Les éditons L’herbe qui tremble à Paris ont à coup sûr eu le nez fin en choisissant Thierry Horguelin pour diriger leur nouvelle collection baptisée « D’autre part ». Passionné de cinéma et de jazz, ancien libraire, chroniqueur, on le connaît avant tout pour le travail de fond qu’il effectue, avec rigueur, dans le monde de l’édition. Chineur invétéré, grappilleur de pépites littéraires oubliées dans les cales des notes de bas de pages, cet arpenteur livresque qui partage son temps entre Montréal, sa ville natale, Bruxelles et Paris est aussi et surtout auteur. On citera au passage son dernier ouvrage, Alphabétiques, objet littéraire et ludique qui témoigne de son attachement à la contrainte oulipienne et qu’ont publié, il y a deux…
La liberté du lecteur a quelque chose de désarmant, justement parce qu’elle est illimitée, inconditionnelle. Partant de deux tableaux d’Henri Fantin-Latour ayant pour titres La Lecture et réalisés respectivement en 1870 et 1877, Jan Baetens poursuit, dans ce nouveau recueil, son questionnement sur les liens qui unissent, de manière parfois souterraine, le texte et l’image. On pourrait dire d’ailleurs que ces correspondances sont envisagées ici selon un triple dialogue puisqu’aux textes inspirés par les tableaux du peintre grenoblois né en 1836 viennent se greffer les photographies de Milan Chlumsky qui ouvrent et ferment le volume. Une construction tridimensionnelle cohérente et exigeante, comme toujours chez Baetens, et qui permet cet échange décuplé entre…
ublié dans la dynamique collection « La petite bédéthèque des savoirs » créée par David Vandermeulen, Le roman-photo de Jan Baetens (textes) et Caroline Mélois (dessins et couleurs) explore ce genre hybride, longtemps décrié, auquel Jan Baetens, poète, professeur en sémiotique et en études culturelles à l’Université catholique de Louvain, a donné ses lettres de noblesse. Pionnier des études sur ce genre narratif longtemps méprisé, assimilé à la presse de cœur bas de gamme, Jan Baetens nous fait voyager dans la genèse, les origines du genre. Faisant ainsi un sort aux idées reçues, aux a priori négatifs (proche de la bande dessinée, le roman-photo agencerait des photos stéréotypées à des textes basiques placés sous le signe d’une histoire à l’eau de rose),…
Une des fonctions de la poésie est de trouver le point d’intensité des choses.
La force minérale du monde, et la vivacité fragile des images et des mots, constituent un seul et complexe champ d’investigation.
Le métier unique de Jan Baetens, sa passion et son originalité foncière, consistent à capter et à refléter la diversité irrésistible du monde dans de petits miroirs solaires, des post-it magnétiques, qu’il dispose un par un autour de lui, avec une science d’abeille fouisseuse.
L’attente soudain se prolonge
Partout on met à sec des silos de patience Victoire de la porte fermée
L’espoir et l’espérance fondent
Comme trois billes
Revenues des bandes de l’univers.
Pour comprendre un peu mieux, de l’intérieur,…
« Plus nous avançons dans une langue et plus son mystère s’épaissit. » Voici l’un des aphorismes que l’on peut glaner au fil de la déambulation à laquelle nous convie Jan Baetens, chasseur subtil de raretés – mais, une fois atteint un certain seuil de littérarité, quel livre ne devient pas un hapax ? La phrase énonce une vérité, pourtant sa limpidité formelle suffirait à en contredire le sens. Et voilà justement où se situe le charme irréductible de l’écriture de Jan Baetens : elle ose dire en toute clarté l’opacité la plus profonde des mots et des textes. Elle se fait passeuse d’énigmes en traversant d’un pas primesautier des labyrinthes qui feraient suinter d’angoisse d’autres plumes, prétendument plus sérieuses, plus…
On connaît l’amour que Jan Baetens porte aux arts du texte et de l’image et en particulier au neuvième art, auquel il a consacré de nombreux textes, depuis Formes et politique de la bande dessinée (Vrin, 1998) ou Hergé écrivain (Flammarion, 2006) jusqu’à la toute première monographie consacrée aux Cités obscures (Rebuilding Story Worlds. The Obscure Cities by Schuiten and Peeters, Rutgers University Press, 2020). Adaptation et bande dessinée vient se saisir d’un sujet qui, pour explicite que le titre puisse paraître, ouvre une véritable boîte de Pandore théorique dont Baetens ordonne le contenu avec sagacité, habileté et simplicité.On se rappelle d’Andrzej Żuławski…
Riche rentrée pour Jan Baetens dont deux ouvrages viennent de paraître. Et s’ils traitent tout deux de poésie, c’est de manière bien différente. Retour sur le travail du plus francophone des poètes flamands.