En novembre 1792, à 25 ans, Saint-Just, le plus jeune député de la Convention, à peine élu, se fait connaître par son discours lors du procès du roi, affirmant : « On ne peut point régner innocemment ». À partir de là, sa vie se confond avec les aléas de la Révolution. Moins de deux ans plus tard, le 9 thermidor, il est condamné par cette même Convention, qu’il affronte, des heures durant, silencieux et les bras croisés. Le lendemain, il est guillotiné.
Rimbaud a écrit ses poèmes en l’espace de quelques années, de 16 à 21 ans, dans les éclats de la fin de l’empire, de la guerre franco-prussienne, du soulèvement de la Commune de Paris puis de son écrasement, et du retour à l’ordre. Après, il tourne le dos à la littérature, voyage et disparaît aux confins de la corne d’Afrique, avant de revenir, malade, se faire amputer et mourir à Marseille.
Parcours fulgurants, destins exceptionnels. Par-delà leur jeunesse, le silence dédaigneux de la fin, ils se rejoignent dans le projet, au croisement de la politique et de la poésie, de régénérer les êtres et le monde. Ce livre voudrait proposer une lecture croisée de l’œuvre et de la vie de Rimbaud et de Saint-Just, autour de quelques moments charnières et de thèmes communs (la fraternité, l’harmonie, le bouleversement de la société) en les réinterrogeant à partir du silence final.
L’ambition est de mettre à jour les correspondances entre les deux hommes et de donner envie de les lire et de les relire, en montrant la radicalité et la force de leur action à la lumière d’aujourd’hui.
Le Voyage au bout de la nuit de Céline : roman de la subversion et subversion du roman
À propos du livre À travers les différents niveaux de sens que le texte romanesque du Voyage au bout de la nuit superpose, cet ouvrage serre de près le processus d'instauration du langage célinien, de la surface des mots à la totalité de la création. Transposant la rhétorique de l'argot en un formidable discours subversif, ce langage fonde l'identité symbolique de Bardamu, le héros-narrateur, mais aussi celle de Céline dans cette Nuit de l'écriture où, entre vécu et imaginaire, durée et Histoire, désir et néant, l'écrivain triomphe des discours sociaux de son temps par l'affirmation souveraine d'un style. Mythe romanesque du voyageur de la Nuit, hallucinant de vérité désespérée et de révolte ; mythe littéraire de l'écrivainargotier dont le propos embrasse dans sa revanche verbale toute la honte, toute la souffrance du Mal contemporain : deux niveaux de cette «écriture de la parole» qui entretiennent un subtil trompe-l'oeil entre le sens et la représentation. C'est dans ce travail que résident la modernité de Céline, son art réel d'écrivain comme sa compromission authentique de sujet face à la société et à l'Histoire. Cette étude est le fruit d'une technique magistrale et…