Légendes en attente


RÉSUMÉ

À l’aéroport, attendre. De l’éditeur, attendre le verdict à propos du manuscrit qu’on lui a soumis. Dans le cabinet du médecin, attendre le diagnostic, puis rentrer chez soi en sachant qu’on n’a plus que la mort à attendre. Par Orphée et Eurydice, le Messie, la patience d’une civilisation ancienne, la quête des origines, le passage quotidien du facteur, l’écrivain nous plonge dans un monde, légendaire ou impitoyable de réalité, où il convient de ne pas trop vite tout dévoiler.




À PROPOS DE L'AUTEUR
Vincent Engel
Auteur de Légendes en attente
Né en 1963 à Uccle, Vincent Engel grandit à Ohain. Après un parcours scolaire chahuté et le jury central, il entre en 1982 à l'Université. Dans la foulée du colloque organisé à Louvain-la-Neuve, Vincent Engel crée en 1995 le Centre d'études de la nouvelle, qu'il dirige. Il devient également professeur à l'Université catholique de Louvain, aboutissement à ce jour d'un parcours académique entamé en 1986. Au fil du temps il se spécialise dans la littérature belge de langue française qu'il enseigne notamment à l'université de Metz, qu'il analyse dans des publications et qu'il présente lors d'interventions diverses aux quatre coins du monde (Québec, Chili, Liban, etc.). Peu auparavant, il s'était déjà fait connaître par la réflexion qu'il mène sur les implications de la deuxième guerre mondiale, et plus particulièrement des camps d'extermination. On oublie bien souvent que sa première publication, en 1989, s'intitule Fou de Dieu ou Dieu des fous : l'oeuvre tragique d'Elie Wiesel, suivie peu après d'un essai : Pourquoi parler d'Auschwitz? Elie Wiesel : un des auteurs, sinon l'auteur, qui influence à la fois la réflexion et la création de Vincent Engel. Son mémoire, son doctorat lui sont consacrés. Par la suite, il accordera une attention constante à la littérature des camps, avec notamment la direction en 1995 d'un numéro spécial de la revue Lettres romanes consacré à ce thème. Pourquoi cette attention à une question qui taraude autant la conscience universelle que l'Histoire du vingtième siècle? Peut-être trouve-t-elle en partie son origine dans l'histoire personnelle de l'auteur : son père était un Juif ashkénaze qui, après avoir perdu toute sa famille dans les camps, sauf un frère, a interdit à sa femme de se convertir au judaïsme et a tenu à ce que ses enfants soient baptisés. Weinberger, le nom du personnage central de son quatrième roman, est aussi celui de sa lignée maternelle. Par ailleurs, ses recherches scientifiques se concentrent sur la littérature française du XXe siècle et les rapports entre idéologies et littérature. A ses yeux, le principe essentiel est de revaloriser la place de l'être humain dans la recherche en sciences humaines et de remettre à l'honneur les questions de sens. On ne s'étonne pas dès lors de le voir s'intéresser à des questions éthiques liées à la médecine par exemple, en les éclairant des lumières de la littérature. Mais Vincent Engel est avant toute chose écrivain. Il se rêvait déjà tel à 9 ans, quand il écrivait de petits romans d'aventures. Vers 15-16 ans, il commençait d'envoyer des textes à des éditeurs. Dans une rencontre avec Francine Ghysen (Mensuel littéraire et poétique, avril 1995), il confesse ses premières influences littéraires : Ce sont les Allemands du début du siècle qui m'ont fait pénétrer dans la littérature, dans l'écriture : Hermann Hesse, Kafka, Rilke, Thomas Mann (par ordre chronologique). A eux se sont ajoutés André Baillon, dont je suis l'arrière-petit-neveu, et qui est pour moi non seulement un des plus grands écrivains belges mais un formidable précurseur de l'existentialisme et de toute la modernité. Salprem, un écrivain breton qui a connu une initiation de Sannyassin et qui dirige maintenant un ashram en Inde. Et, un peu plus tard, Elie Wiesel, à qui j'ai consacré dix ans d'études. C'est lui qui m'a ramené au judaïsme. Terminons en disant que Vincent Engel est avant tout un homme animé par la passion et ses convictions. Aussi n'hésite-t-il pas à susciter le débat sur les thèmes qui le passionnent, comme la place des lettres belges de langue française et la Francophonie (place qu'il défend en tant que président de l'Association des Gens de lettres). Les essais publiés en témoignent, mais aussi les articles parus dans la presse et dans des revues. Alliances par exemple, où il a eu l'occasion de dénoncer la mainmise du politique sur le culturel, la nécessité d'un exil éditorial pour exister. Gageons que notre auteur nous réserve encore bien des surprises, comme ce roman de 770 pages, Retour à Montechiarro (Fayard) dont nous avons appris la sortie au moment de boucler ce dossier. Eh oui, il est des auteurs qui écrivent plus vite qu'on ne les lit !

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«  Il a réglé la course, est sorti en sifflotant et, sans se retourner, il a soulevé son chapeau en guise d’adieu  », telle est la dernière image qu’a laissée Soren. Nous sommes à Bordeaux, en novembre 2017, et ce musicien et producteur âgé de cinquante-huit ans a demandé au chauffeur de taxi de le déposer à l’entrée du Pont de pierre. Après, plus rien… plus de Soren. Qu’est-il advenu ? Le roman de Francis Dannemark et Véronique Biefnot s’ouvre sur cette disparition et met en récit plusieurs voix. Elles ont toutes connu Soren, de près ou de loin. Chacune d’elles plonge dans ses souvenirs, exhume des moments passés en sa compagnie, des instants de sa vie et, dans une polyphonie où les sonorités tantôt se répondent tantôt dissonent, elles livrent au lecteur une reconfiguration de ce mystérieux Soren, tentant de lui éclairer le mobile de son départ. Chacune y va de sa modulation. «  On dira Soren ceci, Soren cela.. on dit tant de choses, mais au fond, qu’est-ce qu’on sait ?  » Lire aussi : un extrait de  Soren disparu  La construction du roman joue sur un décalage entre temps de narration et temps de récit. Tandis que cette volatilisation du personnage principal orchestre les interventions des différents narrateurs – celui-là l’a appris par téléphone, l’autre en écoutant la radio, celui-ci l’annonce à son père, un autre encore y songe à partir d’une photo de chanteuse dans un magazine etc. –, les récits font appel à une mémoire narrative qui reconstruit, rend présente une antériorité qui parcourt la vie du disparu, de son enfance à cette nuit sur le pont. «  Un souvenir entraîne l’autre. Quand on commence, on n’en finirait plus…  »Cette temporalité se déploie dans une spatialité qui accroît le côté mémoriel des interventions. Le lecteur arpente un Bruxelles d’autrefois ; de l’auditoires de l’ULB au Monty, le piano-bar-cinéma d’Ixelles, près de Fernand Cocq, de la chaussée de Ninove au Mirano Continental, la capitale se fait le lieu de ce festival narratif. [L]es soirs où je glandais, on traînait ici ou là, au Styx, on attendait une heure du mat’, avant ça, rien de bien ne se passait nulle part. À pied la plupart du temps, on allait jusqu’à la Bourse, au Falstaff, à l’Archiduc…, on se faisait parfois refouler à l’entrée quand on était trop murgés ou trop nombreux, ou qu’un truc nous avait énervés, un film ou un bouquin, et que la discussion déraillait. On buvait du maitrank ou des half en half, ou rien, ça dépendait de qui payait la tournée, ensuite, on montait le nord, sous le viaduc, vers l’Ex, ou alors à la rue du Sel parfois.  Cent-douze récits rythment ce roman choral où la musique est omniprésente . Fitzgerald, Les Stranglers, Wire, Chet Baker, Branduardi, Kevin Ayers, Neil Young, … La compilation forme une constellation où luisent les traits saillants qui permettent d’appréhender, par fragments, le disparu, de retracer son parcours, avec, en fond, ces musiques qui résonnent et accompagnent la lecture.Le duo Biefnot-Dannemark, déjà connu pour La route des coquelicots (2015), Au tour de l’amour (2015), Kyrielle Blues (2016) et Place des ombres, après la brume (2017), offre un nouveau quatre mains avec Soren disparu . Un roman kaléidoscope où se font échos les témoins de la vie de Soren ; lesquels, dans l’exploration du pourquoi et du comment d’une perte, mettent en lumière le temps qui passe, la complexité de l’existence et sa fugacité.Une nuit, traversant un pont, Soren disparaît. Tour à tour producteur, musicien, organisateur de festivals, cet homme multiple n'a eu de cesse d'arpenter le monde de la musique. Pour percer le mystère de sa disparition, une centaine de témoins…

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