramatique de manifestations surnaturelles qui se révèlent toujours violentes et terribles. Les personnages, souvent marqués par une culpabilité même légère, ne survivent pas à cette confrontation. Ils doutent autant d’eux-mêmes que de leur vision des manifestations étranges. Mais aussi, les catégories habituelles de la perception sont perturbées : temps et espace sont bouleversés, les distinctions entre humain, animal, végétal et minéral vacillent. Cette confrontation au surréel s’accompagne généralement de sentiments de peur ou d’épouvante, dont Ray fait une sorte de mystique.

Sa conception du fantastique s’appuie également sur des croyances populaires héritées du folklore (les loups-garous, fantômes et autres) et sur des superstitions héritées de la religion catholique (le chapelet, les exorcismes, etc.). Sa vision du monde repose sur l’idée qu’il existe une loi divine supérieure qui interdit de comprendre la dimension surnaturelle et surtout de raconter, sous peine d’un châtiment définitif. Les narrateurs sont donc contraints de mettre en œuvre des procédures pour raconter quand même ce qui ne peut être dit selon le prescrit divin. Jean Ray va ainsi multiplier les variations sur l’acte de dire qui permettent d’éluder la responsabilité du locuteur. Son fantastique comporte aussi un aspect scientifique : il prend en compte de nouvelles théories physiques, telles que celles d’Albert Einstein sur la relativité et l’existence d’une quatrième dimension – qu’il interprète cependant à sa manière. Mais il s’inspire aussi des recherches ésotériques plus spéculatives de Maeterlinck, par exemple, sur la vie de l’espace.

Le style de Jean Ray use de l’hyperbole et de la redondance, s’amusant de mots rares. Cette rhétorique de l’excès cadre cependant parfaitement avec son projet littéraire. Il possède le sens du détail pertinent et, surtout peut-être, il étonne par la très grande richesse et la complexité de ses réseaux d’images qui donnent une épaisseur à ses textes.

Ici, un exemple du style particulier de Jean Ray avec la nouvelle fantastique Le gardien du cimetière (extrait des Contes du Whisky)

Après un éloignement de la scène littéraire suite à ses ennuis judiciaires, Jean Ray resurgit pendant la Deuxième Guerre mondiale. Les frontières étant coupées avec la France, une production nationale se développe où Ray peut jouer de l’intérêt renouvelé pour le fantastique. Après la guerre, il connaît à nouveau une éclipse avant de resurgir sur le devant de la scène au début des années 1960. Les éditions Marabout créent une collection de textes fantastiques et une dynamique se développe autour de son nom et de la littérature de l’étrange. Plusieurs auteurs belges y sont édités ; si on a parlé à ce moment d’une école belge de l’étrange, peut-être s’agissait-il surtout d’une convergence éditoriale.

Les textes de Jean Ray, édités par Marabout

Jean Ray est sans conteste l’auteur fantastique belge le plus reconnu internationalement, souvent repris dans des anthologies ou cité dans des études. Malgré cette reconnaissance, en partie posthume, son œuvre n’a plus été disponible durant un long temps. Elle est aujourd’hui largement rééditée.

Trop particulier sans doute, Jean Ray n’a pas eu vraiment d’héritier. Seul Thomas Owen, qu’il a protégé à ses débuts, peut lui être rapproché.

 

Le fantastique chez Thomas Owen (1910-2002) repose pour une grande part sur la peur, et ce n’est pas par hasard que Jean Ray insiste sur cet aspect dans sa préface au premier recueil d’Owen. Elle peut surgir à tout moment, d’un évènement insignifiant qui oblige à regarder avec des yeux nouveaux qui se remplissent alors d’effroi. Cette apparition de la peur repose le plus souvent sur une banale transgression dans la loi du quotidien, à l’image du personnage qui désobéit à la consigne pourtant bien légère de ses parents et qui rencontre l’impossible et l’horreur dans l’escalier (« Cérémonial nocturne »).

 

Thomas Owen reprend les grands thèmes classiques (coïncidences tragiques, métamorphoses, vampires, démons) pour les actualiser dans des situations quotidiennes. Il accorde une place déterminante aux animaux, convoquant dans ses textes une faune variée, souvent effrayante, presque toujours tragique ; des liens implicites se créent entre humains et animaux, le destin des uns devenant celui des autres (« Père et fille »).

 

HELLENS ET LE « FANTASTIQUE RÉEL »

Après des livres marqués par le symbolisme et deux ans avant Jean Ray, Franz Hellens (1881-1972) publie un recueil de nouvelles, Réalités fantastiques (1923). Il théorise sa démarche bien plus tard dans l’essai Le fantastique réel (1967)

Le fantastique réél De Franz Hellens

Essai de Franz Hellens sur le fantastique

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Pour lui, l’aspect étrange ou mystérieux auquel le personnage et l’auteur lui-même sont confrontés ne provient pas d’une manifestation extérieure, il se situe au cœur même du réel qui révèle ainsi des failles. Hellens va donc traquer les méandres de la conscience dans sa perception du monde. Point d’entités surnaturelles, ni de diables, parfois des infractions aux lois naturelles, mais qui trouvent leur source dans l’altération de l’expérience du personnage (« Le double », par exemple). Le rêve, très présent chez Hellens, est également un facteur de transformation du réel et d’apparition d’illusions. (Un de ses premiers romans, Mélusine (1920), qui ne relève pas du fantastique repose tout entier sur les modifications de perception dans le rêve.)

Mélusine ou la robe de saphir de Franz Hellens

Son fantastique « intérieur » part du réel pour aboutir au surnaturel. À partir de situations banales, mais où se produit une modification légère et fortuite, ces personnages vont « dériver ». Comme celui qui suit la grand route : « À peine m’y étais-je engagé et déjà égaré ! ». Ils vont alors percevoir des choses inhabituelles et étranges mais qui ne sont finalement que l’émanation d’eux-mêmes. Dans cette optique, le double est essentiel pour Hellens, car cette confrontation révèle une autre vérité à propos de soi-même, qu’il s’agisse d’une part insoupçonnée de soi ou la confrontation à un autre semblable à soi, et que cette manifestation soit réelle ou hallucinatoire. Hellens revisite aussi des thèmes plus classiques en les réinterprétant dans l’optique du fantastique intérieur, tel celui de la réincarnation. Sa manière se caractérise par la création d’atmosphère, marquée par la lente notation des perturbations de la conscience des personnages. Cela débouche cependant souvent sur une tendance à l’hyperbole des sentiments et à l’exagération des descriptions des états d’esprit : les sens exacerbés et les nerfs tendus sont des images récurrentes. Faut-il y voir le signe d’une tendance à la parodie ?

Comme Jean Ray, Franz Hellens n’a pas à proprement parler fait école. Mais peut-être peut on voir un prolongement de sa démarche dans l’efflorescence ultérieure du réalisme magique. On peut néanmoins rapprocher de lui Marcel Thiry.

 

La question du temps taraude Marcel Thiry (1897-1977) à l’image de son roman qui relève plus de la science-fiction, Échec au temps (1945), où il refait l’Histoire, imaginant que Waterloo aurait vu la victoire de Napoléon. Le temps, c’est-à-dire le fragile passage entre passé, présent et futur, est un des thèmes récurrents de ses Nouvelles du Grand Possible (1960). « Simple distance » montre finement la relativité du temps pour des personnes placées dans des situations différentes : le passé de l’une est encore le futur pour une autre. Outre les constructions fines et maîtrisées de ses nouvelles, Thiry se singularise par une langue d’une grande clarté, d’un classicisme très subtil, comme on l’imagine de la part du grand poète qu’il est.

 

DES FIGURES ISOLEES

Surtout connu comme dramaturge, Michel de Ghelderode (1898-1962) a publié, tardivement, un unique recueil de nouvelles fantastiques, Sortilèges et autres contes crépusculaires (1941), où l’on retrouve les thèmes et les obsessions de son théâtre, la familiarité du surnaturel et de l’effroyable, son angoisse du Mal, la présence obsédante de la mort souvent personnifiée, l’apparition du diable, les images de monstruosités et d’engluement.

Sortilèges, édité chez Marabout

S’il est des manifestations potentiellement terrifiantes, elles proviennent d’abord de la perception subjective du personnage narrateur. Celui-ci assiste à une forme de lente concrétisation de sa peur et à la réalisation qu’il croit effective de ses fantasmes ; les monstruosités ne sont pourtant que l’expression de ses obsessions. Si le mannequin de cire de « L’écrivain public » paraît être plus qu’un mannequin, c’est que le narrateur imagine que cette cire dont il était fait « restait une matière étrange » et lui autorisait dès lors toutes les hallucinations. La dimension carnavalesque, familière à Ghelderode, accentue le gigantesque et le monstrueux. Sa langue fait la part belle à l’excès et à l’hyperbole de la laideur. Il apparaît ainsi à la croisée des deux chemins du fantastique. Il s’est lié d’amitié avec Jean Ray à la fin de sa vie, partageant avec lui le goût de l’expression haute en couleurs ainsi qu’un imaginaire marqué par la Flandre. Mais sa conception de l’apparition de l’étrangeté le rapproche du « fantastique réel » d’Hellens.

 

Robert Poulet (1893-1989), dans son premier roman, Handji (1931), part aussi de l’idée que la perturbation du réel vient d’une modification de la conscience. Pour tromper l’ennui de la vie au front, deux officiers imaginent une femme fascinante qui vivrait avec eux. Leur puissance d’évocation et même d’hallucination fait le reste. Peu à peu cette femme semble prendre corps et existence au point d’interférer avec la réalité. Contraint à l’exil pour fait de collaboration, Poulet disparait de la scène littéraire belge.

 

Gérard Prévot (1921-1975) vient tardivement au fantastique et impose une voix originale dans quatre excellents recueils : Le Démon de février (1970), Celui qui venait de partout (1973), La Nuit du Nord (1974) et Le Spectre large (1975).

Gérard Prévot

On a pu qualifier son fantastique de « métaphysique », dans la mesure où priment ses questionnements sur le sens de l’existence ; l’aspect fantastique n’est qu’un moyen particulier de partager autrement ses inquiétudes. Les thématiques reprises à la littérature de l’étrange servent d’abord à illustrer des ambitions, des rêves, des injustices, commis au quotidien. Des personnages approchent la frontière de l’indicible et de l’interdit ; d’autres ne peuvent échapper à une malédiction. Mais certains trouvent à la fréquentation du surnaturel, un apaisement et un sens à leur existence (« L’Horloger de Rumst »). Les nouvelles présentent des destins qui peuvent être sereins même si les personnages sont confrontés à l’inéluctable mouvement vers la mort. L’un d’eux ne dit-il pas : « Je suis mort de cette mort prématurée qu’est la vie » ?

Prévot est aussi un pourfendeur des injustices sociales, de celles faites aux plus faibles, les enfants et ceux accusés à tort. Le manque d’humanité est la faute capitale et amène à devoir rendre des comptes terribles. L’Histoire contemporaine s’invite aussi dans ses textes. Mais Gérard Prévot manie également l’humour, jouant parfois avec les thèmes et les codes du fantastique. Tout cela dans un style sobre, élégant, sans excès de rhétorique, mais avec une manière de dire finement en quelques mots ce qu’il est parfois si difficile de dire : « Cet instant-là était d’une extraordinaire beauté – fait de rien d’ailleurs, de trois fois rien : le passage d’un moment de nuit sur une parcelle du monde » (« L’Horloger de Rumst »).

 

LE FANTASTIQUE AU FÉMININ 

Dans son essai, Le fantastique féminin (1984), Anne Richter constate que les femmes imposent un ton particulier au fantastique et singulièrement en Belgique. Selon elle, « affrontées depuis toujours à l’éternel illogisme des êtres et des choses, elles [les femmes] ont en quelque sorte appris à l’apprivoiser (…) les femmes pénètrent de plain-pied, sans discussion et sans orgueil, dans le surnaturel dont l’existence leur semble constituer, a priori, une incontestable évidence ».

 

Monique Watteau (1929) privilégie la métamorphose et la transgression des distinctions entre humain, végétal et animal. En témoignent les titres de ses livres, La colère végétale (1954), La nuit aux yeux de bête (1956) et L’ange à fourrure (1958).

 

Ce passage d’un règne à l’autre apparaît comme un signe non de déchéance mais de richesse, le vivant pouvant trouver des virtualités dans chacun des règnes. Même si les rencontres tournent parfois en confrontation, par exemple lorsque des fleurs attaquent la femme dans les bras de son amant.

 

Anne Richter (1939-2019) est aussi autrice, fascinée par les animaux et la proximité de ceux-ci avec les humains. Chez elle, le mystère et le surnaturel surviennent sans artifice ni surprise, car ils sont des composantes normales de l’existence humaine et ce serait une perte que de l’ignorer.

 

UNE CERTAINE DISTANCIATION

Le fantastique repose sur la nécessaire adhésion du lecteur. Sans un minimum de disponibilité de la part du lecteur et surtout sans l’acceptation de certains présupposés de base, comme le postulat d’une dimension inconnue et peut-être surnaturelle, le texte fantastique ne produit pas d’effet. Il repose aussi sur un certain nombre de thématiques et de manières de conduire le récit, impliquant en priorité d’insinuer le doute et de laisser l’explication ouverte. Les virtualités du genre ne sont cependant pas infinies ; à un moment, le genre ne possède plus la force de persuasion nécessaire. Des auteurs vont alors être tentés d’utiliser les thèmes et les ressources narratives pour en jouer, pour mettre l’accent sur les codes du genre et les exhiber dans un but qui n’est cependant pas que ludique.

 

C’est le cas de Marcel Mariën (1920-1993), une des figures de proue du surréalisme littéraire en Belgique, grand pourfendeur d’idées reçues, grand critique de tous les systèmes de pensée. Le fantastique lui apparaît comme un grand réservoir de croyances et de thèmes divers, de lieux communs qu’il va démonter et revivifier, dans son seul recueil fantastique, Les fantômes du château de cartes (1981), dont l’humour du titre indique déjà le projet. De grands thèmes sont ainsi passés à la moulinette de son ironie et de sa cruauté : une servante assassinée dans un château d’Écosse devient « le premier fantôme prolétaire et surexploité » ; le riche oncle exige de ses héritiers d’être mangé par eux, concrétisant de cette façon ses rêves de métempsycose.

 

Jacques Sternberg (1923-2006) est profondément habité par le sentiment de l’absurdité de la vie. Cette absurdité se résume pour lui dans l’expression « métro-boulot-dodo » qui est un cauchemar parce que c’est la vie même des gens. Il va donc dénoncer les absurdités qu’il découvre, les rendre sensibles dans des contes fort brefs, drôles, grinçants. Il traverse la distinction des genres, mêlant fantastique et science-fiction dans des contes qui font la part belle à l’irrationnel. Pour lui, « un fantôme, même dégoulinant de sang ou pourri de vers, c’est très rassurant, il est encore vivant outre-tombe, donc tout va bien ». Le vrai cauchemar effrayant, c’est la vie de tous les jours de l’ouvrier et de l’employé dans un contexte aliénant.

 

Le fantastique n’occupe qu’une place limitée dans la production très diversifiée de Gaston Compère (1924-2008). Il obtint le prix Jean Ray pour La femme de Putiphar (1975). Son œuvre se caractérise par l’humour et un aspect farcesque. La femme de Putiphar reprend le thème du diable en y insufflant un traitement fait de drôlerie et de burlesque, dans une langue qui privilégie l’expression forte et l’inventivité verbale. Compère part de situations banales pour inverser le point de vue : s’il y a une salle de classe, c’est une classe de jeunes démons et l’intrus y est une créature étrange en laquelle on reconnaît un homme. L’humour côtoie l’effrayant.

 

Avec beaucoup d’ironie, qui est une de ses caractéristiques majeures, Jean Muno (1924-1988) revendique un fantastique « de moyen standing ». Il part de réalités banales d’un quotidien très années 50 et 60 : de petites choses apparemment sans grand intérêt se produisent, par exemple dans un quelconque café. Mais,… Et le quotidien bascule, sans excès d’images ou d’expression, vers quelque chose de totalement autre, qui ne nécessite pas d’explications (Histoires singulières, 1979). Le fait étrange se suffit à lui-même. Ses personnages évoluent dans des milieux petits-bourgeois. Comme le dit l’un d’eux : « Je n’ai pas eu la chance de rencontrer le comte Dracula, moi ! Je ne peux témoigner que des vampires bourgeois que j’ai côtoyés. » Ce qui n’empêche pas Muno de s’emparer de thèmes classiques du fantastique pour les banaliser, les embourgeoiser, avec une solide dose de parodie. Ainsi, dans « La voix du sang », une dame très altruiste se désole de la mort par anémie de ses protégés. L’on comprend la nature de son intérêt pour autrui et la cause de leur mort, lorsque l’on apprend son patronyme, Bathory, et que s’explique de cette façon son goût pour les « bécots sangsuels » et leurs conséquences funestes. Jean Muno peut se montrer tendre et positif, imaginant une réconciliation avec le fantastique qui devient alors un des éléments du plaisir d’exister, comme dans la nouvelle « Le larech » (Histoires griffues, 1985).

 

AUJOURD’HUI

À partir des années 1980, les auteurs se font plus rares, peut-être parce que le fantastique se confond pour le grand public avec le « gore » et le sanglant et que les auteurs belges ont depuis longtemps abandonné cette veine ; peut-être aussi par manque d’éditeurs. Alain Dartevelle (1951-2017) plaide alors de « mettre à mal la logique des genres », lui-même mêlant la science-fiction et la politique-fiction et y insufflant une part de fantastique (Script, 1989).

 

Plus récemment, s’est imposé le nom de Bernard Quiriny (1978), Belge de France, dont l’imagination prend en partie sa source dans ses origines belges. Son fantastique s’inscrit résolument dans les réalités du monde moderne, où insidieusement des choses basculent. Il en décrit les conséquences extrêmes, comme par exemple la lutte du béton contre les humains (L’affaire Mayerling, 2018). Ses contes marqués par l’absurde, dans des recueils très construits, témoignent d’un aspect borgésien, jouant finement sur les paradoxes (Contes carnivores, 2008).

 

Jean-Baptiste Baronian (1942) occupe une place à part dans cette constellation du fantastique. D’abord pour le rôle qu’il y a joué. Éditeur chez Marabout, il a été à la base de la collection de livres fantastiques, y a amené des auteurs qui ont été par là révélés et a créé le Prix Jean Ray. Il est aussi un historien du genre et un essayiste, par son anthologie La Belgique fantastique avant et après Jean Ray (1975) et ses études Un nouveau fantastique : esquisses sur les métamorphoses d’un genre littéraire (1977) et Panorama de la littérature fantastique de langue française (1978, réédité en 2007).

La Belgique fantastique

Auteur prolifique, dans des genres variés, il a produit quelques textes d’inspiration fantastique, par exemple Histoires fantômes (2003). L’étrange se manifeste par petites touches au sein du quotidien, provoquant une inquiétude diffuse, sans manifestation excessive de la peur. L’étrange peut aussi apparaitre dans des romans a priori non fantastiques, reposant sur des coïncidences et des inversions de situations (L’enfer d’une saison, 2013).

 

LE RÉALISME MAGIQUE

Des écrivains sensibles à l’étrangeté et à l’existence d’une dimension insoupçonnée du réel ne se retrouvaient pas dans l’esthétique et les codes du fantastique de la deuxième moitié du XXe siècle en Belgique. Ils se sont alors plutôt inspirés du réalisme magique, une esthétique proche du fantastique, qui, à cette époque était répandue en Flandre, le fantastique n’y étant pas un genre acceptable. La littérature de l’étrange s’est donc structurée là en un véritable courant littéraire, autour de Johan Daisne et de Hubert Lampo. Celui-ci va « annexer » à sa définition du réalisme magique, quelqu’un comme Jean Ray, pourtant a priori si différent de sa propre démarche. Et Paul Willems ainsi que Guy Vaes, admirateur de Jean Ray, deux Anversois francophones, étaient proches de l’anversois Lampo. Entre ces auteurs s’est établi une complicité esthétique au-delà des langues. (Lampo écrira une postface pour L’usurpateur de Guy Vaes.)

Lettre d'Hubert Lampo à Guy Vaes / crédit : Archives & Musée de la Littérature

Lettre d’Hubert Lampo à Guy Vaes | © Archives & Musée de la Littérature – ML 09033/0048

Par la suite, Xavier Hanotte, francophone bilingue, entretiendra des liens étroits avec Lampo et dans une moindre mesure avec Guy Vaes.

 

Le réalisme magique postule qu’au cœur de la réalité quotidienne peut apparaître une dimension autre, qui ne doit être comprise ni comme une manifestation surnaturelle ni comme une vérité révélée, une vérité en soi. Ce sont plutôt des liens insoupçonnés, des ressemblances et des correspondances entre éléments du réel qui donnent à percevoir cette dimension autre. Cela repose principalement sur des raccourcis dans le temps, des perceptions d’une sorte de court-circuit temporel. Les distinctions passé-présent, vivant-mort, rêve-réalité, réel-fictif deviennent poreuses.

 

Chez Paul Willems (1912-1997), une légère étrangeté vient subrepticement contaminer la réalité et petit à petit elle peut prendre corps jusqu’à rendre plausible une altération du réel, dans un état de limite ou de frontière, à l’image du titre de son premier livre, Tout est réel ici (1941). Selon les recueils ou les pièces de théâtre, cette étrangeté peut devenir acceptable et induire une logique déroutante. Dans d’autres nouvelles, c’est d’une véritable épiphanie qu’il s’agit, le sentiment d’un brusque rapprochement de deux événements éloignés qui en fait surgir le sens. Le temps peut même devenir immobile, comme dans le domaine de Grand’Rosière de Il pleut dans ma maison (1962).

 

 

Dans Octobre long dimanche (1956) de Guy Vaes (1927-2012), le temps est imprécis, non linéaire, le présent se superpose aux réminiscences qui elles-mêmes se confondent. Le personnage s’estompe petit à petit, il est comme gommé de sa réalité sociale et devra même « vérifier » s’il est mort ou vivant. Le lecteur reste dans l’équivoque et se retrouve dans un espace d’égarement et de distorsion. Les livres de Vaes se fondent ainsi sur un principe d’incertitude.

 

Chez Xavier Hanotte (1960), dans des romans d’inspiration policière ou historique, des situations « impossibles » surgissent parfois, reposant sur des raccourcis dans le temps. La perception des personnages est cependant, pour diverses raisons, momentanément altérée. Il existe donc toujours un doute sur la nature de l’événement, réel, rêvé ou relevant d’une perception exceptionnelle.

 

Paul Emond (1944), proche de Paul Willems, ne s’est jamais explicitement revendiqué de cette esthétique. Mais, de nombreuses situations dans ses romans ou son théâtre témoignent d’un doute quant à la réalité de certains événements, à l’exemple de Il y a des anges qui dansent sur le lac (2009) : est-on sur le lac ou dans un tableau, ou passe-t-on sans cesse de l’un à l’autre ? Le Royal (1998) se déroule dans un espace indécis où surgissent des personnages morts, d’autres étant dans un état d’entre-deux.

 

Il y a chez André-Marcel Adamek (1946-2011) une propension, dans certains textes, au réalisme magique, comme dans Les maitres du jardin noir (1993) où après une longue mise en place réaliste surgit un événement exceptionnel. Dans d’autres romans, il s’agit plutôt d’une acceptation et d’une intégration d’une forme de merveilleux, dans un subtil mélange de réalités contemporaines, d’éléments du passé et de situations non logiques.

 

© Joseph Duhamel, mai 2020

© Image de couverture : Romain Renard


 

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Le Prix des lycéens 2023

Par administrateur,

Dans le cadre du Prix des Lycéens, découvrez 5 entretiens filmés où les auteurs et autrices présentent leur livre, évoquent leurs sources d’inspiration et leur méthode de travail.

Alia Cardyn pour Mademoiselle Papillon
 
Zoé Derleyn pour Debout dans l’eau
Vincent Engel pour Les vieux ne parlent plus
 

 

Giuseppe Santoliquido  pour L’Été sans retour

 

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Les nouvelles parutions en jeunesse : de novembre 2022 à janvier 2023

Par David Dusart,

Les nouveautés d’hiver en littérature de jeunesse | © Nina Six

En fin d’année, les maisons d’édition pensent aux enfants. L’approche des fêtes est pour eux l’occasion de sortir quelques nouveautés.

Découvrez ici les parutions jeunesse s’étalant du 1er novembre 2022 au 31 janvier 2023.

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Protégé : Espace presse

Par administrateur,

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Les Prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022

Par administrateur,

© Elisa Sartori

Les Prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles ont été décernés le lundi 21 novembre 2022 lors d’une cérémonie au théâtre de Namur.

Voici les prix qui ont été attribués en 2022 :
– le Prix triennal de la prose en langue française de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022

Ce prix est attribué à Kenan Görgün pour son roman Le second disciple (Les Arènes)

– le Prix de la prose en langue régionale de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022

Ce prix est attribué à Daniel Barbez pour El réalité aurmintée (Maison de la Culture de Tournai)

– le Prix de la première œuvre en littérature de jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022

Ce prix est attribué à Almudena Pano pour son album jeunesse Histoire en morceaux (Versant Sud Jeunesse)

– le Prix de la première œuvre en bande dessinée de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022

Ce prix est attribué à Alix Garin pour sa bande dessinée Ne m’oublie pas (Le Lombard)

– le Prix de la première œuvre en langue française de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022

Ce prix est attribué à Emmanuelle Dourson pour Si les dieux incendiaient le monde (Grasset)

– le Prix de la première œuvre en langue régionale de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022

Ce prix est attribué à Gustave Defechereux pour Cwand m’Papa Féve dès wafes (inédit)

– le Prix Atomium – Prix de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022

Ce prix, décerné par la Fédération Wallonie-Bruxelles, fait partie des Prix Atomium. Attribué en septembre, dans le cadre du Brussels Comic Strip Festival, il récompense cette année l’autrice Émilie Plateau pour l’ensemble de son œuvre

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Quelques incontournables de la poésie belge

Par David Dusart,

Fleur de livre de Dimitri Piot © Dimitri Piot

Dans le cadre de la campagne Lisez-vous le belge 2022,  la poésie est mise à l’honneur via un carnet pédagogique présentant dix poètes et poétesses belges « incontournables ».
Réalisée en toute subjectivité, la sélection proposée tente de rendre compte de la variété formelle et thématique du paysage poétique belge des deux siècles derniers. Présenté de manière didactique, richement illustré par des documents d’archive et accompagné de capsules sonores, le dossier invite à la (re)découverte de notre patrimoine littéraire.

Les capsules sonores : 

Le dossier pédagogique :

Télécharger le dossier (PDF)

Avec l’aimable autorisation des ayants droits. Reproduction interdite et droits réservés.

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Les finalistes des prix de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Par administrateur,

Les Prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles récompensent chaque année des autrices et auteurs belges francophones actifs en littérature générale, jeunesse, bande dessinée ainsi que des autrices et auteurs écrivant dans une langue régionale de la Fédération Wallonie-Bruxelles (wallon, picard, etc).

A l’occasion de la Fête de la Fédération Wallonie-Bruxelles, nous avons le plaisir de dévoiler les finalistes en lice pour les différents prix qui seront remis cette année.

Prix triennal de la prose en langue française de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022  : les finalistes

Prix triennal de la prose en langue régionale de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022 :  les finalistes

Prix de la première œuvre en littérature de jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022 :  les finalistes

Prix de la première œuvre en bande dessinée de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022 : les finalistes

Prix de la première œuvre en langue française de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2022 : les finalistes

Les autrices ou les auteurs lauréats de chaque prix seront dévoilés lors d’une cérémonie au Théâtre de Namur, le 21 novembre 2022

 

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Panorama d’une littérature pour ados

Par administrateur,

La littérature pour ados en Belgique francophone | © Morgane Somville

Loin d’être cantonnée à un genre particulier, la littérature pour adolescents se révèle variée à souhait, tout particulièrement de nos jours, où elle propose un large éventail de sujets, d’univers et de styles. Récits fantastiques, certes, mais pas seulement. La littérature destinée aux ados touche également volontiers au roman policier, d’anticipation, humoristique, d’amour, psychologique, genres qui leur permettent d’aborder les thèmes les plus délicats ou les plus graves… avec, le plus souvent – il s’agit là d’un dénominateur commun de cette littérature -, un protagoniste de l’âge de ses lecteurs. C’est qu’il en faut pour tous les goûts afin d’atteindre ce public particulièrement volatil.

L’une des préoccupations principales qui anime cette littérature consiste à susciter l’intérêt d’une tranche d’âge spécifique, précisément celle où certains seraient enclins à abandonner la lecture qui, sous le poids de la contrainte scolaire, peut parfois sembler plus ennuyeuse ou laborieuse qu’auparavant. Sans compter que la lecture « littéraire », on le sait, se trouve parfois soumise à la rude concurrence d’autres loisirs particulièrement attractifs, internet, jeux vidéo et réseaux sociaux en tête. Pour remédier à ce risque de décrochage, auteurs et autrices, éditeurs et éditrices mais également bibliothécaires et profs rivalisent de créativité et de talent pour offrir aux jeunes une littérature faite sur-mesure et leur permettre d’y accéder comme d’y prendre du plaisir. Et force est de constater que cela marche…

À cet égard, contrairement à ce que l’on pourrait parfois penser, l’explosion de l’utilisation des écrans n’a pas que des effets négatifs. De nombreuses initiatives se sont spontanément créées sur internet. Parmi celles-ci, les réseaux sociaux de lecteurs, qui permettent à ces derniers d’échanger conseils et avis de lecture. Certains s’adressent spécifiquement aux adolescents et adolescentes ainsi qu’aux jeunes adultes. Un autre phénomène de l’ère numérique est celui des fanfictions qui constituent une manifestation intéressante sur le net. Il s’agit de communautés d’admirateurs d’un ouvrage ou d’un univers littéraire qui se rassemblent pour écrire collectivement la suite de leurs aventures favorites, s’appropriant leurs protagonistes préférés. Les livres anglo-saxons pour adolescents y sont surreprésentés, Harry Potter au premier rang. Enfin, les Booktubeurs et Booktubeuses, Bookstagrameurs et Bookstagrameuses présentent leurs lectures coups de cœur dans de courtes vidéos, publications ou « reels » accessibles en ligne. Bien loin du décrochage, ce sont de véritables passionnés qui, pour la majorité, continuent à plébisciter les bons vieux livres de papier. Pour le plus grand plaisir des éditeurs comme des lecteurs potentiels qui les suivent sur le net et commentent leurs posts.

Si de nombreux écrivains belges pour adultes sont bien connus du public, et si nombre d’illustrateurs et illustratrices pour enfants ou de bédéistes font également parler d’eux, les auteurs et autrices pour ado en Belgique francophone n’ont pas (encore, espérons-le !) leur Amélie Nothomb, leur Mario Ramos ou leur Philippe Geluck. Or, certaines et certains d’entre eux sont indéniablement des auteurs de grande valeur et nos maisons d’édition se montrent particulièrement actives dans ce domaine. Il était donc temps de réaliser un panorama (non-exhaustif) d’une littérature adressée à cette tranche d’âge et de l’activité déployée par ceux qui la portent : les éditeurs et éditrices mais aussi les auteurs et autrices dont ils prennent en charge les œuvres. Nous ne traiterons ici que des romans et nouvelles, qui constituent un champ déjà large, et il ne sera pas question de poésie, de bande dessinée ou de théâtre.

Duculot précurseur : Travelling

Mais remontons tout d’abord un peu dans le temps…

En 1972, la maison d’édition belge Duculot crée une collection de romans destinés aux jeunes de treize à seize ans. Travelling, c’est son nom, est novatrice en la matière. Nous sommes alors en pleine période d’expansion de la littérature de jeunesse. Celle-ci découvre de nouvelles voies, de nouvelles manières de s’adresser aux enfants. Certains éditeurs précurseurs s’avancent sur des chemins encore inconnus. Travelling propose aux adolescents des récits liés à des thématiques contemporaines pour « mieux se comprendre et comprendre le monde. Les ouvrages qu’elle propose allient à l’authenticité des situations un style direct et original. » C’est ainsi que Duculot définit la ligne éditoriale de sa collection.

En 1976, l’éditeur décline son catalogue pour les jeunes avec Travelling sur le futur, une sous-collection axée sur la science-fiction. En 1993, c’est chez Casterman que Travelling continue de raconter ses histoires avant de s’arrêter définitivement quelques années plus tard (la dernière parution datant de 1996).

Parmi les titres qui ont marqué les jeunes lecteurs de l’époque, on trouve Un été pour mourir (1979) de Lois Lowry et réédité en 1993 chez Casterman, Vie et mort d’un cochon (1976) de Robert-Newton Peck et réédité par Flammarion et surtout Le Robinson du métro (1978) de Felice Holman. Cet ouvrage américain, devenu culte, est disponible aujourd’hui dans le catalogue de Casterman. Il narre comment le jeune Slake, un garçon de treize ans maltraité par les siens, trouve refuge dans les profondeurs du métro new-yorkais et y mène une vie clandestine qui s’organise au fil des jours.

On trouve bien entendu parmi les publications certains auteurs belges comme Pierre Coran avec La Mémoire blanche ou France Bastia qui y a publié Le cri du hibou. Certains écrivains qui seront cités plus loin, comme Nadine Monfils ou Patrick Delperdange, y ont également été publiés.

Depuis, l’idée de proposer une littérature spécifique aux adolescents va de soi et, chez nous, quelques « petits » éditeurs (en opposition avec les grands groupes éditoriaux français qui dominent le marché du livre francophone) ont pour mission de dénicher et d’accompagner des auteurs pour continuer à offrir aux jeunes des romans attrayants et de qualité, avec comme point commun, en tout cas pour les trois dont il sera ici question, de préférer publier peu mais bien.

Alice au pays des romans

Les éditions bruxelloises Alice jeunesse ont été fondées en 2001 par Michel de Grand Ry. Cet éditeur a tout particulièrement développé, pendant toutes ces années, les axes de l’album illustré d’une part, et du roman d’autre part. La direction de la maison a été reprise en 2015 par Mélanie Roland, auparavant assistance d’édition. « Nous avons pour objectif de publier des textes qui apportent des pistes de réflexion aux jeunes lecteurs et aux adolescents, et qui leur permettent de se confronter à des problématiques actuelles, sans jamais oublier l’aspect divertissant de la lecture. », dit-elle. Cette maison d’édition, qui privilégie une politique d’auteur en suivant les siens sur le long terme et en favorisant un constant dialogue avec ceux-ci, a développé un catalogue de romans fort attrayants, qui s’étoffe d’année en année. Les collections Tertio, adressée aux treize à seize ans, Deuzio, pour les pré-ados, mais aussi les collections SF ou Fantasy, offrent un large choix de livres, écrits en français ou traduits. Pour les plus grands, la collection Chapelier Fou présente des textes plus exigeants destinés aux plus de seize ans.

Parmi les auteurs belges, la namuroise Marie Colot a publié régulièrement chez Alice depuis la parution de son premier roman, En toutes lettres, en 2012. Elle aborde des thèmes proches du vécu des jeunes qu’elle connait bien puisqu’elle les côtoie régulièrement lors de rencontres et d’ateliers de lecture et d’écriture. Ainsi, dans le roman Dans de beaux draps, elle envisage la construction identitaire sur les réseaux sociaux, la confrontation entre la vie réelle et virtuelle et le harcèlement quotidien à travers le parcours d’une jeune fille de seize ans. Les baleines préfèrent le chocolat narre l’insertion sociale chahutée d’Angelina, surnommée Burger par ses charmants camarades en raison de son embonpoint et de son penchant pour la malbouffe.

Les romans de Marie Colot traitent surtout, avec humour le plus souvent, des relations des adolescents entre eux, de la force de l’amitié, de la recherche de soi. Après sept romans pour adolescents chez Alice, auxquels se sont ajoutés des textes pour plus jeunes, ses livres, qui suscitent l’intérêt des lecteurs comme des professionnels. Son roman Eden,fille de personne, publié chez Actes Sud Junior, a reçu le Prix Libbylit du roman jeunesse belge en 2022 et a nommé pour quatre autres récompenses.

Les romans de science-fiction ou de fantastique colorent le catalogue d’Alice jeunesse de tons tout différents. La série Thomas Passe-Mondes, que l’on doit à Éric Tasset, ne compte pas moins de huit tomes. On y suit Thomas, un orphelin de quatorze ans, qui a la particularité de pouvoir franchir la frontière qui nous sépare d’un univers parallèle. Plus récemment, les deux tomes de Bâtard, écrits par Ukko, nous emmènent chez les orcs. Un jeune sans-crocs nommé Bâtard est chassé de son village et nous conduit dans un univers peuplé de nains, de gobelins mais aussi d’humains. Les deux volumineux tomes d’heroic fantasy présentent un personnage à la fois bestial et attachant et un récit plein d’action qui devrait ravir les amateurs du genre.

Autre roman d’aventure teinté d’imaginaire, Granlarge et Loncour, écrit par André Borbé, est un livre attachant. Cet auteur-compositeur, habitué au monde de la chanson et du spectacle jeune public, sait capter non seulement un auditoire, mais aussi son lectorat. Il a su créer un univers cohérent, balayé par les vents, battu par les embruns, où l’on lit avec plaisir les périples du jeune Tzoutzi.

Mijade, gardien d’un patrimoine

En 2007, la maison d’édition namuroise Mijade, fondée en 1993 par Michel Demeulenaere et publiant des albums pour petits et des romans pour grands enfants, complète son catalogue en accueillant les départements de littérature jeunesse de Memor et Zone J – Espace Nord Jeunesse. C’est un riche héritage qui rejoint à cette occasion l’éditeur namurois. À la tête des collections de littérature, Muriel Molhant édite des fictions d’autrices et auteurs contemporains. On y trouve depuis tout un répertoire d’écrivains belges francophones, dont certains reconnus en littérature pour adultes, à l’instar de Frank AndriatPierre CoranGuduleArmel JobNadine MonfilsEva Kavian ou Xavier Deutsch. Ce dernier, qui publie son premier roman en 1989 chez Gallimard, et a également vu certains de ses textes édités à L’école des loisirs, privilégie depuis quelques années Mijade.

En 2003, Tombé du camion, un récit d’anticipation et de révolte, est lu par des centaines de jeunes dans le cadre du Farniente (dont il sera question plus bas). Avec Onze !, publié en 2011, il signe un jubilatoire roman footballistique qui raconte comment un tout petit club de Flandre s’apprête à affronter l’AC Milan en demi-finale de coupe d’Europe.  Ce roman fait l’unanimité et remporte le prix Libbylit. Paru en 2019, Homme noir sur fond blanc narre le périple d’un jeune soudanais, inspiré des récits de réfugiés accueillis par l’auteur.

Nadine Monfils est écrivaine et réalisatrice, mais aussi critique littéraire. Comme beaucoup d’auteurs évoqués ici, elle n’écrit pas que des romans pour les jeunes, loin de là. Cependant, elle a publiés quatre titres chez un éditeur jeunesse, Mijade en l’occurrence (dont certains ont d’abord été édités dans la collection Travelling). Si Nickel Blues (2011) et Les fleurs brûlées (2009) paraissent de prime abord très différents, le premier ayant pour protagonistes deux ados glandeurs de notre époque alors que le deuxième se situe dans le Paris du XVIIe siècle, les deux romans ont ceci de commun qu’il s’agit, comme la plupart des livres de cette autrice de polars, de saisir l’intérêt du lecteur à la faveur d’enquêtes captivantes. Le genre est apprécié des jeunes, souvent friands de suspense, et Nadine Monfils le pratique avec un brio certain, comme en témoigne plus récemment Le doux murmure du tueur, publié en 2021.

C’est indéniablement l’émotion qui prend le dessus dans Ma mère à l’Ouest. Dans ce roman d’Eva Kavian, la toute jeune Sam, enceinte à dix-sept sans le vouloir, dévoile son histoire familiale. Elle-même est née d’une femme trop jeune et, surtout, handicapée mentale. Corollairement à celle des jeunes mères, Eva Kavian évoque la difficile thématique de la maladie mentale, qu’elle connait de près puisqu’elle a elle-même travaillé en hôpital psychiatrique. Mais elle traite avant tout des relations qui unissent les membres d’une famille. Ces deux thèmes reviennent dans La dernière licorne, un très beau texte paru en 2008. Adolescente, la protagoniste et narratrice a vu sa vie basculer des années auparavant lors d’un accident domestique, une chute dont sa sœur n’est pas sortie indemne. Cette autrice qui touche à tous les genres, écrit pour tous les âges et anime des ateliers d’écriture propose des textes ambitieux, le plus souvent pour les 14-17 ans.

Les Barons, c’est d’abord un film du réalisateur bruxellois Nabil Ben Yadir sorti en 2009 et qui a fait parler de lui, mais ce que certains ignorent, c’est qu’il s’agit aussi d’un livre.

L’histoire, signée par le réalisateur du film et le scénariste Laurent Brandenbourger, se déroule dans les quartiers multiculturels de Molenbeek-Saint-Jean, qu’une actualité récente tend à réduire injustement à sa face sombre. On y suit le quotidien de quatre amis. Quatre portraits de glandeurs professionnels dont les ambitions distinctes et les relations affectives les mèneront sur des voies différentes. L’apparent humour et l’autodérision ne masquent pas les cafouillages et les coups durs de la vie. La difficulté de se trouver déchiré entre deux mondes, deux cultures, est traitée entre tragique et comique. Ce roman atypique aborde un thème trop rare et traite d’une jeunesse issue de l’immigration trop peu représentée en littérature.

Mijade privilégie les récits de vie et les thématiques touchant les jeunes, soit faisant partie de leur quotidien, soit relatives à des sujets de société les interpelant particulièrement. C’est le cas d’un des auteurs phares de la maison, Frank Andriat. Le prolifique romancier, enseignant à Schaerbeek, publie en 1986 Le journal de Jamila, initialement paru au Cri. Depuis, le roman a été réédité à de nombreuses reprises et, devenu une lecture scolaire, a été lu par des milliers de jeunes. Le récit, qui se présente comme un authentique journal, fait découvrir le quotidien pas toujours facile d’une jeune fille issue de l’immigration marocaine. Souffrant du regard de ceux qui la considèrent comme une étrangère, elle n’aspire qu’à vivre avec les mêmes chances que ses camarades.

Frank Andriat multiplie ensuite les publications. Si le contexte multiculturel constitue de façon récurrente la matière de son œuvre, il traite aussi de l’amour (L’amour à boire), de la fugue, du suicide, de l’homosexualité (Tabou), de la guerre (Je t’enverrai des fleurs de Damas) ou du harcèlement (Rumeurs, tu meurs !). Ses livres sont autant de manières d’entamer la réflexion et le débat chez les ados. C’est probablement pour cette raison qu’ils sont tant utilisés en classe.

Cette utilisation scolaire des romans est privilégiée par Mijade. En effet, l’éditeur propose de nombreux documents pédagogiques à destination des professeurs. Suggérant pistes d’exploitation ou exercices d’écriture, ils encouragent nos enseignants à favoriser une littérature « locale » et de ce fait plus proche des lecteurs auxquels elle s’adresse.

Enfin, l’éditeur namurois fait également des incursions dans la science-fiction. De la terrible et magnifique histoire des créatures les plus moches de l’univers, écrit par Thomas Gunzig, raconte l’histoire d’un Yurk, jeune extraterrestre, avec Polo, petit ouvrier dans une fabrique de crayons de couleur. Dans Reborn, l’écrivain Thierry Robberecht place son récit, fluide et rythmé, en 2064. La Terre n’étant plus habitable, les humains les plus riches ont été relocalisés sur une nouvelle planète ultra-sécurisée. Des passagers clandestins, appelés « invasifs », tentent d’y trouver un avenir. Ainsi, le livre permet indirectement d’aborder le sujet de la crise migratoire. Dans l’impressionnante bibliographie de cet auteur et scénariste de bande dessinée, on trouve également des romans policiers, pour les amateurs du genre.

Ker, un « village littéraire »

Andriat, cité plus haut, est aussi l’auteur de la série Bob Tarlouze, publiée cette fois chez Ker éditions. Cette maison basée à Hévillers édite depuis quelques années la collection Double Jeu, qui accueille des romans pour jeunes lecteurs. Ker signifie « village » en breton, afin que chaque auteur, chaque livre publié trouve un chez-soi. La série de Frank Andriat y occupe une place de choix. « My name is Bob, Bob Tarlouze » : ainsi commence le premier tome de la série d’aventure qui porte le nom de son atypique héros, un garçon de quinze ans qui mène des enquêtes policières et s’habille en rose. Pleins d’humour, les quatre tomes consacrés à ses investigations circulent, eux aussi, dans les écoles, puisque l’auteur participe à de fréquentes rencontres avec le public scolaire.

Ker pose peu à peu les jalons d’une collection de romans jeunesse qui prend du poids.  Sorti 2016, Où es-tu, Yazid ? de Claude Raucy traite d’un sujet difficile, celui du terrorisme, à travers un personnage revenu de Syrie.

Entre les enquêtes espiègles et les thématiques plus graves, Ker publie aussi des romans d’aventures avec Les aventures de Parsifal Crusader de Michel Honaker, entre Jules Verne et Indiana Jones, ou encore du réalisme magique avec Et dans la forêt, j’ai vu. Dans ce premier roman jeunesse, Vincent Engel revient à la Toscane de son Retour à Montechiarro avec une histoire d’amour sur le pouvoir du rêve et de l’évasion.

À l’instar de Mijade, Ker favorise l’exploitation scolaire de ses publications jeunesse en proposant aux professeurs de français des dossiers pédagogiques liés à chacun des romans. Ces comptes-rendus sont d’ailleurs réalisés par le comité de lecture de Ker qui est composé de… professeurs de français ! Fondée par Xavier Vanvaerenbergh, Ker collabore en effet de près avec cette équipe pour faire vivre ses parutions dans les classes.

Aventure en Fizzland

Comment parler de littérature pour adolescents en Belgique francophone sans évoquer Thomas Lavachery, notre J.K. Rowling national (toutes proportions gardées, bien sûr…) ? S’étant taillé une réputation solide et justifiée chez nous comme à l’étranger, l’auteur ucclois est connu et reconnu avant tout grâce à sa série à succès Bjorn, une saga qui s’étend sur sept tomes déjà, toujours à suivre, publiée à L’école des loisirs. En 2004, le premier tome, Bjorn le Morphir, fait immédiatement parler de lui. Les lecteurs y suivent les péripéties d’un jeune viking dans le Fizzland (pays inventé par l’auteur et dont il a développé l’histoire, la géographie et l’archéologie), en proie à une neige maléfique qui le cloître avec les siens dans sa demeure pour un rude hiver qui le verra se métamorphoser en guerrier. Le roman conquiert aussitôt un lectorat qui attend impatiemment le deuxième tome, Bjorn aux Enfers I.

De livre en livre, les aventures de ce jeune et redoutable viking l’amèneront au cœur de la terre, puis, dans Bjorn aux armées, au cœur de la guerre. Pays imaginaire, dragons, trolls, épées : nous sommes en plein heroic fantasy, aucun doute n’est permis. Cependant, Lavachery se démarque du genre et évite avec brio ses poncifs. En effet, il n’a jamais été lui-même un grand lecteur de médiéval fantastique et affirme ne pas en connaître les codes. Il part donc sur des bases neuves plutôt que de se poser en énième successeur de Tolkien.

Sa première passion est la bande dessinée. Ses débuts, il les a faits comme illustrateur et a publié l’une ou l’autre page dans le journal Tintin. Ayant également réalisé deux films documentaires, l’aspect visuel est chez lui essentiel. Ses histoires, il les visualise puis les écrit, donnant à voir autant qu’à lire. Il accompagne ses romans d’illustrations, de cartes du Fizzland et veille à la bonne adaptation de Bjorn en bande dessinée, avec Thomas Gilbert au dessin.

À l’origine, Bjorn a été inventé pour son fils aîné à qui il racontait des histoires de son invention à haute voix. L’intérêt qu’a porté son fils à ce personnage l’a poussé à se lancer dans l’écriture. Il rédige sans plan précis, avançant avec son héros au gré des aventures. En 2015 sort un nouveau roman, Ramulf, qui se situe dans le même univers que Bjorn.

Sur son site, Thomas Lavachery aime favoriser la proximité avec ses lecteurs et se montre accessible. Lorsque ceux-ci lui écrivent, lui posant de bonnes questions sur ses histoires ou son métier, il y répond avec beaucoup de simplicité. Il multiple également les rencontres dans le cadre scolaire. L’un de ses livres, La colère des MacGregor, édité chez Bayard, est d’ailleurs né d’un projet d’écriture collective avec une classe.

Des auteurs devenus classiques aux jeunes talents

Gudule était une grande romancière pour enfants. Son portrait par Natacha Wallez ayant été publié dans Le Carnet et les Instants (n° 188, 1er octobre 2015), cet article ne lui accordera pas la place qu’elle mérite. Pour les ados, elle a notamment écrit L’amour en chaussettes, une réjouissante histoire d’amour abordant sans détour la première expérience sexuelle.

Gudule, autrice au style farfelu et à l’imaginaire riche et décalé, n’écrivait pas uniquement ce type de récit. Son œuvre fait en outre la part belle au fantastique et au conte, mais aussi à l’Histoire. Son roman pour pré-ados, La bibliothécaire, célèbre l’univers des personnages de romans et encense le pouvoir des livres. Décédée en 2015, elle a laissé une œuvre qui a marqué des générations de jeunes lecteurs.

Patrick Delperdange commence sa carrière d’écrivain par des romans policiers (il a d’ailleurs reçu le prix Simenon en 1987). Il écrit aussi des pièces de théâtre, des scénarios de bande dessinée ou pour la télévision. Nombre de ses romans sont destinés aux enfants ou adolescents. Chez Mijade, il publie notamment Comme une bombe, dans lequel un adolescent mène l’enquête sur le meurtre d’un de ses proches, ainsi que Tombé des nues, récit dans lequel un garçon de seize ans est malgré lui amené à livrer un mystérieux colis qui le plongera dans des situations inextricables. Delperdange est aussi l’auteur de séries d’aventures : L’œil du milieu et Ishango, tous deux parus chez Nathan, et Le Royaume des Euménides, publié par Gallimard. Enquêtes ou romans d’aventures, ses livres offrent toujours des lectures emplies d’action et de mystère.

Le Liégeois Luc Baba, auteur de plusieurs romans mais aussi professeur, comédien, chanteur et slameur, a écrit, parmi sa quinzaine de romans, un texte vif et lucide pour les adolescents. Les aigles ne tuent pas les mouches, sorti en 2011 chez Thierry Magnier, est un roman plein d’énergie racontant le parcours de la jeune Zoé qui apprend le jour de son anniversaire qu’elle est moche. Elle tente de vivre avec ce constat et la douleur qui en résulte, pas vraiment aidée par sa famille brinquebalante, Elle fonde le « club des mouches » (comprendre : des moches), pour répondre avec humour à ce vilain tour du sort.

Mathieu Pierloot, issu du milieu enseignant bruxellois (l’univers scolaire est d’ailleurs rendu avec beaucoup de justesse dans son œuvre), publie son premier roman jeunesse, L’amour, c’est n’importe quoi ! en 2014 à L’école des loisirs. Si ce livre s’adresse plutôt aux pré-adolescents et pré-adolescentes, le roman suivant, qui vient de paraître chez le même éditeur, concerne un public plus âgé. En grève ! raconte la découverte du militantisme politique par un groupe d’ados sur fond de grève des professeurs.  À la conscientisation sociale qui enflamme une bande de potes s’ajoutent les histoires de cœur du narrateur. On retrouve d’ailleurs ce dernier dans Summer kids, qui s’adresse aux jeunes adultes et décrit la délicate période de transition entre la fin du lycée et les études supérieures, et lors de laquelle il faut choisir son parcours professionnel. Dans ses textes tout en dialogues, Pierloot décrit l’âge où bouleversements et révolte font délicieusement frémir l’âme.

C’est également dans le catalogue de L’école des loisirs que l’on trouve les livres de Marie Chartres. Française d’origine, elle exerce le beau métier de libraire à Bruxelles. Ses textes s’adressent à différentes tranches d’âge, notamment aux adolescents dans quatre romans subtils et intimes, portés par une écriture délicate. Bleu de Rose (2009), son premier roman, aborde un de ses sujets de prédilection : la fratrie. Il en est également question dans Comme un feu furieux (2014), qui se déroule dans une ville silencieuse et blanche de Sibérie. Dans ses textes, on trouve des personnages en proie avec les difficultés de la vie (maladie, deuil…), à la croisée des chemins, en quête d’une nouvelle façon de vivre. Ces thèmes traversent également Les petits orages (2016) et L’âge des possibles (2020), qui se déroulent tous deux aux États-Unis. Avec ce dernier, Marie Chartes crée un roman à trois voix, celles de ces trois personnages principaux. Deux d’entre eux sont issus d’une communauté amish et se frottent au monde moderne afin de choisir leur destinée en connaissance de cause. Cette brusque découverte vient amplifier les difficultés propres à l’entrée dans l’âge adulte.

La jeune bruxelloise Aylin Manço se fait remarquer dès 2019 lors de la parution de son premier roman, La dernière marée, aux éditions Talents Hauts. Sur une terre où les eaux refluent, la mer disparait, les rivages se vident. Dans une station balnéaire presque déserte, la jeune Élo passe quinze jours décisifs. Relations parentales et amour naissant sont au cœur de ce roman comme de celui d’Ogresse, son deuxième et excellent livre, lauréat du prix Libbylit du meilleur roman belge en 2021 et sélectionné pour les prestigieuses Pépites du Salon de Montreuil en 2020, et dont l’action se déroule dans des décors ixellois existants. Inscrit dans la veine du réalisme magique, ce texte déroutant et frontal narre le parcours d’une adolescente devant faire face non seulement à des problématiques de son âge, mais aussi à l’apparition d’événements bien plus perturbants et violents. Le thème du cannibalisme est ici traité avec finesse et permet de faire grimper la tension tant les ambiances mettent le lecteur sous une délicieuse pression. En octobre 2022 paraitra Les éblouis, le troisième roman d’Aylin Manço. Cette jeune autrice est sans aucun doute au début d’une prometteuse carrière…

Si Vinciane Moeschler, lauréate du Prix Rossel en 2019, écrit principalement pour les adultes, elle a également publié deux ouvrages pour ados. À corps parfait, paru en 2020 chez Muscadier, est une histoire d’amour et de haikus qui traite du difficile sujet de l’anorexie. Quant à Caraïbes amers, il raconte l’exil d’un jeune parisien de quinze qui quitte sa ville pour la République dominicaine. L’occasion pour lui d’être confronté à de dures réalités sociales et de faire évoluer son regard sur le monde.

Enfin, bonne nouvelle pour les jeunes encore peu tentés par l’idée de se farcir une grosse brique : les éditeurs ont pensé à eux et proposent des textes très courts et percutants. C’est le cas de la collection Adopuscules des éditions bruxelloises Lamiroy, qui regroupe de petits ouvrages vendus à prix modique. Et dans la collection Court toujours des éditions Nathan, l’auteur franco-bruxellois Vincent Cuvellier, qui a l’habitude de s’adresser à un public plus jeune, a eu la bonne idée de publier Le plus mauvais livre du monde, un récit franchement drôle qui devrait plaire aux plus rétifs à la lecture. Certains des récits au format court publiés dans le cadre de la Fureur de lire s’adressent également aux ados : ceux-ci sont disponibles gratuitement en ligne sur Objectif plumes.

Littératures de l’imaginaire : fantasy et dystopies

Le parcours de Christelle Dabos, autrice originaire de Côté d’Azur résidant maintenant en Belgique, est révélateur de l’impact de nouveaux canaux de diffusion littéraire. Ses textes fleurissent d’abord au sein d’une communauté d’auteurs et d’autrices sur internet, Plume d’Argent, avant de suivre un parcours plus conventionnel. Lauréate du concours « Premier roman » organisé par Gallimard, auquel elle participe en 2012, elle voit son manuscrit publié en 2013 chez ce même éditeur. Il s’agit des Fiancés de l’hiver, premier tome de la passionnante série La passe-miroir, qui reçoit le Grand Prix de l’Imaginaire en 2016. Cette saga de fantasy en quatre tomes nous plonge dans un monde éclaté en morceaux, aux univers aussi variés que redoutables. Son anti-héroïne se révèle aussi inventive que la jeune écrivaine qui imagine ses aventures. Animisme, pouvoirs magiques, trahisons, relations troubles… Dabos nous plonge dans des intrigues bien construites et dépeint des personnages subtils et complexes.

Cindy Van Wilder a vu sa notoriété grandir grâce à sa saga en quatre tomes Les Outrepasseurs, publiée chez Gulfstream. On lui doit aussi les deux tomes de Terre de brume, récit de fantasy post-apocalyptique, dans lequel le monde est recouvert d’un épais brouillard toxique. À travers les péripéties de ses deux héroïnes, l’autrice inscrit son texte dans un double engagement, féministe et écologique.

Autrice également de Memorex, un thriller d’anticipation, cette jeune écrivaine semble privilégier une littérature de genre, mais ne s’y cantonne pas. En effet, on trouve aussi des romans réalistes contemporains à son actif, comme #tousdebouts, destiné à un public dit « young adults ».

Villa anima, le premier roman de Mathilde Maras, s’inscrit dans les romans dystopiques. Publié dans la collection Échos chez Gulf Stream, destinée au 13-15 ans, ce roman féministe augure un intéressant début de carrière. Autrice également à suivre, A. D. Martel publie en 2022 chez Scrinéo les deux tomes De rouages & de sang, une saga aux accents steampunk prononcés.

La liégeoise d’origine espagnole Katia Lanero Zamora est l’autrice de plusieurs romans appartenant au genre des littératures de l’imaginaire. Après le remarqué Les ombres d’Esver, paru en 2018 chez ActuSF, elle publie chez le même éditeur La Machine (tome 1). Ce roman prenant plonge ses lecteurs dans une ville d’une Espagne fictive et ses rouages politiques. C’est dans la même collection que l’on trouve les romans La stratégie des as et Ex Dei de Damien Snyers, à la croisée du steampunk et de la fantasy. Les amateurs du genre y croisent elfes et trolls pour leur plus grand plaisir.

Les littératures de l’imaginaire semblent constituer un support privilégié pour parler des maux de notre époque. Dans ses Biotanistes, publiés en 2021 chez ActuSF, Anne-Sophie Devriese imagine un monde futur, postapocalyptique, duquel ont presque disparu les ruisseaux, les animaux et… les hommes. Ce nouveau monde de femmes, dirigé par des sorcières, a relégué les hommes au rang d’esclaves reproducteurs. Catastrophes écologiques et féminisme sont au cœur de ce roman. Ainsi, les dystopies, ou la science-fiction, offrent ainsi aux auteurs et autrices une distance et une liberté qui leur permet de mieux livrer des textes engagés politiquement, et d’aborder d’autres thèmes tels que la surveillance, les traitements réservés aux migrants, ou les inégalités sociales. Une bonne manière d’amorcer de passionnants débats avec les adolescents !

Encourager et promouvoir

Auteurs et autrices, éditeurs et éditrices belges offrent aux ados une littérature de qualité présentant des styles et genres variés, qui couvrent toute la gamme des goûts et des couleurs des lecteurs de cette tranche d’âge dont il est parfois dit qu’il serait délicat d’éveiller et de maintenir l’intérêt, surtout sur la longueur. La lecture n’est pas une activité qui va de soi à cet âge. Elle a besoin d’être soutenue et encouragée. De nombreux acteurs y œuvrent en Belgique francophone. Bibliothécaires, libraires, professeurs ou instances culturelles, ils sont nombreux à communiquer leur enthousiasme et à offrir un accès à tous les jeunes à la littérature pour adolescents.

La bibliothèque d’Ixelles, pour ne citer qu’elle, a mis sur pied en 2004 un Club de lecture Ados. Depuis lors, chaque mois, un petit groupe se réunit autour d’un goûter très attendu. Le but est de faire lire à ses membres « de tout », et pas uniquement les romans vers lesquels ils se dirigeraient d’eux-mêmes. Les jeunes lecteurs, « recrutés » parmi les habitués des lieux, se voient proposer des livres choisis par deux bibliothécaires. Ils sont ensuite invités à faire part de leur avis et à donner au livre une note qui sera collée sur l’ouvrage. Ainsi, tous les jeunes fréquentant la bibliothèque peuvent bénéficier des conseils des ados du Club.

Noémie Ons, l’une des bibliothécaires en charge du projet, participe également à la présélection du Farniente. Créé en 2000, il a été organisé par la Ligue des Familles mais est depuis devenu une ASBL indépendante.

Ce prix littéraire invite chaque année les ados à lire une sélection de cinq livres choisis par des adolescents et adolescentes parmi les parutions récentes. Pour participer, il suffit de lire les ouvrages et de voter. L’objectif du prix est de promouvoir une lecture plaisir, hors obligation scolaire. Certaines règles existent pour guider les décisions des jeunes qui établissent la sélection des ouvrages et les amener à faire des choix cohérents. Ils sont par exemple invités à opter pour des lectures qui donnent envie de débattre ou de s’ouvrir à l’autre.

Enfin, la même bibliothécaire nous explique que leur principal projet futur est le développement du quart d’heure de lecture quotidien en classe, au sein  d’écoles secondaires avec lesquelles la bibliothèque collabore. Il s’agira d’accompagner les enseignants dans cette pratique qui constitue un outil simple et très puissant pour accrocher les jeunes à la lecture, les faire débattre, réfléchir.

Ce type d’initiative existe un peu partout, non seulement en bibliothèque mais aussi dans certaines librairies. À Woluwe-Saint-Lambert, les ados du Rat Conteur partagent leurs coups de cœur lors de rencontres organisées tous les vendredis. Ces initiatives sont en général l’œuvre de libraires particulièrement zélés.

C’est aussi du monde de la librairie que nous vient Deborah Danblon, chroniqueuse radio à la RTBF dans « Tendances Première » ou « La Librairie Francophone ». Elle y partage ses coups de cœur de lectrice assidue, spécialisée en romans pour adolescents, avec un enthousiasme communicatif.

Du côté de l’école, de nombreux professeurs, passionnés de littérature, engagent leurs élèves dans des projets tels qu’Auteurs en classe, initié par la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui permet à des auteurs de venir rencontrer leurs lecteurs dans le cadre de scolaire.

C’est la même Fédération Wallonie-Bruxelles qui organise, tous les deux ans, le Prix des lycéens. En collaboration avec les professeurs, il s’agit de faire lire à des élèves de fin d’études secondaires une sélection de cinq romans belges de langue française.

Cette fois-ci, il ne s’agit plus de littérature pour la jeunesse mais bien de romans destinés aux adultes. Une manière de les faire doucement entrer dans la littérature « pour les grands », et, si l’on en croit la devise du Prix de lycéens « Du plaisir de lire au délice d’élire », de les amener à y prendre goût. Parmi les précédents lauréats, on trouve Henry BauchauBernard Tirtiaux et autres. La dernière édition du prix, en 2021, a couronné le roman Bluebird de Geneviève Damas, publié chez Gallimard.

Dans le but de s’adresser aux ados un peu moins âgés, la Fédération Wallonie-Bruxelles a ouvert depuis 2021 le concours annuel « La Petite Fureur », auparavant limité aux 12-13 ans, à une nouvelle tranche d’âge, les 14-15 ans.

Ouvert à tous les genres (on y trouve d’excellents albums de bande dessinée), ce concours vise autant à susciter le plaisir de lecture qu’à mettre en avant auteurs et autrices belges. Il développe également la créativité des jeunes qui sont amenés à réaliser une œuvre, plastique, littéraire ou autre, autour d’un ouvrage choisi.

Mais si, les jeunes lisent !

Tous ces projets sont autant de signes qui témoignent de la belle vitalité d’une littérature pour adolescents qui lisent, si si, et qui aiment le revendiquer (en ligne, de préférence). Les jeunes lectrices et lecteurs passionnés se multiplient et adorent discuter de leurs personnages préférés. Les auteurs et autrices leur proposent des romans au plus près de leurs multiples préoccupations, du plus banal à l’extraordinaire, du plus réaliste au plus fantastique, des textes les plus accessibles aux plus exigeants, les amenant pas à pas à considérer la littérature comme une part essentielle de leurs activités. Pour rêver, pour réfléchir, pour leur faire vivre de trépidantes aventures ou leur permettre d’évoquer des sujets difficiles, ils piochent volontiers dans les piles des librairies ou les rayonnages des bibliothèques. Difficile de ne pas trouver sa tasse de thé tant l’offre est variée et qualitative. À l’heure d’une starification de certains romans anglo-saxons adaptés en films à succès, la littérature pour les jeunes a, dans le monde entier, plus que jamais le vent en poupe. Une occasion en or et à saisir pour tous les acteurs du livre pour adolescents, chez nous comme ailleurs.


© Fanny Deschamps, juillet 2022

Une première version de cet article a été publiée en 2016 dans la revue papier Le Carnet et les Instants : l’article est disponible sur le site Revues.be

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La Fureur de Lire

Par administrateur,

Comme chaque année, à la mi-octobre, la Fureur de lire prend ses quartiers en Wallonie et à Bruxelles en vue de sensibiliser le grand public à la lecture.

Du 12 au 16 octobre 2022, ce sont plusieurs centaines d’activités en lien avec la lecture, pour la plupart gratuites, qui sont proposées au sein des bibliothèques publiques, librairies, associations, etc. sur l’ensemble du territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Rencontres, animations, lectures, concours, expositions, un programme diversifié qui s’adresse à tous les âges : bébés, enfants, adolescents et adultes.

La Fureur de Lire dans notre Agenda
Télécharger le programme complet (PDF)

 

 

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La rentrée jeunesse des maisons d’édition belges

Par David Dusart,

Découvrez les éditeurs belges et leur rentrée jeunesse en littérature belge. Les ouvrages jeunesse évoqués dans cet article sont parus après le 1e juin ou vont être publiés avant le 30 octobre dans une maison d’édition active en Fédération Wallonie-Bruxelles. La liste complète des parutions jeunesse en littérature belge (publiées en Belgique ou ailleurs) entre juin et octobre est disponible ici.

Alice

 

Le programme des éditions Alice en cette rentrée est varié avec comme d’habitude des albums et des romans. L’illustratrice Maud Roegiers revient avec un album où elle met en image la chanson La vie c’est quoi ? de l’auteur-compositeur français Aldebert. Pour les lecteurs friands d’histoires de loup, l’auteur Philippe Malempré propose l’histoire déjantée de Lugosi, le mouton-garou. Illustré par Gwenaëlle Doumont, l’album Les mouzes invite les enfants dès cinq ans à se questionner sur les tendances vestimentaires et le mimétisme qui tient parfois lieu de loi dans la cour de récréation. En ce qui concerne les romans pour la jeunesse, l’illustratrice Charlotte Meert a quant à elle réalisé les illustrations du tome 2 de Othello, qui sera disponible fin septembre en librairie.

Les douze ans et plus ne sont pas oubliés par l’éditeur puisque sort également Par-delà les sentiers, un roman d’aventure de Jérôme Eeckhout, qui avait déjà publié chez le même éditeur un premier récit baignant dans une ambiance fantastique médiévale.

Casterman

Fondées en 1777, les éditions Casterman n’ont de cesse d’évoluer avec leur temps, pour répondre aux attentes éditoriales de leur époque. Une nouvelle preuve en est donnée avec l’album Une licorne du Far West. Cette histoire écrite par Coralie Saudo invite à dépasser les clichés de genre et à la liberté d’être soi.

CotCotCot éditions

Les éditions CotCotCot ont pour ambition de « publier des histoires pour l’adulte à venir chez l’enfant, pour l’enfant intérieur chez l’adulte ». Soirée d’été, le premier album de Dina Melnikova répond parfaitement à cette ambition puisqu’il s’adresse à tous les publics. Le livre évoque avec douceur des moments passés avec une grand-mère bien-aimée.

Empaj 

 Les éditions Empaj, qui publient principalement de la littérature générale, proposent en cette rentrée un roman accessible aux ados dès 12 ans. Dégâts irréversibles de Justine Paque a pour ambition d’ouvrir le dialogue sur le danger des réseaux sociaux. Pour la maison d’édition, publier ce roman a été comme une évidence tant le sujet est d’actualité. Un sujet qui comme on le sait intéresse aussi bien les enseignants et les parents.

Esperluète

Esperluète est une maison d’édition placée sous le signe typographique de la rencontre. Ce & est un lien, entre écrivains et plasticiens, entre le livre et son lecteur. Cette ligne va comme un gant à Un nouvel ami de l’autrice-illustratrice Geneviève Casterman ! Cette histoire est le premier volet d’une série d’albums « La bande à Lily », qui plongera les lecteurs dans le quotidien d’un groupe d’enfants. À suivre, donc !

Ker

Dans la collection « Double jeu » chez Ker, parait WWW, un recueil collectif au nom évocateur et qui rassemble les textes de nouvellistes belges et français : Barbara Abel, Nicolas Ancion, Frank Andriat, Vincent Engel, François Filleul, Kenan Görgün, Armel Job,  Fanny Lalande (Fr), Katia Lanero Zamora, Olivier Paquet (Fr) et Grégoire Polet. Un questionnement sur le réseau et ses implications dans nos vies contemporaines.

Lansman

Chez Lansman Éditeur, qui publie des textes dramatiques, plus d’un tiers des publications s’adressent aujourd’hui aux enfants et adolescents. Quatre publications sont proposées par l’éditeur en cette période de rentrée. Tout d’abord, pour les enfants à partir de 8 ans, Céline Lefèbvre publie Monsieur Phône et les sardines, un texte teinté de surréalisme qui met en scène des personnages bien campés. Marie Henry, dans Norman c’est comme normal, à une lettre près, questionne joyeusement et avec humour le rapport à la norme, l’acceptation de la différence et les codes culturels. Avec Apnée, Rémi Pons évoque la question du surendettement. Pour les plus âgés, Sisyphes de Florian Pâque est une relecture socialo loufoque du mythe de Sisyphe qui vise à sensibiliser les ados à la permanence de l’exploitation des plus faibles.

Livr’s

Livr’S Éditions, maison d’édition spécialisée en littérature de genre et de l’imaginaire, s’adresse aussi aux enfants et aux adolescents. En cette rentrée, parait Tout ira bien de l’autrice Elena Tenace,  un roman pour adolescents qui traite du harcèlement scolaire sous une forme fantastique.

Marque belge

Marque Belge, fondée en 2016, est une maison d’édition belge généraliste qui publie aussi de la jeunesse. L’auteur et psychologue Simon Orenbach y publie le deuxième tome de sa série d’albums jeunesse « Le rouge-gorge et le grand magicien ». Ce deuxième album s’intitule Giovanni le timide et sera disponible en librairie au mois d’octobre.

 Mijade

La maison d’édition Mijade qui se spécialise dans les albums illustrés pour enfants et les romans pour adolescents et jeunes adultes propose en ce mois de septembre de beaux albums écrits et/ou illustrés par des auteurs confirmés. Ainsi, paraissent en septembre Balthazar, mis en images par Marie-Aline Bawin (texte de Isabelle Wlodarczyk) ; L’heure de la sieste de Sibylle Delacroix, Mon pantalon a disparu, illustré par Quentin Gréban (texte de Christine Naumann-Villemin.) et Olga Cracra (texte de Sandrine Lamour), croquée par Estelle Meens. Illustratrice expérimentée elle aussi, Claude K. Dubois a réalisé les dessins du roman jeunesse L’Altesse des maladresses (texte de  Lisa Lejamtel ), qui paraitra en octobre. Toujours pour le roman, mais cette fois pour adolescents, Mijade rééditera au mois d’octobre Sa dernière chance, le roman d’Armel Job paru en 2021 et qui a déjà connu un beau succès auprès du public adulte.

Pastel / L’école des loisirs

Pastel, la griffe belge de l’école des loisirs créée en 1988 à Bruxelles, a toujours eu à cœur de mettre en avant les talents de notre pays. Autrice incontournable chez les tout-petits, Jeanne Ashbé poursuit sa série d’albums sans texte « Les images de Lou et Mouf » en y ajoutant quatre nouveaux titres : Le jardin, Le zoo, Le voyage et La mer. Toujours pour la même tranche d’âge, Rascal publie Découpe, un album bien coloré comme on les aime. Emile Jadoul sonne lui l’heure de la rentrée avec son petit pingouin prénommé Léon : À l’école, Léon ! est paru fin août, adapté aux nouvelles dates de la rentrée scolaire belge. Le grand inventaire des petits plaisirs de Luchien de Frédéric Stehr est une ode aux petits bonheurs qui ravira les petits de 3 à 6 ans. Jean-Luc Englebert initie les enfants au plaisir de la peinture en atelier avec Jan le petit peintre, un album accessible dès 6 ans. Avec T’es pas mort !, Catherine Pineur aborde un sujet difficile mais sur lequel les enfants posent de nombreuses questions : que se passe-t-il après la mort ? . Autre album, autre thème : un conte autour de la naissance, La femme qui attendait un enfant à aimer et l’homme qui attendait un garçon, d’Anne-Catherine De Boel (texte d’Alain Serge Dzotap). En roman jeunesse, à partir de 9 ans, Marie Chartres publie Frankie, quel cinéma !, avec des illustrations de· Jean-Luc Englebert. Enfin, à paraitre en octobre, Anne Herbauts continue sa série Matin Minet avec Smimna, une histoire de moufle et de cueillette dans les bois.

Versant Sud Jeunesse

Versant Sud Jeunesse est une maison d’édition indépendante bruxelloise qui publie depuis 2016 des livres illustrés pour enfants. L’équipe de Versant Sud Jeunesse accorde le plus grand soin à ce que ses livres soient à la fois exigeants et accessibles aux petits lecteurs. La maison d’édition travaille souvent avec de jeunes illustrateurs et illustratrices, souvent issus des excellentes écoles d’art bruxelloises, dont la réputation internationale attire des talents de tous les pays.

Valentine Laffitte, Sara Gréselle et Laura Simonati font partie de ces autrices-illustratrices qui débutent leur carrière.

Grandir est le troisième album de Valentine Laffitte. Depuis le premier, on assiste à une belle évolution de sa technique, qui s’affine. Grandir est basé sur une petite publication que l’autrice avait réalisée pour la Fédération Wallonie-Bruxelles à l’occasion de la Fureur de lire. L’ensemble a été réécrit et les illustrations entièrement recomposées en papiers découpés. Son univers foisonnant, poétique, se déploie tout en délicatesse.

Les lundis de Camille est le deuxième livre que Sara Gréselle publie chez Versant Sud (et un troisième est en réalisation !). Elle propose l’histoire très touchante d’une petite fille qui se sent mal à l’école. Sara Gréselle a trouvé pour cet ouvrage un style de dessin très différent de celui de son précédent album, Bastien, ours de la nuit. D’un projet à l’autre, Sara cherche de nouvelles façons de travailler et cela donne de très beaux résultats !

Laura Simonati vient de terminer ses études et publie aujourd’hui son premier livre, Mariedl, une histoire gigantesque. Le caractère graphique très particulier de ce livre, et la qualité de sa narration, ont d’emblée séduit les éditrices de Versant Sud. Au-delà de l’aspect visuel novateur, il y a là une magnifique histoire, touchante, trépidante, une véritable aventure qui plaira aux enfants.

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Des Livres pour Les 5-8 ans pour entrer dans le PECA

Par administrateur,

Le PECA ou Parcours d’Education Culturelle et Artistique entend permettre à tous les élèves, depuis l’entrée en maternelle jusqu’à la fin du secondaire, de vivre des expériences culturelles et artistiques multiples tant à l’intérieur de l’école qu’en dehors.

Dans ce cadre, une première sélection de livres de jeunesse destinés aux enfants de 5-8 ans est proposée aux enseignants mais aussi aux bibliothécaires, parents, libraires ou toute personne intéressée par la littérature de jeunesse. 50 livres sont présentés au sein de deux rubriques : 40 albums et 10 romans. Le classement au sein de celles-ci suit l’ordre alphabétique des titres. Chaque ouvrage est accompagné d’une brève notice bibliographique, d’une présentation succincte et de deux ou trois mots-clés.

 

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Les nouveautés en littérature jeunesse

Par David Dusart,

La littérature jeunesse fait, elle aussi, sa rentrée !

Découvrez ci-dessous, les dernières sorties pour la période de juin à octobre.

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Les malles pédagogiques BD, valises de voyage littéraire

Par David Dusart,

Les malles pédagogiques BD | © Jérôme Puigros-Puigener

Dans le cadre du programme Auteurs en classe, les enseignants peuvent emprunter gratuitement des malles pédagogiques permettant l’exploration, avec leurs élèves, d’un ou plusieurs albums de bandes dessinées d’auteurs belges francophones (ou résidant en Belgique). L’emprunt de ces malles peut être complémentaire ou non de l’organisation d’une visite d’auteur en classe.

Chaque malle contient une quinzaine d’albums BD à répartir entre les élèves et l’enseignant ou l’enseignante ainsi qu’un carnet pédagogique proposant des activités et des ressources autour des livres prêtés.

Tous les carnets pédagogiques inclus dans les malles BD sont téléchargeables via la rubrique Dossiers pédagogiques ou via les liens ci-dessous. Les carnets pédagogiques réalisés par la FW-B sont également disponibles gratuitement dans la limite des stocks en version papier (contact : auteursenclasse@cfwb.be)

Chaque année, la collection s’enrichit de plusieurs malles.

Les malles, qui prennent la forme de grandes valises à roulettes, sont mises à disposition gratuitement sur réservation et pour une période de deux mois par classe au Centre Belge de la Bande Dessinée, partenaire de l’opération et responsable de sa gestion logistique.

Pour emprunter une malle au Centre Belge de la Bande Dessinée : Jérôme PUIGROS-PUIGENER visit@cbbd.be


Dès 3 ans :

Malle Petit Poilu

Nombre d’exemplaires disponibles : 3

Contient :

Dès 8 ans :

Malle Les enfants de la résistance

Nombre d’exemplaires disponibles : 1

Contient :

Dès 13 ans :

Malle La Perle

Nombre d’exemplaires disponibles : 1

Contient :

Dès 12-13 ans, 14-15 ans :

Malle Petite Fureur 22-23

Disponible pour les classes inscrites au concours et pour un prêt d’une durée d’un mois maximum.

Le concours Petite Fureur est un concours pour les enfants de 3 à 15 ans autour de 15 livres d’auteurs, auteurs de bandes dessinées, illustrateurs et traducteurs de Wallonie et de Bruxelles. Les participants entrent dans l’univers de l’un des livres de la sélection. Inspirés par leur lecture, ils dessinent, écrivent, enregistrent une chanson, réalisent une vidéo, imaginent des décors…

Nombre d’exemplaires disponibles : 1

Contient :

  • 7 albums BD de M. BURNIAT, Sous terre, Dargaud, 2021. Sélection 14-15 ans.
  • 7 albums BD de M. de RADIGUÈS, Alerte 5, Casterman, 2021. Sélection 14-15 ans.
  • 7 albums BD de F. GROLLEAU (scénario)  et ABDEL DE BRUXELLES (dessin), Tanger sous la pluie, Dargaud, 2022. Sélection 14-15 ans.
  • 7 albums BD de G. TALMASSE, Le grand voyage d’Alice, La Boîte à Bulles, 2021. Sélection 12-13 ans.

Dès 15 ans :

Malle Philocomix

Nombre d’exemplaires disponibles : 1

Contient :

 

Les albums disponibles dans les malles pédagogiques BD :

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Rentrée littéraire 2022

Par David Dusart,

Un été de tous les records qui doucement s’achève avec la rentrée littéraire.

Quelques premières publications, des rééditions mais aussi et surtout, des auteurs confirmés.

Et, comme chaque année,  du roman, des nouvelles, de la poésie, du théâtre, des essais, des chroniques et écrits intimes et des biographies.

Découvrez ci-dessous, les dernières sorties en littérature pour la période du 15 aout au 15 octobre.

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La Petite Fureur : sélection 2022

Par administrateur,

La Petite Fureur est un concours pour promouvoir la lecture chez les enfants et mettre en valeur les auteurs, illustrateurs et traducteurs de Wallonie et de Bruxelles.

La Petite Fureur est un concours littéraire organisé par la Fédération Wallonie-Bruxelles à destination des enfants de 3 à 15 ans. Un jury de professionnels établit une sélection de livres dans les différentes catégories d’âge. Ces livres sont soit signés par des auteurs, autrices et/ou illustrateurs, illustratrices belges, soit traduits par des traducteurs ou traductrices belges.

Aux enfants participants, il est demandé de choisir l’un des ouvrages de la sélection et de le prolonger par un dessin, collage, poésie, chanson, adaptation théâtrale… Le concours rencontre ainsi un triple objectif. du côté de l’enfant, il suscite le plaisir de la lecture et développe la créativité. Et du côté des auteurs, illustrateurs et traducteurs, il est un outil de promotion de la création en Fédération Wallonie-Bruxelles

Sélection 2022 :

3-5 ans

On joue à cache-cache de Léa Viana Fereira
Nino d‘Anne Brouillard
Des trucs comme ci, des trucs comme ça de Bernadette Gervais

6-8 ans

Le Bison Non-Non de Victoire de Changy et Marine Schneider
Comment mettre une baleine dans une valise ? d’Anne Casterman (traduction)
Ma vie en vert, Zig Zag de Michel Van Zeveren

9-11 ans

Les aventures de moi-même, Journal de ma fugue de Charly Delwart
Petits poèmes pour y aller de Carl Norac et Anne Herbauts
Dessiner sur les murs : une histoire de Keith Haring d’Anne Cohen Beucher (traduction)

12-13 ans

Granlarge et Loncour de André Borbé
Le grand voyage d’Alice de Gaspard Talmasse
Ce que baleine veut de Stanislas Cotton

14-15 ans

Alerte 5 de Max de Radiguès
Tanger sous la pluie d’Abdel De Bruxelles
Sous terre de Mathieu Burniat

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La nouvelle belge d’aujourd’hui

Par administrateur,

Souvent, dans le monde francophone, la nouvelle est aujourd’hui considérée comme un genre mineur, qui pâtit de sa comparaison récurrente avec le roman. Un jugement qui témoigne surtout de la méconnaissance du genre. En Belgique francophone, la nouvelle a pourtant donné plusieurs œuvres majeures de ces dernières années et connait un notable dynamisme éditorial.

NOUVELLE ET ROMAN

Esthétiquement, la nouvelle est quasi toujours rapprochée du roman, auquel elle est comparée. Dans le « petit sottisier de la nouvelle » qu’il alimentait régulièrement sur son site internet, le chercheur belge et grand spécialiste de la nouvelle René Godenne cite notamment cet extrait éclairant :

Adoptons une définition de la nouvelle qui peut faire l’unanimité : un roman en raccourci.[1]

Opinion largement répandue, elle réduit la nouvelle à n’être pas un genre en soi, mais seulement le satellite d’un autre, plus prestigieux : le roman, dont elle ne formerait qu’une variante brève, une ébauche – un roman au souffle court. La nouvelle serait en quelque sorte au roman ce que le court-métrage est au long-métrage : une œuvre de jeunesse, un premier pas hésitant, en attendant la réalisation de la grande œuvre. Les concours de nouvelles, très nombreux aujourd’hui, alimentent malgré eux cette croyance : ils sont souvent destinés aux auteurs amateurs et désignent dès lors la nouvelle comme un genre accessible à tous.

Romancier et nouvelliste, Éric-Emmanuel Schmitt recourt lui aussi à la comparaison entre roman et nouvelle, mais pour prendre le contrepied de l’opinion courante. Dans son recueil de nouvelles Concerto à la mémoire d’un ange , il théorise ainsi le genre qu’il pratique :

La nouvelle est une épure de roman, un roman réduit à l’essentiel. 
Ce genre exigeant ne pardonne pas la trahison.
Si l’on peut utiliser le roman en débarras fourre-tout, c’est impossible pour la nouvelle. Il faut mesurer l’espace imparti à la description, au dialogue, à la séquence. La moindre faute d’architecture y apparaît. Les complaisances aussi.[2]

Presque toujours comparée au roman, la nouvelle lui est aussi associée en matière de prix littéraires. On l’ignore parfois, mais les Goncourt, Renaudot, Médicis, Femina ou le Rossel peuvent aussi bien récompenser un recueil de nouvelles qu’un roman. Un bref parcours des palmarès de ces prix révèle toutefois la portion congrue réservée à la nouvelle. Le Rossel, par exemple, a couronné, au cours des trente dernières éditions,  trois ouvrages qui s’apparentent à des recueils de nouvelles : Le jour du chien de Caroline Lamarche en 1996, Contes carnivores de Bernard Quiriny en 2008 et Argentine de Serge Delaive en 2009.

Du côté du Goncourt, on retiendra que Charles Plisnier est non seulement le premier lauréat belge (et premier lauréat non-français) du prix, mais est aussi le premier auteur récompensé pour un recueil de nouvelles, Faux passeports. C’était en 1937 ; le prix est décerné depuis 1903. Significativement, l’Académie Goncourt a créé en 1974 le Goncourt de la nouvelle. Destiné à mettre le genre en lumière par une catégorie dédiée, il signale aussi en creux la difficulté à faire exister la nouvelle lorsqu’elle est en compétition avec le roman.

 

MAISON D’EDITION ET COLLECTIONS

Le déficit de reconnaissance de la nouvelle a des conséquences économiques : les éditeurs sont généralement peu friands d’un genre qui ne se vend pas bien auprès du public. En Belgique francophone, toutefois, des maisons d’édition font la part belle à la nouvelle, via des collections dédiées, voire en publiant exclusivement des nouvelles. Tanguy Habrand et Pascal Durand constatent que l’édition de niche est l’une des tendances de l’édition littéraire actuelle à Bruxelles et en Wallonie et y voient deux explications possibles : « Il est difficile de démêler ce qu’il entre de spécifiquement belge ou de modalement lié aux possibilités de la microédition dans l’émergence presque spontanée de ces structures très spécialisées[3] ».

 

Les éditions Quadrature

Établies à Louvain-la-Neuve et animées par une équipe d’éditeurs passionnés, les éditions Quadrature ont été fondées en 2005 et publient exclusivement des recueils de nouvelles. Publiant peu, la maison d’édition parie sur la qualité, tant dans le choix des projets édités que dans la réalisation matérielle de ceux-ci.

Les éditions Quadrature

Au catalogue : une cinquantaine d’auteurs pour une septantaine de livres. Des nouvellistes belges et français ; des nouvelles de tous genres ; des nouvellistes qui ont débuté dans la maison d’édition, comme Isabelle Baldacchino ou Aliénor Debrocq (qui est passée au roman pour ses derniers livres) ; des auteurs confirmés, publiés par d’autres maisons lorsqu’ils pratiquent d’autres genres littéraires, comme Dominique Costermans ou Kenan Görgün.

Le travail sur la nouvelle réalisé par Quadrature est reconnu dans le monde francophone, la maison d’édition étant régulièrement présente lors d’événements internationaux dédiés au genre et dans des sélections de prix littéraires. En Belgique, on se souviendra que le recueil de nouvelles de Zoé Derleyn, Le goût de la limace, figurait parmi les cinq finalistes de l’édition 2017 du Rossel – exploit double, dans le cadre d’un prix qui récompense peu les recueils de nouvelles et les livres publiés en Belgique.

 

La collection « Belgiques » des éditions Ker

Éditeur généraliste, les éditions Ker publient de la littérature générale, des romans pour la jeunesse et des essais. En 2017, elles ont lancé la collection « Belgiques ». Le concept : chaque volume est un recueil de nouvelles signé par un auteur belge francophone, qui y raconte ses images et représentations de la Belgique. Le pluriel du titre de la collection, qui insiste sur la pluralité, la multiplicité des facettes, appelle par nature le recueil de nouvelles, qui rassemble en un même ouvrage des textes aux tonalités et angles différents.

Les auteurs rassemblés dans la collection sont eux aussi une preuve de sa diversité. Une dizaine d’ouvrages ont été publiés jusqu’à présent, signés notamment par Frank Andriat, Véronique Bergen, Luc DelisseJean Jauniaux, Françoise Lalande, Giuseppe Santoliquido ou Michel Torrekens.

Les éditions Ker abordent aussi la nouvelle dans la collection « Double jeu ». La dimension mosaïque prévaut ici encore, mais d’une autre façon : les recueils publiés rassemblent des nouvelles de différents auteurs et autrices autour d’une thématique commune. Destinés en priorité à un public adolescent, ils abordent sous différents angles des questions qui font débat : le terrorisme et la radicalisation dans Le peuple des Lumières (2015), le populisme ou le racisme dans L’heure du leurre (2017), la crise climatique dans Les bâtisseurs (2019), ou encore le difficile respect de la vie privée à l’heure des réseaux sociaux dans #balancetavie (2019).

 « Opuscule » des éditions Lamiroy

Les nouvelles ne se publient quasiment qu’en recueil, qu’il soit individuel ou collectif. La raison en est d’abord économique. Le coût de fabrication d’un livre de peu de pages est quasi identique à celui d’un livre long. Or le lecteur souhaite en avoir pour son argent.

Dans le paysage éditorial, les éditions Lamiroy se singularisent avec la création de la collection « Opuscule ». La petitesse et la brièveté sont au cœur du projet, comme l’indique le nom de la collection. Chaque volume comporte une seule nouvelle, très courte. La collection s’étoffe rapidement : un nouveau livre est publié chaque semaine, en papier et en numérique. Une autre innovation des éditions Lamiroy est de proposer un abonnement à « Opuscule ».

Les écrivains du catalogue sont nombreux. L’éditeur a d’abord misé sur des auteurs « maison » : Thierry Coljon, Carlos Vaquera et Adeline Dieudonné (dont le seule-en-scène Bonobo Moussaka a été publié chez Lamiroy avant le succès de La vraie vie) signent quelques-uns des premiers volumes d’Opuscule. Ils ont été rapidement rejoints par d’autres, plumes confirmées ou auteurs novices.

Le succès est au rendez-vous et la collection connait dès lors des déclinaisons. Les hors-séries rassemblent plusieurs nouvelles sur un thème unique ; « Crépuscule » se spécialise dans le polar et « Adopuscule » rassemble des nouvelles destinées au public adolescent.

 

Marginales : une revue pour la nouvelle

Fondée en 1945 par Albert Aygueparse, la revue Marginales a cessé de paraître en 1991, avant de renaître en 1999 sous l’impulsion de Jacques De Decker (1945-2020). Elle marque de nouveau une pause en 2021. Chaque numéro propose un ensemble de textes brefs, majoritairement des nouvelles, d’auteurs différents, autour d’une thématique qui résonne avec l’actualité.

Marginales, une revue belge consacrée à la nouvelle

Les contributeurs, essentiellement mais pas exclusivement belges, sont nombreux et se renouvellent dans le temps : Claude Raucy voisine avec Luc Dellisse, Véronique Bergen, Liliane Wouters ou Eva Kavian.

 

Chez d’autres éditeurs

Sans lui dédier nécessairement une collection, plusieurs autres maisons d’édition généralistes réservent une place sinon large du moins appréciable à la nouvelle publiée en recueil. C’était notamment le cas des éditions Luce Wilquin, qui ont cessé leurs activités. Y ont été publiés des recueils de nouvelles de Dominique Costermans (Nous dormirons ensemble, Y a pas photo), de Patrick Dupuis (Enfin seuls, Passés imparfaits, Nuageux à serein) ou Emmanuèle Sandron (Sarah Malcorps, Je ne te mangerai pas tout de suite).

La collection « Plumes du coq » des éditions Weyrich, collection littéraire principale de l’éditeur, accueille elle aussi plusieurs recueils de nouvelles, inédits (L’été sous un chapeau de paille d’Alain Bertrand ; Sept histoires pas très catholiques d’Armel Job ; Au diable ! de Ziska Larouge ; Ceux que nous sommes de Christine Van Acker) ou rééditions (L’année dernière à Saint-Idesbald de Jean Jauniaux).

Même politique attentive à la nouvelle aux éditions M.E.O., où l’on retrouve notamment des recueils de Ben Arès (Les jours rouges), Daniel Simon (À côté du sentier ; Ce n’est pas rien), Liliane Schraûwen (Ailleurs ; Exquises petites morts) et Evelyne Wilwerth (La nacelle turquoise), chez Traverse (Lorenzo Cecchi, La solitude des anges gardiens ; Luc Dellisse, Le sas ; Daniel Fano, Privé de parking (Micro-fictions)…) ou au Cactus inébranlable (Lorenzo Cecchi, Protection rapprochée ; Anne-Michèle Hamesse, Ma voisine a hurlé toute la nuit et Le neuvième orgasme est toujours le meilleur ; Jean-Philippe Querton, T’as des nouvelles de Jpé ?…).

Enfin, on notera que la maison d’édition Marque belge a remporté en 2018 le prix de la première œuvre de la Fédération Wallonie-Bruxelles (prix pour lequel tous les genres littéraires concourent ensemble) avec un recueil de nouvelles : Pitou et autres récits d’Henri de Meeûs.

DES PRIX DÉDIÉS À LA NOUVELLE

Au dynamisme éditorial de la Belgique francophone dans le domaine de la nouvelle répond une relative attention au genre dans les prix littéraires. Certes, plusieurs récompenses sont ouvertes indifféremment aux romans et aux recueils de nouvelles – ce qui aboutit invariablement à la quasi-absence des seconds au palmarès. C’est le cas du prix Rossel, du prix Marcel Thiry (qui récompense un roman ou recueil de nouvelles une édition sur deux, l’autre étant consacrée à la poésie), du prix de littérature Charles Plisnier (consacré une année sur trois au roman et à la nouvelle, en alternance avec la poésie et le théâtre), ou encore du prix triennal de la prose de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

D’autres prix évitent toutefois de mettre en concurrence les nouvelles avec les romans. C’est notamment le cas du prix Emma Martin de l’A.E.B., qui récompense successivement un recueil de poèmes, un roman, un recueil de contes ou de nouvelles. Décerné jusqu’en 2019, le prix Franz De Wever de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique récompensait quant à lui alternativement un recueil de poèmes, un essai ou un recueil de nouvelles d’un auteur de moins de 40 ans.

Siège des éditions Quadrature, la ville d’Ottignies-Louvain-la-Neuve est un centre de rayonnement de la nouvelle francophone. En 1994, elle a accueilli le « colloque-festival » l’Année nouvelle, organisé par Vincent Engel. Elle a décerné, de 1992 à 2013, le prix Renaissance de la nouvelle. Porté par les pouvoirs communaux ottintois et animé par Michel Lambert et Carlo Masoni (1921-2010), le prix récompensait chaque année un recueil de nouvelles francophone. Après une interruption de sept ans, la Ville a relancé un prix dédié au genre : le prix de la nouvelle – Ville d’Ottignies Louvain-la-Neuve a connu une première édition en 2021, consacrée aux nouvellistes belges ; les éditions suivantes seront élargies à l’ensemble de la Francophonie.

TENDANCES ACTUELLES

La nouvelle forme un ensemble protéiforme. La brièveté même se révèle un critère inopérant, une nouvelle pouvant aller de quelques lignes, voire quelques mots, à une centaine de pages. Une longue nouvelle n’est donc pas forcément plus courte qu’un bref roman.

Parmi les textes publiés sous la bannière « nouvelle », plusieurs types ou sous-genres émergent néanmoins. Toujours pratiquée aujourd’hui, la nouvelle classique – celle des maîtres francophones du genre, Maupassant et Mérimée – est la nouvelle-histoire, qui suit un schéma narratif traditionnel : situation initiale – bouleversement – péripéties – situation finale avec résolution.

La nouvelle-instant a émergé plus récemment. La nouvelle-histoire développe une portion plus ou moins longue de la ligne du temps, selon un axe horizontal. La nouvelle-instant, au contraire, évoque un bref moment, dont elle explore les ramifications profondes. La logique est plutôt verticale dans ce cas.

La nouvelle à chute est pour sa part tout entière tendue vers la conclusion, qui, prenant le lecteur par surprise, en renverse le sens et place l’ensemble du récit dans une perspective nouvelle.

Récit de fiction, la nouvelle est également traversée par certains courants littéraires. L’histoire de la littérature fantastique belge montre que les grands fantastiqueurs ont souvent pratiqué la nouvelle : Franz Hellens, Jean Muno, Thomas Owen, Gérard Prévot, Jean Ray, Jacques Sternberg étaient tous aussi et surtout nouvellistes. Aujourd’hui, la nouvelle séduit toujours les auteurs de la mouvance fantastique, comme l’illustrent notamment Anne Richter (1939-2019) (La promenade du grand canal, Talus d’approche, 1995, rééd. L’âge d’homme, 2012 ; L’ange hurleur, L’âge d’homme, 2008 ; Le chat Lucian et autres nouvelles inquiètes, L’âge d’homme, 2010)  et Bernard Quiriny (Contes carnivores, Seuil, 2008, prix Rossel et prix Marcel Thiry ; Histoires assassines, Rivages, 2015 ; Vies conjugales, Rivages, 2019), voire plus occasionnellement Liliane Schraûwen (Ailleurs, M.E.O., 2015) ou Thierry Horguelin (Nouvelles de l’autre vie, L’oie de cravan, 2016). Dans le domaine de la SF et de l’anticipation aussi, la nouvelle est très présente. Alain Dartevelle (1951-2017) est l’un des nouvellistes remarquables dans cette mouvance, avec les recueils Amours sanglantes (L’âge d’homme, 2011), Narconews et autres mauvaises nouvelles du monde (Murmure des soirs, 2011) ou Toy boy et autres leurres (Academia, 2017).

L’histoire récente de la nouvelle belge francophone porte aussi la trace d’une veine érotique relativement présente. Ces recueils constituent des exceptions dans la bibliographie des auteurs (en fait surtout des autrices) qui s’y sont illustrés. Emmanuelle Pol s’y est essayée dès son premier livre, La douceur du corset (Finitude, 2009). Elle abandonne ensuite la nouvelle pour le roman, tout en creusant le sillon érotique dans son deuxième livre, L’atelier de la chair (Finitude, 2011). D’Evelyne Wilwerth, on notera Hôtel de la mer sensuelle (Avant-propos, 2015). En 2015, Corinne Hoex signe le troublant Valets de nuit (Les Impressions nouvelles, 2015) auquel François Emmanuel a offert le pendant l’année suivante avec 33 chambres d’amour (Le Seuil, 2016).

 

Anthologies et recueils collectifs : des panoramas de la nouvelle d’aujourd’hui

Plusieurs initiatives éditoriales ont vu le jour ces dernières années, qui offrent un panorama des nouvellistes et de la nouvelle belge actuelle.

Depuis 1997, le Ministère de la Communauté française, devenue Fédération Wallonie-Bruxelles publie chaque année, dans le cadre de la Fureur de lire, des plaquettes présentant chacune une nouvelle d’un auteur belge (l’opération s’est depuis lors élargie à la bande dessinée et à l’album pour la jeunesse). D’accès gratuit et largement distribuée sur le territoire belge francophone, la collection ainsi façonnée offre un intéressant reflet de la littérature belge de ces années, et en particulier de la production de nouvelles.

Pour les 30 ans de la Fureur de lire, en 2021, vingt-deux de ces plaquettes ont été rassemblées dans un recueil, Fenêtres sur court, 400e volume de la collection « Espace Nord ». Il ne s’agit pas de la première anthologie du genre parue dans la collection patrimoniale. Celle-ci avait en effet précédemment accueilli Nouvelles belges à l’usage de tous, florilège établi par René Godenne, reprenant des nouvelles parues depuis les débuts de la Belgique jusqu’à nos jours.

D’autres recueils collectifs rassemblent quant à eux des nouvelles spécialement écrites pour l’occasion. Les éditions françaises Magellan & Cie ont intégré à leur collection de recueils de nouvelles de différents pays et régions un Nouvelles de Belgique. Il rassemble des textes courts d’auteurs dont plusieurs pratiquent surtout la littérature dite de genre (polar, thriller, SF…) : Patrick Delperdange, Kenan Görgün, Katia Lanero Zamora, Nadine Monfils, Aiko Solovkine et la traduction d’une nouvelle de l’Équatorien Alfredo Noriega. Plusieurs de ces auteurs ont contribué au recueil Bruxelles noir, dirigé par Michel Dufranne pour les éditions Asphalte. Contrairement au précédent, ce recueil se revendique de la littérature noire. Les textes sont signés Barbara Abel, Emilie de Béco, Paul Colize, Jean-Luc Cornette, Patrick Delperdange, Kenan Görgün, Edgar Kosma, Katia Lanero Zamora, Nadine Monfils, et l’auteur néerlandophone Bob Van Laerhoven.

 

PARCOURS DE NOUVELLISTES

On l’a dit : la nouvelle est un genre marqué à la fois par une proximité, réelle ou supposée, avec le roman et par sa précarité économique. Conséquence directe : peu d’auteurs sont des nouvellistes purs, la plupart pratiquant aussi d’autres genres littéraires, et singulièrement le roman. Examen du parcours de quelques nouvellistes actuels.

 

Nouvellistes exclusifs ou à titre principal

Malgré les difficultés liées au genre, certains auteurs pratiquent la nouvelle de manière privilégiée ou même exclusive. C’est le cas des autrices Dominique Costermans et Agnès Dumont.

Dominique Costermans a publié son premier recueil de nouvelles, Des provisions de bonheur, aux éditions Luce Wilquin en 2003. Elle s’est depuis lors imposée comme l’une des grandes nouvellistes d’aujourd’hui. Elle s’est aventurée une seule fois sur le terrain du roman avec Outre-mère (Luce Wilquin, 2017), restant fidèle au genre court. Si la majorité de son œuvre a été publié chez Luce Wilquin, deux recueils ont paru chez Quadrature (Petites coupures et En love mineur) et un autre chez Weyrich (Les petits plats dans les grands). L’autrice saisit des instants de vie, y évoque l’enfance et le passé, entre nostalgie et humour.

Toute l’œuvre de nouvelliste d’Agnès Dumont a été publiée chez Quadrature. Depuis Demain, je franchis la frontière (2008), ce sont quatre recueils qui ont vu le jour. L’autrice a exploré les terres du roman policier, avec Le gardien d’Ansembourg chez Luc Pire et Une mort pas très catholique, puis Neige sur Liège tous deux co-écrits avec Patrick Dupuis chez Weyrich. La nouvelle reste toutefois son genre de prédilection et lui a notamment valu le prix Georges Garnir 2011 de l’Académie royale de langue et littérature françaises de Belgique pour J’ai fait mieux depuis.

Thierry Horguelin est lui aussi un adepte de la nouvelle. Il travaille tantôt l’écriture à contrainte, tantôt la littérature de genre (fantastique, policier…), jouant avec les références littéraires. Parmi ses recueils : Le voyageur de la nuit (L’oie de cravan, 2005), La nuit sans fin (L’oie de cravan, 2009).

Auteur de deux recueils publiés aux éditions du Tripode (Les pas perdus, 2018 et L’éternité, brève, 2019), Étienne Verhasselt semble lui aussi avoir trouvé sa manière dans la nouvelle.

 

De la nouvelle au roman

Étant donné le rapport de force entre le roman et la nouvelle, on ne s’étonnera pas que plusieurs auteurs qui ont commencé par la nouvelle soient ensuite passés au roman. C’est par exemple le cas d’Aliénor Debrocq. Après deux recueils de nouvelles remarqués publiés chez Quadrature (Cruise control, 2013 et À voie basse, 2017), elle s’essaie au roman, d’abord chez Luce Wilquin (Le tiers sauvage, 2018), puis aux éditons ONLiT (Cent jours sans Lily, 2020).

Vincent Engel a d’abord été un auteur de nouvelles (Légendes en attente, 1993, La vie malgré tout, 1994), avant de passer au roman – non sans revenir parfois à la nouvelle (Opera mundi, Le grand miroir, 2009 ; Belgiques, Ker, 2017).

L’œuvre littéraire de Thomas Gunzig a d’abord été celle d’un nouvelliste. Son premier recueil, Situation instable penchant vers le mois d’août, date de 1993 et a paru aux éditions Jacques Grancher. Il publie encore plusieurs recueils avant de passer au roman en 2001, avec Mort d’un parfait bilingue (Au diable vauvert), qui lui vaut le prix Rossel. Il alterne alors recueils de nouvelles et romans, mais délaisse le genre court depuis 2009 et son dernier recueil Assortiment pour une vie meilleure (Au diable vauvert, 2009). De romans en nouvelles, mais aussi dans ses pièces de théâtre et ses chroniques, ce polygraphe a bâti une œuvre singulière, à l’humour corrosif et à l’imagination débridée.

 

Du roman à la nouvelle

Patrick Dupuis est l’un des rares exemples du parcours inverse. S’essayant d’abord au roman (Le conseiller, 1993, Le maître immobile, 1996), il trouve ensuite dans la nouvelle son genre de prédilection (Ceux d’en face, 2003, Nuageux à serein, 2009, et Passés imparfaits, 2012). Il s’est toutefois récemment replongé dans le roman (policier), en duo avec une autre nouvelliste, Agnès Dumont, pour Une mort pas très catholique (Weyrich, 2020) et Neige sur Liège (Weyrich, 2021).

 

Romanciers et nouvellistes

D’autres auteurs pratiquent la nouvelle et le roman simultanément. Caroline Lamarche, Michel Lambert, Jacques Richard et Liliane Schraûwen passent du roman à la nouvelle et de la nouvelle au roman, qui pratiquant un peu plus l’une, qui fréquentant un peu plus l’autre. Leur travail est également reconnu dans les deux genres.

Caroline Lamarche façonne depuis une trentaine d’années une œuvre où le roman voisine avec la nouvelle. Dans le domaine de la nouvelle, précisément, elle explore les différentes formes du genre. Son premier livre est un recueil de nouvelles : J’ai cent ans, paru chez L’âge d’homme en 1995. Son deuxième livre, Le jour du chien (Minuit, 1996) se lit aussi bien comme un roman construit sur une série de variations que comme un recueil de nouvelles. Il vaut à l’autrice le prix Rossel. Dans la maison un grand cerf (Gallimard, 2017, prix triennal de prose de la Fédération Wallonie-Bruxelles) se structure également comme un ensemble de variations – plaçant l’ouvrage entre le récit et le recueil de nouvelles. Dans un recueil de facture plus classique, Nous sommes à la lisière (Gallimard, 2019), Caroline Lamarche évoque au plus près la condition animale et son rapport à l’humanité. L’ouvrage a été salué par le Goncourt de la nouvelle.

Après un premier recueil de nouvelles, De très petites fêlures, paru en 1987 (L’âge d’homme), Michel Lambert a publié un roman, Une vie d’oiseau, qui lui a valu le prix Rossel. Il a ensuite pratiqué les deux genres, s’adonne principalement à la nouvelle depuis les années 2010. L’auteur travaille essentiellement la nouvelle-instant, saisissant ses personnages dans un moment de mélancolie, ou lors d’une rencontre inattendue, qui font resurgir toute leur histoire et les laissent prêts à basculer.

Après deux récits parus aux éditions Albertine, La plage d’Oran (2010) et Petit traitre (2012), l’écrivain et plasticien Jacques Richard est passé à la nouvelle et a publié deux recueils aux éditions Zellige : L’homme peut-être (2014) et Scènes d’amour et autres cruautés (2015), qui laissent parler tout son talent de styliste. Il revient ensuite au roman. En 2020, il passe à nouveau au format court avec Nues (Onlit).

Autrice d’essais et de livres pour la jeunesse, Liliane Schraûwen est aussi et surtout romancière et nouvelliste. Depuis le début des années 1990, elle pratique les deux genres parallèlement. Publiées aux éditions Luce Wilquin (Instants de femmes, 1997 ; Le jour où Jacques Brel…, 1999), chez Quadrature (Race de salauds, 2005), M.E.O. (Ailleurs, 2015 ; Exquises petites morts, 2020) ou Zellige (À deux pas de chez vous, 2016), ses nouvelles déclinent tantôt une veine fantastique, tantôt une thématique érotique, tantôt encore des faits divers.

À ces quelques exemples, on pourrait encore ajouter celui de Jacques De Decker (1945-2020). Bien qu’ayant surtout écrit pour le théâtre – des œuvres originales, des adaptations et des traductions, il a pratiqué la nouvelle et le roman à parts égales et simultanément. Son dernier recueil de nouvelles, Modèles réduits, quintessence de son art de nouvelliste, a été publié en 2010 à La Muette.

 

Nouvellistes occasionnels

Plusieurs romanciers pratiquent occasionnellement la nouvelle, comme une sorte d’à-côté de leur œuvre. Amélie Nothomb indique n’écrire des nouvelles qu’à l’occasion de commandes[4]. La plupart de ces textes sont disséminés dans des recueils collectifs ou revues. Un seul recueil personnel a été publié, Brillant comme une casserole, paru chez l’éditeur belge La Pierre d’Alun (avec des illustrations de Kikie Crêvecoeur), alors que ses romans sont publiés aux éditions Albin Michel. La situation d’Armel Job est assez similaire. Alors que ses romans paraissent chez Robert Laffont, son recueil de nouvelles Sept histoires pas très catholiques a été publié aux éditions Weyrich, dans la collection « Plumes du coq ».

 

Publié chez Albin Michel comme Amélie Nothomb, Éric-Emmanuel Schmitt est principalement romancier et auteur de théâtre. Les nouvelles sont plus rares dans son œuvre, mais ses recueils sont publiés chez son éditeur principal, et semblent donc s’inscrire davantage dans le continuum de son œuvre (Odette Toulemonde et autres histoires, 2006 ; La rêveuse d’Ostende, 2007 ; Concerto à la mémoire d’un ange, 2010 ; Les deux messieurs de Bruxelles, 2012 ; La vengeance du pardon, 2017). Bien que nouvelliste occasionnel, Schmitt a remporté le Goncourt de la nouvelle en 2010 pour Concerto à la mémoire d’un ange.

Romancier, Grégoire Polet a publié à ce jour un seul recueil de nouvelles : Soucoupes volantes (2021), paru chez Gallimard comme son œuvre romanesque. Un coup d’essai qui lui a valu le prix de la nouvelle – Ville d’Ottignies Louvain-la-Neuve, dont il est ainsi le tout premier lauréat. Interviewé à l’occasion de ce prix, l’auteur a commenté la différence entre roman et nouvelles dans son œuvre : « C’est très différent d’écrire une nouvelle, c’est une joie plus rapide, plus intense. Mais j’aime beaucoup le roman : on peut avoir plusieurs amours. […] [La nouvelle et le roman] C’est une autre disposition d’esprit, presque une autre discipline. C’est comme si on monte sur un ring de boxe ou un terrain de foot, ce n’est pas la même chose. Sur le terrain de foot, tu sais que tu vas jouer longtemps, tu te prépares pour un truc de longue haleine. Sur le ring de boxe, c’est à la vie à la mort en quelques minutes »>[5]

Geneviève Damas est tout d’abord une autrice de théâtre. Elle est venue au roman en 2011, avec Si tu passes la rivière (Luce Wilquin). Un genre qu’elle n’a cessé de pratiquer depuis lors (tout en publiant encore du théâtre). Après le succès de son premier roman (prix Rossel, prix des Cinq continents de la francophonie), elle a publié un unique recueil de nouvelles, Benny, Samy, Lulu et autres nouvelles (Luce Wilquin, 2014).

Quant à Antoine Wauters, il a commencé par la poésie avant de se tourner résolument vers le roman, passant pour l’occasion des éditions Cheyne aux éditions Verdier. Après plusieurs romans salués par la critique (Nos mères, 2014, Pense aux pierres sous tes pas et Moi, Marthe et les autres, 2018, Mahmoud ou la montée des eaux, 2021), il s’octroie un détour par le recueil de nouvelles au début de l’année 2022 avec Le musée des contradictions (éditions du Sous-sol), avec une reconnaissance immédiate puisque le livre lui a valu le Goncourt de la nouvelle 2022.

Un seul recueil aussi pour les romanciers Christopher Gérard (Osbert et autres historiettes, L’âge d’homme, 2014) et Xavier Hanotte (L’architecte du désastre, Belfond, 2005), qui sont ensuite revenus au roman, confirmant qu’il est leur forme de prédilection.

 

* * * 

La nouvelle est aujourd’hui un genre assez méconnu et peu prisé du grand public. Elle est pourtant pratiquée par de nombreux auteurs qui assurent la diversité et le renouveau du genre. Ils sont soutenus par quelques maisons d’édition qui s’aventurent avec conviction sur ce terrain « de niche ».


[1] Cahiers Simenon 6. Le Nouvelliste et le conteur, 1993, p. 39, cité dans René Godenne, « Petit sottisier de la nouvelle », URL : http://renegodenne.be/?p=712

[2] Éric-Emmanuel Schmitt, Concerto à la mémoire d’un ange, Paris, Albin Michel, 2010, p. 209.

[3] Pascal Durand et Tanguy Habrand, Histoire de l’édition en Belgique XVe-XXIe siècle, Bruxelles, Les Impressions nouvelles, 2018, p. 511.

[4] « Amélie Nothomb : de la musique avant toute chose », dans Le Carnet et les Instants n° 196, octobre-décembre 2018, URL : https://le-carnet-et-les-instants.net/archives/amelie-nothomb-de-la-musique-avant-toute-chose/

[5] Les « Soucoupes volantes » dans le firmament de la nouvelle », propos recueillis par Jean-Claude Vantroyen, dans Le Soir, 12/10/2021, URL : https://www.lesoir.be/400071/article/2021-10-12/les-soucoupes-volantes-dans-le-firmament-de-la-nouvelle


 © Nausicaa Dewez, septembre 2020

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Gabrielle Vincent et les 20 ans d’Ernest et Célestine

Par administrateur,

© Ernest & Célestine

Après Elisabeth Ivanovsky1, abordée en 2007, une opportunité se présente à nouveau avec Gabrielle Vincent de faire une incursion dans le patrimoine de la littérature de jeunesse belge. Notons que cette grande artiste avait déjà fait l’objet d’un dossier spécial rédigé2 par Michel Defourny en 1994 pour la revue Lectures.

   Ernest & Célestine | © Ernest & Célestine

Les enfants de papier de Gabrielle Vincent sont nés en 1981. Ils ont 40 ans. À cette occasion, ils ont invité chacun.e à venir fêter leur anniversaire avec eux en ouvrant grandes les portes de la maison du bonheur par le biais d’une superbe exposition à la Chapelle de Boondael, lieu majestueux et cosy, sise dans la commune d’Ixelles où l’autrice a vécu durant 40 ans Bienvenue chez Ernest et Célestine ! Visite guidée dans la vie de leur autrice et dans son œuvre, en compagnie de sa petite-nièce Émeline Attout et de son filleul Benoît Attout.

PETITE BIO3 : IL ÉTAIT UNE FOIS MONIQUE MARTIN / GABRIELLE VINCENT

Monique Martin | DR

Née à Bruxelles en 1928, Monique Martin y passe toute sa vie jusqu’à sa mort, le 24 septembre 2000. Un père employé de banque qui joue du violon, une mère pianiste à ses heures… Monique et ses sœurs grandissent dans une maison amie des arts. Si ses trois sœurs sont plus adeptes de musique, Monique, quant à elle, n’a jamais cessé de dessiner.

Après la guerre, Monique Martin s’inscrit à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles et en sort avec le premier prix en 1951. Ses expositions suscitent un enthousiasme soutenu du public bruxellois, qui apprécie tout autant le trait de ses grandes séries au fusain, à l’aquarelle ou à l’huile que ses sujets puisés dans l’actualité, la vie quotidienne ou les voyages.

Au début des années 1980, Monique Martin franchit vraiment le pas, quitte le confort de la peinture et des galeries bruxelloises pour passer du côté des illustrateurs. Elle se choisit un pseudonyme. Monique Martin devient alors Gabrielle Vincent et relève un défi de taille : faire vivre des personnages au long cours.

Crayonné des personnages d’Ernest & Célestine |  © Ernest & Célestine

En 1981, c’est la naissance d’Ernest et Célestine avec Ernest et Célestine ont perdu Siméon. S’ensuivront 25 albums publiés aux éditions Duculot, puis Casterman, le dernier, Les questions de Célestine, datant de 2000.

Monique Martin / Gabrielle Vincent est considérée comme la meilleure illustratrice belge et à l’avant-garde du métier d’illustrateur de livres pour enfants. La série Ernest et Célestine, et d’autres œuvres mondialement connues comme La Petite Marionnette et Un Jour, Un Chien, lui ont valu de nombreuses récompenses (meilleur livre de jeunesse au Salon du Livre de Montreuil, Prix Sankei Children’s books Publications Prize du Japon…)4.

En tant qu’artiste-peintre, elle exploite le noir et blanc jusque dans les années 1960 (encre, fusain, crayon…). Plus tard, elle utilise la couleur et explore de nouvelles techniques comme l’aquarelle, le pastel et la couleur à l’huile.

Pour découvrir plus en détail l’autrice-illustratrice et son œuvre, le lecteur consultera le dossier réalisé par Monique Malfait-Dohet pour la revue Libbylit5.

UNE FONDATION MONIQUE MARTIN

Benoît Attout, son filleul et ayant droit, est à l’origine d’une fondation destinée à faire reconnaître Monique Martin en tant qu’artiste-peintre6. Les objectifs poursuivis sont : conserver et faire connaître le patrimoine artistique (peinture et illustration) ; promouvoir l’art et la culture en Belgique et ailleurs ; transmettre les valeurs défendues par l’artiste dans le monde. « Nous voulons diffuser le plus largement possible les valeurs développées dans les albums d’Ernest et Célestine : l’Amour, la tolérance, le respect, l’écologie, le recyclage, la justice, l’humilité… »

Ernest, c’est le gros ours et Célestine la petite souris. Avec cette amitié le ton était donné. L’autrice évoque d’emblée la différence, par le biais des deux personnages à la cohabitation au départ improbable. Dans le premier album, Ernest et Célestine ont perdu Siméon, l’autrice met en scène le doudou, un thème universel, un souvenir qui résonne en chacun de nous, la perte, l’oubli de l’objet sacré.

UN BEL ALBUM COLLECTOR POUR FÊTER L’ANNIVERSAIRE D’ERNEST ET CÉLESTINE

Ernest et Célestine, ou comment l’amitié entre un grand ours et une petite souris a commencé. Ce livre, intitulé Ernest et Célestine, ou comment tout a commencé est édité spécialement pour cet anniversaire et remonte aux origines de ce chef-d’œuvre de la littérature jeunesse en réunissant le premier (Ernest et Célestine ont perdu Siméon) et le dernier album (Les questions de Célestine) créé par Gabrielle Vincent.

Un dossier exclusif s’ajoute à ces histoires, pour découvrir qui était Gabrielle Vincent / Monique Martin, ses premiers dessins préparatoires, et un hommage inédit de Daniel Pennac avec qui elle a entretenu une longue et belle amitié épistolaire.

UNE EXPOSITION POUR FÊTER LES 40 ANS7

L’idée était de pénétrer au sein de la maison où vivent les deux héros en mettant en évidence, à travers divers albums, les valeurs prônées par l’artiste : inclusion, partage, ouverture aux autres, recyclage… Une autrice d’une brûlante actualité… L’organisatrice de l’exposition explique que le choix des images s’est voulu le plus représentatif possible de cette ambiance dans les moments d’une journée vécue, allant du réveil au coucher.

Vue de l’exposition à la chapelle Bondael © Isabelle Decuyper

Le visiteur pénètre d’abord le matin chez Ernest et Célestine, participe à leur réveil et au petit déjeuner. Il vivra avec eux jusqu’à la fin de la journée, où c’est bassine et pyjama party… avec l’heure du coucher. Les éléments du décor sont ceux qui étaient présents dans la maison de l’artiste.

Pour ce duo, il s’agissait d’être toujours dans une atmosphère de fête. La musique les accompagnait tous les jours, notamment avec le violon d’Ernest. La couture avec le patchwork et sa couseuse, le recyclage en ce qui concerne les meubles rendent bien l’esprit anti-consommation à tout prix.

© Ernest & Célestine

Chez Ernest et Célestine, c’est aussi prendre le temps d’organiser des fêtes, c’est-à-dire concocter des petits plats sur la cuisinière. Le tout dans un joyeux désordre évoqué précédemment par Myriam Mallié8. Ou plus récemment par Monique Malfait-Dohet9 : « Désordre et rigueur. Cette opposition est surtout développée dans les Ernest et Célestine. Que ce soit à cause de la maladie ou d’un accident, de l’organisation de fêtes démesurées ou par paresse, la maison est le lieu d’un joyeux laisser-aller, la vaisselle et le rangement ne font pas partie des préoccupations majeures des personnages. »

BRUXELLES

Gabrielle Vincent a toujours vécu à Ixelles, Place du Châtelain. Elle fréquentait les Marolles… Le lecteur retrouvera dans son œuvre des monuments, des décors extérieurs de Bruxelles, comme dans Le petit ange à Bruxelles. L’artiste était toujours dans une logique de déconsommation. Comme dans cet album où Ernest et Célestine accueillent une vieille tante casse-pied et pour laquelle ils vont à la déchetterie récupérer matelas, tapis, lampe… sauf que le matelas a pris l’eau…

JOURS DE FÊTE

Ernest et Célestine se préparent souvent à faire la fête. On les retrouve manipulant des bouts de tissus pour inventer divers scénarios. Célestine est une artiste. Elle prépare la fête puis accueille les invités sans aucune limite.

© Ernest & Célestine

Tout le monde est bienvenu, y compris pour fêter Noël, la fête préférée de l’héroïne. Son rêve est d’aller fêter Noël dans la forêt autour d’un sapin toujours bien vivant, qui n’aura pas été coupé pour l’occasion (cf. l’album Le sapin de Noël).
C’est la maison du bonheur, une maison durable qui pense à la protection de la nature ! Tous les moments sont des moments de rire, de fête même quand ceux-ci sont difficiles.

EN PROJET

– La création d’une fresque en 2022 et un retour d’Ernest et Célestine sur grand écran avec un long métrage annoncé pour décembre 2022 : https://folivari.com/projet/ernest- et-celestine-voyage-en-charabie/
– Et une nouvelle série télé : https://folivari.com/projet/ernest- celestine-la-collection-saison-2/


Notes
1. Dans Lectures, n° 149, janvier-février 2007, pp. 56-58, À visualiser en ligne via calaméo

2. Hommage à Gabrielle Vincent dans Lectures, n° 77, mars-avril 1994, dans un dossier spécial rédigé par Michel Defourny, pp. I-V et bibliographie, pp. VI-X, À visualiser en ligne via calaméo
3. Extrait du dossier de presse : « Ernest et Célestine 40 ans d’amitié : Voici comment tout a commencé », dossier de Fanny Husson-Ollagnier et Émeline Attout, Casterman, 2021, 20 p.
4. Extrait du site fondation-monique-martin.be.
5. Dossier « Gabrielle Vincent ou l’art de la suggestion : le parcours artistique d’une tendre insoumise », par Monique Malfait-Dohet, Libbylit, 137, juin-août 2019, pp. 5-15. À visualiser en ligne via calaméo
6. https://ernest-et-celestine.com/a-propos/ fondation-monique-martin/
7. L’exposition intitulée Bienvenue chez Ernest & Célestine s’est tenue du 13 novembre au 19 décembre 2021 à la Chapelle Bondael (Bruxelles). Plus d’informations sur : https://ernest-et-celestine.com/40-ans/les-expositions/
8. Myriam Mallié, « Gabrielle Vincent : Ernest et Célestine. Éloge du désordre », Lectures, n° 55, mai-juin 1990, pp. 15-16. À visualiser en ligne via calaméo
9. Extrait p. 6 du dossier « Gabrielle Vincent ou l’art de la suggestion : le parcours artistique d’une tendre insoumise », par Monique Malfait- Dohet, Libbylit, n° 137, juin-août 2019, pp. 5-15. À visualiser en ligne via calaméo


© Isabelle Decuyper pour Lectures•Cultures N°27, Mars-Avril 2022

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Education

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auteurs a la maison

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Le Prix du parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles

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Le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles remet chaque année un prix littéraire qui récompense un auteur ou une autrice belge francophone. Le prix est attribué chaque année pour récompenser successivement une pièce de théâtre, une œuvre en prose, un recueil poétique et un essai.

 

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Masterclasse avec Anne Herbauts

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Anne Herbauts a reçu en 2021 le Prix triennal de littérature de jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Autrice et illustratrice, elle explore le livre et ses multiples langages : texte, image, plis, papier, couture. Selon ses propres mots, « L’important n’est pas de faire beau, c’est de faire juste. ». Pour cette masterclasse, Anne Herbauts dialogue avec la poétesse Anna Ayanoglou, également primée en 2021 par la Fédération Wallonie-Bruxelles.

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J’ai déjà réussi à te dire tout ça

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Une exposition d’Elisa Sartori, prix de la première œuvre en littérature jeunesse

Elisa Sartori | © Jean Poucet – FWB

Elisa Sartori est la lauréate 2021 du prix de la première œuvre en littérature jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour son livre, Je connais peu de mots. Ce prix, doté de 5000 euros, récompense chaque année un ou une jeune artiste pour une première publication dans le domaine de la littérature jeunesse. L’objectif de cette récompense est double. Elle permet dans un premier temps de faire découvrir un auteur ou une autrice en attirant l’attention des professionnels et du grand public sur un travail de qualité. Elle soutient dans un second temps un jeune créateur ou une jeune créatrice qui débute une carrière littéraire.

 

Une exposition itinérante

Depuis plusieurs années, le prix s’accompagne d’une exposition afin de soutenir les artistes primés. Cette exposition peut être empruntée gratuitement pendant trois ans par les écoles, les centres culturels, les bibliothèques ou par d’autres associations œuvrant dans le champ de la culture ou de l’alphabétisation[1]. D’autres expositions, comme celle de Sandra Edinger[2] (lauréate 2020 du prix de la première œuvre) ou celle de Gaya Wisniewski[3] (lauréate 2019 de ce même prix) sont par ailleurs toujours disponibles en prêt. L’exposition mise en place par Elisa Sartori s’appelle J’ai déjà réussi à te dire tout ça et est basée sur son livre Je connais peu de mots. Rien que par le choix de ces deux titres, celui du livre et celui de l’exposition, l’autrice invite le public à se questionner sur ce que représente l’appropriation d’une langue étrangère, plus encore en milieu inconnu.

Vue de l’exposition J’ai déjà réussi à te dire tout ça | © Jean Poucet – FWB

« Je connais peu de mots » : un leporello

Je connais peu de mots est un livre multi public qui peut aussi bien toucher les enfants que les adultes. Je connais peu de mots exprime le bonheur et la satisfaction qu’il peut y avoir à s’immerger dans une nouvelle langue mais dévoile aussi la frustration liée aux difficultés que rencontre l’apprenant qui tente de maitriser une autre langue que la sienne. Le propos du livre s’articule autour d’une analogie entre deux apprentissages à première vue différents mais tellement semblables aux yeux d’Elisa Sartori : apprendre une langue et apprendre à nager. Dans les deux cas, il s’agit de s’immerger complètement et d’acquérir une certaine grâce, ou du moins d’être à l’aise dans nos mouvements. Mouvements illustrés dans ce leporello par une femme dessinée en bleu entrant et sortant de l’eau au fur et à mesure de la lecture. Le technique particulière de pliage utilisée pour ce livre a permis à Elisa Sartori d’exploiter les deux faces de ce leporello également appelé livre-accordéon. L’ouvrage se distingue par le minimalisme des illustrations, le choix d’une thématique sensible et originale mais aussi par la qualité de la réalisation de l’objet-livre. Tous ces éléments ont, lors des délibérations, suscité l’enthousiasme du jury chargé d’attribuer le prix de la première œuvre en littérature jeunesse.

 

L’origine du projet

C’est au cours de ses années à l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles qu’Elisa Sartori a commencé à écrire Je connais peu de mots. Le livre s’est d’abord construit petit à petit grâce aux conseils de ses différents professeurs. À ce stade, il n’était, d’après les mots de l’autrice, « qu’une poésie (volontairement) remplie d’erreurs ».

Avec le temps, Elisa Sartori a acquis de nouvelles compétences et le projet initial s’est développé et a évolué vers une autre forme. Les illustrations sont le fruit d’une collaboration avec une danseuse, Bianca Zueneli. Elisa Sartori a pris des photos de Bianca Zueneli pour les utiliser comme modèle afin de créer ses illustrations. Il ne s’agit pas d’une reproduction fidèle : l’autrice travaille à partir de photos mais modifie le corps de la danseuse pour arriver à plus d’expressivité, comme dans les illustrations du livre.

Le texte tel que publié dans le livre a été écrit d’abord en italien. Elisa Sartori s’est fait accompagner par une traductrice, Anne Brunet. C’est grâce aux échanges avec celle-ci mais aussi avec son éditrice, Odile Flament, que le texte a pris sa forme définitive en français.

Je connais peu de mots est publié en 2020 aux éditions CotCotCot. De nombreuses critiques littéraires positives ont suivi sa parution. En novembre 2021, Elisa Sartori a reçu le prix de la première œuvre en littérature jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Les mois qui ont suivi cette remise de prix ont rimé pour l’autrice avec travail, excitation et collaboration afin d’aboutir à la mise en place de l’exposition J’ai déjà réussi à te dire tout ça.

 

« L’exposition parle du livre mais sans pour autant le faire à cent pour cent » 

L’exposition a été pensée et installée afin de répondre à un double objectif : mettre en avant les thèmes du livre et rendre leur médiation possible via des canaux et des mots différents que ceux présents dans l’ouvrage. C’est par des illustrations, des photos, des textes ainsi qu’une création audio qu’Elisa Sartori nous permet de nous imprégner de l’expérience de l’apprentissage d’une langue étrangère.

L’exposition est mise en place de sorte que l’on comprenne les différentes étapes de cet apprentissage. Elle repose sur un fil rouge, celui de la migration. Tout cela en 4 escales !

Vue de l’exposition J’ai déjà réussi à te dire tout ça | © Jean Poucet – FWB

Tout d’abord, une suite de 8 sérigraphies réalisées sur des documents authentiques liés au parcours d’Élisa Sartori (billet d’avion, lettre de sa maman…) accueille les visiteurs et montre la réalité à laquelle doit faire face la personne qui arrive dans un nouveau pays. Dans l’espace de l’exposition, on trouve quatre panneaux sur lesquels sont reproduites des silhouettes féminines bleues à taille humaine qui rappellent celles du livre et illustrent le voyage et l’arrivée dans un pays étranger. Trois portraits réalisés par Elisa Sartori décrivent le sentiment d’immersion lié à l’appropriation des codes nécessaires à une intégration réussie. Enfin, l’exposition se termine par une création audio. C’est une lecture par Elisa Sartori du premier jet de son livre, le texte poétique initial.

Vue de l’exposition J’ai déjà réussi à te dire tout ça | © Jean Poucet – FWB

En ajoutant de la narration à son exposition, Elisa Sartori a rendu celle-ci ludique, attrayante et accessible au tout public. La visite est de plus facilitée par un cahier créatif du visiteur[4] qui s’adresse aux plus jeunes mais aussi aux apprenants et apprenantes moins à l’aise avec la langue française.

L’autrice vogue déjà vers d’autres projets

Elisa Sartori a déjà plusieurs projets en cours pour les mois et les années qui viennent. Elle travaille notamment sur une plaquette qui sera publiée dans le cadre de la Fureur de lire, en octobre 2022. L’autrice collabore également avec Dina Melnikova sur un projet de roman graphique prévu pour 2024. On l’aura compris, le parcours d’autrice d’Elisa Sartori ne fait que commencer !


Notes :

[1] Les informations concernant le prêt de l’exposition J’ai déjà réussi à te dire tout ça  et son calendrier de circulation sont disponibles sur le site Littérature de jeunesse
[2] Les informations concernant l’exposition Revers de Sandra Edinger sont disponibles sur le site Littérature de jeunesse
[3] Les informations concernant l’exposition Un thé avec Gaya de Gaya Wisnieski sont disponibles le site Littérature de jeunesse
[4] Le cahier créatif est disponible en téléchargement gratuit 


© Emilie Casano pour Objectif plumes, 2022

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Nouveautés en littérature belge disponibles en prêt numérique

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Nouveautés 2022 disponibles en prêt numérique

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Féminisme et littérature

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Entretien avec Léonie Bischoff, Malika Madi, Nicole Malinconi et Alix Garin

Léonie Bischoff, Malika Madi, Nicole Malinconi et Alix Garin : quatre autrices aux parcours de vie et d’écriture divers, de générations et d’origines différentes. Parce qu’elles écrivent sur des femmes fortes, qu’elles racontent la maternité ou l’avortement, elles sont toutes quatre souvent étiquetées comme des autrices féministes. Toutes ne se reconnaissent pas dans ce label pour autant. Pour Objectif plumes, chacune évoque son rapport au féminisme et en quoi il est déterminant – ou pas – dans son œuvre littéraire.

Léonie Bischoff : « J’étais contente de faire, en tant que femme, un livre avec un personnage féminin fort »

Léonie Bischoff | © Benedicte Maindiaux

Léonie Bischoff est une autrice de bande dessinée de nationalité suisse qui vit à Bruxelles depuis de nombreuses années. Son album consacré à l’écrivaine Anaïs Nin, intitulé Anaïs Nin : sur la mer des mensonges, a remporté en 2021 le Prix du public au Festival d’Angoulême. Figure ambigüe et complexe, Anaïs Nin y est avant tout présentée comme une personnalité forte, éprise de liberté et animée par un vif besoin de créer.

Léonie, toutes tes bandes dessinées solo mettent en scène des figures féminines, que ce soit Gaby dans Princesse Suplex, Adèle dans Hoodoo Darlin’ ou Anaïs Nin dans le roman graphique éponyme. Peut-on leur trouver des caractéristiques communes ?

Je crois que la caractéristique commune, je m’en suis rendu compte après avoir fini le dernier, donc celui sur Anaïs Nin, c’est que ce sont toutes des femmes qui cherchent à gagner plus d’espace et de liberté que ce qu’elles ont à la base. Après, elles ont toutes des contextes de vie, des époques et des challenges bien spécifiques… Je pense à une force de caractère et un refus de se laisser enfermer ou réduire à ce que les autres voudraient qu’elles soient, c’est ça surtout leur point commun. Et ce sont tous des personnages qui m’inspirent, même si sur les trois, il y en a deux que j’ai complètement inventés, qui sont plus des expressions de ce désir qu’il y a en moi de gagner plus d’espace.

 Dans Anaïs Nin, tu utilises ce qu’on appelle le female gaze, le regard féminin…

Au moment où j’ai écrit Hoodoo Darlin, je n’avais encore jamais entendu parler du female gaze ou même du male gaze, et c’était plus quelque chose d’inconscient. J’étais déjà consciente que les œuvres réalisées par des femmes me parlaient différemment, me parlaient peut-être plus intimement, et donc j’étais contente de faire, en tant que femme, un livre avec un personnage féminin fort et de le montrer… Par exemple, il y a une scène où Adèle est nue mais elle n’est pas sexualisée, et pour moi, ça, c’était important.

Pour Anaïs Nin, c’était évident qu’il fallait être de l’intérieur parce que c’est comme ça qu’elle écrit, c’est comme ça qu’elle m’a touchée, c’est comme ça qu’elle existe. Et c’était aussi en opposition à des biographies qui ont été écrites sur elle, en particulier dans les années 90, avec des gens qui ont l’impression qu’ils ont tout compris et qui sont complètement à côté de la plaque en fait… Qui sont super jugeants, super pathologisants…  C’était vraiment en opposition à ça, et donc j’ai essayé d’être très fidèle à sa façon à elle d’écrire, à ses mots à elle, à ne pas chercher une vérité mais à essayer de retranscrire son expérience. En ajoutant par-dessus tout le côté visuel qui me venait en la lisant.

   Extrait de Anaïs Nin : sur la mer des mensonges | © Casterman

 

En tant que lecteurs et lectrices, on peut aisément penser que ces livres parlent également de toi. Quels liens peux-tu faire entre ces personnages, tes pratiques littéraires et ta vie à toi ?

Il y a des liens évidemment, en particulier avec Anaïs Nin. La période dont je parle dans ma BD, c’est une période où elle est aussi débutante, où elle se considère encore vraiment comme novice, même si elle écrit depuis qu’elle a 11 ans pratiquement quotidiennement : elle n’a encore rien publié donc elle ne se sent pas légitime, elle se compare beaucoup aux autres, elle veut écrire un roman et elle n’a pas encore réussi à le faire, donc elle est très frustrée… Ça faisait vraiment écho à ce que je ressentais… et quand je l’ai découverte, j’étais étudiante, et j’étais extrêmement frustrée, très en colère et très triste d’avoir l’impression de ne pas être à la hauteur. Et donc elle m’a vraiment beaucoup aidée parce que dans son cheminement, on voit justement sa persévérance et ses échecs, et comment elle s’y remet et comment elle arrive aussi à confronter la critique extérieure et à faire le tri entre ce qui est bon pour elle et ce qu’elle a le droit de rejeter. Et tout ça, ça a été très inspirant pour moi.

Au moment de Princesse Suplex, mon féminisme n’était pas encore du tout suffisamment nourri de lectures et de théorie et tout était très flou. À part un gros malaise que je ressentais par rapport à ma place dans la société, aux difficultés que j’avais à être en relation amoureuse, à être en amitié avec des hommes, aux difficultés que je pouvais avoir dans mes rapports à mes parents. Un malaise que je commençais à comprendre comme étant plus grand que moi et ma famille, à avoir une dimension systémique. Mais je n’avais pas encore bien compris à quelle échelle c’était.  Ce n’était pas très défini…

C’est toujours un mélange d’influences et un élément déclencheur qui amène une histoire. Mais c’est sûr qu’il y a toujours des liens avec ma vie au moment où j’écris une histoire.

Tu l’as dit, tu te considères comme féministe… À quelle vague du féminisme te rattaches-tu ?

Vraiment au féminisme intersectionnel. Souvent je me sens plus touchée, ou plus concernée, par les paroles qui viennent des pays anglo-saxons, je ne sais pas pourquoi… J’écoute beaucoup de podcasts en anglais, et peut-être que c’est même au niveau du vocabulaire ou de la langue elle-même que cela se passe… J’ai parfois l’impression que je comprends mieux, ou que j’avance plus. Mais en France et en francophonie, il y a quand même des choses passionnantes, je pense par exemple au podcast de Lauren Bastide, La Poudre, qui a été une grande source d’inspiration. Le féminisme blanc soi-disant universaliste est vraiment une illusion, il faut s’en détacher, il n’y a pas d’universalisme. Il y a des particularités et il faut les prendre en compte. Je pense au féminisme américain, en particulier aux féministes noires américaines qui ont été à l’intersection de plusieurs discriminations et qui ont une pensée plus large avec une forme de combativité peut-être plus joyeuse, plus populaire aussi. C’est vrai qu’en France, ce sont souvent des personnes issues de milieux très bourgeois qui avaient la parole sur le sujet du féminisme. Là, il y a des femmes de milieux beaucoup plus populaires avec un point de vue très intéressant aussi, moins intellectuel, plus concret parfois.

En ce moment j’écoute beaucoup de contes et de podcasts faits par et pour des travailleurs et travailleuses du sexe, des performeuses porno. Tout le débat qu’il y a en France autour de l’abolition de la prostitution, pour moi c’est un non-sens total. Bien sûr qu’il faut être contre la traite et l’esclavage sexuel, mais la prostitution en tant que profession, si elle est librement choisie, je ne vois pas en quoi on l’interdirait… Je suis très claire là-dessus.

En ce sens, tu rejoins le combat d’Ovidie ?

Oui, complètement. Parce qu’elle réfléchit énormément, y compris au female gaze, et elle revendique le fait de faire de la pornographie comme un geste féministe et militant. Si on dit « La pornographie, c’est se soumettre au regard des hommes », ça présuppose que toute la sexualité ne fait que s’adresser aux hommes, alors que non, il faut justement se réapproprier l’outil pornographie pour s’adresser à d’autres personnes et montrer autre chose, montrer d’autres pratiques, montrer des choses que même des hommes blancs hétérosexuels n’ont pas envie de voir. La pornographie traditionnelle mainstream, je n’ai pas envie de la voir, elle me fait du mal, elle me dégoute. La position de la femme, même de l’homme, elle me rebute. On n’a pas tous les mêmes goûts, on n’a pas tous envie de voir les mêmes choses.

Tu rejoins le mouvement Sex-positive, qui prône la réappropriation de l’intime comme acte politique ?

Complètement. Et cela veut aussi dire que quelqu’un qui est asexuel a un point de vue tout à fait valide. Quand on ne questionne pas ces normes-là, il y a aussi l’obligation, du coup, d’avoir des rapports sexuels si on est en couple. Et c’est aussi une question qu’on a le droit de poser et une position totalement valable. Cela fait partie du mouvement Sex-positive de dire « Si je n’ai pas envie de sexe, je n’ai pas envie de sexe, cela ne fait pas de moi quelqu’un de Sex-négatif. »

Outre Anaïs Nin, y a-t-il une autrice qui t’a influencée dans ta manière d’écrire et qui a contribué à forger ta vision de la littérature ?

Oui et non, parce qu’en fait, comme beaucoup de gens jusqu’à récemment, par défaut, j’ai lu plus d’hommes que de femmes. Il y a eu… alors, apparemment, elle serait un peu d’extrême droite, pas nette… mais quand j’étais ado, j’adorais les romans fantasy de Marion Zimmer Bradley. J’ai adoré parce que je trouve que pour une fois, on y trouve un peu plus de female gaze.

Plus récemment, Toni Morrison, justement, comme féministe noire américaine. J’entendais parler d’elle depuis longtemps et ça ne fait plus ou moins qu’un an que j’ai commencé à la lire, et c’est effectivement hyper fort. J’ai lu Beloved et là, je suis en train de lire les essais. C’est tellement fort comme elle parle du fait d’écrire et d’où on écrit, et de l’autocensure qu’il y a eu, même chez des gens qui étaient militants. Et elle, elle refuse un peu ça, parce que justement, dans Beloved ou dans certains écrits, elle décrit des choses qui sont extrêmement choquantes mais d’une manière très simple et très factuelle. Elle n’essaie pas de montrer l’horreur, elle dit juste ce qu’il se passe et c’est à chacun de réaliser.

Il y a eu Benoîte Groult qui a été très importante quand j’étais en fin d’adolescence. Une voix féminine forte, quelqu’un qui assumait des désirs. Tout ce qui touche à la sexualité m’a quand même toujours beaucoup intéressée, donc j’ai lu pas mal de gens qui arrivaient à intégrer ça à leur vie et à en parler dans des romans qui étaient assez autobiographiques. Et à en parler sans se cacher, sans passer par le biais de la fiction. Je trouvais ça vraiment intéressant et ça m’a pas mal aidée.

 Au cinéma, en musique, en peinture, il y a des autrices qui t’ont influencée ?

Au cinéma, et c’est vraiment une rencontre hyper forte pour moi et un des films qui m’a le plus marquée, c’est La Leçon de piano. Jane Campion est la première réalisatrice dont j’ai vu les films, dont je connaissais le nom, dont je pouvais spécifiquement aller chercher des films au vidéoclub. La Leçon de piano, ça a été une claque esthétique, musicale, visuelle, tout quoi… J’en ai déjà parlé dans une autre interview mais vraiment aussi cette surprise, alors que j’avais 14 ans quand je l’ai vu, d’être tout à coup attirée par le corps d’Harvey Keitel qui était vieux, qui était un peu gros, qui était bizarre… Alors que moi, on m’avait toujours dit que j’étais censée être attirée par Brad Pitt. Et là, je n’en pouvais plus d’Harvey Keitel.

Et musicalement, Björk. Aujourd’hui, sa musique me parle un peu moins qu’avant, mais je garde une grande fascination pour son univers visuel.

As-tu déjà un nouveau projet solo en tête ?

Oui, mais il est encore très flou, c’est trop tôt pour en parler… Ce sera probablement un bouquin plus féministe, peut-être plus en colère que ceux d’avant. La question de la colère m’intéresse beaucoup. Comment l’exprimer et qu’en faire quand on la ressent.

 Tu vas donc continuer à suivre des parcours de femmes ?

Oui, j’ai l’impression que les projets que j’écris moi-même, ils font forcément écho avec ce que je vis au moment où je les écris. Au moment où j’ai écrit Anaïs Nin, j’étais en couple depuis super longtemps, cela faisait 16 ans que j’étais en couple quand on s’est séparés. J’ai été célibataire pendant un moment, et maintenant je suis de nouveau en couple et j’ai de plus en plus de peine à être en couple hétéro. Je suis toujours, jusqu’à preuve du contraire, hétéro, mais c’est vraiment compliqué. J’ai beaucoup de colère et de conflits autour de ça et je n’ai pas du tout envie de renoncer au fait d’être amoureuse, alors je négocie les formes que prend le couple : je n’habite pas en couple, je refuse de cohabiter, je refuse plein de choses mais du coup, il y a beaucoup de négociation et beaucoup de colère. À me rendre compte de tout ce que j’ai accepté sans réaliser que cela me faisait du mal, avec quelqu’un qui n’était pas toxique, pas méchant, pas manipulateur… Mais le poids de toutes nos habitudes sociétales faisait que j’étais écrasée, je n’étais pas moi-même.

C’est fou comme on est nombreuses à faire ce constat… C’est invivable en fait. Tu as enlevé tes œillères et tu ne peux plus vivre dans ce moule-là. Ce n’est plus possible.

Ce n’est pas pour charger les hommes mais j’ai vraiment l’impression que comme ils ne souffrent pas fondamentalement de leur position, même si pour certains trucs ils en souffrent, mais ils ne s’en rendent pas forcément compte, ils ne déconstruisent pas, ils n’y travaillent pas et ceux qui y travaillent, ils y travaillent un peu du bout des doigts. C’est très frustrant d’avoir l’impression de devoir expliquer et porter seule la charge d’essayer de rendre cette relation meilleure. Et justement, il y a ce podcast Le cœur sur la table… L’avant-dernier s’appelle « L’infirmière et l’ingénieur » et parle de la charge émotionnelle au sein des couples et de comment, quand quelque chose ne va pas, à 98% des cas, c’est la femme qui fait les démarches pour améliorer. Que ce soit lire des livres ou proposer d’aller voir un thérapeute. Comme si les hommes se contentaient, pouvaient se contenter ad vitam aeternam d’un truc médiocre et un peu pourri, et qu’ils font semblant de ne rien voir. Et ils ont l’air de tomber des nues si tout d’un coup la femme dit « Bon ben puisque rien ne bouge, c’est fini »… Et je vois ça se reproduire partout autour de moi, c’est fou.

Mon prochain sujet va parler de cela, mais j’aimerais que ce soit sous une forme fantastique ou gothique. Ou je ne sais pas… Cela ne va pas être dans le quotidien réaliste contemporain, ça c’est clair.

À plusieurs reprises, tu as évoqué les podcasts que tu écoutes. Quels sont ceux que tu recommanderais ?

Le Cœur sur la table, et aussi Les Couilles sur la table.

Kiffe ta race parce que ça fait le lien entre différentes formes d’oppressions et ça aide vraiment à comprendre pourquoi les choses évoluent si peu au niveau du racisme et des préjugés qu’on a les uns sur les autres. Je pense qu’en tant que personne blanche, c’est vachement important de se rendre compte que, même si on n’est pas raciste, il y a plein de choses qu’on fait ou qu’on ne fait pas et qui entretiennent ces mécanismes et ces préjugés. En tant que femme, on se perçoit maintenant comme étant dans un système où on est les opprimées… Mais il faut aussi se resituer en tant que blanche, où là on est du côté des dominants. Et on a un rôle à jouer dans la déconstruction de cela aussi.

Je recommanderais La Poudre aussi. Dans La Poudre, Lauren Bastide interviewe à chaque fois des artistes, des femmes politiques, des écrivaines, des théoriciennes. Ça parle du sujet d’expertise de la personne qu’elle interviewe, mais toujours avec un female gaze très ample. C’est vraiment hyper inspirant et montre qu’il y a des expertes femmes partout. Lauren Bastide a récemment écrit un livre qui s’appelle Présente, un très bon livre sur la femme dans l’espace privé, politique, dans l’espace de la rue… Elle est journaliste et elle se base sur des chiffres pour montrer concrètement la réalité : pourcentages de la prise de parole, chiffres de féminicides, plein d’éléments concrets quand on essaie d’expliquer à des gens que ce n’est  pas juste du ressenti, que ce ne sont pas juste des impressions, qu’il y a des études derrière. La Poudre a vraiment un côté journalistique très précis, très vigoureux.

 

Nicole Malinconi : « Les femmes ont raison de se battre pour faire tomber les préjugés liés à une société qui était hier sous domination masculine »

Nicolas Malinconi est une autrice belge qui bénéficie d’une reconnaissance publique et critique. L’autrice est entrée en littérature en 1985 avec Hôpital Silence, un roman autour de l’hôpital et du corps des femmes où l’avortement et la maternité constituent à la fois l’enjeu essentiel et la toile de fond du récit.

Quel auteur / quelle autrice citeriez-vous comme référence ou source d’influence ? Il n’est pas rare que l’on vous associe à Marguerite Duras ou Annie Ernaux. Revendiquez-vous cette filiation ?

Oui et non. C’est bien avec Marguerite Duras que je peux parler d’une filiation, avec elle exclusivement. C’est son écriture qui m’a donné le désir d’écrire. Les questions que je me posais depuis longtemps, le vœu imprécis d’écrire qui m’habitait ont trouvé une sorte de porte ouverte avec la découverte de ses livres ; son style m’a touchée et m’a donné le désir pour les mots.

Ensuite, quand mes livres sont sortis, on nous a associées, Annie Ernaux et moi, mais je ne parlerais pas d’une filiation. Nous sommes parties toutes deux de nos vécus pour certains de nos livres, mais quant à moi, c’est le rapport à la maladresse des mots, la difficulté de trouver les mots, les choses qui ne sont pas dites qui me poussent à écrire. Dire aujourd’hui quels auteurs m’influencent, cela tient avant tout à la façon dont l’écriture transcende l’« histoire », fait advenir un réel plus fort que l’histoire… Mais comment dire cela en si peu de mots ?… Cela peut aller de Proust, Nathalie Sarraute, Flaubert à Laurent Mauvignier…

Hôpital Silence est souvent associé au féminisme en littérature. Vous considérez-vous comme féministe ?

Hôpital Silence a été publié en 1985. À cette époque-là, l’avortement était encore (jusqu’en 1993) interdit par la loi belge et punissable de prison. Durant cinq ans auparavant, j’avais travaillé comme assistante sociale dans une clinique gynécologique avec le Docteur Willy Peers qui avait pris la responsabilité de transgresser la loi et de pratiquer l’avortement dans de bonnes conditions médicales pour que les femmes n’aient plus à avorter clandestinement au risque de leur vie.

Hopital silence a connu plusieurs rééditions depuis sa publication en 1985

 

Hôpital Silence n’a donc pas été écrit dans une optique ni sous une « étiquette » féministe ; les enjeux étaient plus forts ! Ce livre est lié à cette question qui était extrêmement brûlante dans ces années-là (70-80) et à la personnalité du Docteur Peers, qui d’abord s’était battu pour que les femmes aient le droit à la contraception. Il avait été sanctionné comme médecin pour avoir fait de la publicité pour les méthodes contraceptives car, à l’époque, il était interdit d’en parler.

Ensuite, il s’est battu pour que les femmes puissent avorter dans des situations dignes et respectueuses. J’ai choisi de travailler avec lui parce que je savais que j’allais m’engager à accueillir et écouter des femmes qui ne désiraient pas être mères et à les aider.

Aujourd’hui, on élève le féminisme comme une bannière, sans même trop savoir contre quoi on se bat, alors qu’à l’époque, les questions étaient vives et concrètes. La question de l’avortement devait être abordée de manière capitale.

J’ai, bien entendu, soutenu l’idée que les femmes puissent avoir un travail aussi bien rémunéré que celui des hommes, qu’elles aient accès à tous les droits de citoyennes au même titre que tous les hommes, qu’elles ne soient pas cantonnées dans leurs tâches ménagères et empêchées par ailleurs de travailler et d’avoir, si elles le souhaitaient, un métier. Cependant, si j’ai bien fait partie d’un petit groupe de femmes qui se réunissaient dans l’esprit d’une complicité féminine, il y a eu, très vite, un côté « anti-homme par principe » qui me gênait beaucoup, d’autant plus que j’étais mariée, à l’époque, avec un homme pour qui le partage des tâches ménagères ne posait aucun problème. Je me disais donc que je n’avais aucune raison, dans ma vie privée, de m’associer à ce combat « anti-mec ».

Je pense que c’est important de rester dans la nuance.

Comment définiriez-vous le féminisme ?

Les femmes ont raison de ne pas se laisser vivre des situations opprimantes de soumission qu’elles n’ont pas désirées, de violences subies dans leur couple, d’inégalités ou d’injustice à l’égard de leur travail ou de leur rémunération ou de leur accès à certains postes professionnels. Les femmes ont raison de se battre pour faire tomber les préjugés liés à une société qui était hier sous domination masculine. Ce qui m’étonne et me rend perplexe, c’est cette dimension « anti-homme » qui a pris de l’ampleur au cours de ces dernières années et qui ne jouera pas en faveur des femmes, ne les rendra pas plus femmes ou plus féminines parce qu’elles s’opposent ou sortent leur hargne contre les hommes. Le féminin, ce n’est pas vouloir un pouvoir qui équivaudrait ou même surpasserait celui des hommes. D’ailleurs, le féminin n’est pas la propriété des femmes, ce n’est pas quelque chose sur quoi mettre la main ; c’est une singularité à cultiver, à faire émerger.

Je pense que pour mener ce combat de manière juste, il faut soutenir des choses essentielles pour la dignité d’une femme. La haine contre les hommes ne nous mènera nulle part.

 

Malika Madi : «  En tant que femmes, nous sommes nées avec une difficulté plus grande de trouver une place »

Malika Madi | © AML (Archives et Musée de la Littérature)

Malika Madi est une autrice belge d’origine algérienne. Son roman Nuit d’encre pour Farah a remporté en 2000 le Prix de la Première œuvre de la Communauté française de Belgique. Dans son travail d’écriture, l’autrice ne craint pas d’aborder des sujets complexes tels  l’immigration, le racisme ou encore la religion.  La question de l’égalité des genres occupe également une place importante dans son œuvre.

Quel auteur / quelle autrice citeriez-vous comme référence ou source d’influence ?

Je ne citerais pas un auteur ou une autrice mais des livres qui m’ont marquée. En tant que Belge d’origine algérienne, je me suis beaucoup intéressée à la littérature française, à des auteurs comme Vian ou Gary. Quand j’étais adolescente, la connaissance de la littérature belge se limitait à Maeterlinck ou Simenon. Ensuite, je me suis intéressée à la littérature russe, dont l’imaginaire me faisait rêver tout en me rappelant le climat belge qui, à l’époque était plus rude qu’aujourd’hui!

Plus tard, je me suis tournée vers des auteurs comme Alessandro Barrico ou Jorge Amado qui parvenaient à créer une œuvre en parlant de leur culture. Ils atteignaient un axe qui m’intéressait pour l’écriture. Ces questions de culture et d’immigration sont inévitablement liées à la place de la femme dans la société. Nous sommes un tout, nous sommes composés de 1001 facettes que nous ne pouvons isoler. En tant que femme nous sommes mère, fille, autrice, citoyenne, … Je m’intéresse également énormément à l’œuvre de Nancy Huston, à l’évolution de sa pensée concernant la maternité et la création.

Vous considérez-vous comme féministe ?

Il faut mettre en avant la cause des femmes. En tant que femmes, nous sommes nées avec une difficulté plus grande de trouver une place, c’est une réalité mais nous ne pouvons faire fi des hommes. Contrairement à Simone de Beauvoir, je pense que l’on naît femme et que nous avons une physiologie  qui est en lien avec notre psyché. Pour elle, la maternité est une aliénation de la femme. Selon moi, c’est justement l’inverse : la maternité est, pour moi, une exploration de soi. Ce qui me pose problème, ce sont les féministes qui établissent des règles générales pour des individualités.

Je suis pour une égalité homme-femme, mais je revendique ma singularité de femme.

Comment définiriez-vous le féminisme ?

Le féminisme est multiple, variable et relatif en fonction des cultures. Nous avons la chance de vivre dans un pays de droits et de libertés où nous pouvons choisir notre destin. Chacune d’entre nous peut vivre sa féminité, ses choix professionnels ou autres comme elle l’entend. Ce qui me dérange, c’est l’injonction. Pour certaines femmes, la liberté, le bonheur, l’équilibre, c’est s’occuper de ses enfants. Pour d’autres, c’est la carrière qui prime. Selon moi, il faut encore travailler sur le regard que l’on porte sur les choix que l’on peut faire. Bien sûr, il y a la question plus globale de l’égalité salariale, des droits, mais dans ce cas, c’est un combat citoyen. Les hommes doivent être associés à ce combat féministe. Il faut également durcir les lois sur le harcèlement pour qu’il y ait une prise de conscience.

Cependant, il faut garder à l’esprit que tout est relatif, que ces questions de féminisme sont perçues différemment d’un pays à l’autre. Le féminisme se construit également en lien avec son vécu. Il n’y a pas un féminisme meilleur qu’un autre. Pour moi, le féminisme est un combat très individuel. Ce sont des individualités qui se retrouvent dans un collectif, mais ce n’est pas une voix unique : ce sont des voix différentes qui revendiquent chacune des combats différents.

En tant qu’artiste (écrivain, poète, peintre), on apporte une pierre singulière à un édifice mais chaque pierre est différente.

 

Alix Garin : «  Je me considère comme engagée par la manière dont je laisse infuser le féminisme dans mes œuvres artistiques »

Alix Garin | © Robin Nissen

Alix Garin est une jeune autrice belge de bande dessinée. Elle a publié en 2021 un roman graphique intitulé Ne m’oublie pas, qui a connu immédiatement le succès commercial et critique. Déjà récompensé de nombreuses fois, notamment par le Prix Rossel du roman de bande dessinée, Ne m’oublie pas  est construit autour de deux personnages féminins et de la relation complice qu’entretien l’héroïne de la bande dessinée, Clémence, avec sa grand-mère, Marie-Louise.

Alix, te considères-tu comme féministe ? Est-ce que pour être féministe, il faut s’engager ?

Personnellement,  je me revendique comme féministe. Après, qu’est-ce qu’on veut dire par « engagée » ? Je me considère comme engagée par la manière dont je laisse infuser le féminisme dans mes œuvres artistiques, œuvres qui sont lues et qui peuvent donc résonner. Je me dis que ce sont de toutes petites graines qu’en tant qu’artistes, on plante dans l’esprit des gens et qu’on fait germer si possible, mais en tout cas, qu’on sème.

Après, je pense que l’on peut être féministe sans s’engager. Même si on n’a pas l’impression de s’engager, remettre un peu en question ce qu’on nous apprend, c’est déjà être féministe. On n’est pas obligés de faire des manifs ou des collages pour pouvoir se qualifier de féministe.

Après, il y a tout ce débat : est-ce qu’on peut s’auto-qualifier de féministe ? Qui peut le faire ? Qui ne peut pas le faire ? À quel courant du féminisme on se rattache ? Tout cela c’est compliqué, tellement compliqué que ça peut intimider les non-initiés.

Là, récemment, je viens de signer un reportage pour TOPO sur le groupe de collages féministes à Nantes. J’étais avec une journaliste qui s’appelle Elsa Gambin et j’ai dessiné le reportage. Et ça a été compliqué à réaliser comme reportage, parce qu’en fait elles s’opposaient à la publication. Dans le reportage, Elsa citait le fait que c’est Marguerite Stern qui a créé ce mode d’expression via le collage sur les murs des villes et que ça a été repris par différents groupes partout, en Europe, et au-delà. Et les colleuses ont dit : « Il est hors de question que notre nom figure aux côtés de celui de Marguerite Stern dans le reportage. Parce que c’est une TERF [NB : utilisé pour « trans-exclusionary radical feminist » , ce terme désigne une personne qui se revendique du féminisme mais exclut les personnes trans], elle est transphobe ». Ça, au sein de la rédaction de TOPO, ça a été un gros débat parce qu’il est hors de question que qui que ce soit impose au magazine comment il traite son sujet.

Qu’est-ce que le féminisme pour toi ?

Pour moi, le féminisme, ce serait de ne pas se laisser assigner à des rôles, à quoi que ce soit de prédéterminé. En termes de rôles, d’état d’esprit, de traits psychologiques, de métier, de physique. Et ça, ça vaut autant pour les femmes qui sont très soumises à ce genre d’injonctions que pour les hommes et pour tout ce qu’il y a entre les deux.

Ces rôles sont évoqués dans ta BD, lorsque Clémence affirme :  « Les filles me détestent, elles disent que je suis un garçon. Les garçons me détestent, parce que je suis une fille ».

La cour de récré, c’est l’endroit le plus genré de la terre, horrible. Et où les rôles sont incroyablement marqués…

Il faudrait laisser le droit aux gens d’être des gens sans les enfermer dans quoi que ce soit… C’est un monde dans lequel j’aurais envie de vivre, où tout ça, ce serait des non-sujets. Comme l’orientation sexuelle de Clémence dans mon livre Ne m’oublie pas… Parce que souvent, on me dit « Clémence est lesbienne ».  Clémence n’est rien du tout, elle couche avec une fille mais… elle est non hétérosexuelle, voilà. J’aimais bien laisser cette porte ouverte, et cela fait partie de sa personnalité et de sa back story, mais ça n’est pas du tout un sujet dans le livre. Tu me demandais « Qu’est-ce qui fait de ce livre un livre féministe ? », je pense qu’il y a ça aussi : le fait que ce soit un non-sujet et que ce soit juste communément admis. Et pour moi, c’était important. L’étape suivante c’est qu’on ait des héros qui ont des caractéristiques et qui évoluent dans une histoire dont ce n’est pas le thème. Au même titre que « Elle est brune, elle mesure 1,75m, et elle a une grand-mère » quoi.

La génération actuelle sera déjà beaucoup plus éveillée au féminisme, du fait qu’on en parle plus, et c’est très chouette. Mais a contrario, je pense que cela va engendrer une sorte de réaction épidermique inverse. Aujourd’hui, on est dans une époque où il faut toujours polariser. Et ça, c’est dû aux réseaux sociaux à 100 %. Il faut que les sujets soient clivants pour entrainer de la réaction, du clic, et tout le monde doit s’aligner là-dessus parce que c’est devenu la nouvelle norme, parce que ça catalyse l’attention des gens. Pourtant, on peut être modéré, on peut être centriste, on peut juste ne pas prendre de position ferme et voir les choses en gris ou avec beaucoup de nuances, ou tempérer ce que l’on dit. Aujourd’hui, le féminisme fait partie de ces sujets super polarisants alors que je crois qu’on peut juste dire « Moi je suis féministe parce que j’ai envie que les femmes aient les mêmes droits que les hommes », c’est tout à fait valable. Et en même temps, on peut dire « Je suis féministe mais je ne suis pas d’accord avec tout un tas de choses qui font partie de certaines sphères féministes ». C’est ce qui rend ce qualificatif difficile à utiliser parce que c’est un peu fourre-tout aujourd’hui, « féminisme ». Ça veut tout et rien dire…

Du coup, ce qui donne cette portée féministe à Ne m’oublie pas, c’est… en fait, ce n’était pas du tout une question que je m’étais posée au moment d’écrire l’histoire mais, en même temps, je savais que c’était un ouvrage qui pourrait être catégorisé comme tel du seul fait que c’est un roman graphique écrit et réalisé par une femme qui met en avant un très fort female gaze, avec cette héroïne qui est une femme cisgenre, et qu’il aborde des thématiques qui touchent trois générations de femmes. Il n’y a presque que des femmes en fait dans ce roman. Et je trouvais ça bien, équilibré, parce qu’en même temps, moi ce que je veux faire, c’est de la fiction, donc pas forcément faire rentrer au chausse-pied des revendications. Mais en même temps, elles sont là, en filigranes, et c’est surtout ça qui me tenait à cœur.

Extrait de Ne m’oublie pas | © Alix Garin / Le Lombard 2022

 

Tu cites Annie Ernaux en début de livre (« S’annuleront subitement les milliers de mots qui ont servi à nommer les choses, les visages des gens, les actes et les sentiments, ordonné le monde, fait battre le cœur et mouiller le sexe. »), qu’est-ce qui t’a poussée à reprendre une citation des Années ? Annie Ernaux se revendique elle-même comme féministe.

J’ai découvert Annie Ernaux quand j’étais en train de dessiner Ne m’oublie pas, donc je l’avais déjà entièrement écrit. Je l’ai découverte via France Culture qui a fait une lecture des Années avec interprétation par des acteurs etc., c’était bouleversant… J’ai écouté tous les épisodes et j’étais en larmes. J’ai donc commencé par lire Les Années, et cela a été une gifle énorme… J’ai tout, tout aimé. Sa démarche, son écriture, le recul qu’elle parvient à avoir sur sa propre expérience, qu’elle met en évidence. Cette espèce de subjectivité objective, je trouve ça fascinant. Dans Les Années, en plus, la thématique, c’est la mémoire. Annie Ernaux, je trouve qu’elle a ce talent d’arriver à mettre le doigt sur des choses, des sentiments, des souvenirs très ténus et qui sont des catalyseurs pour nos propres expériences, nos propres souvenirs. C’est brillant.

Tu as dessiné pour le journal Spirou il y a peu de temps.

C’était au début du mois de juillet, quand Spirou m’a proposé de participer à leur rubrique « Spirou et moi » où un auteur parle de sa relation avec Spirou. Là aussi, c’était un immense honneur, parce que Spirou, c’était toute mon enfance, c’était une déclaration d’amour.

Tu y évoques une série en particulier…

Il y a Les Nombrils. J’étais vraiment fan, c’est un des sommets de la bande dessinée francophone d’humour je pense. Au départ, ce sont juste des gags en une page sur ces pestes qui sont très attachantes mais qui sont méchantes comme des poux. Il y en a une bête, une maligne, et une troisième qui est la vraie gentille, mais qui veut rester avec ses copines, et qui du coup se fait maltraiter par elles… Mais de cette base somme toute assez simple, la série se développe et crée des arcs narratifs très modernes pour chaque personnage.  C’est drôle, c’est vraiment marrant. Bon, on aime ou on n’aime pas l’humour mais moi ça me fait pleurer de rire. Et du coup, pour moi, c’est une source d’inspiration énorme.

On parle de féminisme… Mais quand on ouvre cette BD-là, on se dit a priori qu’il ne va pas être question de cela…

Pour moi, c’est super féministe. C’est un trio d’héroïnes. Et à propos du fait que ce sont des pimbêches dont le string dépasse du pantalon etc., c’est une vision de la femme qui est remise en question par les autres personnages… …

Tu rêvais déjà jeune ado, même petite, de devenir autrice de bande dessinée ?

Oui, je rêvais déjà d’être autrice quand j’étais enfant. C’est une amie de ma mère qui m’a appris comment faire de la BD.  Elle a tracé 6 cases en gaufrier et m’a dit « Tu peux raconter des histoires avec ça » et je ne me suis plus jamais arrêtée. Quand je suis arrivée à Saint-Luc, j’ai décuplé ma connaissance de la bande dessinée, qui était somme toute  assez limitée. Elle était encore très axées sur les œuvres d’auteurs, avec quelques femmes, mais rares : Florence Cestac par exemple. Et puis  petit à petit, en fouillant dans les bibliothèques, je suis tombée sur des autrices femmes. Je pense que la première qui m’a vraiment fort influencée, c’est Aude Picault. Elle a réalisé Idéal Standard, L’air de rien… J’adore son trait. Et pour en revenir à aujourd’hui, je ne dirais pas que le genre de l’auteur est un critère de choix, je choisis au feeling mais je suis souvent attirée par des récits de femmes parce qu’elles abordent des thématiques que j’aime, des thématiques qui me touchent, elles ont une sensibilité qui me parle en tant que femme.


Les entretiens de Léonie Bischoff et Alix Garin ont été menés par Violaine Gréant. Laura Delaye a réalisé les interviews de Malika Madi et Nicole Malinconi.
 © Objectif plumes, mars 2022

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Rentrée littéraire hivernale 2022

Par David Dusart,

Les rentrées littéraires, il y en a deux. La « grande », fin aout début septembre et la plus « petite » qui s’étale sur le début de l’année civile. C’est de cette dernière qu’il sera question sur cette page qui  reprend les sorties en littérature belge francophone entre le 1e janvier et  le 15 mars 2022.

Tous les livres repris ci-dessous se trouvent aussi sur Librel. Ils sont soit en stock dans votre librairie, soit disponibles sur commande. Certains ouvrages sont également disponibles en prêt numérique via Lirtuel. Des liens vers ces plateformes sont proposés sur les fiches des ouvrages ci-dessous.

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Pierre Coran et les animaux rêveurs

Par administrateur,

Pierre Coran

C’est d’Ostende, station balnéaire, que Pierre Coran (nom de plume d’Eugène Delaisse) fait la promotion de son dernier né car son fils Carl, poète national belge 2020-2021, y réside désormais. Son dernier album Les animaux rêvent aussi, à la présentation très réussie, bénéficie d’un grand format et d’illustrations très modernes d’Iris Fossier. Il marque surtout le retour de l’auteur chez Casterman. Lauréat du prix de la Communauté française pour le rayonnement de la littérature de jeunesse en 2007, ce grand poète de quatre-vingt-sept printemps consigne encore une pensée chaque jour – son carnet n’en totalise pas moins de trois cents. Et reste très actif, multipliant créations et publications dont on ne compte plus le nombre, tant sa bibliographie est impressionnante, comptabilisant plus de cent cinquante titres à ce jour.

GENÈSE DE CET ABÉCÉDAIRE

Extrait de Les animaux rêvent aussi, pp. 28-29 | © Casterman, 2021, Pierre Coran

« C’est Anne-Sophie Congar de Casterman qui m’a proposé de réaliser ce livre. Comme j’adore les animaux, j’ai d’emblée accepté. Ce retour chez Casterman me touche beaucoup car, en 1980, c’est cet éditeur qui m’a donné ma chance. S’en est suivie la collaboration avec les éditrices Clotilde Guislain et Monique Dejaifve. Je me souviens de la parution du Roman de Renart (en vers). Puis Casterman a été racheté et mes œuvres publiées chez d’autres éditeurs. Né dans le petit village de Saint Denisen-Brocqueroie, dans la banlieue de Mons, j’ai passé ma jeunesse dans une campagne au contact des animaux. J’ai ainsi pu assister à un envol d’éphémères, chose rare. Les animaux me sont toujours aussi proches. Vivant à Erbisœul depuis cinquante-trois ans, je côtoie écureuils, biches, faons. Dans ce nouvel album, je raconte les rêves de l’auteur que je suis à travers des animaux. Faut-il rappeler que j’ai écrit cinquante fables chez Grasset et cent cinq fables à Boston aux États-Unis, traduites par Norman Shapiro, traducteur officiel de Jean de La Fontaine aux États-Unis. Mon recueil Amuserimes (septante et un courts poèmes qui jonglent de façon enjouée avec les mots et les sons) a aussi été traduit à Boston. L’instituteur, dans la mouvance de la pédagogie Freinet, que j’ai été se souvient qu’apprendre l’alphabet en s’amusant est reconnu pédagogiquement. Chaque lettre se trouve dans un contexte. Ainsi le N, représenté par le nasique, dont je raconte qu’il est le singe le plus laid. Est-ce vrai  ? Est-ce faux ? Pour moi, c’est clair et net, je l’ai lu sur Internet. Les rêves des animaux se marient aux miens. Comme La Fontaine et ses fables. À la différence que celles-ci avaient parfois des morales contradictoires : « La raison du plus fort est toujours la meilleure », « On a souvent besoin d’un plus petit que soi ». Personnellement, je joue sur des caractères bien précis et avec les mots. J’essaie aussi d’avoir une chute : comme le rhinocéros qui est sourd ou le lama et le lamantin qui chantent faux. Mon amour pour la langue française est couplé à l’observation de ce qui m’entoure. Un jour, une libellule est entrée dans la maison. Je l’ai relâchée et peu de temps après, elle est venue se poser sur mon épaule. En fait, je peux rêver qu’elle voulait me dire merci de lui avoir sauvé la vie. Une araignée se trouvait à la maison sur mon bureau. Elle s’est retrouvée dans la farde empruntée par ma femme Irène qui préparait la visite de la maison de Van Gogh en compagnie de ses élèves du Conservatoire de Mons. J’imagine cet arachnide dans la célèbre demeure de Cuesmes[1] … Les anecdotes que le lecteur découvre s’imprègnent de mon vécu. Je suis constamment entouré d’animaux. Les biches viennent du bois par la prairie du voisin. Cinq écureuils qui viennent de naître dansaient récemment autour de la mangeoire où j’offre des graines de soleil aux oiseaux  : mésanges, merles, pies et parfois même à l’un ou l’autre ailé du grand parc animalier Pairi Daiza tout proche, venu me rendre une petite visite. J’ai la chance d’habiter à l’orée du bois d’Erbisœul, non loin du pavillon de chasse du Prince de Ligne. « J’avance dans l’hiver à force de printemps », un alexandrin de ce poète du dix-huitième siècle, est ma devise.

SES LIVRES-FÉTICHES

Un classique qui a connu de nombreuses rééditions

Dans un même temps, le roman Les aventures des Pièces-à-Trou vient d’être réédité chez Mijade, collection « Zone J », dans une version réécrite qui connaît le succès. « L’histoire commence en 1940 avec Simon, neuf ans, vivant dans un petit village du Hainaut belge, Saint-Denis-en-Brocqueroie. Ce gamin est ravi car il vient de réussir les épreuves pour être admis dans la bande des grands du village, les « Pièces-àTrou ». Quelques jours plus tard, la guerre éclate et, très vite, les soldats allemands sont là…  »

En 1988, l’histoire des Pièces-à-Trou est adaptée sous forme de court métrage. Le film de Pierrot De Heusch avec Michel Galabru et Daniel Prévost est disponible sur la plate-forme dailymotion

 

« Ce récit est largement autobiographique. Il s’agit de mon livre-fétiche avec Jaffabules, qui a reçu, en 1989, à Paris, le Grand Prix de Poésie pour la Jeunesse[3] la première fois que celui-ci fut décerné. Ce titre, disponible en livre de poche, est devenu un classique et en est à sa sixième édition[4]. »

UNE EXPOSITION

« En 2009, j’ai fêté un double anniversaire  : mes septante-cinq ans et un demi-siècle de créations littéraires. À l’occasion du cinquantième anniversaire de la première parution, j’ai eu droit à une exposition rétrospective au Centre de Littérature de Jeunesse de Bruxelles, une exposition interactive sur mon parcours avec des documents personnels, des livres, des photos, des objets… et j’ai aussi été nominé pour le prix Hans Christian Andersen 2009 (le prix Nobel de littérature de jeunesse).[6]

L’ÉCOLE ET PIERRE : TOUT UN PROGRAMME…

Pierre Coran en animation au Centre de littérature de jeunesse de Bruxelles

Ma mère, très tôt veuve, était ravie quand je suis devenu instituteur en 1954. J’ai enseigné durant vingt ans avant de diriger l’École d’application de l’École normale de l’État à Mons (1974- 1978). En 1978, j’ai été nommé professeur d’histoire de la littérature et j’ai rejoint mon épouse au Conservatoire royal de Mons, où Irène enseignait la phonétique. Depuis des années, dans les écoles, la poésie a connu un véritable bond en avant. Le rayonnement de la littérature de jeunesse n’y est pas étranger. À la lecture de certains programmes scolaires actuels qui se disent novateurs, je constate que ma classe, à l’époque, les expérimentait déjà. Côté animations, vu mon âge, je les réserve en priorité aux deux écoles qui portent mon nom[7]. Au niveau de la création, mon cerveau n’éprouve aucun problème pour continuer à créer avec plaisir.

DES PROJETS ?

Oh que oui ! Je prépare un livre de poésie en collaboration, pour la première fois, avec mon fils Carl Norac pour l’éditeur français Rue du Monde. Chez Didier Jeunesse est prévue la parution à l’automne d’un nouveau recueil de poèmes et, fin 2022, d’un livre-disque La Belle au bois dormant. Ma recette pour réussir ? Il ne faut pas être pressé, il faut durer. Quand un livre reçoit subsides ou aides, cela doit être au mérite. J’ai toujours voulu rester indépendant. Voilà peut-être le secret d’une si importante longévité éditoriale… » •


[1] https://www.maisonvangogh.mons.be
[3] Créé à Paris par le ministère de la Jeunesse et la Maison de la Poésie ; le jury étant présidé par Claude Roy.
[4] 1990, 1995, 1997, 1999, 2010, 2015.

[5] L’auteur a reçu de nombreux prix :
– Prix Jean de La Fontaine 1979, à Château-Thierry, pour un choix de fables, jury présidé par Armand Lanoux.
– Prix de Poésie pour la Jeunesse 1989, à Paris, pour Jaffabules (Hachette, coll. « Le Livre de poche », 1990, avec illustrations de Gabriel Lefebvre), jury présidé par Claude Roy.
– Lauréat, en Flandre, du prix Kinder- en Jeugdjury 2000.
– Prix du ministère de la Culture de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour le rayonnement de la Littérature de Jeunesse (2007).
– Nommé au prix mondial Hans Christian Andersen 2000, 2006, 2010, décerné par l’IBBY (International Board on Books for Young People).
– Personnalité Richelieu Belgique-Luxembourg, 2014-2015.
[6] Depuis 2003, une section primaire de l’Athénée royal Marguerite Bervoets à Mons s’appelle : « École Pierre Coran ». En 2015, ce fut l’inauguration de l’École Pierre Coran, la nouvelle école d’Erbisœul (Jurbise) où vit le poète. Et, depuis 1999, une bibliothèque porte aussi son nom, celle de Fontaine-l’Évêque (section Jeunesse).


© Isabelle Decuyper pour  Lectures•Cultures N° 25, Novembre-Décembre 2021

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Rencontre avec Marie Colot

Par administrateur,

Marie Colot vit à Bruxelles et écrit des romans pour adolescents. Son roman Jusqu’ici tout va bien publié chez Alice jeunesse, met en scène Jozef, un jeune homme révolté qui a fui le domicile familial. La nouvelle Il neige en moi revient sur un épisode de la fugue de Josef qui ne se trouve pas dans le roman. Nouvelle et roman exploitent donc le même personnage.

Dans la vidéo ci-dessous, l’autrice évoque les liens entre les deux textes, son rapport à l’écriture et ses influences.

Il neige en moi  est une nouvelle publiée dans le cadre de la Fureur de lire. Elle est disponible gratuitement en pdf et peut être commandée en version papier via fureurdelire@cfwb.be

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Le policier belge d’aujourd’hui

Par administrateur,

À la ville comme à la campagne…

De nos villes, de nos campagnes, de nos faits divers s’est dessiné un paysage polar qui n’a rien à envier à nos prolifiques voisins français ou même à nos classiques anglo-saxons. Simple à dire, facile à lire : quand des polars se publient ici, il faut les savourer par les lieux racontés, par les personnages rencontrés, par les sujets d’actualité développés. Pour en assurer une cohérence fictionnelle, nos autrices et auteurs ont assumé un art narratif qui révèle de nouveaux enquêteurs, professionnels ou amateurs. Parmi ces nouveaux chercheurs de vérité, l’un est d’ailleurs célèbre puisqu’un musée lui est consacré au cœur même de notre capitale. Dans les villes comme dans les champs, le chant du polar « à la belge » s’élève en multiples notes bien noires. Surtout pas de sentiment de « belgitude » dans le paysage mais un plaisir affirmé d’oser la puissance des lieux quand il faut structurer des histoires ici. Tout est possible par l’écriture, tout s’invente à condition d’y faire apposer une signature qui assume la responsabilité de ces intrigues de papier. Voici rassemblées en un seul voyage plus de 5000 pages de propositions de lecture.

Sous les ailes du Noir Corbeau

Quand les Corbeaux laissent leurs pattes – noires évidemment – sur des couvertures jaunes, nous voilà portés sous les ailes colorées du « dernier  Groff », Waterloo mortelle plaine. Par un titre aussi localisé et par sa dimension mortuaire affirmée, ce roman prend la huitième place dans cette désormais incontournable collection de chez l’éditeur Weyrich en conviant le lecteur à dévorer la quatrième enquête de ce drôle de bonhomme qu’est Stanislas Barberian, un privé très spécial puisque son métier principal est… bouquiniste. De fait, il se mêle encore de faire la lumière sur le décès bien étrange d’un jeune homme qui a participé à la reconstitution d’une phase de la célèbre bataille. En 2019, ceux que l’on désigne couramment « des reconstituteurs » ont justement… reconstitué une infirmerie de 1815 sous la direction d’un certain « Doc Percy ». Le bouquiniste-enquêteur-amateur fait mieux, beaucoup mieux que la pataude police officielle puisqu’il a retrouvé de la poudre blanche dans la giberne d’un reconstituteur. Or ce jeune homme décédé est le pur produit d’une bourgeoisie bien en place dans le Brabant-Wallon, or la poudre palpée par Barberian dans la giberne n’est ni du sucre ni de la farine… Dès lors, le lecteur est lancé : la mise en place de l’énigme est rapide tandis que Stanislas Barberian flanqué de son amie Martine, elle aussi dans les bouquins au Sablon, est curieux de tout, s’amuse à chercher le nom du coupable. À côté de cette détection de type policière même si l’officielle semble être tenue à l’écart, se trouve deviné le plaisir de Francis Groff à balancer de multiples références en provenance de la RTB de papa avec Arlette Vincent, de la chanson de grand-papa avec Marc Aryan, de la littérature avec Victor Hugo et bien sûr de la célèbre bataille de 1815, avec la Ferme du Caillou.

© Weyrich

© Weyrich

Ce quatrième volume se positionne en roman policier comme le furent les trois précédents, toujours disponibles chez les libraires pour voyager dans les contrées de chez nous : en route pour les bords de la Sambre avec… Morts sur la Sambre, arrêt au centre de Namur avec Vade retro, Félicien ! et tout droit vers le carnaval de Binche avec Orange sanguine. Aucun fait divers ou d’été ne peut menacer l’enthousiasme de Barberian quand il s’intéresse de près au destin des cadavres qui parsèment son calme métier de bouquiniste…

Auparavant, en juin de l’année 2020, la collection Noir Corbeau avait mis le cap sur un autre coin de la Wallonie en déployant ses ailes à Louvain-la-Neuve avec Une mort pas très catholique, premier roman dans le genre policier d’un duo neuf composé d’Agnès Dumont et de Patrick Dupuis. L’autrice liégeoise est une pensionnaire fidèle de la maison « Quadrature » qu’elle squatte pour ses recueils de nouvelles tandis que Patrick Dupuis se trouve être le fondateur et propriétaire de cette maison d’édition connue pour son engagement en faveur du texte court. Elle est située à Louvain-la-Neuve et par conséquent il ne faut pas s’étonner que le premier polar signé par ce duo de choc se déroule dans la fameuse ville universitaire. Cette fois, l’enquête est menée par un duo de policiers très officiels : Roger est un ancien du commissariat de la rue du Marché aux Poulets à Bruxelles et Paul est un jeune flic belge d’origine marocaine qui habite Namur. Ils découvrent à peu près en même temps un commerçant sicilien apparemment mort dans son sommeil.

© Weyrich

Pas très catholique cette mort, l’évidence parle. Le duo d’auteurs se jette aux basques fictionnelles du duo d’enquêteurs pour mener le lecteur au cœur même de la cité estudiantine qui connaît dans ses bas-fonds un phénomène que les médias ont nommé les « sugar babies ». Des étudiantes qui arrondissent leurs fins de mois en tarifiant des services intimes à des messieurs, bien décidées à en tirer un maximum de profit. Dans ce milieu parallèle s’est infiltrée une étudiante un brin naïve qui tente d’y voir clair. Le duo de policiers ne compte pas fleurette en longeant les pistes qui les mènent à un trafic de vêtements très maffieux. Roger, l’ancien, et Paul, le neuf, finiront par démasquer le coupable, bien sûr, même si le lecteur attendra les dernières pages pour tirer les fils de ce tissu fortement coloré. Les lieux sont précisés, l’atmosphère est légère, le duo de policiers fonctionne à merveille. Rien de futile pour le lecteur assuré de passer du bon temps dans cette ville particulière « qui n’a pas de cimetière ». Quant aux « Dudu », les Dumont-Dupuis, ils proposent,  dans la même collection, Neige sur Liège, une visite patrimoniale et mouvementée de leurs pragmatiques duos d’enquêteurs dans le quartier chaud de la Cité ardente, le Carré et  en toute continuité dans bien d’autres coins urbains  tout aussi passionnants à visiter.  La neige n’y est pas toujours blanche et les bonhommes ne sont pas à prendre avec des pincettes.

Retour à Bruxelles

Les Marolles, cœur palpitant de la capitale, le refrain est connu. Nestor Burma, détective de choc créé par le monument Malet, y est venu enquêter en 2019 sous la plume admirative de Nadine Monfils, Crime dans les Marolles (Pulp édition). Deux ans plus tard, en ce printemps 2021, Nadine Monfils retrouve Bruxelles avec une autre célébrité qu’elle transforme en enquêteur libre et désintéressé : René Magritte en personne !

© Robert Laffont

Oui, l’homme à la pipe qui n’en est pas une, le peintre surréaliste par excellence, amateur de romans policiers (il apprécie la lecture d’Edgard Allan Poe et de Nick Carter, parait-il) se lance dans la résolution d’une énigme en étroite collaboration avec la pataude police officielle qui, selon l’expression consacrée, « patauge ». Bien sûr, dans la vie comme dans son enquête, Magritte est flanqué de sa fidèle amie d’enfance Georgette devenue sa chérie pour la vie. Le voilà agité, on pourrait même le qualifier surréalistement de « magritté » quand il prend comme modèle une jeune femme à robe à fleurs qu’il a rencontrée par hasard dans la rue.

Or cette femme prénommée Madeleine est charmée par des billets d’amour cachés dans des enveloppes bleues, tracés par une main inconnue. Madeleine est serveuse au « Roi d’Espagne », célèbre établissement de la Grand Place, elle est découverte poignardée au Cameo, salle de cinéma à cette époque toujours en activité. René et Georgette veulent tout savoir et tout comprendre de ce fait divers tragique ; avec l’aide d’un ami inspecteur de police, ils pensent pouvoir se mêler à l’enquête en discutant le coup au fameux café « La Fleur en Papier Doré », rue des Alexiens. L’affaire se complique lorsque qu’un deuxième fait tout aussi divers tombe : cette fois c’est une Rosa retrouvée morte qui s’avère être la maîtresse du mari de la Madeleine… Pour Georgette comme pour René, le joli couple de la rue des Mimosas à Schaerbeek, l’enquête devient un vrai jeu de piste, amusant, déroutant qui les amène à retrouver Jacques Brel à la terrasse du Métropole. Brel, c’est l’auteur de Madeleine, de Rosa mais aussi de Mathilde… tiens donc ! Un lien avec l’auteur des crimes ? Pure fantaisie évidemment que l’expérience bruxelloise de Nadine Monfils transforme en roman policier et qui permet à son lecteur de retrouver le quotidien de Magritte, le chien de Magritte, l’atelier de Magritte, le bus 33, la Grand Place, les Marolles, le bon vieux stoemp à « La Clé d’Or » et même le fromage de Herve mais c’est logique puisque René et son pote flic se retrouvent à Namur près de la fameuse église Saint-Loup. Le lecteur en quête d’exploration d’un Bruxelles d’antan sera comblé s’il ne cherche que pur plaisir dans les ambiances « magrittiques » reconstituées avec le plus grand soin.

Et voici  le retour de Van Kroetsch ! Qui c’est celui-là ? Il s’agit d’un privé célibataire qui aime le rock et la bière, se fourre dans des affaires compliquées et s’en tire toujours. La série commencée dès 2012 chez 180° éditions vient de retrouver une belle jeunesse chez Lamiroy.

L’auteur, Marc Meganck connaît à fond les recoins de ce Bruxelles qu’il a souvent étudié comme historien ;  son intention est d’accrocher le lecteur au cœur de la capitale par un titre bien serré  : Le pendu de l’Îlot sacré. Le nœud de l’affaire est constitué d’une série de nains aux jambes artificielles retrouvés dans des bistrots de l’Îlot bien connu par son flux de touristes, ses impasses et ses habitués. Problème de taille : les nains disparaissent… Van Kroetsch est dégoté par son ami inspecteur Reginald qui ne manque jamais de le secouer entre deux cuites pour aller de l’avant  dans  la résolution de cette affaire originale. En plus, la vie privée du privé est mouvementée : une bande de jeunes encercle son appartement dans une cacophonie intolérable, son propriétaire menace de le jeter car un autre pendu est retrouvé  à l’étage occupé par Van Kroetsch. Une seule destination : filer à Ostende pister un suspect, se retrouver à boire dans un bar jusqu’aux  premières lueurs du jour… Le célèbre îlot ne serait-il qu’une façade qui cache mal ses misères ? Dans ce roman relié en permanence à la ville, la célèbre rue des Bouchers en prend pour son grade et le tout aussi célèbre théâtre de Tonne assume la dernière scène du roman… Beaucoup d’humeurs, beaucoup d’humour, un flot de bière et de la belle musique country pour sucrer le tout…

Toujours la capitale, encore Bruxelles ma belle mais cette fois engoncée sous un manteau noir signé Michel Claise. En une bonne dizaine de volumes publiés depuis Salle des pas perdus réédité en poche chez Genèse en 2019 jusqu’ à ce Sans destination finale publié lui aussi chez Genèse en 2019, ce juge d’instruction souvent médiatisé s’est imposé comme un excellent romancier qui n’hésite jamais à faire plonger son lecteur dans des milieux très particuliers. Il lance l’histoire d’une jeune femme prénommée Monica. Monica ? Elle s’était destinée à une vie tranquille par le mariage et l’éducation de son fils. Monica a viré de bord ; professeur de français très honorée, elle subit un drame familial insoutenable qu’elle tente de dissoudre dans les eaux troubles des sans-abris bruxellois. La rue est désormais son impitoyable chemin de déraison. Elle y apprend la survie, la puanteur, la désespérance totale mais aussi, en parallèle, la solidarité, l’amour… Accusée d’avoir tué sa tante qui voulait la sortir de cette mauvaise passe, elle est arrêtée puis incarcérée et, au bout du roman, jugée au cours d’un procès d’assise retentissant. Et les lecteurs, fort heureusement impuissants à maîtriser les ficelles finales de cette histoire se laissent emporter par l’art du romancier qui, bien entendu, excelle à les rouler dans la farine. Le blanc contre le noir, les masques de la convenance sociale contre la vérité intérieure de Monica que les lecteurs devront bien accepter dans les ultimes paragraphes. Ce roman est noir fondant, noir de chez noir, maîtrisé par un auteur qui se montre fin connaisseur des mécanismes de la justice. Michel Claise bâtit à l’aise, sans trop de bruit une œuvre magistrale que la maison Genèse, après celle de Luce Wilquin édite en poche ou en grand format…

Le noir leur va bien…

Branche particulière du polar, le roman dit « noir » se concentre plus sur la description d’un milieu que sur une stricte enquête d’investigation. Il y aurait dans ce sous-genre une intention de mise en lumière de pans de la société qui semblent se cacher derrière la bienséance, le socialement correct. Dans la galerie du roman noir contemporain se promène un nom : Caroline de Mulder ; elle a sorti fin 2021 dans « La noire » de chez Gallimard un appétissant Manger Bambi. Bambi, c’est le surnom d’une jeune lycéenne parce qu’elle a « les yeux doux » et une «  charpente légère toute en pattes » , Bambi c’est la détentrice d’un revolver, son « gun » comme elle dit et flanquée de sa copine Leila, chasse l’homme. Pas n’importe quel homme bien sûr, mais l’homme mûr suffisamment musqué pour être rat coffré dans de luxueuses chambres d’hôtel, l’homme qui pense qu’il suffit de se laisser mener par deux jeunes femmes pour s’offrir des plaisirs inavouables au grand jour. Et si l’un de ces gibiers masculins paraît mort, là n’est pas l’essentiel pour Bambi qui semble alors prendre possession de cette histoire sordide et construire son destin. Les lecteurs finissent par s’intéresser au passé de Bambi, à ses préoccupations et à sa mère qui vient d’introduire dans sa vie pourrie un sacré bonhomme surnommé Nounours, le plus dangereux de tous ceux qui sont passés dans son lit. Entre temps, Bambi est arrêtée et, puisqu’elle est mineure, expédiée dans « une unité de vie pour jeunes filles en difficulté » : elle s’enfuit sous le regard goguenard de l’éducatrice de service car elle croit toujours que son « gun » est le seul objet qui peut la délivrer de ce monde adulte qu’elle peine à comprendre du haut de ses seize ans. Fort, très fort, ce roman lardé de crudités, de férocité mais aussi traversé par des envies d’humanité douce laissées en filigrane dans la violence de ces adolescentes livrées à elles-mêmes en l’absence de valeurs stables. Petite réserve, faut-il le préciser : les lecteurs peu familiarisés avec le vocabulaire des banlieues, risquent de s’égarer dans les premiers chapitres. L’autrice prend le temps d’installer son univers.

© Gallimard

Et encore du noir mais pas trop : le dernier roman de Rose-Marie François Au soleil la nuit publié chez Maelström s’articule autour d’une question tout à fait classique dans le genre : la mort accidentelle d’une jeune fille avec à son bord un auto-stoppeur ne serait-elle point plus qu’un simple accident de la route dans le lointain Cap-Nord ? Pour y répondre, un enquêteur d’assurance suédois vient interroger l’amie d’enfance ; il loge à l’hôtel… « Le Suède » en face de la statue de Grégory, ce qui tend à prouver noir sur blanc que la ville de « Meuse bourg » serait bien un camouflage maladroit de « Liège ». Peu importe car l’enquête se complexifie lorsque ce type bien suédois ne serait finalement que la doublure de l’auto-stoppeur dont on apprend petit à petit qu’il était bien tombé amoureux de cette conductrice qui se targuait d’être écrivaine en laissant des cartons remplis de récits autobiographiques. Aux lecteurs de se laisser inviter à découvrir plusieurs de ses récits. Si la phase « noire » du roman n’est pas très chocolatée, c’est parce que le souci de la romancière se place aussi à l’intérieur d’une époque particulière qu’elle veut non pas reconstituer mais offrir en traits rapides ici et là.

Rose-Marie François © FW-B – Jean POUCET

Changement d’époque avec le premier polar de Bernadette de Rache, La fille sur le banc  qui lance un nouvel enquêteur de papier, un jeune inspecteur nommé Steve Bollard qui se retrouve face à une énigme : pourquoi la fille d’un puissant entrepreneur liégeois est-elle retrouvée morte sur un banc de la place Cathédrale ? L’originalité du roman se trouve dans le récit d’une grand-mère très observatrice des remous ardents d’une cité où se chauffe rondement tous les soirs un quadrilatère qu’on appelle communément le « Carré »…

 

Direction Esneux…

Nous descendons le long de l’Ourthe vers Esneux, plus précisément vers le village de Fontis. Au sommet de la colline se niche la maison d’édition de Françoise Salomon, Murmure des soirs qui, tout en continuant de publier des auteurs et autrices de chez nous, ne néglige pas de noircir les pages de son catalogue en ayant publié avant l’été 2021 deux volumes aux accents polars bien appuyés. Le premier signé d’un auteur déjà expérimenté dans le Murmure se déroule en grosse partie à Schaerbeek tandis que l’autre signé d’une débutante se déroule à Charleroi.

Kennedy et le dinosaure, titre pour le moins étrange de ce polar est signé Michel Lauwers ; l’enquêteur principal est cette fois un journaliste qui écrit des papiers sur les anciennes publicités peintes à même les pignons des villas de Schaerbeek. Le roman se tient entre le 21 mars et le 15 avril de cette année 2018. L’écoulement du temps d’enquête est donc à la fois précis et rapide ; quand ce journaliste découvre que le champignonniste mort en 1963 pourrait bien avoir chuté de son échelle non pas par accident mais par une volonté externe, il se sent troublé, il veut tout savoir avant de publier son histoire dans les pages de son journal. Et très bizarrement, dans une maison voisine est mort à la même époque un Américain. La piste mène le journaliste à un dinosaure peint et à une explication assez plausible du meurtre de Kennedy en novembre 63 à Dallas. Le roman profite du jeu du temps pour se faufiler dans les rues de Schaerbeek et même au nord du pays, à Triporteur et à Bruges. Il y avait longtemps que cette profession pourtant reconnue pour ses enquêtes n’avait plus servi la cause d’un genre littéraire qui, très souvent, en a consommé des paquets.

Mea culpa est le premier polar de Nicole Thiry et l’on peut dire d’emblée qu’elle a parfaitement réussi son entrée grâce à deux recettes souvent utilisées dans le genre : la qualité de restitution du cadre exploratoire et le personnage de l’enquêtrice. Pour le cadre, tout simplement, l’autrice a choisi Charleroi et sa proche banlieue dans ses détails topographiques connus : les statues de Soupir, les terrils que l’autrice souligne comme étant de formidables points de vue, la fameuse et nouvelle tour de la police local… L’enquêtrice en chef, c’est Marine qui a ses habitudes au Delhi de Marcelline, il faut le savoir, même si ce détail n’est pas très important et le nœud de vipères à dénouer est une sorte de sculpture composée de morceaux de corps sans identité rassemblés dans le froid. Brrr… L’équipe de Marine se met au turbin : un Arabe sympa et un jeune policier flamand dont on apprendra au cours de l’enquête pourquoi il a choisi Charleroi comme ville de travail. C’est drôlement bien mené jusqu’à son terme parce que Marine est attachante avec sa libido oscillante. Pour les besoins de l’intrigue, l’enquête prend la direction d’autres bleds comme Suborneuse, Douillet, Jamila et même un petit tour à Liège pour l’ASBL Thermos. Mais ne nous trompons pas de cible urbaine : c’est au quai Rimbaud, dans l’odeur fraîche des pizzas, que s’achève chaudement cette intrigue qui a fait vibrer le cœur du lecteur dans des bagarres pétaradantes à souhait. Nicole Thiry n’écrit pas dans la dentelle même si les dessous de cette affaire sont noirs… Que revienne vite Marine et qu’elle emmène ses admirateurs dans d’autres quartiers de Charleroi ou d’ailleurs.

Polars des campagnes

Le nid de la collection « Noir Corbeau » est une création des éditions Weyrich qui sont localisées à Onglier, village de Neufchâteau situé en bordure de la forêt d’Ablier. Il n’est donc aucunement étonnant d’y voir un titre de Corbeau se poser à la lisière d’un bois : Le roi de la forêt est le premier roman policier signé Christian Joosten et le sixième Corbeau, paru à l’automne 2020. Ce romancier semble vouloir lancer un vieil inspecteur de 55 ans, un certain Guillaume La vallée, dans la grande galerie des inspecteurs de fiction. Or, dès les premières pages, son supérieur fait barrage à l’enquête : la femme retrouvée  le long de la Semois par un promeneur solitaire n’est autre que son épouse ! Du coup, changement de cap pour  La vallée qui… se retrouve  dans le rôle du suspect numéro un… Pas drôle du tout. Et pour le lecteur, descente dans le passé, trente ans plus tôt, en 1976… où il est question de la disparition d’une jeune fille et d’une imprimerie de faux billets de banque dans les caves d’un hôtel abandonné. « Un vrai merdier » dit quelque part un flic du coin devant la mort d’un collègue. Car c’est aussi à l’intérieur du couple La vallée que marchent à pas lents les premiers éléments qui effeuillent le mystère de la femme du flic morte en forêt….

Autre destination dans les profondeurs de l’Ardenne, le château de Saint-Laurent, lieu imaginé par Alain Berenboom pour cadrer la nouvelle enquête de son Michel Van Loo, Michel Van Loo disparaît chez l’éditeur Genèse qui, l’air de rien, poursuit avec succès la publication systématique des enquêtes de ce privé hors du commun. Les lecteurs savent que ce château doit se situer du côté de Libramont puisque Van Loo y débarque du train mais ces mêmes lecteurs se perdent dans les itinéraires proposés… Toujours est-il que ce château hanté est la propriété du couple Éborgné qui a missionné le détective pour chasser les fantômes qui semblent se faufiler durant la nuit dans ses sombres couloirs. Une propriété au passé trouble durant l’Occupation. L’on chuchote que le vieux comte de l’époque aurait eu de réelles sympathies pour Léon Grenelle, citoyen du coin puisqu’il venait de Bouillon. À peine arrivé, Van Loo est confronté à la mort du garde-chasse qu’il retrouve sous sa propre couverture, un type peu sympathique… Et les fantômes ? Ils viendraient en ligne directe du précédent propriétaire, pas très clair tout ça. Alors qu’il boucle l’enquête, Van Loo disparaît comme le titre l’indique et c’est son amoureuse Anne qui reprend les recherches dans la seconde partie du roman. Van Loo va-t-il réapparaître ? C’est la troisième partie et la recherche de la vérité qui appartient au lecteur…

Campagne encore pour les décors de ce tout premier roman signé Odile Baltar, Arrête ton cirque !, un titre amusant pour le premier prix « San-Antonio » décerné au cours de l’été 2021. Une jeune femme prénommée Laure totalement à la masse raconte en toute bonne foi comment elle se retrouve dans de sales draps puisque son amant en titre s’est suicidé et que c’est son compagnon – en titre lui aussi – qui lui a annoncé… Ce dernier d’ailleurs se retrouve dans un coma artificiel à la suite d’un lancer de bûche fortement agressif de la part de Laure. « J’ai rien à voir dans le suicide de mon amant » devra-t-elle se résoudre à avouer au policier qui l’interroge… « Simple éboulement de troncs d’arbre » devra-t-elle admettre un peu plus tard au même policier un brin trop entreprenant. C’est sans compter sur une mère riche et possessive, une fausse belle-sœur méchante, une morale en lambeau et un certain penchant pour le pétard, Gaston Lagaffe et l’alcool. Laure est tout bonnement  distendue. Mais au fil des chapitres, elle devient adorable par son humour, sa capacité à rebondir et son envie quand même de se calmer. Ce court roman se situe dans la veine des bons vieux Fleuve Noir « spécial police » (où San Antonio fit ses débuts) des années 60 qu’aujourd’hui plus personne ne lit. Vite, une suite, vite de la campagne chez Laure ! Odile Baltar est un pseudo mais l’on commence à savoir qu’elle vit calmement dans un bout d’Ardenne au sud de la province de Namur ; elle y cultive en toute modestie un talent fou, une sorte de capacité à raconter des histoires dingues qui font le plus grand bien.

Et polars de bords de mer

Car la plume de Nadine Monfils, un mois seulement après avoir fait son nid à Schaerbeek et dans quelques hauts lieux de la capitale, envoie les Magritte sur la côte belge, du côté des riches, à Knokke-le-Zoute. Ce n’est pas la première fois qu’un polar bien belge campe une enquête dans le coin puisque, en 1999, ce bon André-Paul Duchâteau avait amené dans cette station son privé Max Ruiter dans Knokke-sur-mort. Le couple René-Georgette, en bon serviteur de la belgitude, aime le sable, les cabines en bois, les crevettes et les cuistax sans oublier l’hôtel dit « de la Plage ». Et les lecteurs de saliver devant « les boules de l’y’sn », ces beignets fourrés à la crème pâtissière vendus sur cette plage. Au bout du brise-lame, que découvre René, enterré dans le sable ? Un cadavre évidemment ! Il le reconnaît, le bonhomme… c’était un client de l’hôtel de la Plage qui avait déclaré qu’il n’avait plus aucune nouvelle de sa femme Daisy, une journaliste employée dans un magazine de tourisme… Les lecteurs, plongés dans le bain des années 60, suivent pour la deuxième fois le couple Magritte dans sa quête d’un coupable. Les mystères les plus poivrés sont souvent ceux qui proviennent des salières conjugales, c’est bien connu dans les romans policiers classiques. Ici, faut-il le rappeler, Brel chante toujours sur scène mais c’est Hergé que Magritte rencontre avant de se faire accrocher par la voix d’une sorte de Castafiore dégénérée. Hergé déclare posséder deux Magritte tandis que le peintre emporte un original du créateur de Tintin. Nadine Monfils ne se prononce pas sur la fortune de chacun mais maintient sa verve pour emmener son célèbre couple à Ostende, la « reine des plages » sur les traces de Spilliaert, d’Ensor et profite de l’été à Knokke en plaçant d’autres cadavres exquis pour bien ensabler les pistes suivies par le bon René et sa belle Georgette. C’est l’époque où il était encore possible d’explorer les anciens bunkers du Mur de l’Atlantique… La visite illégale d’une maison vide et la puanteur du fromage de Herve marquent le lien entre cette deuxième enquête et la précédente. Et quel est l’autre belge célèbre que Magritte devrait rencontrer dans sa troisième aventure qui devrait amplifier cette collection « La Bête noire » chez Laffont ? Selon la rumeur entretenue par quelques affamés de polars sauce Lapin cuisiné en Outremeuse, Nadine Monfils serait bien décidée à ne pas lâcher le filon et à envoyer René et Georgette à Liège sur les traces de Georges Simenon après un détour par Bruges…

Plein de prix, plein les poches

Les lecteurs friands des suspenses signés Barbara Abel attendront aussi le printemps 2022 pour voir son prochain thriller  (intitulé À peine les ombres) briller chez les libraires tout en sachant que son dernier, Et les vivants autour, est revenu en format poche, comme d’habitude, chez Pocket. Pour conserver la forme noire des récits courts, elle s’est retrouvée en couverture du volume de nouvelles Écouter le noir chez Pocket (n°17829) en compagnie de la fine fleur du polar français contemporain. Honneur à elle, même si Abel n’a pas encore trouvé les chemins des lieux réels.

Autre grand format du polar de ville, Paul Colize a eu les honneurs de retrouver Un jour comme les autres dans le must des collections de poche, la Folio Policier (n°906).

Elle fait sa place, elle connaît les ficelles du thriller, la namuroise Patricia Hespel qui voit encore son deuxième thriller La dernière maille se retrouver pour un large public chez Pocket après La fille derrière la porte, thriller éblouissant qu’avait salué en son temps Frank Thilliez en personne.

Côté prix, l’on en remarquera trois  : le prix Femme actuelle 2020 pour le thriller de Benoit Sagaro, La conjonction dorée (Nouveaux auteurs), le prix Fintro 2021 Écritures Noires pour Benoit Gustin et son Sous la ceinture (Ker) et enfin, belle récompense pour Caroline de Mulder : le prix du « polar francophone » du magazine français Transfuges pour son très comestible Manger Bambi, seul polar de la bande qui avait eu en 2020 les honneurs d’être présenté à La Grande librairie sur FR3.

 

© Guy Delhasse – oct. 2021

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Le Prix Gauchez-Philippot

Par administrateur,

PRIX

Doté de 620 euros et décerné par la Ville de Chimay, l’Association Maurice et Gisèle Gauchez-Philippot et la Province de Hainaut, le Prix Gauchez-Philippot récompense alternativement un recueil de poèmes et un roman ou recueil de nouvelles d’un auteur belge de langue française.

2021         Louis Adran pour Nu l’été sous les fleurs précédé de Traquée comme jardin
2020         Tristan Alleman pour Fugitives
2019         Francesco Pittau pour La quincaille des jours
2018         Daniel Charneux pour Si près de l’aurore
2017         Werner Lambersy pour La chute de la grande roue
2016         Luc Baba pour Elephant Island
2015         Philippe Leuckx pour Lumière nomade
2014         Jasna Samic pour Portrait de Balthasar
2013         Éric Piette pour Voz
2012         Daniel Simon pour Ne trouves-tu pas que le temps change ?
2011         Jack Kéguenne pour Ordre d’apparaître
2010         Corinne Hoex pour Ma robe n’est pas froissée
2009         Éric Brogniet pour Ce fragile aujourd’hui
2008         Marie-Agnès Hoffmans-Gosset pour Le relevé des pas
2007         Paul André pour D’Ambleteuse et d’elle au plus près
2006         Colette Nys-Mazure pour Sans y toucher
2005         Lucien Noullez pour Escarpe et contrescarpe
2003         Véronique Wautier pour Douce la densité du bleu
2002         Jean-Claude Bologne pour Requiem pour un ange tombé du nid
2001         Jean-Luc Wauthier pour La soif et l’oubli
2000         Françoise Pirart pour La grinche
1999         Philippe Cantraine pour Gagner du champ sur la nuit
1998         Jacques Lefèbvre pour Comme un veilleur…
1997         Françoise Lison-Leroy pour Terre en douce
1996         Amélie Nothomb pour Les catilinaires
1995         Philippe Mathy pour Monter au monde
1994          Patrick Virelles pour Peau de vélin
1993         Yves Namur pour Fragments de l’inachevée
1991         Carl Norac pour Le maintien du désordre
1990         Michel Joiret pour La différence
1989         Françoise Houdart pour Arythmies
1987         Gaspard Hons pour Mémoire peinte
1984         Roger Cantraine pour Pièges
1983         Pierre-Jean Foulon pour L’ombre des aunes
1981         Anne-Marie Carlier pour Impressions
1980         Anne-Marie Derèse pour Nue sous un manteau de paroles
1979         Max Vilain pour Pour saluer L’homme qui rit

 

Plus d’informations
Le Prix Gauchez-Philippot sur le site de la Maison Losseau  – Siège du Secteur littérature de la province du Hainaut

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Rétrospective 2021 : les romans

Par administrateur,

Que retenir de 2021 ? En collaboration avec Le Carnet et les Instants, nous vous présentons une sélection de 12 romans parus en 2021 et à lire absolument. Les titres mis en avant ici ont tous été choisis par les chroniqueurs et chroniqueuses du blog Le Carnet et les Instants comme une lecture marquante de l’année 2021.

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Retrospective 2021 : recueils de nouvelles

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Que retenir de 2021 ? En collaboration avec Le Carnet et les Instants, nous vous présentons une sélection de 12 recueils parus en 2021 et à lire absolument. Les titres mis en avant ici ont tous été choisis par les chroniqueurs et chroniqueuses du blog Le Carnet et les Instants comme une lecture marquante de l’année 2021.

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Rétrospective 2021 : poésie

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Que retenir de 2021 ? En collaboration avec Le Carnet et les Instants, nous vous présentons une sélection de 12 recueils de poésie parus en 2021 et à lire absolument. Les titres mis en avant ici ont tous été choisis par les chroniqueurs et chroniqueuses du blog Le Carnet et les Instants comme leurs lectures marquantes de l’année 2021.

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Noémie Favart ou la minutie du détail

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Extrait de Marcel et Odilon © Versant Sud Jeunesse

Noémie Favart est une illustratrice bruxelloise. Elle compose des images colorées, expressives et pleines de motifs. Elle a publié en 2021 chez Versant Sud Jeunesse Marcel et Odilon, une histoire d’amitié entre un escargot et une coccinelle.

Qui êtes-vous ?

Je suis née à Bruxelles en 1992. J’ai toujours aimé dessiner et après mes secondaires je me suis inscrite en illustration à Saint-Luc à Bruxelles. J’ai adoré ces études et je m’y suis tout de suite sentie dans mon élément. À Saint-Luc, le dessin était abordé de façon décomplexée, on pouvait arriver avec sa personnalité et y développer son propre style. Les études étaient orientées sur la narration et sur l’apprentissage de différentes techniques. On se plongeait avec passion dans le monde du livre et de l’illustration. Cependant, j’avais l’impression qu’il me manquait quelque chose qui me permettrait de pousser ma pratique du dessin un peu plus loin dans sa mise en forme. Je voulais explorer plus en profondeur le côté graphique, la mise en page et j’ai donc enchaîné avec trois années à La Cambre, option Communication visuelle et graphique. Là-bas, on apprenait à composer une image pour lui donner de l’impact et penser au sens qu’elle véhicule. L’un de mes professeurs à la Cambre était Pascal Lemaître. Il nous a appris à lâcher prise sur le dessin, à y mettre de l’énergie et de la personnalité. Je me rappelle qu’il mettait l’accent sur les petits détails adressés au lecteur. Ça m’est resté et j’y pense encore souvent aujourd’hui.

Noémie Favart dans son atelier © Fanny Deschamps

Cinq ans, un anniversaire pour Versant Sud Jeunesse

Cette année, Versant Sud Jeunesse fête ses cinq ans. J’ai eu la chance de rencontrer Élisabeth Jongen au moment où elle créait la section jeunesse de sa maison d’édition en compagnie de Fanny Deschamps. Avec deux amies de la Cambre, Camille Van Hoof et Paola De Narvaez, nous avons chacune publié notre premier livre chez Versant Sud Jeunesse au printemps 2016.

Les deux albums publiés précédemment par Noémie Favart

Le mien s’appelle L’épouvantable histoire de Valentine et ses 118 poux, un livre qui donne envie de se gratter la tête ! Avec Camille et Paola, nous étions conviées aux réunions et avons donc pu donner notre avis sur la charte graphique de la maison, le format et le titre de la première collection. C’était génial de faire partie des prémices de cette aventure. D’ailleurs, Élisabeth et Fanny nous ont demandé de réaliser le logo de Versant Sud Jeunesse. On peut donc retrouver un peu de nous sur chaque livre édité !

 

Comment êtes-vous arrivée à la littérature jeunesse ?

Je crois que je suis arrivée dans ce milieu… parce que j’aime les chats ! Je réalisais, à l’époque, des affiches pour un orchestre dans lequel jouait Élisabeth Jongen. Au cours de discussions, nous nous sommes rendu compte de notre amour commun pour les félins. Ni une ni deux, je me suis retrouvée à faire du cat-sitting pour elle et lorsqu’elle a décidé de se lancer dans l’édition jeunesse, elle a pensé à moi, tout simplement. (Bon, il semblerait qu’elle aimait surtout mes dessins pour les affiches…)

 

Parlez-nous de votre dernier ouvrage, Marcel et Odilon

Marcel et Odilon, c’est la rencontre entre un jeune escargot fougueux et une coccinelle un peu bourrue et l’histoire d’amitié qui en découle. Dans l’album, on peut trouver trois histoires mettant chacune en avant les aventures d’un personnage différent. Le projet a démarré avec la deuxième histoire de l’album, La course d’Odilon. La Fédération Wallonie-Bruxelles m’avait commandé une plaquette pour la Fureur de lire. Quand Fanny a souhaité éditer ce récit en album, j’ai accepté à condition d’y ajouter deux autres histoires pour pouvoir explorer plus en profondeur ce monde d’insectes et développer les relations entre les personnages. En effet, ce que je trouve le plus gai dans la création, c’est d’inventer un univers dans lequel différents personnages évoluent et interagissent les uns avec les autres. Par exemple, le caractère d’Odilon change dans le récit après sa rencontre avec Marcel. Il y a encore plein d’aspects à exploiter, voilà pourquoi je repars sur un second tome dans lequel vous découvrirez les aventures d’autres personnages du même univers !

 

Techniques utilisées

Après avoir fait mon découpage, je prépare les brouillons sur l’ordinateur, j’y travaille la composition de mes dessins. C’est un moment très important qui demande beaucoup de concentration et de recul. Ensuite, je fais une impression de cette ébauche et je repasse dessus à l’aide de ma tablette lumineuse en y ajoutant les détails. C’est ma façon à moi de « mettre au propre ». Sur papier, je travaille avec un artline très fin et noir. Cela me prend souvent beaucoup de temps car j’ai toujours aimé les détails et les motifs.

La table de travail de Noémie Favart

Déjà dans Tibor et le monstre du désordre, j’ai pris énormément de plaisir à combler chaque recoin de la page. Cette étape me plaît beaucoup car ce que je préfère dans l’illustration, c’est le foisonnement de détails et l’humour que l’on peut distiller un peu partout. Enfin vient la dernière étape, la mise en couleur. Avec celle-ci, j’essaie d’amener de la fraîcheur à mon illustration. J’utilise de l’écoline, des marqueurs et un peu d’aquarelle. C’est une partie du travail vraiment agréable, plus méditative.

Dans la vidéo ci-dessous, réalisée à l’occasion de la Foire du Livre de Bruxelles 2021, Noémie Favart en dit davantage sur sa manière de travailler et propose un atelier pop-up autour de l’univers de Marcel et Odilon :

 

Des influences pour Marcel et Odilon

Petite, j’adorais l’œuvre de Claude Ponti. Ses livres aux univers complètement déjantés et qui fourmillent de détails et d’objets du quotidien m’inspirent beaucoup. On peut passer des heures à regarder chaque petit dessin. J’appréciais également la collection de « La famille Souris », où la couleur crée de belles ambiances lumineuses. En dehors du monde du livre, j’aimais aussi déambuler dans le magasin bruxellois La Courte Échelle, qui était un magasin spécialisé dans l’art de la miniature. Les miniatures, ce sont des petites boîtes qui mettent en scène un espace, souvent sans personnages. On peut y trouver de petits jardins, de petites librairies, de petites cuisines… Au vu de mes héros minuscules (des poux, des coccinelles, des escargots…), on peut se rendre compte que c’est quelque chose qui me fascine toujours autant.

Les personnages de Marcel et Odilon © Versant Sud Jeunesse

 

Pour finir, même si mon histoire se passe entre les brins d’herbe, le gazon est éminemment belge. Un œil averti pourra ainsi reconnaître de nombreux quartiers et bâtiments de Bruxelles dans la ville de Coxis où habite Marcel. Et si j’ai bien fait mon travail, il est possible qu’une familière odeur de frites vienne vous chatouiller les narines au détour d’une page.

© Versant Sud Jeunesse

 

Des projets  ?

À côté de l’illustration, je réalise aussi des marionnettes et j’explore les techniques de gravure et de pop-up. J’ai réalisé cette année les marionnettes du prochain spectacle de la compagnie de théâtre jeune public La P’tite Canaille. Le spectacle s’appelle Œil de cobra et est inspiré du roman de Pedro Mañas, Les A.U.T.R.E.S. J’ai beaucoup aimé faire ce travail et voir les marionnettes prendre vie sur scène.

Les marionnettes réalisées par Noémie Favart ©  Quentin Noël

En ce moment, je suis en train d’en réaliser pour le jardin Massart de l’ULB. Le thème… les insectes ! J’anime également des stages d’espionnage, de sorcellerie ou de grimoires magiques pour enfants avec Camille Van Hoof. On y crée des histoires complètement folles et on se plonge avec les enfants dans un univers à chaque fois renouvelé. Avec Manon Coppée, qui a créé La P’tite Canaille, nous montons des projets de théâtre dans des écoles, que ce soit des marionnettes ou des livres pop-up géants. J’ai encore plusieurs projets en cours : une série avec Vincent Cuvellier, qui se passe dans une cour de récré, éditée chez Gallimard Giboulées, le tome  2 de Marcel et Odilon et un album avec Ludovic Flamant.

© Isabelle Decuyper pour Lectures•Cultures N° 24, Septembre-Octobre 2021

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La nouvelle en Belgique francophone : 1830-1970

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Traditionnellement dévolue à trois genres majeurs (le roman, le théâtre, la poésie), l’histoire littéraire telle qu’elle s’est écrite au XXe siècle laisse peu de place aux autres catégories. L’essai demeure indéfinissable, le conte, dès lors qu’il échappe au folklore, est quasiment oublié, et la nouvelle tend à se confondre avec le roman, dont elle serait une sorte d’avatar bref, une tentative pas tout à fait aboutie, un récit sans le souffle qui le mènerait à terme. Comme un grand nombre de nouvellistes ont fait également carrière dans le roman, il est commode de ranger leurs œuvres dans le même sac, la différence tenant dès lors à la seule quantité de signes typographiques. Dans quelques cas, la distinction est affectivement ténue. Bruges-la-Morte, le récit de Georges Rodenbach dont le succès ne s’est pas démenti depuis sa première publication chez Marpon et Flammarion en 1892, est-il une longue nouvelle ou un roman bref  ? L’éditeur a réglé le problème, de son point de vue, en augmentant le volume de pages grâce aux 35 photographies de Bruges choisies dans le fonds de Lévy et Neurstein, maison spécialisée dans la photographie touristique. Légèrement recadrées et retravaillées, ces images ont renforcé le caractère novateur du livre, puisqu’il s’agit d’une des premières fictions de langue française illustrée par des photographies. Celles-ci nouent avec le texte une relation complexe, faite de décalages et de correspondances, qui n’est pas étrangère aux jeux de miroirs que le récit mentionne à maintes reprises. L’œuvre est ainsi devenue un roman.

© Archives et Musée de la Littérature

La nouvelle est un genre ancien. L’ouvrage qui le fonde est le Décaméron (1350-1353) de Boccace, recueil de récits attribués à différents narrateurs mais unifiés par une histoire-cadre qui a été abondamment imité, entre autres dans les Cent nouvelles nouvelles (anonyme, 1462) et dans l’Heptaméron (1559) de Marguerite de Navarre. Publié en volume, le récit bref entre en concurrence avec le recueil de contes, mais également avec le roman picaresque, formé d’une suite de chapitres hétérogènes, et avec d’autres genres brefs comme l’exemplum, la fable ou l’apologue. Les petits romans galants ou historiques du XVIIIe siècle en prolongent le succès, mais l’apparition du roman, au sens moderne du mot, au début du siècle suivant oblige la nouvelle à se trouver une nouvelle identité. La distinction est d’autant plus nécessaire que les deux genres en prose se partagent un même marché éditorial formé, d’une part, de l’édition en volume où le terme « roman » s’impose, et d’autre part, de l’édition dans les journaux, où l’espace dévolu à la fiction se répartit désormais entre le feuilleton et le récit bref, indifféremment nommé conte ou nouvelle. Car c’est désormais la presse qui dicte ses règles au monde littéraire, c’est elle qui rétribue les écrivains, bien en amont des contrats signés avec les éditeurs, c’est elle aussi qui régit les formats et la demande sociale des écritures de fiction. Rares sont les écrivains qui, comme Victor Hugo ou Émile Zola, signent des contrats qui les mettent à l’abri du besoin. Quand ils ne disposent pas de revenus propres (comme c’est le cas de Flaubert ou des Goncourt), les prosateurs sont d’abord des hommes (et des femmes) de presse. Si elle doit rivaliser avec le reportage, la chronique ou le fait divers, la nouvelle s’impose dans les journaux comme une prose publiée en une ou deux séquences, au contraire du roman-feuilleton qui cherche à fidéliser le lecteur dans la longue durée. Le réalisme, qui l’ancre dans le référentiel dominant du support journalistique, favorise son expansion, libre à elle ensuite de se diversifier dans des énoncés moins vraisemblables, comme le fantastique, l’érotisme, le macabre etc. Le modèle ainsi mis en place est celui d’un récit bref, relatant un fait remarquable, et comportant souvent une chute accentuée. Il n’a plus guère changé depuis.

Dans le monde anglo-saxon, la nouvelle a bénéficié de supports éditoriaux spécialisés : novel magazines, pulp magazine, Fanzines. Ceux-ci ont connu peu d’équivalents dans le monde francophone, qui a préféré publier des suppléments littéraires ou des périodiques dépendant des éditeurs, où paraissent les « bonnes pages » des œuvres à venir. Les éditeurs ont ainsi préféré le risque de publier des « premiers romans » plutôt que de laisser se développer un marché indépendant de récits brefs, mais rétribués, qui aurait pu servir de terrain d’essai à de nouveaux auteurs. Les nouvelles ont donc paru plutôt dans la presse générale ou dans des hebdomadaires à succès, avant d’être réunies, du fait des auteurs le plus souvent, en recueils plus ou moins homogènes. L’exemple le plus notable est celui de Guy de Maupassant, dont presque toute l’œuvre a été publiée par des périodiques, qui vont de L’Almanach lorrain de Pont-à-Mousson de l’année 1875 (La main d’écorché) à L’Écho de Paris en 1890 pour Qui sait ? En Belgique, peu connus du grand public, quelques fanzines auront une importance historique dans les domaines de la bande dessinée et de la science-fiction (Phénix, 1985-1994, et Magie rouge, 1980-1999). Mais, pas plus qu’en France, il n’y eut de magazines littéraires publiant des textes courts. Quant aux lecteurs francophones, Belges ou Français, ils continuent majoritairement à tenir la nouvelle pour un genre secondaire, à quelques exceptions près. On voudrait suggérer ici qu’ils ont sans doute tort.

 

Nouvellistes du XIXe au XXe siècle

Le nouvelliste belge le plus fécond de la fin du xixe siècle, comparable à Maupassant à maints égards, est incontestablement Camille Lemonnier. De 1860 à 1913, il est l’auteur de 558 contes et nouvelles publiées dans la presse, dont seulement 212 ont été repris, parfois avec des remaniements, dans ses recueils. Lié par contrat au Gil Blas, au Journal et à Comœdia, c’est dans ces organes parisiens qu’il a publié l’essentiel de son œuvre en prose et acquis son statut international. Il leur doit d’être devenu un écrivain professionnel (voir La Minute de bonheur dans la bibliographie). Alors que les romans font de lui un rival de Zola (dans Happe Chair), puis un adepte du « naturisme » (avec Au cœur frais de la forêt, 1900, par exemple), les récits brefs dessinent un parcours créatif plus diversifié et moins dépendant des grands courants littéraires, où s’encroisent des thématiques régionalistes, décadentes voire d’étranges confessions intimes (« L’initiation amoureuse »,1896 ). L’exceptionnelle anthologie que lui ont consacré Jacques Detemmerman et Gilbert Stevens révèle ainsi tout un aspect méconnu de l’écrivain.

Camille Lemonnier | © Archives et Musée de la Littérature

Avant Lemonnier, le récit bref accompagne la montée en puissance du courant réaliste. Des revues comme L’Uylenspiegel ou La Revue trimestrielle publient des contes et des nouvelles, comme celles que Charles De Coster rassemblera dans ses Légendes flamandes (1857) et ses Contes brabançons (1861). La plupart des auteurs de ce courant se satisfont d’un format éditorial restreint qui s’ajuste à la description d’un milieu et d’un bref récit de vie. Ainsi Caroline Popp (Contes et nouvelles, 1880), Victor Greyson ( « La bottine de Suska », dans Aventures en Flandre, 1882), Caroline Gravière (Choses reçues, 1872), Louise Bovie (Contes posthumes, 1870) et bien d’autres illustrent le genre dans des publications qui n’auront guère d’écho. Le faible tirage des publications et le nombre restreint de lecteurs locaux limitent irrémédiablement la portée de leurs tentatives littéraires.

 © Archives et Musée de la Littérature

 

Cela sera moins le cas à la génération suivante, lorsque les écrivains de la mouvance naturaliste et symboliste se seront frayé un chemin dans les revues parisiennes. Un cas curieux est celui de l’avocat Alfred Guinotte, qui signe Paul Heusy en littérature. Auteur de récits sociaux (Un coin de la vie de misère, 1878), cet écrivain fort oublié occupe une place singulière entre le réalisme social de la génération d’Émile Leclercq et d’Émile Greyson, les disciples belges de Champfleury, le misérabilisme attendri d’un Hector Malot (Sans famille est publié en 1878, la même année que le recueil de Heusy) et les premiers grands textes naturalistes consacrés au monde ouvrier. Il fait toute sa carrière à Paris, comme rédacteur et chroniqueur judiciaire du quotidien Le Radical. Il y signe presque un récit par semaine depuis le 28 novembre 1882 jusqu’en 1908, avec quelques interruptions motivées par ses voyages aux États-Unis, soit près de 300 récits au total, toujours dans le même genre, dont quelques-uns ont été réunis par Paul Delsemme dans Gens des rues (1994).

Un autre Belge ou plus exactement, deux autres Belges, réunis sous une signature commune, commencent également leur carrière à Paris dans ces mêmes années. Il s’agit des frères Boëx, qui signent ensemble la majorité de leurs textes du pseudonyme de J.-H. Rosny aîné. Auteurs d’une œuvre considérable, inamovibles présidents successifs de l’Académie Goncourt, leur principal apport littéraire est constitué de romans préhistoriques (La Guerre du feu, 1909 ) et de récits d’anticipation scientifique. La plus belle nouvelle de ce genre s’intitule « Les Xipehuz » (dans le recueil L’Immolation, 1887). Elle a été rééditée avec d’autres récits brefs dans la belle anthologie de Jean-Baptiste Baronian (Rosny, Récits de science-fiction, 1973), puis souvent reprise dans des recueils divers. On a dit, non sans raison, qu’elle a inauguré la science-fiction française.

Comme Maeterlinck avec « Le Massacre des Innocents » (publié en mai 1886 dans la revue La Pléiade ), les débuts littéraires d’Émile Verhaeren et de Charles Van Lerberghe, surtout connus pour leur œuvre poétique, sont marqués par la publication de récits brefs de grande qualité. Le premier publie à l’orée de sa carrière des Contes de minuit (1884) d’esprit hoffmannien, le second des Contes hors du temps, édition posthume (1931, rééd. 1992) de sept contes et des premiers chapitres d’un roman inachevé. Par leurs nombreuses correspondances avec le théâtre, mais surtout avec La Chanson d’Ève, son chef d’œuvre, ces proses sont un complément indispensable à la connaissance de la poétique de l’auteur.

© Archives et Musée de la Littérature

 

Le romancier Georges Eekhoud, qui est le second grand écrivain naturaliste de la fin de siècle, est également l’auteur de plusieurs recueils de nouvelles. On n’a pas assez souligné combien le format court convenait à Eekhoud. Il s’adaptait à sa vie professionnelle partagée entre l’enseignement et la chronique journalistique. Même son grand roman, La nouvelle Carthage, n’atteint sa forme définitive que grâce à l’adjonction de deux chapitres qu’il serait permis de concevoir comme des nouvelles indépendantes. Si les trois recueils des Kermesses lui permettent de développer sa veine régionaliste, le Cycle patibulaire (1892) et Mes communions (1895) contiennent les récits les plus audacieux de son exploration des bas-fonds sociaux et des amours homosexuelles. Après la guerre, dans la revue Clarté (1er mars 1920), il publie une remarquable nouvelle, intitulée « Des Hommes ! » Elle est dédiée à la mémoire de six Allemands fusillés au Tir National pour désobéissance aux ordres. Cette prise de position humaniste et internationaliste, contrastant avec les critiques que lui valaient, en Belgique, ses positions pacifistes et flamingantes, offrit à l’écrivain l’appui d’un comité de soutien dans lequel on retrouve les noms de nombreux mandataires socialistes, mais aussi d’artistes belges et d’auteurs français comme Romain Rolland et Henri Barbusse.

© Archives et Musée de la Littérature

© Archives et Musée de la Littérature

 

Au tournant du siècle, la nouvelle répond ainsi à des préoccupations très diverses, mais où l’ancrage local reste dominant. Autour de l’avocat Edmond Picard, certains auteurs tentent de faire vivre une littérature judiciaire posant des problèmes moraux et révélant, non sans ironie, les dessous du monde des tribunaux. Parmi eux, Jules Destrée (Quelques histoires de miséricorde; Le secret de Frédéric Marcinel, 1902), Eugène Demolder (Sous la robe, notes d’audience, de palais et d’ailleurs, d’un juge de paix, 1897) ou Léopold Courouble (Mes Pandectes, 1900) donnent des textes intéressants. Le dernier est aussi un auteur fécond qui s’illustre dans le genre des récits bruxellois (Contes et récits d’un Bruxellois, 1907 ), dont plusieurs auteurs de nouvelles exploitent la veine régionaliste, tel Franz Mahutte (Gens de province, 1893 ; Quelques histoires, 1913 ).

© Archives et Musée de la Littérature

© Archives et Musée de la Littérature

 

D’autres écrivains se répartissent alors les diverses régions du pays, pour alimenter une veine localiste un peu grise et conventionnelle souvent, mais d’où l’on peut extraire de belles pages. C’est le cas de Hubert Krains (Amours rustiques, 1899), Jean Tousseul (Au bord de l’eau, 1932 ; La Cellule 158, 1924 ) ; Marius Renard (Ceux du Pays noir, 1907), Joseph Chot (Légendes et nouvelles de l’Entre-Sambre-et-Meuse, 1895), Georges Virrès (Sous les yeux et dans les cœurs, 1925) ou Edmond Glesener (Au beau plafond ou l’Enfant prodigue, 1932). Tousseul excepté, aucun n’atteint — et ne la recherche d’ailleurs pas — la véracité sociale qu’on lit dans les Contes farouches (1913) de Neel Doff, qui prolongent sa trilogie autobiographique (Jours de famine et de détresse, Keetje, Keetje trottin ).

© Archives et Musée de la Littérature

© Archives et Musée de la Littérature

 

Entre les deux guerres

L’événement de la vie littéraire belge entre les deux guerres vient de Paris. En 1937, Charles Plisnier obtient le prix Goncourt pour Faux Passeports publié aux éditions Corrêa. C’est la première fois qu’un étranger obtient cette récompense prestigieuse, et c’est la première fois que le prix, destiné à un romancier, échoit à un recueil de nouvelles. Pour une part, il y avait là comme une forme de réparation : Mariages, publié l’année précédente, avait été pressenti pour le prix, mais la nationalité de l’auteur faisait obstacle. Plisnier s’installe dès lors en France et prépare en hâte un second ouvrage destiné à emporter les voix qui avaient fait défaut. Le recueil rassemble ainsi une nouvelle publiée dans Monde en 1930 (Ditka), trois nouvelles parues dans la revue Les Feuillets bleus en 1935 ( « Pilar » et « Carlotta » en avril ; « Corvelise » et la réimpression de « Ditka », en mai ) ainsi qu’une cinquième, la plus longue, « Iégor », composée sous la pression de l’éditeur. De manière remarquable, il ajoute à ce recueil une sorte de cadre composé d’un « Avertissement » signé Charles Plisnier, d’une préface intitulée « Souvenirs d’un agitateur » et d’une postface « Adieu à ces créatures » que l’on peut attribuer au narrateur des récits enchâssés. Cette structure complexe, qui renoue avec la technique du Décaméron, donne une grande unité au recueil, comme un faux air de roman, ce qui était parfaitement opportun.

Charles Plisnier

 

On observera que les quatre premières nouvelles ne sont pas sans rappeler les thèmes du recueil Faits divers publié par Henri Barbusse en 1928. De part et d’autre, le lecteur assiste au martyrologue de la révolution mondiale, à une manière de tour d’Europe tragique de la répression, aux conflits de la foi et du drame historique. Mais le point de vue des deux écrivains diverge naturellement, dans la mesure où Barbusse tente d’inciter son lecteur à une révolte concrète, tandis que Plisnier peint des personnages qui prennent l’aspect de statues figées dans leur tragédie et qui ne peuvent plus dès lors servir de modèles aux éventuels militants.

Faux Passeport ne reste pourtant pas un livre désengagé sur l’engagement. La dernière nouvelle, « Iégor », lui confère une tout autre signification, en recentrant l’évocation de la vie du délégué russe au Congrès d’Anvers de 1928 sur un démontage de la mécanique des procès staliniens. Cette nouvelle, Plisnier achève de la rédiger le 13 février 1937 et la corrige du 3 au 15 mars 1937 à Ohain. Il y incorpore quasiment au jour le jour de nouvelles informations afin de parfaire sa plaidoirie. Or le dossier dans lequel il puise avec toute la science de l’avocat rompu à l’examen des pièces juridiques n’a pas été constitué par lui seul. Plisnier se sert de l’enquête de la revue anarchiste Les Humbles publiée en octobre 1936, des Bulletins du service d’information et de presse de la Quatrième Internationale, de la Révolution prolétarienne de février et mars 1937 et, surtout, des informations que lui transmet Victor Serge, auteur lui-même d’un important dossier dans le Crapouillot, et qui répond aux questions précises que lui pose Plisnier sur la vraisemblance des situations décrites. C’est donc quasiment sous la dictée de l’ancien animateur de l’Opposition de gauche, en faveur duquel il est intervenu à de nombreuses reprises, et qu’il a invité l’année précédente chez lui, que Plisnier modifie le statut littéraire et idéologique du texte qui lui vaudra le prix Goncourt. Les récits du passé débouchent sur le présent. Ils abandonnent l’évocation pour la prise de position. Ils forgent une intervention dans l’urgence de l’heure qui donnera toute son efficacité au propos de l’écrivain, et un sens tout différent aux « Souvenirs » initiaux. Plus tard, et dans un tout autre contexte, Plisnier publie les nouvelles de Folie douce (1952), consacrées également à la compréhension de personnages déchirés et tragiques.

Georges Simenon

Le plus fécond des nouvellistes belges au XXe siècle, qui s’en étonnera, est évidemment Georges Simenon. Mais il faut constater l’inintérêt de Simenon pour les séparations de genres littéraires. Telle œuvre est-elle un reportage ou un récit de voyage ? Un essai ou un témoignage ? Les éditeurs ont bien du mal à suivre la diversité simenonienne. Ainsi « Vaincus de l’aventure. Les Notes de voyage » publiées dans Paris-Soir du 12 au 25 juin 1935 sont partiellement rééditées par Gallimard en 1938 sous le titre La Mauvaise Étoile, mais ne figurent pas dans les reportages de Simenon chez Omnibus. Rien ne semble pourtant les distinguer formellement de « l’Inventaire de la France » publié dans Le Jour en octobre-novembre 1934 et repris dans l’anthologie des collaborations journalistiques. À rebours des classements auxquels conduisent de nos jours les genres institués du roman policier, du reportage ou de la nouvelle, le lecteur de l’époque se trouvait souvent placé devant une sorte de continuum générique dont la signature de l’auteur constituait le fil rouge. Comment en effet classer un texte comme « L’affaire Lefrançois », publié dans Détective le 21 mars 1929 ? Simenon y invente pour l’hebdomadaire des éditions Gallimard la formule des récits à énigmes que les lecteurs doivent résoudre. Il s’agit d’un pur produit médiatique, qui n’est ni une nouvelle, ni un texte journalistique au sens strict. Or ce texte et les suivants seront réédités dans trois recueils successifs, Les 13 Énigmes, Les 13 Coupables, Les 13 mystères qu’il faut bien qualifier de nouvelles policières. Du reportage au récit d’aventures, du vécu à la fiction, les frontières sont à chaque fois déplacées voire effacées. Simenon publie aussi des aventures de Maigret sous la forme de nouvelles (elles ont été réunies dans le dixième tome de l’édition intégrale des cent trois Maigret aux éditions Omnibus, 2008 ) ; d’autres, comme La Nuit des sept minutes, est adaptée au théâtre sous le titre Le Pavillon d’Asnières en 1943. Cela étant, les nouvelles de Simenon se comptent donc par dizaines, et se répartissent principalement entre nouvelles policières et ce que l’on pourrait appeler des nouvelles documentaires.

Fernand Dumont

Fernand Dumont

 

Parmi les auteurs qui, plus discrètement, ont pratiqué la nouvelle, il faut signaler ceux qui adhèrent au courant surréaliste. Marqué par le merveilleux nervalien et par le fantastique de Poe, André Breton, qui affichait sa détestation du romanesque, acceptait plus volontiers les proses brèves et atypiques. Pour Fernand Dumont, les contes ou nouvelles de La Région du cœur, qui forment un diptyque avec la Dialectique du hasard au service du désir, incarnent dans la fiction une manière exigeante de « changer la vie ». Les nouvelles de Marcel Lecomte tiennent sans doute davantage du poème en prose ; elles explorent les surprises d’une temporalité distendue (Les Minutes insolites, 1936). Celles de Marcel Mariën, souvent très réussies, se livrent aux plaisirs de l’érotisme, du pastiche littéraire ou aux frissons de la réalité bouleversante avec une imagination jamais en défaut (Fantômes du château de cartes, 1981).

 © Archives et Musée de la Littérature

Dans la même période, Jean Ray et Franz Hellens donnent, chacun pour leur part, et sans autre lien que leur commune origine gantoise, de nombreux récits courts qui relèvent du fantastique. Celui de Hellens creuse dans un premier temps une perception diffractée du réel, encore symboliste, pour explorer systématiquement par la suite toutes les formules du genre, de l’inquiétude légère au surgissement de l’innommable. Depuis Les Hors-le-vent (1909) et Les Clartés latentes (1912), ses premiers recueils, jusqu’aux Nouvelles Réalités fantastiques ( 1941 ) et à son essai sur Le Fantastique réel (1967), une part majeure de son œuvre relève de ce genre, qu’il développe dans ses romans comme dans ses nouvelles. Celles de Jean Ray relèvent davantage de la littérature de grand public. Publiés d’abord dans la presse gantoise, ses récits fantastiques nourrissent une longue série de volumes constamment réédités, comme Les Contes du Whisky (1925), Le Grand Nocturne (1942), Les Cercles de l’épouvante (1943 ), Les Derniers Contes de Canterbury (1943). Les éditions Marabout assurent sa diffusion à partir des années 1960, relayée ensuite en France par Laffont, puis par Néo. Son fantastique s’ancre dans la tradition romantique : vie nocturne, présence des morts, mystères des doubles forment un registre qui varie peu, mais qui touche toujours le lecteur par l’atmosphère qui s’en dégage.

 

Après la guerre

L’effacement progressif de la presse imprimée n’a pas entraîné celui du genre de la nouvelle. Cela s’explique de plusieurs manières. L’une d’elle est l’installation du genre dans les usages littéraires, certains auteurs privilégiant les formes courtes, soit par goût, soit par compatibilité avec leur emploi du temps ou, comme aurait sans doute dit Sternberg, leur paresse. D’aucuns ont ainsi choisi de devenir des nouvellistes à part entière, parfois de préférence au roman.

Une seconde raison tient dans l’apparition de prix, de festivals, d’anthologies et d’ouvrages de synthèse qui donnent une visibilité institutionnelle au genre, et relancent la motivation des auteurs. L’Académie française en 1971, le Goncourt (1974), la Société des Gens de Lettres (1984) décernent des prix dédiés à la nouvelle, et des revues littéraires spécialisées ont vu le jour, y compris en format numérique. En sus de son œuvre personnelle (Sept simulacres : contes insolites, 1982), Jean-Baptiste Baronian multiplie chez Marabout les anthologies de prestige, inscrivant ainsi La Belgique fantastique (1975) dans une série qui rassemble des textes russes, anglais et américains. Il prolongera ensuite ce travail d’inventaire chez des éditeurs français. La thèse d’Éric Lysøe sur Les Kermesses de l’Étrange (1993) et les quatre volumes qu’il publie dans la collection Espace nord sur la La Belgique de l’étrange (2003-2010) renforcent l’idée d’une sorte d’imaginaire local particulièrement enclin au fantastique. Très naturellement, en raison de leur format, contes et nouvelles trouvent une place privilégiée dans ces recueils thématiques ; elles ne doivent pourtant pas faire oublier que de nombreuses nouvelles s’écrivent aussi dans d’autres genres.

Jean-Baptiste Baronian

Jean-Baptiste Baronian 

Les écrivains convoqués sous l’égide du fantastique sont toutefois loin de faire école ou de partager les mêmes préoccupations. Le Guldentop de Marie Gevers, dont l’édition définitive paraît en 1965, peut être lu comme un recueil de nouvelles sur les apparitions d’un fantôme. Mais l’univers intérieur de la romancière de l’Escaut n’a rien de commun avec celui de Jacques Sternberg, originaire d’Anvers et parisien d’adoption. Selon René Godenne, Sternberg aurait rédigé pas moins de 973 nouvelles, certaines ne dépassant d’ailleurs pas quelques lignes (dans Encyclopédie, p. 367). De cette brièveté, Sternberg a fait une sorte de marque de fabrique, cherchant la densité maximale et la chute la plus surprenante. Certaines adoptent presque un style formulaire, comme « Il était tellement bien élevé qu’avant d’entrer dans sa mort, il fit passer sa femme devant lui. » Ces nouvelles relèvent du fantastique ou de la science-fiction pour le plus grand nombre (Contes glacés, 1974), mais aussi d’un certain réalisme (Histoires à dormir sans vous, 1990). Souvent cocasses, elles dénotent aussi une vision désabusée ou mélancolique du monde, qui est la marque de l’auteur et sa nécessité d’écrire.

Jacques Sternberg © Minuit

Tout autre également est l’œuvre de Thomas Owen (pseudonyme de Gérald Bertot), qui publie d’abord des romans policiers dans les collections de Stanislas-André Steeman pour des raisons économiques et qui poursuit ultérieurement, pour son plaisir et le nôtre, une œuvre abondante d’auteur de nouvelles fantastiques (de La Cave aux crapauds, 1945, souvent rééditée, à Contes à l’encre de la nuit, 1998). Digne successeur de Jean Ray, avec lequel il était lié, Owen, qui était aussi critique d’art sous le nom de Stéphane Rey, est un maître de la description précise et colorée dans laquelle monte, insoutenable, une angoisse souvent teintée d’un peu d’humour.

Marcel Thiry, auteur des Nouvelles du grand possible (1960) pourrait compléter ce trio d’auteurs fécond. Poète avant tout, ce grand écrivain wallon évoque, lui aussi, une perception décalée du monde, mais sans fréquenter les chemins de l’horreur. Plus proche d’Hellens que de Ray, y compris par une écriture assez sophistiquée, Thiry travaille la dimension ludique du décalage, à la limite des genres constitués, dans une quête très personnelle de la prise de distance. Son chef-d’œuvre, « Le Concerto pour Anne Queur », est une longue nouvelle sur le thème des morts-vivants, un récit de science-fiction, mais également une méditation philosophique sur le corps et l’esprit. Un Michel Lambert, dont l’œuvre débute dans la période suivante (De très petites fêlures, 1987) se souviendra de cet usage minimal du fantastique.

Marcel Thiry

On ne peut, en ces quelques lignes, faire le panorama complet de la nouvelle belge avant 1970. Les listes patiemment dressées par René Godenne mentionnent bien des écrivains qui n’ont pas été cités ici. Les revues littéraires, ce média privilégié de l’édition belge, en ont publié d’innombrables, qui sont restées inédites, et nulle enquête n’a extrait de la presse quotidienne nationale, qui commence seulement à peine à être numérisée, les collaborations d’écrivains connus ou méconnus qui s’y trouvent. Il existe par ailleurs un genre de récits courts spécialement destiné aux enfants ou aux adolescents, parfois produits par des écrivains importants, qui mériterait également qu’on le découvre. Mais nul doute que les auteurs cités méritent déjà qu’on les lise.

 


 © Paul Aron, octobre 2020

 

 

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Focus sur le policier belge

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Le policier en Belgique francophone

Dans le domaine du policier, la réputation de la littérature belge n’est plus à faire. Des contemporains aux classiques, notre littérature fourmille de talents qui explorent ou ont exploré avec succès le roman policier.

 

Le policier dans la collection Espace Nord : 

De nombreux romans policiers patrimoniaux et contemporains sont présents dans la collection Espace Nord. Découvrez-les ci-dessous.

Chaque roman est accompagné d’une fiche pédagogique à télécharger gratuitement.

Télécharger toutes les fiches sur le policier dans la collection Espace nord (PDF).

 

 

 

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Prix de langue régionale endogène

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Prix de la première œuvre en langue régionale 

2021           Armand Herbetto pour Mi sonle-t-i qui / Il me semble que
et Michelle Fourez pour Louise Bel Air
2020           Eric Monaux pour Djan
2019           Pierre Noël pour El dernî pinchon
2017           Pascal Winberg pour C’est cha l’amou

Prix triennal de littérature dramatique en langue régionale

2021         Michel Robert & Michel Meurée pour Vauban Toudis Li
                  et  Rose-Marie François pourFilipè & Je.han 

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Sélection jeunesse Lisez-vous le belge ? 2021

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À l’occasion de la campagne « Lisez-vous le belge ? »  nous vous proposons une sélection de vingt livres d’auteurs belges francophones destinés aux enfants entre 0 et 12 ans. Publiés entre 2005 et 2021, ces titres forment un ensemble bigarré, tant au niveau des thématiques abordées que des formes empruntées, dans lequel chaque jeune lecteur ou lectrice pourra trouver son bonheur.

Les âges sont notés à titre indicatif. Au gré des humeurs et des envies, n’hésitez donc pas à jeter un œil dans les autres catégories

Télécharger la sélection (PDF)

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Rétrospectives 2020

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Retrouvez sur cette page toutes les sélections rétrospectives de l’année 2020 en littérature générale. :

  • Rétrospective 2020 : les romans

Rétrospective 2020 : les romans

  • Rétrospective 2020 : les recueils de poésie

Rétrospective 2020 : les recueils de poésie

  • Rétrospective 2020 : les recueils de nouvelles

Rétrospective 2020 : les recueils de nouvelles

  • Rétrospective 2020 : les policiers

Retrospective 2020 : les policiers

  • Rétrospective 2019-2020 : littératures de l’imaginaire

Retrospective 2019 & 2020 : littératures de l’imaginaire

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Nouvelle

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Sur cette page, retrouvez la liste des ressources présentes sur Objectif plumes et consacrées à la nouvelle

  • Notre article : La nouvelle belge d’aujourd’hui

La nouvelle belge d’aujourd’hui

  • Notre article : La nouvelle en Belgique francophone : 1830-1970

La nouvelle en Belgique francophone : 1830-1970

  • Notre sélection rétrospective : 6 recueils de nouvelles parus en 2021

Retrospective 2021 : recueils de nouvelles

  • Notre sélection rétrospective : 6 recueils de nouvelles parus en 2020

Rétrospective 2020 : les recueils de nouvelles

  • Nouvelles : suggestions aléatoires

Nouvelles : suggestions aléatoires

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Les Prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2021

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Initiés sous d’autres formes dès 1924 pour certains d’entre eux, les prix littéraires de la Fédération Wallonie-Bruxelles récompensent aujourd’hui aussi bien les auteurs débutants qui ont publié un premier titre que les écrivains confirmés dont ils couronnent la carrière. Une façon pour la Fédération Wallonie-Bruxelles de participer à la promotion des œuvres et à travers elles de celles et ceux qui leur donnent vie.

Ces huit prix attribués en 2021 possèdent chacun leur spécificité et les jurys qui les ont proposés étaient composés d’experts et de spécialistes dans les domaines considérés. Toutes les littératures y sont à l’honneur, qu’il s’agisse de la littérature générale en langue française ou en langue régionale, de la bande dessinée et de la littérature dramatique ou de jeunesse.

Les prix attribués cette année sont :

Le Prix triennal de littérature dramatique en langue française
Le Prix triennal de littérature dramatique en langue régionale
Le Prix de la première œuvre en langue française, sur proposition de la session Lettres de la Commission des écritures et du livre
Le Prix de la première œuvre en langue régionale
Le Prix triennal de littérature de jeunesse 
Le prix de première œuvre en littérature de jeunesse
Le prix de première œuvre en bande dessinée, sur proposition de la session Bande dessinée de la Commission des écritures et du livre
Le prix Atomium-Fédération Wallonie-Bruxelles en bande dessinée, sur proposition de la session Bande dessinée de la Commission des écritures et du livre

Le Prix triennal de littérature de jeunesse est attribué à Anne Herbauts

Ce prix, décerné depuis 2006, récompense un auteur/un illustrateur issu de la Fédération Wallonie-Bruxelles, dont l’ensemble des publications constitue déjà une œuvre. Il est une marque de reconnaissance et d’encouragement. Le travail d’Anne Herbauts se distingue par une exigence graphique et une richesse dans le contenu narratif. On y perçoit aussi une exigence poétique susceptible de toucher tant les petits que les lecteurs adultes, enrichissant ainsi le potentiel d’une lecture partagée.

Anne Herbauts succède au palmarès de ce prix à Thomas Lavachery, récompensé en 2018.

Le Prix de la première œuvre en langue française récompense le recueil Le Fil des traversées, d’Anna Ayanoglou

Ce prix annuel est attribué depuis 1999 et célèbre le premier ouvrage en littérature générale (roman, poésie, essai) d’un jeune auteur ou d’une jeune autrice. En récompensant Anna Ayanoglou et son recueil Le Fil des traversées, le jury salue la naissance d’une voix poétique originale et nouvelle présentant une belle ouverture d’esprit, un lyrisme renouvelé en plus d’une grande maturité du discours poétique.

Anna Ayanoglou succède au palmarès de ce prix à Claire May (Oostduinkerke) et Maud Joiret (Cobalt).

Le Prix de la première œuvre en langue régionale récompense Michelle Fourez et Armand Herbeto  

Le prix est attribué ex-aequo à Michelle Fourez (pour Louise Bel Air) et Armand Herbeto (pour Mi sonle-t-i qui)

Louise Bel Air de Michelle Fourez se distingue par sa construction narrative très cohérente. Les faits tels qu’ils sont décrits, sans commentaire émotionnel ni jugement de valeur, dégagent beaucoup d’humanité. Le poids du qu’en dira-t-on et l’atmosphère générale du texte, qui évoque Maupassant, sont traités avec finesse.

Mi sonle-t-i qui d’Armand Herbeto évoque un sujet original et rarement traité en wallon : la maladie d’Alzheimer. Le jury souligne que la solitude du personnage fait l’objet d’une évocation sensible.

Michelle Fourez et Armand Herbeto succèdent au palmarès de ce prix à Anne Blanpain couronnée en 2020 pour son texte Dji routeu sins mouv’ter.

Le Prix de la première œuvre en littérature de jeunesse récompense Elisa Sartori pour Je connais peu de mots

Ce prix est attribué depuis 2020. Il récompense un premier ouvrage en littérature jeunesse. Le livre d’Elisa Sartori, intitulé Je connais peu de mots est un fin Leporello, glissé dans une pochette. Il a suscité de l’enthousiasme pour la qualité de l’objet, particulièrement soigné, pour l’illustration, témoignant d’un minimalisme soigné et  pour la thématique, la maîtrise d’une langue autre que la sienne ; le propos est susceptible de toucher un public enfant et adulte.

Elisa Sartori succède au palmarès de ce prix à Sandra Edinger  récompensée en 2020 pour Le grand débordement.

Le Prix de la première œuvre en bande dessinée met en avant le Manuel de civilité biohardcore d’Antoine Boute, Stephan De Groef et Adrien Herda

Depuis 2019, le prix de la première œuvre en bande dessinée met en avant chaque année la première publication d’un auteur, d’une autrice ou d’un collectif.

La récompense est attribuée à Antoine BouteStéphane De Groef et Adrien Herda  pour leur Manuel de civilité biohardcore.

Le jury salue une première œuvre forte, marquante, conceptuelle. Il s’agit des débuts en bande dessinée d’Antoine Boute (déjà actif comme poète), de Stéphane De Groef et Adrien Herda.

Les auteurs succèdent au palmarès de ce prix à Eléonore Scardoni et Romane Armand pour Forgeries : Construction de l’exploratoire (tome 1)

Le Prix triennal de littérature dramatique en langue française va à Paul Pourveur, pour Aurore boréale

Décerné pour la première fois en 1926, ce prix récompense tous les trois ans un auteur pour une pièce de théâtre. Cette année, c’est la pièce Aurore boréale de Paul Pourvreur qui est primée. Le jury souligne la force de cette pièce, où fond et forme se rejoignent, ainsi que sur l’importance de Paul Pourveur comme dramaturge, alors que son œuvre a été peu récompensée par des prix. Enfin, les membres du jury souhaitent également indiquer que le travail réalisé par la maison d’édition L’arbre de Diane mérite d’être encouragé.

Paul Pourveur succède au palmarès de ce prix à Veronika Mabardi couronnée en 2018 pour Loin de Linden.

Deux ex-aequo pour Le Prix triennal de littérature dramatique en langue régionale 

Le prix est attribué à la fois à Rose-Marie François, pour Filipè & Je.han et aux auteurs Michel Robert & Michel Meurée, pour Vauban Toudis Li 

Pour le texte de Rose-Marie FrançoisFilipè & Je.han  : les membres du Jury saluent l’écriture soignée de l’autrice, laquelle maîtrise parfaitement tant son parler picard (Douvrain) que les techniques de composition théâtrale, et reconnaissent la haute valeur linguistique et littéraire de l’œuvre proposée.

Pour la pièce Vauban Toudis Li  de Michel Robert & Michel Meurée :

Rose-Marie FrançoisMichel Robert & Michel Meurée succèdent au palmarès de ce prix à Roland Thibeau couronné en 2018 pour Ël vilâje insclumî (Le village endormi) 

Le Prix Atomium-Fédération Wallonie-Bruxelles en bande dessinée pour José Parrondo

Depuis 2017, ce prix récompense chaque année un auteur de bande dessinée. Déjà proclamé lors de la remise des Prix Atomium (et aussi dénommé Prix Atomium de la Fédération Wallonie-Bruxelles), ce prix n’est pas une surprise puisqu’il avait déjà été annoncé publiquement au mois de septembre.

En récompensant l’auteur José Parrondo pour l’ensemble de son œuvre, le jury a tenu à mettre en avant un auteur qu’il considère comme un peu trop discret jusqu’à présent dans l’univers de la bande dessinée, et ce alors qu’il contribue de façon significative à son enrichissement culturel. Ce prix contribue à la visibilité de cette œuvre singulière et est une manière d’encourager le lauréat à poursuivre celle-ci.  

José Parrondo succède au palmarès de ce prix à l’autrice Dominique Goblet, récompensée en 2020.

Photos des auteurs : © FW-B – Jean POUCET

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Les incontournables de la littérature belge

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Du 1er novembre au 6 décembre 2021, la campagne de promotion intitulée « Lisez-vous le belge ? » vise à célébrer la diversité du livre belge francophone. L’ambition de cette campagne est de faire (re)découvrir au grand public, toutes générations confondues, un panel varié de genres littéraires : du roman à la poésie, du policier à l’autofiction, en passant par les formes courtes et le théâtre.

À cette occasion, les Archives & Musée de la Littérature (AML) et la collection patrimoniale Espace Nord, propriété de la Fédération Wallonie-Bruxelles, en partenariat avec le PILEn proposent une sélection de vingt œuvres incontournables de la littérature belge francophone.

Un dossier téléchargeable met en avant les différents titres de cette sélection. Outre les biographies et portraits de chaque auteur/autrice, vous y trouverez les résumés des œuvres accompagnés d’extraits, de clés de compréhension, mais aussi de pistes pédagogiques à exploiter et de ressources complémentaires pour mieux comprendre le contexte, les thématiques ou la réception des titres en question. Les classiques qui composent cette sélection offrent une belle introduction au patrimoine/matrimoine littéraire de Belgique francophone. Que ce soit pour inviter vos élèves à la découverte ou défricher vous-mêmes de nouveaux pans de nos littératures, nous vous invitons à lire ou à relire ces œuvres-phares.

Télécharger le dossier « Les incontournables de la littérature belge » (PDF)

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La campagne Lisez-vous le belge ?

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Avec une première édition lancée en 2020, la campagne Lisez-vous le belge ? se renouvelle en 2021 pour promouvoir encore et toujours le livre belge francophone.

Une campagne qui met en avant les auteurs et leurs créations

Comme l’année précédente, la campagne mettra à l’honneur les productions d’auteurs et d’illustrateurs préalablement sélectionnés via un appel à intérêt. La liste des créateurs et créatrices choisis pour la campagne 2021 est désormais disponible. Découvrez leur présentation et leur bibliographie complète ci-dessous. Les illustrations et poèmes produits spécialement pour la campagne seront publiés sur le site du PILEn et sur les pages facebook et instagram de Lisez-vous le belge ?.

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La Fureur de lire

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Comme chaque année, à la mi-octobre, la Fureur de lire prend ses quartiers en Wallonie et à Bruxelles en vue de sensibiliser le grand public à la lecture.

Du 12 au 16 octobre 2022, ce sont plusieurs centaines d’activités en lien avec la lecture, pour la plupart gratuites, qui sont proposées au sein des bibliothèques publiques, librairies, écoles, associations, etc. sur l’ensemble du territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Rencontres, animations, lectures, concours, expositions, un programme diversifié qui s’adresse à tous les âges : bébés, enfants, adolescents et adultes.

> AFFICHER  L’AGENDA « FUREUR DE LIRE »
> TÉLÉCHARGER LE PROGRAMME (PDF)
> CONSULTER LE PROGRAMME :

 

Outre le programme d’activités, la Fureur de lire se décline sous une foule d’initiatives :

 

LES PLAQUETTES DE LA FUREUR DE LIRE

Il s’agit de six nouvelles, poèmes et albums d’auteurs et d’illustrateurs de la Fédération Wallonie-Bruxelles créés dans le cadre de l’événement.
Chaque année, six nouveaux titres viennent étoffer la collection des plaquettes de la Fureur de lire. Des histoires, adaptées pour des tranches d’âges spécifiques, et qui sont, pour certaines, accompagnées de fiches d’activités ludiques.

Les plaquettes sont à découvrir dans les lieux organisateurs d’activités et disponibles, gratuitement, sur simple demande durant toute l’année, en fonction des stocks disponibles. Elles sont également disponibles sur demande pour les enseignants du fondamental et du secondaire.

 

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Le Prix Maurice Carême de Poésie

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Le Prix Maurice Carême de poésie a été créé pour les dix ans de la mort de Maurice Carême. Il couronne tous les deux ans un poète belge francophone.
Les candidats devront être de nationalité belge ou résider en Belgique depuis au moins trois ans. Ils doivent être l’auteur d’un recueil de poèmes écrit en langue française manuscrit ou édité durant les deux années précédant la remise du prix.

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Rentrée littéraire 2021

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Focus sur les titres de la rentrée littéraire belge !

Une belle variété dans les sorties de la rentrée, avec de nouveaux auteurs mais aussi des auteurs confirmés. Et, comme chaque année,  du roman, des nouvelles, de la poésie, du théâtre, des essais, des chroniques et écrits intimes et des biographies.

Cette rentrée littéraire rime avec le retour à une vie presque normale et la reprise complète des dédicaces et des rencontres avec les auteurs (pour découvrir les prochains évènements, consultez notre agenda).

Tous les ouvrages repris ci-dessous se trouvent aussi sur Librel. Ils sont soit en stock dans votre librairie, soit disponibles sur commande.

 

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Les romans de la rentrée en prêt numérique

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La rentrée littéraire belge est déjà disponible en prêt numérique sur Lirtuel !

Grâce à cette sélection créée en partenariat avec Lirtuel, découvrez les romans belges de la rentrée que vous pouvez emprunter gratuitement en numérique.

Vous êtes déjà utilisateur de Lirtuel ? Si un titre de la liste ci-dessous vous intéresse, rendez-vous sur la page qui lui est consacrée sur Objectif plumes et dans la colonne de droite, sélectionnez « Emprunter cette œuvre sur Lirtuel ».

Vous n’êtes par encore utilisateur de Lirtuel ? Accédez directement à la page pour vous y créer un compte.

 

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Les Enfants de la résistance

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© Ers – Dugomier / Éditions du Lombard (Dargaud-Lombard S.A.) 2021

Connaissez-vous la série BD Les Enfants de la résistance ? Il s’agit d’une série d’albums écrits par Vincent Dugomier et dessinés par Benoît Ers qui met en scène trois jeunes villageois français sous l’occupation allemande. Cette série accessible et particulièrement bien documentée intéresse le jeune public mais également les enseignants, tant pour ses qualités narratives et graphiques que pour sa rigueur historique qui leur permet d’aborder la Seconde Guerre mondiale et l’histoire de la résistance avec leurs élèves.

Dans la vidéo ci-dessous, les auteurs Vincent Dugomier et Benoît Ers sont conviés à un mystérieux rendez-vous. Ils évoquent leur travail de bédéistes et la manière dont ils ont construit cette série qui s’étoffe de tome en tome.

Les enseignants peuvent utiliser la vidéo avec leurs élèves afin d’approfondir la série, évoquer la Seconde Guerre et la résistance ou encore découvrir comment se construit un album de bande dessinée.

À paraitre prochainement sur cette page, un dossier pédagogique qui accompagne la vidéo et les deux premiers tomes de la série. Ceux-ci peuvent être empruntés gratuitement et en multi exemplaires au Centre Belge de la Bande Dessinée sous la forme d’une Valise de Voyage littéraire.

Vous êtes enseignant ou enseignante et vous souhaitez aborder la bande dessinée en classe ? Les enseignants qui souhaitent proposer un moment de découverte autour de la bande dessinée à leurs élèves peuvent inviter dans leur classe un auteur de bande dessinée. La Fédération Wallonie-Bruxelles prend en charge le défraiement de l’auteur et le remboursement de ses frais de déplacement (sous réserve du budget disponible et de l’acceptation du projet de rencontre).

Consultez toutes les infos pratiques et la listes des auteurs disponibles pour des rencontres

 

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Bernadette Gervais : Pépite d’or à Montreuil et Prix Libbylit 2020

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Véritable consécration pour le travail de Bernadette Gervais qui vient d’obtenir la Pépite d’or au Salon du livre de jeunesse de Montreuil pour l’ABC de la nature et est lauréate du prix Libbylit 2020 avec En 4 temps .

© Bernadette Gervais

© Bernadette Gervais

Malgré son abondante production, Bernadette Gervais a rarement été sélectionnée pour un prix. Elle a déjà été étonnée qu’un de ses ouvrages figure dans la présélection des Pépites de Montreuil. Mais ce fut une surprise totale lors de l’annonce de la Pépite d’or. «  C’est une belle reconnaissance de mon travail », dit-elle. C’est aussi valorisant d’avoir reçu le prix Libbylit qui récompense une production atypique.

Nous avons déjà eu le plaisir de rencontrer Bernadette Gervais… il y dix ans pour la revue Lectures[1] . Elle y avait raconté ses débuts en littérature de jeunesse. Une autre facette de cette artiste a aussi été présentée par Victoire de Changy dans Le Carnet et les instants[2]. Nous avons décidé de donner un coup de projecteur sur ses dernières productions dont les deux primées.

 

ABC DE LA NATURE

© Les Grandes Personnes

Un album grand format édité aux Grandes Personnes en quadri avec une 5e  couleur orange et une 6e  couleur jaune pétant, terminé en juillet 2020. «  J’aime travailler sur les abécédaires qui sont aussi une forme d’imagier et qui se prêtent bien à mon dessin. Ce travail est assez contemplatif. J’aime créer des livres où les enfants rentrent dedans et apprennent à regarder des choses les entraînant vers l’extérieur. Voir mieux les choses pour mieux les respecter et respecter l’autre. J’adore m’adresser aux petits. La meilleure des récompenses est d’avoir vu sur des photos des bébés absorbés du début à la fin par mon livre. Dès que j’ai eu l’idée, je l’ai présentée à Brigitte Morel, mon éditrice. Je pensais le réaliser en sérigraphie suite à une résidence vécue au Père Castor. Mais de par certaines étapes, cela devenait trop ardu. D’où je l’ai réalisé au pochoir. Le concept de cet abécédaire étant très classique, j’ai donc voulu que graphiquement il le soit moins. C’était un défi. Tout est peint. Aucune intervention numérique. Les lettres sont créées à la main et font partie de mon dessin. Je fais la conception totale de l’image, le jeu des couleurs, la typo très graphique intervenant dans la composition de la page. J’ai essayé de choisir des mots moins connus que ceux que l’on trouve habituellement dans les imagiers. Je désirais que tout cela rende un climat poétique. Les livres que je réalise accompagnent les enfants sur plusieurs années. Ils apprendront ce qu’est un oiseau, puis à le reconnaître, entendre le bruit qu’il fait. Les parents, eux, découvriront les noms d’oiseaux.

Au salon de Montreuil, lors d’un échange avec une personne s’occupant d’alphabétisation, j’ai découvert que mes livres servent à apprendre le français aux primo-arrivants et aux personnes n’ayant pas accès au livre, comme les mamans qui apprennent à lire en se servant de mes livres. Un autre témoignage auquel je pense est celui d’un petit garçon en difficulté qui, lors d’une animation en classe avec Axinamu, a couru voir l’album et est resté 20 minutes à le regarder alors qu’on ne l’avait jamais vu aussi longtemps captivé par un livre. Logopèdes, enseignants et enfants en difficultés utilisent mes ouvrages offrant une plongée, une immersion dans les images. Dans l’enseignement, l’éducation artistique, à l’image, au graphisme, le dessin est complètement négligé. Je suis super touchée d’avoir eu la Pépite d’or pour ce bouquin. Il est celui pour lequel j’ai eu le plus de mal à travailler dessus. Je l’ai commencé juste une semaine après le décès de mon père ; c’est pourquoi je le lui ai dédicacé. Il y a quelque chose qui s’est passé dans ce livre que je n’ai pas maîtrisé. C’est un hommage à mon père qui m’a transmis l’amour de la nature. Je me souviens de promenades avec des jumelles, de guides de fleurs qu’on consultait… Ce livre était une ode à la nature. Il fallait que je sois à la hauteur et qu’on sente l’émerveillement de la petite fille. »

 

EN 4 TEMPS, CHEZ ALBIN MICHEL JEUNESSE EN 2020
© Albin Michel Jeunesse

© Albin Michel Jeunesse>

« Procrastinatrice, je dois travailler de manière intensive pour remettre mes livres à temps. D’où une fois remis, je suis éreintée. Entre deux livres, j’ai l’impression que je ne fais pas grand-chose. Or cela travaille dans la tête et les idées me viennent en une fois. J’ai créé cet ouvrage suite à un flash que j’ai eu avec les 4 temps du coquelicot puis le livre s’est construit autour du flash mûri par ce que j’avais envie de faire. Tout d’un coup, cela émerge. Je vais chez mon éditrice avec uniquement l’image du coquelicot et le découpage du livre. Tout comme Brigitte Morel, Béatrice Vincent est une éditrice exceptionnelle, avec laquelle j’ai une belle complicité. Je montre le projet au départ… une image… et j’arrive ensuite avec le projet abouti. Nous échangeons sur l’objet livre, surtout le format, le papier, le titre et la couverture. On a décidé d’un rouge en cinquième couleur. Cet album est dans un format plus petit. En un coup d’œil, on capte les quatre cases qui se suivent. Les quatre étapes vues de suite ont plus d’impact visuellement. Cela se passe aussi dans le temps de lecture. Ce livre est plus dans l’action. La notion de temps intervient aussi. Entièrement réalisé au pochoir, j’ai travaillé dans un format plus grand qui a été réduit. Les originaux ont une taille double. »

 

ON ÉCHANGE ! PARU AU SEUIL JEUNESSE EN 2019
© Seuil Jeunesse

© Seuil Jeunesse

« Un imagier décalé avec des échanges farfelus, qui réinvente le monde en imaginant ce qu’il se passerait si la vache et la coccinelle échangeaient leurs taches ou si un arrosoir avait une trompe d’éléphant. Là aussi, j’ai eu un flash. Je cherche des idées et j’aime faire des choses assez simples mais pas simplistes. Même si au premier abord cela paraît simple, cela ne l’est pas tant que ça. Comme cette idée de mélange avec l’idée d’échange des caractéristiques, qui fait qu’on devient différent. C’est aussi un livre sur les richesses des échanges. Il y a plusieurs niveaux de lecture, un côté rigolo et un côté graphique très abordable que je reproche parfois aux livres beaux graphiquement mais d’où les enfants décrochent. Mon premier souci est de réaliser des livres pour enfants. Celui-ci a vu le jour chez Seuil jeunesse car mes deux autres éditrices avaient déjà leur planning de publications bouclé et je désirais sortir ce projet. Je suis donc retournée au Seuil où j’ai rencontré Angèle Cambournac, excellente éditrice elle aussi, avec qui je compte bien continuer à travailler. »

 

EN PROJET
© Bernadette Gervais / Albin Michel

© Bernadette Gervais / Albin Michel

Des trucs comme ci, des trucs comme ça, prévu pour septembre 2021, qui comprendra des trucs de la nature et de la vie quotidienne comme des trucs qui collent (scotch, gui), des trucs qui volent (cerf-volant, avion, montgolfière), des trucs qui fondent (beurre, crème glacée, chocolat, iceberg), des trucs qui s’ouvrent (pomme de pin, fermeture éclair), qui éclairent (phare, luciole)… un mélange inattendu pour un imagier moins conventionnel et poétique. Pour conclure, je dirais que la qualité, on ne peut pas la mettre dans des cases. J’aimerais aussi ajouter une phrase de Tana Hoban réputée pour ses imagiers et qui rejoint assez bien mes propos : « Pour moi, les détails sont le plus important. C’est une autre façon de voir, qui aiguise ma perception et c’est ce que je veux faire passer aux enfants à travers mes livres. Je veux dire aux enfants de continuer à regarder, de faire attention aux détails, d’observer, de voir. Je veux qu’ils voient des choses qu’ils n’avaient jamais vues auparavant, ne pas passer trop vite sur ce qui les entoure. »

© Isabelle Decuyper pour Lectures.Cultures N°22, mars-avril 2021

 Crédit image de couverture :  ABC de la Nature de Bernadette Gervais © Éditions des Grandes Personnes, 2020.

 


Notes

[1] Cf. Lectures, n° 164, janvier-février 2010, pp. 86-89. https://fr.calameo.com/books/001070373d0767b8b4b13

[2] Victoire de Changy, « Plier, déplier, n’en jamais finir de découvrir, avec Bernadette Gervais » : un portrait de Bernadette Gervais paru dans Le Carnet et les Instants, n° 197, 2018. Consultable en lignehttps://le-carnet-et-les-instants.net/archives/bernadette-gervais/


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La Petite Fureur : sélection 2021

Par administrateur,
La Petite Fureur est un concours pour promouvoir la lecture chez les enfants et mettre en valeur les auteurs, illustrateurs et traducteurs de Wallonie et de Bruxelles.

Au départ de la sélection de titres ci-dessous, les enfants de 3 à 15 ans sont invités à prolonger leur lecture par une forme artistique de leur choix : dessin, collage, poème, adaptation théâtrale ou musicale (à l’exception de réalisations en trois dimensions). Pour s’inscrire, un formulaire sera bientôt disponible sur la page « Concours Petite Fureur » du site www.fureurdelire.be.

C’est le jury composé des auteurs, illustrateurs et traducteurs des œuvres ci-dessous qui choisira les gagnants.

Plus d’informations sur le concours et la sélection sur le site Littérature de Jeunesse 

 

Sélection 2021

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L’aventure d’un premier roman

Par administrateur,
Quatre primo-romanciers édités en 2021 reviennent sur leur expérience

 

Quel plaisir pour un écrivain de publier un premier roman. Du tapuscrit au lecteur ou à la lectrice, le parcours peut cependant être long, sinueux, rempli d’embûches et soumis à une part de hasard. Nous avons interrogé quatre primo-romanciers belges de cette année.

Les premiers romans sont devenus un phénomène éditorial en soi. Ils occupent une place de choix à chaque rentrée littéraire, que ce soit celle de septembre ou celle de janvier. La presse spécialisée mentionne quasi systématiquement le nombre de premiers romans publiés à ces deux occasions saisonnières. Des données qui rappellent que l’édition est aussi affaire de chiffres. Dans le maelstrom des rentrées littéraires, le premier roman relève pour l’éditeur d’une réelle audace, même si cette catégorie de livres bénéficie d’un coup de projecteur « marketing » et d’un attrait assez partagé pour la nouveauté.

 Encore faut-il que l’éditeur et le primo-romancier se rencontrent. Comment tomber sur la perle rare pour l’éditeur ? Comment décrocher le sésame d’une première publication pour l’aspirant écrivain ? L’accumulation de refus est, à de rares exceptions près, le lot de la majorité des candidats. L’histoire littéraire cite des exemples fameux d’écrivains devenus classiques qui ont failli désespérer de décrocher un jour la timbale, voire ont autoédité leur texte. Être édité est affaire de persévérance. Et pourtant, le simple envoi par la poste reste la référence pour la plupart des éditeurs, à l’exception de quelques-uns qui optent depuis peu pour la voie numérique. Certes, d’autres arrivent dans telle ou telle maison après avoir été lu par un écrivain de référence, après avoir été repéré à la suite d’un concours ou, plus récemment, sur les plateformes d’autoédition sur le net que scrutent certains éditeurs. Sans oublier l’intercession éventuelle d’un agent comme il en existe dans le monde du football. Il n’y a en réalité pas de règle établie et le monde de l’édition est truffé d’anecdotes diverses. Tout écrivain est passé par un premier roman : chacun a sa petite histoire plus ou moins romancée à propos de son entrée en littérature. Au vu de l’actualité littéraire de ces dernières années, force est de constater que la littérature belge de langue française ne manque pas d’une certaine relève. Les primo-romanciers occupent une belle place à toutes les rentrées. Raison pour laquelle nous avons donné la parole à quatre d’entre eux, deux femmes, deux hommes, de générations différentes (il n’y a pas d’âge pour publier un premier roman). Quatre Belges, dont deux édités en France, deux en Belgique, ce qui est une des caractéristiques des littératures périphériques à la France.

 

SOPHIE WOUTERS : UNE AVENTURE MAGNIFIQUE

Sophie Wouters

Le temps de l’écriture ne correspond pas toujours à celui de la publication. Un premier roman publié a parfois été précédé de plusieurs manuscrits et de plusieurs démarches vers des éditeurs. Sophie Wouters, qui a publié cette année Célestine chez 180° éditions, une enseigne belge, s’est d’abord exprimée dans le domaine des arts plastiques. Elle y a consacré l’essentiel de son temps pendant des années, même si l’écriture l’accompagne depuis longtemps. « J’ai toujours eu des idées de romans en tête, précise-t-elle, mais écrire un roman, c’est fastidieux. Rédiger un mail me demande une énergie de malade. Alors, un roman ! » Il n’empêche, avant d’envoyer Célestine à un éditeur, Sophie Wouters a écrit un premier roman, imposant, inédit à ce jour : « Il se déroule de 1923 à 2056, explique-t-elle, un livre d’idées sur l’humanité, la famille, les relations humaines, les parallèles entre la grande Histoire et nos petites histoires… Au moment de poster le manuscrit, j’ai eu un doute par rapport au monde de l’édition. Ayant beaucoup lu dans ma vie, je me suis rendu compte des failles de ce manuscrit et qu’il y avait un décalage entre les attentes des lecteurs et ce qu’acceptaient les éditeurs. Je crois que les gens ont à nouveau besoin de lire de vraies histoires. Ce n’est pas une analyse, plutôt une intuition. Ce texte est toujours dans un tiroir, je le retravaillerai peut-être un jour. » Quelques mois passent et Sophie Wouters se remet à écrire. Un roman d’un tout autre genre. L’histoire prenante d’une gamine née orpheline, élevée par une tante dans les années ’60 et que l’on retrouve quelques années plus tard au cœur d’un procès d’assise. Tout le suspens du roman reposera sur ce qui a pu arriver entretemps à ce personnage qui nous devient de plus en plus familier au fil de la lecture ! Une fois le manuscrit terminé, encore faut-il convaincre un éditeur. « Je ne connaissais rien au monde de l’édition, précise Sophie Wouters, mais parallèlement à l’écriture, je m’y suis intéressée pendant trois ans. Je me suis même rendu compte que j’en connaissais parfois plus que certains écrivains qui avaient déjà publié ! J’ai présenté le texte à cinq éditeurs, choisis en fonction de mes lectures et des auteurs qu’ils publient et que j’apprécie, j’ai eu cinq refus. Puis est venu le confinement. J’ai décidé de mettre mon orgueil de côté et d’avoir l’audace jamais eue auparavant : annoncer que j’avais écrit un roman. J’en ai publié un extrait par jour sur Facebook pour tester la réaction des internautes. Cela a fait le buzz. J’ai été approchée par deux éditeurs avec qui le courant n’est pas passé, et un scénariste qui voulait en faire un film, mais me demandait de changer la fin, ce que j’ai refusé. Le hasard a fait que le même jour, en décembre 2020, j’ai envisagé l’autoédition et qu’Hervé Gérard, l’ancien président de la Foire du Livre de Bruxelles, qui avait aimé le manuscrit, mais m’avait laissé l’envoyer en France, m’a conseillé de l’envoyer à son éditeur, Robert Nahum, le patron de 180° éditions. Celui-ci l’a accepté avec enthousiasme. Je m’étais promis une seconde naissance et elle est arrivée à 58 ans, en pleine pandémie. »

Surtout, respectez-vous !

Une fois accepté, un manuscrit connaît encore bien des étapes suivant l’éditeur qui l’accepte : il y a celui qui se contente d’apporter les corrections de base, celui qui demande de retravailler le texte en profondeur, les longueurs, la découpe, la psychologie de tel ou tel personnage, il y a celui qui suggère – ou impose – un changement de titre, celui qui interpelle l’auteur sur le choix de l’illustration en couverture quand il y en a une… La présentation de Célestine est sobre : un titre simple, en rouge comme les coquelicots qui reviennent dans le texte, sur un fond crème, tel que l’imaginait l’auteure. « L’éditeur a répondu à mes desiderata. Dans le travail sur le texte, se souvient Sophie Wouters, il a eu cette phrase importante pour moi : « Surtout, respectez-vous ! » Il n’a fait aucune remarque, il y a eu simplement des propositions très précises du correcteur, plus sur des détails comme bohème avec ou sans accent circonflexe. » Le livre est ensuite parti à la rencontre de son lectorat, aidé en cela par cette appréciation d’… Amélie Nothomb reprise en 4e de couverture : « Cette nuit, j’ai lu Célestine. Ton texte m’a bouleversée, je n’ai pas pu m’arrêter. Je te dois une nuit blanche ! » « Je l’ai connue quand j’étais gamine, précise Sophie Wouters, je ne l’avais plus vue depuis une vingtaine d’années. Elle a lu le manuscrit immédiatement et réagit presque aussi vite. » Un marrainage qui va porter ses fruits. Les libraires, les journalistes et les chroniqueuses sont au rendez-vous, dont un passage dans le JT de RTL et un bel article de Jean-Claude Vantroyen dans Le Soir. « Un succès invraisemblable, sourit Sophie Wouters. Je vis des moments incroyables. J’ai une énergie pour donner vie à Célestine. C’est à la sortie d’un livre que tout commence, qu’il faut donner le maximum. Je ne suis pas seule : l’éditeur est disponible, toujours à l’écoute, ainsi que l’attachée de presse. Il y a aussi le bouche-à-oreille, l’enthousiasme du patron de Filigranes, du directeur de la Maison de la Francité… Je remercie systématiquement tous ces gens. Ce n’est pas du marketing, c’est dans ma nature, et j’ai une grande gratitude à leur égard. »

Le conseil de Sophie Wouters à celui, celle qui cherche un éditeur

« D’abord croire à ses rêves et s’y accrocher à fond. Ensuite, demander la plus grande sincérité à ceux à qui on demande de lire le manuscrit et même le faire lire à des personnes qui vous connaissent moins ou pas du tout. Sur le conseil d’Éric-Emmanuel Schmidt croisé par hasard, j’ai protégé mon tapuscrit en le déposant auprès d’une société de droits d’auteurs. Cela peut se faire via un coffre-fort virtuel et ça ne coûte pas très cher. Par ailleurs, on a toujours envie d’être publié auprès de grandes maisons d’édition en France mais, comme on me l’a dit un jour à la Maison des Auteurs, il vaut mieux être publié dans une petite maison d’édition belge qui se battra pour vous que dans une grande maison française qui vous lâchera si ça ne marche pas. Avec 180° éditions, je vis une aventure magnifique faite de bienveillance, de rigueur, dans une entente presque parfaite, avec des valeurs similaires. »

 

ZOÉ DERLEYN : SORTIR DE LA SOLITUDE DE L’ÉCRITURE

Zoé Derleyn

Un primo-romancier n’est pas nécessairement un novice en littérature. Debout dans l’eau, de Zoé Derleyn, n’est pas son premier livre. Il a été précédé par la publication d’un recueil de nouvelles aux éditions Quadrature, Le goût de la limace. Un passage de la nouvelle au roman vécu par plusieurs écrivains belges comme Michel Lambert, Caroline Lamarche, Vincent Engel, Thomas Gunzig, etc., qui comporte certains avantages. « Cette première expérience a été l’occasion de me confronter à la réalité de la publication, se souvient Zoé Derleyn. Il y a tout le travail d’accompagnement du livre qui n’a rien à voir avec l’écriture et qu’il faut assumer. L’exposition, même si elle est relative, ne m’est pas naturelle. Je dois un peu me faire violence, malgré le réel plaisir de partager. C’est aussi ce premier livre qui m’a donné envie de continuer à publier. L’écriture a toujours fait partie de ma vie, c’est une nécessité, mais jusqu’à ce recueil, je n’envisageais pas vraiment de publier. » Particularité de son éditeur basé à Louvain-la-Neuve : il publie exclusivement des recueils de nouvelles, à raison de trois, quatre titres par an. Vu cette spécificité, Zoé Derleyn a dû remettre quasiment les compteurs à zéro avec son nouveau manuscrit.

L’expertise d’une équipe éditoriale

Dans Debout dans l’eau, roman sobre et bien mené sur la filiation, paru au Rouergue, une gamine élevée par ses grands-parents assiste aux derniers jours de son grand-père distant et autoritaire, qui a régné sur un jardin où s’est jouée l’enfance de l’héroïne, très imaginative. « Pour le roman, il m’a fallu repartir en quête d’un éditeur, se souvient Zoé Derleyn. Il y a eu des refus, dont certains argumentés que j’ai ressentis comme des encouragements. Finalement, ce qui compte, c’est quand le texte rencontre son éditeur, dans mon cas une éditrice, Nathalie Démoulin, qui a envie de le porter, de le faire devenir livre. C’est un moment très important, on sort de la solitude de l’écriture. Derrière la fabrication d’un livre, il y a toute une équipe. » Et lorsque la jeune romancière évoque différents aspects de la collaboration qu’elle a pu nouer avec ses deux maisons d’éditions, elle met en avant des éléments auxquels le lecteur ou la lectrice ne pense pas nécessairement une fois l’ouvrage entre leurs mains. « Bien que l’habillage du livre fasse partie des prérogatives de l’éditeur, j’ai chaque fois eu le sentiment d’être incluse dans le processus. Pour le recueil de nouvelles, la photo de couverture a été réalisée par un ami, Cyrus Pâques, sur une idée de l’éditeur. Le seul point de divergence était le choix de Quadrature de publier en orthographe rectifiée. Pour la couverture, nous avons trouvé un compromis, une petite limace en guise d’accent circonflexe sur le mot « goût ». Pour le roman, l’éditrice m’a envoyé les projets de couverture et de quatrième de couverture. Je n’avais aucune idée préalable et je suis très contente du résultat. Pour cette partie du travail, indispensable à la publication, c’est rassurant de pouvoir se reposer sur l’expertise de l’équipe éditoriale. » Cette expertise s’avère également indispensable pour la suite de l’aventure : « Depuis la parution, j’ai une relation suivie avec l’équipe éditoriale, en particulier l’attachée de presse, Laure Wachter. Je me sens tout à fait soutenue par l’équipe du Rouergue, et c’est quelque chose que j’avais déjà vécu avec Quadrature. L’écriture est pour moi un chemin parsemé de doutes et le soutien d’un éditeur est très précieux. À tel point que lorsque j’ai su que le roman allait être publié au Rouergue, parmi les premières personnes que j’ai prévenues, il y avait l’équipe de Quadrature. » Autre bonheur lié à la publication, selon Zoé Derleyn : « L’étonnement positif, c’est la rencontre avec les lecteurs. Quand j’écris, ce qui m’importe, c’est d’être juste par rapport à moi. Quand on passe à la publication, je me demande si ce qui fait sens pour moi peut aussi faire sens pour d’autres. C’est une vraie joie, un vrai étonnement de découvrir que mes mots peuvent toucher des inconnus. »

 

Le conseil de Zoé Derleyn à celui, celle qui cherche un éditeur

« Je ne sais pas si j’ai des conseils à donner, chaque chemin est tellement différent ! Pour ma part, avant d’envoyer le manuscrit, je le laisse reposer, quelques semaines, quelques mois. Cela me permet de le relire avec un regard neuf. Alors, peut-être que je conseillerais la patience. Je pense aussi qu’il ne faut pas oublier que tout ce qu’on écrit n’a pas nécessairement vocation à être publié. Il m’arrive sans arrêt de travailler un texte, parfois même longuement, puis de le mettre de côté. Je sais que j’ai eu besoin de l’écrire, et peut-être que j’y reviendrai plus tard, peut-être pas. Cela fait partie du chemin. »

 

PHILIPPE GUSTIN : L’ENTREPRENEUR LITTÉRAIRE

Philippe Gustin

Avec Philippe Gustin, nous avons la confirmation qu’il y a presque autant de parcours de primo-romanciers qu’il y a de primo-romanciers. Son premier manuscrit n’a été précédé d’aucun autre et celui-ci a été publié parce qu’il a été le lauréat du Prix Fintro Écritures Noires 2020. Celui-ci était organisé pour la quatrième fois par Fintro et la Foire du Livre de Bruxelles, attribué sur manuscrit afin de promouvoir de nouvelles voix d’auteurs de polar belges francophones qui n’ont pas encore publié à compte d’éditeur. Mené tambour battant, truffé de trouvailles incroyables, débordant d’humour potache et de piques caustiques, Sous la ceinture met le doigt là où saignent nos sociétés contemporaines : le terrorisme, ou plutôt les terrorismes, puisqu’il y est question d’extrême-droite, d’islamisme et d’écoterrorisme… L’air de rien, l’auteur amène à réfléchir à leur montée en puissance, même quand il les tourne en ridicule, et à la manière dont la démocratie témoigne d’une dangereuse impuissance face à eux. Un texte remarqué par des spécialistes du genre et qui pourtant était un coup d’essai pour son auteur. « Sous la ceinture est mon premier manuscrit. Assez curieusement, je n’ai jamais rêvé d’être écrivain, explique Philippe Gustin, et je ne me vois d’ailleurs pas comme tel : si je devais me coller une étiquette, ce serait celle « d’entrepreneur littéraire ». L’envie m’est venue de me lancer dans un projet personnel et ambitieux : écrire un livre ne nécessite presque aucun investissement financier et est une sacrée aventure. C’était ce qu’il me fallait ! » Entrepreneur littéraire, voilà bien une expression que nous n’avions jamais entendue auparavant et qui nous a intriguée au point de vouloir en savoir davantage sur le métier de celui qui l’a utilisée pour se qualifier. « Dans la vie quotidienne, précise Philippe Gustin, je dirige une petite équipe commerciale, dans le secteur de la construction. Je me suis donc naturellement intéressé à tous les aspects de l’aventure du Prix Fintro : élaboration de la couverture la plus attrayante possible, participation à la réunion avec l’équipe commerciale de Media Diffusion avant le lancement, discussion avec l’éditeur sur la manière de communiquer autour du roman. Bref, après avoir écrit le livre, je voulais le vendre, même si je savais que je ne ferais pas beaucoup d’argent avec. Je décris mon roman comme mon « magasin de fleurs en papier sur la plage ». »

Tout un package

L’attribution du Prix Fintro remis sur manuscrit et qui consiste en sa publication bouscule le schéma classique du parcours du combattant de bien des aspirants romanciers. En quoi cela peut-il être déterminant ? « Le Prix Fintro, c’est une entrée par la grande porte dans le monde littéraire belge, s’enthousiasme Philippe Gustin. Il y a tout un package dont je n’aurais pas forcément disposé autrement : le précieux contrat d’édition chez Ker. La caution qu’apporte un beau jury comportant de grands prescripteurs, dont Michel Dufranne ou Thierry Bellefroid, pour ne citer qu’eux. Les services d’Isabelle Fagot, une attachée de presse très efficace, et le soutien de toute l’équipe de la Foire du Livre. La visibilité est probablement bien supérieure à celle que j’aurais pu avoir par la voie classique. Dans la mesure où j’ai remporté le Prix Fintro assez vite, je n’ai pas eu le temps de galérer bien longtemps à la recherche d’un éditeur. Ce qui ne m’a pas empêché de recevoir quelques refus de vénérables institutions parisiennes. L’une d’elles m’avait quand même lu et envoyé un courrier personnalisé, ce que j’avais trouvé sympa (en pareil cas, on se contente de peu). » Autre particularité, le Prix Fintro est remis à un roman noir, ce qui suppose probablement d’investiguer des collections particulières quand on recherche un éditeur. « Ce que je vais dire est sans doute bizarre, mais je n’avais pas vraiment conscience que Sous la ceinture était un roman noir, avoue Philippe Gustin. Mon franc est tombé quand j’ai reçu un courriel d’un éditeur qui m’annonçait que mon texte serait soumis au comité de lecture de sa collection noire. Je sais d’ailleurs que le roman a suscité une discussion au sein du jury du Prix Fintro car ce n’est ni un thriller, ni un polar, mais le roman noir, c’est bien plus large que cela. Je n’ai donc pas choisi une catégorie : j’avais une histoire à raconter, et elle a pris cette forme. Par ailleurs, je ne lis presque jamais de thrillers : ils sont souvent glauques et je ne lis pas pour me sentir mal. C’est la raison pour laquelle chez moi, les « méchants » sont presque attachants… » Et son deuxième roman, dont on dit bien souvent qu’il est plus compliqué à écrire que le premier roman, sera-t-il aussi dans cette veine ? « Aucune idée, répond-il du tact au tac : je n’ai pas encore commencé de deuxième roman. Mais je pense que les gens se mettent la pression en voulant battre le fer tant qu’il est chaud, coûte que coûte. Moi, si je veux me poser quelques années, je peux le faire puisque j’ai ce luxe : je ne vis pas de ma plume. Par ailleurs, et pour donner du sens à l’expression « entrepreneur littéraire », je me pose quand même la question du style à adopter pour un deuxième bouquin, car Sous la ceinture est un roman déjanté et politiquement incorrect. J’ai eu la chance de bénéficier de très bonnes critiques dans la presse et de retours encourageants de lecteurs. Mais ce traitement du texte reste limité à un marché de niche. Il suffit d’aller en librairie et de rencontrer des clients pour se rendre compte que les amateurs de romans noirs ne cherchent pas prioritairement à rire, même s’il existe de rares auteurs de polars qui en ont fait leur fonds de commerce. Or, je ne serai jamais capable de rester sérieux 300 pages… »

L’ennemi, c’est le poids

Finalement, le roman est publié chez Ker éditions, partenaire éditoriale du Prix Fintro. On peut dès lors se demander si l’éditeur, une fois le manuscrit primé, intervient encore a posteriori sur le texte avant publication. « Oui, bien sûr, insiste Philippe Gustin. Nous avons beaucoup échangé, Xavier Vanvaerenbergh et moi. Je sais que certains auteurs sont frileux quant à une intervention sur leur texte. Moi, j’étais au contraire ravi d’avoir droit à un vrai travail d’édition. C’est vraiment une force de Ker éditions, qui accorde une grande importance à la qualité finale du texte. Pour avoir discuté avec d’autres romanciers, tous les éditeurs ne fournissent pas un tel support. C’est précieux ! En gros, le retravail a surtout été un élagage : une trentaine de pages sont tombées et je comparais Xavier à un préparateur de voiture de course, où l’ennemi, c’est le poids. »

L’objet-livre en mains, l’écrivain frais émoulu peut savourer l’odeur du papier neuf, le toucher particulier du plastifié ou du grain de la couverture, le plaisir d’identifier un graphisme propre à la maison ou la collection, en un mot la fierté de rejoindre un label, tant il est vrai que la plupart des maisons d’édition ont une identité graphique propre, avec des signes distinctifs qui sont autant d’éléments de séduction. Ce livre enfin sorti de presse, il lui reste à vivre sa vie loin (ou pas) de son géniteur. Cette étape peut aussi entraîner son lot de désillusions. Critiques négatives ou, pire ?, silences de la critique, absence du livre sur les tables des librairies ou relégation en bas d’étagère, rencontres parcimonieuses avec le public, manque de suivi de la part de l’éditeur pour diverses raisons, etc. Les chiffres de vente surprennent plus d’un. Selon une enquête du magazine Lire, la plupart des premiers romans se vendent entre trois mille et… trois cents exemplaires. À l’inverse, le succès rapide et foudroyant peut être au rendez-vous et se révéler tout aussi déstabilisant. La vie d’Amélie Nothomb confrontée dès ses débuts à un tourbillon médiatique a dû exiger d’elle une capacité de résistance au stress dont tout le monde ne dispose pas nécessairement. Après avoir connu la solitude, le silence et l’anonymat de l’écriture, celui qui a décroché le nirvana entame un parcours qui révèle aussi son lot de surprises, positives et négatives, ainsi qu’a pu le constater Philippe Gustin : « J’ai été surpris par la bienveillance de nombreuses personnes : que cela soit sur les réseaux sociaux ou dans le monde réel, j’ai reçu du soutien et des encouragements parfois inattendus. Comme toujours, ce sont les réactions spontanées les plus touchantes. Par exemple, une collègue de ma femme est rentrée chez elle avec mon livre à la main : en voyant la couverture, son compagnon a réagi en disant : « Oh, tu as acheté le livre avec les nounours sur la couverture ? J’ai vu une interview du gars à la télé, il a l’air hyper sympa ! ». Ou ce journaliste de la RTBF, qui m’a envoyé un message Facebook pour me dire spontanément qu’il avait lu mon roman sur le conseil de l’une de ses collègues et qu’il avait adoré. Là, on est hors du cadre d’une interview et ça fait plaisir !

Pour le côté négatif je ne vois que deux choses : le processus éditorial et la promo du livre peuvent être très chronophages si on veut s’y impliquer sérieusement. Mais on sait pourquoi on le fait, donc on ne se plaint pas. Et ce qui est étrange, c’est que ma façon de lire a changé : c’est un peu comme si j’allais voir un spectacle de magie en en connaissant les ficelles et astuces. J’avais une grande admiration pour les gens capables d’écrire tout un roman. Maintenant, je sais que ce n’est pas un exploit et je me montre nettement plus critique. »

 

Le conseil de Philippe Gustin à celui, celle qui cherche un éditeur

« Faites flèche de tout bois : sortez de chez vous, rencontrez le plus de monde possible, discutez, posez des questions et laissez trainer vos oreilles partout. Les grandes choses de l’existence n’arrivent pas par hasard, mais rarement de la façon que l’on aurait attendue. »

 

MAXIME BULTOT : UNE ÉQUIPE DERRIÈRE LE ROMAN
 

Maxime Bultot
L’année la plus chaude, premier roman remarqué de Maxime Bultot, raconte de manière vivante et drôle l’été caniculaire d’un jeune adolescent engoncé dans son ennui et qui rêve d’une autre vie. Diplômé de l’INSAS, réalisateur, assistant mise en scène et scénariste, ce qui peut expliquer le ton rythmé et enlevé du roman, l’auteur ne connaissait rien du monde de l’édition avant de le poster et de le publier chez Jean-Claude Lattès. « L’année la plus chaude est mon unique démarche auprès des éditeurs. Le seul manuscrit que j’aie envoyé. » D’emblée, celui-ci est accepté dans une maison d’édition française qui a pignon sur rue. Sans qu’il ait eu pour autant la volonté de privilégier une maison d’édition française plutôt que belge. « C’est un choix qui relève d’une part d’ignorance, explique-t-il. Au moment d’envoyer mon manuscrit, j’ai regardé les éditeurs qui occupaient ma bibliothèque. Force est de constater qu’ils sont très majoritairement français. C’est ceux qui me semblaient avoir la plus grosse influence dans le milieu, ceux qui me semblaient être les plus armés pour défendre mon roman. J’ai découvert par la suite certains éditeurs belges. » Contrairement à la majorité des candidats romanciers, il n’a pas dû patienter longuement. « J’ai eu beaucoup de chance, avoue-t-il. J’ai envoyé mon manuscrit à une dizaine de maisons d’édition françaises. Quinze jours plus tard, Mahir Guven, le directeur littéraire du label « La Grenade » de Jean-Claude Lattès, m’appelait. »

Améliorer ce qui existe

Pour un auteur, il est difficile de se situer par rapport à son travail d’écriture. Est-ce le moment de publier ? Dois-je encore travailler ? L’éditeur a ici une vraie responsabilité. C’est le premier qui adoube un auteur, goûte à son univers, identifie un style, etc. C’est lui qui dit : Tu es prêt, on y va. C’est tout aussi important de refuser un manuscrit que de le sélectionner. Accepter un texte à un stade intermédiaire de maturité n’est pas un bon service à rendre à son auteur. C’est le jeter sur le marché alors qu’il n’a pas encore donné tout son potentiel. C’est ce qu’on pourrait d’ailleurs reprocher à l’autoédition. Il n’y a aucun filtre. Hormis quelques surprises, les auteurs apparaissent sur la toile comme des diamants bruts, un peu à l’abandon. Maxime Bultot a pu bénéficier de tout ce travail intermédiaire, ainsi qu’il s’en explique : « J’avais envoyé le manuscrit comme une étape de travail. Pas comme un texte définitif. On s’est rencontré chez Jean-Claude Lattès pour parler de mon roman, voir comment le faire évoluer. Chacun voulait améliorer ce qui existait, en faire un meilleur roman. Ils m’ont proposé d’écrire un synopsis long d’une version développée (environ cinq pages qui résument le roman à venir). Et sur base de ce synopsis, nous avons signé le contrat. À partir de là, a commencé la réécriture qui a duré six mois environ. Avec des échanges ponctuels avec l’éditeur sur certaines étapes de travail. Ces échanges ont toujours été bienveillants, à l’écoute, sans aucune pression de leur part. Une fois le manuscrit arrivé dans sa phase finale, il y a eu un travail de relecture/ajustement assez important. Toujours en suggestion, et dans le dialogue. Mais j’ai beaucoup discuté avec Jeanne Morosoff, mon éditrice, du texte, des choses à changer, à clarifier, etc. C’est un travail qui se révèle parfois un peu fastidieux, mais qui permet de questionner le texte, de le fluidifier, de le rendre plus fort encore. » Leur collaboration ne s’est par arrêtée au texte, Maxime Bultot a également été consulté pour l’habillage du livre, l’illustration de couverture, la quatrième de couverture… « J’ai pu discuter avec eux de ces choses-là, de questionner certains détails, mais j’étais globalement en accord avec les choix qu’ils ont posés. » Depuis la parution, le primo-romancier est suivi par deux attachées de presse (une en France, une en Belgique), ainsi qu’un responsable des relations libraires et salons littéraires. « J’ai peu de contact avec Mahir Guven et Jeanne Morossoff, qui m’ont accompagné dans l’écriture, mais me soutiennent dans cette aventure depuis la sortie du roman. Ce qui est agréable, c’est de sentir que je suis accompagné. Que des gens continuent de travailler pour défendre ce livre quand mon travail d’écriture est terminé. Je sens l’équipe derrière le roman. Ce qui est plus compliqué, c’est de se faire une place dans le paysage littéraire. Ce n’est pas une révélation en soi, mais une réalité qu’on éprouve rapidement.  Il y a tellement de livres qui sortent chaque semaine, qu’il est parfois compliqué de sortir du lot, surtout quand c’est votre premier roman, et que personne ne vous connaît. »

 

Le conseil de Maxime Bultot à celui, celle qui cherche un éditeur

« Oser envoyer son manuscrit à de grands éditeurs, ce que j’ai fait en y croyant à moitié. Oser envoyer ce manuscrit même s’il n’est pas parfait. Il faut évidemment une histoire complète, avec un début et une fin, que le ton y soit, mais le travail d’un éditeur (comme celui d’un producteur au cinéma), c’est aussi de faire émerger des livres, d’aider les auteurs à révéler leur potentiel. Il ne faut pas chercher la perfection à tout prix. Ce qu’ils recherchent, ce sont des voix, des personnes qui ont des histoires à raconter. Et n’abandonnez pas. Continuez d’écrire. Continuez d’envoyer vos manuscrits. »


© Michel Torrekens, juin 2021

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Policier

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Le Prix Charles Plisnier

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PRIX

PRIX

Doté de 2.500 €, le Prix de littérature Charles Plisnier est décerné chaque année par la province de Hainaut. Il est né en 1963 de la fusion entre le Prix de littérature française, créé en 1952, et le Prix Charles Plisnier, fondé en 1959 en mémoire du romancier montois, premier lauréat belge du prix Goncourt.

Le prix récompense alternativement la poésie, le roman et la nouvelle et, enfin, le théâtre.

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José Parrondo, les évidences minimalistes

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Extrait de Rien © José Parrondo

SES LIVRES, SON UNIVERS ET LUI

Avant de rencontrer l’auteur, j’ai rencontré l’homme. Une rencontre particulière, inattendue lors d’un voyage organisé par Jean-Marie Dersheid à Séoul pour une expo sur la bande dessinée belge. Quand on rencontre José Parrondo, on peut se demander s’il est solitaire ou timide, ou peut-être discret, délicat, minimaliste, humble en tout cas et on le découvre en parfaite osmose avec son trait. José est une énigme, voire ineffable. Il suffit de jeter un œil sur l’une ou l’autre page de ses livres, vous comprendrez tout de suite pourquoi.

Étrangement, José arrive bien tard à sa passion pour le dessin et la bande dessinée. Influencé dans l’adolescence par le photographe Duane Michals, il s’intéresse d’abord à l’étude de la photo, et plus particulièrement à la photographie technique et industrielle  comme il l’a apprise à l’Institut Communal des Arts Décoratifs et Industriels (ICADI) de Liège. Pas très doué en technique, mais un inventeur formidable, José reçoit son diplôme. Cette année-là, c’est le déclic pour border sa voile et changer de cap : créateur multidisciplinaire ! La gravure, la peinture et la bande dessinée, il les apprendra en autodidacte en participant et en créant des fanzines. S’enchaîne logiquement la rencontre à Angoulême avec Joël Bernardis directeur des éditions du Lézard : une rencontre déterminante et motivante. Parrondo publie la même année, dans cette maison, son premier album L’Eau du Duc.

À partir de 1996, une quantité impressionnante d’albums de qualité paraît principalement à l’Association et aux éditions du Rouergue ou aux Requins Marteaux. La lune, la bouche d’égout et la flaque d’eau, Parrondo Poche, La Main à cinq doigts, Ni plus, ni moins, Olibrius, Le petit Parrondo, La Porte, le très remarqué Rien, la série Allez Raconte, et pour finir, son dernier opus I’m the Eggman… Plus d’une quarantaine d’albums parus à ce jour.

Véritable touche à tout, derrière ses fausses simplicités, José Parrondo multiplie les recherches dans toutes les directions : l’illustration jeunesse, la peinture, la presse, l’enseignement la peinture, la musique…

 

VOYAGE EN ABSURDIE : POÉSIE ET MINIMALISME

José Parrondo dessine comme s’il était dans la peau d’un enfant de 8 ou de 9 ans. Un enfant appliqué, qui aime la dérision et qui a le sens du non-sens. Une apparente candeur se dégage de son œuvre, renforcée par une nature généreuse et subtile, un trait simple, délicat et faussement naïf pour représenter un monde décalé ; une approche qui interpelle autant l’enfant que l’adulte. Son dessin est identifiable au premier coup d’œil, on peut le qualifier de minimaliste, mais un minimalisme qui renvoie le lecteur à de multiples questions. Le minimalisme pour José n’est pas un moyen de communication, c’est une profession de foi. Dessinateur jeunesse ? Pas si sûr ; José dit d’ailleurs qu’il ne pense pas à son lecteur. Il veut raconter, d’abord pour lui et puis pour le grand public.  Si on dépasse les premières impressions et  la sensation d’un travail enfantin en apparence, on se rend compte que le propos s’adresse à tous. Aujourd’hui, c’est l’écriture qui domine son travail, le dessin ne représente qu’une petite partie du parcours de l’artiste et en constitue la dernière étape.

Extrait de Parfois les ennuis mettent un chapeau de José Parrondo  | © José Parrondo

Extrait de Parfois les ennuis mettent un chapeau de José Parrondo  | © José Parrondo

Toute l’ingéniosité de Parrondo réside dans ce choix fourchu reliant une certaine abstraction, un récit de l’absurde et une poésie enfantine. C’est cette poésie enfantine qui fait la différence avec des univers aussi absurdes que ceux de Gary Larson, Joan Cornella ou Paul Kirchner. Ne lui parlez pas de surréalisme ou de magie, il raconte des histoires simples dans une approche artistique pointue pour un médium riche et fascinant. Ce choix est lié à son intuition et sa vision particulière d’exprimer les choses et d’exprimer le monde.

Extrait de Rien de José Parrondo  | ©  José Parrondo

Extrait de Rien de José Parrondo  | © José Parrondo

Du bout des doigts, sans y paraître, avec application, il triture un art inédit du récit, un espace-temps totalement original, en nous trompant par un dessin à l’apparence enfantin et en jouant sur les codes de la case, de l’inter-case et de l’espace inter-iconique, le lieu même de « l’art séquentiel » selon l’expression de Will Eisner. Son dessin n’a de cesse de créer une autre temporalité. Chaque trait se dessine, se dévoile plus comme un jeu drôle et malicieux que comme une narration. La mise en abîme, la duplication, la transformation, les trébuchements, les métamorphoses,  l’illusion, les collisions, les accidents graphiques, (on pourrait les appeler dans l’œuvre de José, « les processus catastrophiques »,  des catastrophes créées pour le dessin plutôt que des catastrophes qui arrivent à ses personnages) sont autant de subterfuges qu’il utilise pour nous transporter, nous tromper, nous surprendre. Ses images expriment, symbolisent, représentent, sous-entendent, mais surtout interrogent la logique du monde et son mystère.

 

CONTRAINTES ET DÉTOURS

José Parrondo n’est sûr de rien, mais rusé, il observe le monde qui l’entoure, il s’observe parmi les autres. En se mettant en danger et en poussant les limites du langage spécifique de la bande dessinée, il  tisse un univers singulier qui convoque le bizarre et l’insolite. Il est l’homme des contraintes, grand amateur de l’OUBAPO, comme dans le livre palindrome créée avec Anouk Ricard, Voisin, Voisine  (ou bien dans National Zero où il détourne les panneaux routiers , ou encore dans Histoires à emporter  où il détourne savamment la structure et la forme du conte…). Par la contrainte, José se plait à revisiter et à réinventer tout l’arsenal sémiotique de la BD moderne. Modeste, il vous dira : « C’est juste un jeu, j’ouvre et je ferme des portes toujours dans l’invention, l’imaginaire et l’onirisme. Juste de l’absurde et des contraintes ».

Extrait de « I’m the Eggman » de José Parrondo

Extrait de I’m the Eggman de José Parrondo  | ©  José Parrondo

 

C’est sur cette scène quasi vide, de façon structurée et souvent géométrique, que le « presque rien » de José devient un art de la simplification, du non-dit, du minimalisme pour un maximum d’impertinence théâtrale. Car il s’agit bien dans chacun de ses récits de petites scènes de théâtre. Ses nombreux protagonistes, l’homme-œuf en tête, errent dans un espace défini et limité par la case : à chaque page le rideau s’ouvre sur un décor fait d’un minimum de trait.

Extrait de I’m the Eggman de José Parrondo

Extrait de I’m the Eggman de José Parrondo  | ©  José Parrondo

Parrondo a bien compris que notre capacité d’identification ainsi que notre aptitude à nous attacher profondément et à suivre  un personnage sont directement liées à notre capacité d’abstraire, à l’instar des personnages à têtes rondes, schématiques, sorte d’image-épure, un dessin certes froid par l’absence de fioritures, mais lisible et dynamique, tels les Tintin, Mickey, Bécassine, Schtroumpfs…,  mais aussi les personnages de Keith Harring ou de Chris Ware. Ils ont tous une tête ronde avec quelques points en guise de physionomie expressive. Ils dégagent quelque chose qui nous pousse à ressentir une forme de sympathie immédiate, proche de celle que nous ressentons à l’égard des nourrissons. Cette recherche vers le minimum permet aux lecteurs, petits et grands, de s’identifier facilement et de s’immerger avec émotion dans ces histoires extraordinaires. Pierre Sterckx disait de Tintin que « son visage minimaliste permettait à tout un chacun d’y accueillir toutes les subjectivités »1.  Les simplifications d’un personnage, d’un visage vont de pair avec une ouverture pour le développement sémantique. Bien plus que des petites histoires d’œufs divertissantes, la BD de José fait de la sémiologie tout comme Mr Jourdain fait de la prose. Selon Scott Mc Cloud, « plus un visage est simplifié, plus il est sémiotiquement riche. Il instaure une lisibilité active incitant notre cerveau à fabriquer du visible ». Pour « Eggman », la tête et le corps ne font qu’un. Et son œuf est le bon prétexte pour que le personnage ne soit qu’une tête, qu’un visage, une entité créée dans sa plus pure simplicité. Le travail de José évolue dans cette direction, de récits décalés, pleins de péripéties farfelues, il nous entraîne vers des non-récits toujours absurdes, mais où les événements sont davantage de l’ordre de l’interrogation que du rebondissement. Plus tôt dans son œuvre, son personnage, l’œuf Bolas Bug (éditions du Rouergue) avait un nez, une bouche et une cravate. Cette fois, « Eggman » n’est habillé que de sa coquille et n’a pas de bouche.  « Il n’en a pas besoin, un œuf ne parle pas », nous dit José Parrondo. LA contrainte par excellence.

 

LA BELLE PRÉSENCE DU VIDE ET DU RIEN

Avec Rien, José annonce la couleur. Ce petit livre fascinant est le contrepied parfait de l’intention de l’auteur. Ce « rien » est un petit bijou lové dans son écrin bleu bien rempli de questions (« Peut-on écrire un livre passionnant sur l’ennui ? »), d’interrogations (« Est-ce moi qui suis à l’endroit où je suis, ou est-ce l’endroit qui est autour de moi ? »), d’humour absurde (« Je suis parti voir là-bas si j’y étais, et j’y étais. »), de recherches, de combinaisons, de travail, d’angoisses existentielles. Rien contient des récits courts, des illustrations, des gravures, des photographies et il est parsemé de ces dessins de petits bonshommes enfantins facilement identifiables.

Extrait de I’m the Eggman de José Parrondo  | ©  José Parrondo

Extrait de Rien de José Parrondo  | ©  José Parrondo

Avec Rien, récit d’un voyage les yeux fermés, il pose sa réflexion sur l’absence et la présence des choses en connexions contradictoires. Question du vide et du trou, un trou ce n’est pas rien. Et par l’absence il donne à évaluer la présence. Ne rien dire ou ne rien montrer pour dire plus et montrer plus. La logique mathématique de la démonstration par l’absurde. Univers poétique, toujours absurde, voire surréaliste, mais d’une incroyable richesse.  José nous dit : « Le rien contient du rien et rien d’autre » à la manière d’un Magritte qui dit : « Je montre de la poésie mais je n’exprime pas la poésie. Il faut être sensible à la poésie pour  y chercher un symbole, le symbole étant toujours la négation de la poésie».  Il existe deux usages des images et des mots, deux modes de la signification à travers les mots et les images : un univers poétique, plébiscité par l’auteur et un usage non poétique, indifféremment appliqué au langage ordinaire.  Ceci dit Magritte ajoute : « Les symboles sont supposés représenter la réalité, mais ne représentent rien… mes images montrent des choses et ne représentent rien à penser ».  Comme Magritte, Parrondo nous parle de perception ; par contre, il nous entraîne dans un processus bien différent de la pensée par des questionnements formels, philosophiques et existentialistes déguisés en interrogations  candides. il interpelle directement l’enfant qui sommeille en nous. Son Rien nous touche, nous emporte tout en douceur et nous plonge dans son univers et son errance.

 

L’HOMME-OEUF  

C’est sans doute en partant de rien que José a créé son personnage. Un œuf, juste des yeux et des jambes. Dans I’m the Eggman, la contrainte fut de créer chaque jour un récit en un gaufrier récurent de quatre cases muettes, posté sur FB pendant 333 jours. Une nouvelle occasion d’interroger le vocabulaire propre, spécifique de l’agencement d’images cadrées qui se répondent, s’enchaînent, se confrontent ou simplement se juxtaposent. C’est une mécanique. La mécanique des signes, de l’espace, des proportions, des perspectives tronquées, des accidents, mais surtout du mouvement, toujours dans l’absurdité et dans une fausse naïveté. Derrière ce dessin aux allures enfantines, il multiplie les recherches, il expérimente à chaque page le déplacement impossible d’un espace dans un autre. Il use du vocabulaire de la bande dessinée pour explorer les questions du rapport texte/image : comment leur donner sens ?  Il interroge l’humour où toute issue est vaine, il questionne avec pertinence et fantaisie l’endroit, l’envers, le dedans, le dehors et plus largement le monde des apparences. Tout simplement, il remet en question les codes en jouant sur la ligne, les signes, les onomatopées avec des petits riens, juste un bonhomme qui ressemble comme deux gouttes d’eau à un œuf. Il nous mène en bateau, à la dérive parfois, mais comme un capitaine, il sait où il nous entraine.

Extrait de I’m the Eggman de José Parrondo  | ©  José Parrondo

Extrait de I’m the Eggman de José Parrondo  | ©  José Parrondo

Planche après planche, l’humour se renforce. Sorte de running gag tendre et naïf, l’humour édifie un véritable univers, source d’étonnement, d’accidents graphiques et d’énigmes visuelles.

 

LE RÉCIT EN CASES, C’EST UNE HISTOIRE DE MUSIQUE ET DE COLLABORATIONS

Parrondo combine, collabore, élargit son champ de recherche, ou tout simplement, comme un adulte qui ne cesse de s’émerveiller, il s’amuse de ses passions. Bien avant de feuilleter  les fanzines, c’est la musique qui l’anime. Bassiste au départ, il commence par côtoyer les scènes alternatives liégeoises, il participe à différents groupes et mixe des cassettes pirates. Plus tard, en collaboration avec Nicolas Mahler pour plusieurs dessins animés et en collaboration avec Sacha Toorop, Françoise Breut et Delphine Bouhy sur le label Soundstation, il concrétise ses compositions. Dans Allez Raconte, une série publiée aux éditions Delcourt en collaboration avec Lewis Trondheim, il nous entraîne  dans un dessin proche de la silhouette, de l’épure : pas une seule expression sur les visages, pas une seule caractéristique, le strict minimum pour une lecture limpide, éliminant tout artifice. Comme un véritable horloger ou un chirurgien de la ligne, il dissèque et élimine pour ne garder que l’essentiel. En 2006, sa série Allez Raconte a été adaptée en dessin animé pour la chaîne M6. Un long métrage de Jean-Christophe Roger est sorti en salles en 2010. Un fameux contre-pied pour un dessinateur qui aime travailler seul sur des projets à plus petite échelle.

Sa délicatesse, sa timidité apparente sont la manifestation de cette innocence typique de l’enfance, qu’il garde précieusement, comme un secret de fabrication. Une qualité spontanée, maîtrisée, un état d’esprit, une attitude singulière indispensable pour être un grand artiste.

Extrait de Parfois les ennuis mettent un chapeau de José Parrondo  | © José Parrondo

Extrait de Parfois les ennuis mettent un chapeau de José Parrondo  | © José Parrondo

L’attitude « Parrondo » est cependant étrange et magnifique, tout en résonance avec sa ligne et son trait. Il convoque le « bizarre » et nous entraîne dans un tourbillon de lecture, de questions et de surprises. Il aime nous déstabiliser en distillant De-ci de-là, quelques clés graphiques… À nous d’ouvrir les portes et d’y entrer. « LA porte… pas une porte. Celle qu’il faut prendre, tout comme son personnage au début du récit intitulé tout simplement La porte, qui porte la porte et l’apporte là où l’esprit les transporte, où le récit nous emporte, peu importe où… »2.

© Olivier Grenson, mai 2021


Notes :
1. Pierre Sterck, Tintin schizo, Les impressions nouvelles, 2007.
2. Cf. José Parrondo, La porte, L’association, 2010

Crédits : Les images ont été reproduites ici avec l’aimable autorisation de l’auteur.  

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Des romans publiés en 2021 à emprunter en numérique

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En collaboration avec Lirtuel,  nous vous proposons une liste de romans d’auteurs belges disponibles en prêt numérique. Tous les romans présentés ci-dessous ont été publiés lors de la première moitié de l’année 2021.

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