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Le parti de l’étranger. L’Image du «réfugié» dans la littérature néerlandophone d’aujourd’hui

[Traduit du néerlandais par Christian Marcipont.] Le sort du réfugié est devenu un thème de la littérature contemporaine, y compris des lettres de langue néerlandaise. quels sont les auteurs qui, dans les plats pays, ont eu le courage d’aborder le thème du réfugié, montrant chacun à leur manière que la littérature peut apporter une plus-value parce qu’elle sait observer ce sujet sensible sous une multitude d’angles différents? * De nos jours , il est un thème – avec le climat et le terrorisme – qui domine et détermine l’actualité: celui de la migration. C’est surtout depuis les années 1990, qui voient le déclenchement de la guerre civile en ex-Yougoslavie, que la question des « réfugiés » en Europe est devenue un sujet aux nombreuses implications éthiques, politiques et sociales, et que les brasiers en Syrie et au Moyen-Orient ont rendu plus prégnant encore. Il est devenu l’enjeu de campagnes électorales virulentes et est aujourd’hui instrumentalisé comme jamais auparavant par les politiques, et cela sur le dos de groupes de population qui ne se doutent pourtant de rien. C’est aussi une question qui attise la rhétorique belliqueuse des populistes européens. Que cette problématique ne soit pas sans influencer la culture et la littérature contemporaines, c’est là une quasi-évidence. La question s’est toutefois déjà posée à maintes reprises: le réfugié est-il devenu le cache-misère idéal pour l’artiste qui cherche à s’avancer armé de son engagement? Et, mutatis mutandis, cela vaut-il également pour le monde des lettres? S’agit-il d’un passage obligé, d’une thématique « prémâchée »? Toujours est-il qu’à l’heure actuelle les romans et récits dont les protagonistes sont des réfugiés s’accumulent. Nombre d’écrivains traitent dans leurs livres des motivations des migrants et plus particulièrement des réfugiés, des demandeurs d’asile et des sans-papiers. Ils racontent les obstacles à surmonter dans la quête d’une vie meilleure. Chose on ne peut plus logique si l’on considère que ce n’est pas d’hier que les écrivains observent les soubresauts du monde. Le sujet est au cœur de l’actualité et, de surcroît, ces dernières années les catastrophes se sont succédé sans relâche. Cependant, les écrivains ont parfaitement compris qu’il ne leur était pas permis de se jeter tête baissée dans la littérature pamphlétaire. Mieux vaut se tenir à quelque distance des versatilités de l’opinion. On ne peut sortir de son chapeau un « récit de réfugiés », sauf à espérer marquer un point par le biais du journalisme ou de l’essai. Il y a peu, par exemple, Valeria Luiselli a braqué les projecteurs sur les enfants mexicains qui traversent la frontière entre le Mexique et les États-Unis dans son livre de non-fiction Raconte-moi la fin, récit des expériences qu’elle a vécues comme interprète. Mais, récemment aussi, la même Valeria Luiselli leur a consacré un roman, Archives des enfants perdus, où elle raconte les vicissitudes d’une famille à la dérive, dans le contexte de la crise des réfugiés à la frontière du Mexique et des États-Unis. Or, les choses se présentent différemment dans un roman, qui est régi par d’autres règles: « Les récits qui trouvent leur origine dans la réalité nécessitent une plus longue période d’incubation s’ils veulent se transformer en fiction, beaucoup d’eau doit couler sous le pont avant que l’on atteigne la juste mesure », déclarait à ce propos l’auteur néerlandais Tommy Wieringa dans une interview accordée au quotidien flamand De Standaard. Si l’on considère la situation d’un point de vue international, on constate que les ouvrages dont les réfugiés occupent la première place suffiraient à remplir une bibliothèque entière. Dans le genre, Le Grand Quoi de Dave Eggers représente incontestablement un jalon: l’auteur, à travers un roman, raconte l’histoire de Valentino Achak Deng, un enfant réfugié soudanais qui émigre aux États-Unis sous les auspices du Lost Boys of Sudan Program. Citons ensuite le très populaire Khaled Hosseini. Ce dernier a acquis une réputation planétaire grâce à son livre consacré aux atrocités vécues en Afghanistan sous le régime des talibans. En définitive, le protagoniste des Cerfs-volants de Kaboul, après un passage par le Pakistan, finira par débarquer aux États-Unis. Dans le roman qui lui fait suite, Mille soleils splendides, Hosseini évoque également les camps de réfugiés en Afghanistan. « Voilà plusieurs siècles que la littérature prend fait et cause pour l’étranger, l’« autre », le réfugié », observait Margot Dijkgraaf dans le quotidien néerlandais NRC, renvoyant explicitement à l’œuvre du Français Philippe Claudel, qui n’a jamais fait mystère de son indignation quant au sort réservé aux réfugiés. Amer, humain, allégorique, factuel, pamphlétaire ou moralisateur: les angles d’attaque ne manquent pas dès lors que des auteurs se penchent sur le sujet. À quoi il faut ajouter que la question ne divise pas seulement la société, mais les écrivains eux-mêmes. Tommy Wieringa, par exemple, s’est depuis peu rangé à l’idée qu’« une frontière extérieure européenne sûre est nécessaire », ce qui est un point de vue d’adoption récente. Pour ne rien dire ici de Thierry Baudet, chef de file du parti de droite populiste Forum voor Democratie, qui ne répugne pas à se présenter comme écrivain. Parmi les représentants de la littérature d’expression néerlandaise, Kader Abdolah, originaire d’Iran, fut l’un des premiers à coucher par écrit son vécu de réfugié, entre autres dans De adelaars (Les Aigles) et Le Voyage des bouteilles vides XX . Depuis lors, les textes en prose consacrés à l’immigration sont quasiment devenus un genre en soi. Pourtant, des années-lumière séparent Hôtel Problemski XX, Dimitri Verhulst s’immerge dans un centre pour demandeurs d’asile, et l’effrayant L’oiseau est malade XX d’Arnon Grunberg. Souvent, le réfugié offre matière à opter pour des thèmes plus vastes. C’est ce qu’a réussi à faire, par exemple, Joke van Leeuwen avec Hier (Ici), une parabole sur les frontières et sur les contours de la liberté. « Les frontières maintiennent une pensée de type nous / eux, ce qui ne ressortit pas exclusivement au passé. Au contraire, j’ai l’impression que ce type de pensée binaire s’est renforcé ces dernières années », déclare-t-elle à ce sujet. Jeroen Theunissen, de son côté, a introduit subrepticement le thème des réfugiés dans son roman Onschuld (Innoncence) XX , où l’on voit le photographe de guerre Manuel Horst se faire enlever et torturer par des djihadistes dans le guêpier syrien avant, la chance aidant, de parvenir à s’échapper. Il est très peu disert à propos de sa nouvelle liberté, assure qu’il n’a nul besoin d’un soutien posttraumatique et tombe amoureux de Nada, une réfugiée syrienne. Il rentre avec elle en Belgique, où il leur faut batailler pour se construire une nouvelle existence avec le jeune fils de Nada, Basil. Mentionnons également Rosita Steenbeek, auteure de Wie is mijn naaste? (Qui est mon prochain?), un ouvrage engagé non fictionnel s’apparentant au reportage et consacré à l’accueil des réfugiés à Lampedusa, en Sicile et au Liban. Présenter un miroir au lecteur Venons-en à trois œuvres néerlandaises en prose qui traitent du thème des réfugiés d’une manière beaucoup plus directe et qui, pour se baser sur un récit nettement personnel, n’en parviennent pas moins à donner à cette problématique une portée universelle. Elvis Peeters (° 1957) – qui écrit ses romans en collaboration avec son épouse Nicole Van Bael – est un de ces auteurs flamands qui abordent régulièrement ce thème avec maestria, quoique sans menacer quiconque d’un doigt moralisateur. Plus d’une fois on trouve chez lui un penchant pour l’allégorie et un ton pessimiste. Son roman De ontelbaren (Les Innombrables,…

Introduction. De l’âme des objets à la phalloplastie

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Liliane Wouters, la voix la plus vraie

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Ârtûr a Châlèrwè [Arthur Rimbaud à Charleroi] èl bourdon N° 600

Pierre Arcq Illustré par

( walon d’ Djumèt.) Tous les personnages et tous les faits…

Enseigner une littérature «invisible» à l’Université. Le cas de la littérature en langue picarde

En avril 2023, la Société organisait une journée de mise à l’honneur de nos membres correspondants. À cette occasion, quatre d’entre eux ont eu l’occasion de prendre la parole sur des sujets de leur choix, soit en lien avec les langues régionales de Belgique romane, soit à propos de sujets d’études proches de nos considérations. Les intervenants ont accepté de faire part de leurs présentations par écrit et nous nous proposons de les publier dans Wallonnes, au fil des numéros. Voici la deuxième contribution: celle d’Olivier Engelaere, introduite par Baptiste Frankinet. * Présentation Il est presqu’impossible, à l’heure actuelle, d’évoquer la langue et la littérature picardes, sans arriver rapidement à mentionner le nom d’Olivier Engelaere . Historien et documentaliste de formation, Olivier a été chargé dès 1999 de développer des projets de défense, de soutien, d’illustration de la langue picarde au sein de l’Office Culturel Régional de Picardie. Et, dès cette première mission, force est de constater qu’il s’est pris d’une passion incommensurable pour le picard, sous tous ses aspects. Sa passion n’a d’égal que l’investissement et l’énergie immenses qu’il a pu déployer au cours des vingt-cinq dernières années pour mener à bien les missions qui lui ont été confiées à la fin du 20e siècle. En 2009, le département Langue et Culture de Picardie qu’il avait savamment organisé au sein de l’office culturel régional de Picardie, se concrétise en une Agence régionale de la langue picarde. Cette agence, directement missionnée par la Région Hauts-de-France, est placée sous sa responsabilité et développe des opérations de promotion qui prennent les formes les plus diverses: organisation de prix, animations scolaires, développement d’ateliers d’écriture en bibliothèque ou en milieu carcéral, défense militante de la langue, soutien dans l’apprentissage, organisation d’une commission de terminologie picarde, aide à la publication, et j’en passe. Parallèlement, il fonde la maison d’édition Engelaere, une maison d’édition associative spécialisée dans les questions culturelles régionales et notamment dans l’édition en langue régionale. Cet outil vient, incontestablement, en aide aux auteurs et aux écrivains picards, et cherche à leur assurer une diffusion et une promotion convenables face au marché concurrentiel du livre en français ou en langue étrangère. Depuis 2015, Olivier Engelaere assure un cours de langue et culture picardes à l’Université de Picardie-Jules Verne à Amiens. Depuis 2020, il organise également un cours similaire à l’Université Polytechnique des Hauts-de-France à Valenciennes. En 2021, il accepte de devenir membre correspondant de notre SLLW, a fortiori parce que le picard est un de nos objets d’études. La langue picarde, qu’il défend et qu’il promeut depuis des années, déborde sur une grande partie du Hainaut. Depuis 2022, il a entrepris une thèse qui étudie la littérature de langue picarde au 19e siècle, sous la direction de Marie-Françoise Melmoux-Montaubin. C’est donc avec grand plaisir que nous accueillons Olivier Engelaere au sein de notre Société, en qualité de membre correspondant, en espérant qu’il pourra s’appuyer sur les études faites par cette même Société pour toute la région picarde, mais qu’il pourra également nous aider à mieux connaître le picard tel qu’il est parlé outre-Quiévrain. © Baptiste Frankinet, revue Wallonnes 4-2023, SLLW, Liège, Belgique * Enseigner une littérature «invisible» à l’université Le cas de la littérature en langue picarde par Olivier Engelaere Je tiens en premier lieu à vous remercier pour l’honneur qui m’est fait de me proposer de devenir membre correspondant de la Société de langue et de littérature wallonne dont l’objet, la défense et la promotion des langues régionale, a été, pi i est toudis, un des moteurs de mon existence. Lorsque Monsieur Frankinet m’a demandé de choisir un thème pour cette intervention, tout de suite le rapport entre nos langues régionales et le monde universitaire m’est venu à l’esprit. Comme vous le savez certainement, un évènement très important, qui a bouleversé notre paysage, dans le nord de la France, a eu lieu le mardi 14 décembre 2021. Il s’agit de la publication d’une circulaire du ministère de l’Éducation nationale qui ajoute le picard, ainsi que le flamand occidental et le franco-provençal, à la liste des langues régionales qui peuvent être enseignées à tous les niveaux de la scolarité. Je passerai sur l’aventure qu’a été l’élaboration de ce texte et les méandres politiques qui ont permis que le picard ne soit pas oublié. Le picard jouit donc aujourd’hui du même statut dans l’enseignement que le basque, le breton ou l’occitan. Ce qui ne veut pas dire bien entendu qu’il en est au même point qu’eux… bien loin de là, et c’est un euphémisme que de le dire. Cette irruption presque brutale du picard dans l’éducation nationale a engendré de suite la question de la formation des maîtres qui seront en charge de son enseignement. Immédiatement, les regards se portent vers l’Université dont une des missions est de former les futurs enseignants. Le picard et l’Université, c’est une histoire ancienne. Le professeur Jean-Michel Eloy, de l’Université de Picardie Jules Verne, a consacré un article, non publié à ma connaissance, sur ce sujet. À l’Université de Lille, une chaire de «langue et littérature picarde et wallonne» existe depuis 1892. L’enseignante actuellement en poste est Esther Baiwir, dialectologue liégeoise que vous connaissez très probablement. Cette chaire a d’abord été occupée par des médiévistes et aujourd’hui la présence du picard à l’Université de Lille dépend du Centre d’études médiévales et dialectale. Ni les mots langue picarde ni les mots littérature picarde n’apparaissent dans la présentation des composantes de ce centre sur le site internet de l’Université. Les étudiants lillois de lettres peuvent donc suivre une option «langue, littérature et culture régionale». Le nom de la région concernée n’étant pas précisée, on imagine qu’il s’agit de langue et de littérature picardes, et non flamande puisque le flamand occidental est également une langue régionale des Hauts-de-France. À Amiens, le picard est présent à l’Université depuis sa création en 1971. C’est à la demande de son premier président, Dominique Taddéi, qu’est créé le Centre d’Etudes Picardes alors sous la responsabilité de Jacqueline Picoche, professeure de linguistique. Ici aussi, l’étude du picard est proposée aux étudiantes et étudiants sous la forme d’une option dont la forme a beaucoup varié selon les époques. Ce sont essentiellement des linguistes qui ont été en charge de cette option et je me dois de citer le nom de l’infatigable René Debrie. Cette option a eu une ampleur parfois assez considérable en termes d’horaires et a recouru à de nombreux vacataires. Depuis le départ de Jean-Michel Éloy, qui avait succédé à Jacqueline Picoche, plus aucun enseignant titulaire n’est responsable directement de cet enseignement, qui se poursuit et est donc aujourd’hui entre les mains de chargés de cours, dont je fais partie. Enfin, le picard est enseigné depuis l’année 2019-2020 à l’Université Polytechnique du Hainaut à Valenciennes dans le cadre d’un module d’ouverture de 18h par semestre. La demande de l’Université était de proposer un cours d’apprentissage de la langue. Là également, l’enseignement n’est pas assuré par un titulaire mais par un vacataire, ch’est toudis mi. Il n’y a donc, aujourd’hui, qu’à l’Université de Lille, qu’une enseignante titulaire se charge elle-même les cours de l’option «picard» entre guillemets. La présence du picard à l’Université, l’enseignement de la langue, ou plutôt son étude, est surtout une affaire de linguistes,…

Ârtûr a Châlèrwè

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Le cliquetis

Imaginez une demeure de plus d’un siècle, un peu décrépie, mais au pouls vaillant. Prête à vous confier les mystères qui l’ont traversée au fil des ans ou à vous révéler…

Jean Muno. La subversion souriante de l’ironie

C’est avec l’ironie pour fil conducteur qu’Isabelle Moreels étudie en profondeur l’œuvre de Jean…

À ma place

La subtile nuance, si déplaçable, entre Love and Friendship , se rappelle à nous grâce au  film récent ainsi titré, qui est l’adaptation cinématographique du premier roman de Jane Austen,…

Les Anglais sont là!

Dans les rues de Charleroi , on rencontrait des soldats français, des Russes, des Italiens, des Anglais, anciens prisonniers lâchés par les Allemands. J’ai ramené…

Anne Frank, le journal d'une émancipation assasinée

J’avais l’âge d’Anne Frank quand j’ai découvert son Journal en 1967 ou 68, dans une…

RENCONTRE: La Bellone, un outil de réflexion pour la dramaturgie. Entretien avec Mylène Lauzon

Quand elle débarque en janvier 2004 à Bruxelles, il y a plus de dix ans, Mylène Lauzon ne sait pas qu’elle postulerait un jour à la direction de La Bellone. Formée aux Études littéraires, adjointe à la direction de compagnies de danse à Montréal, elle s’intéresse à la nouvelle narrativité et au rapport texte/image. Lors d’un passage à Copenhague en 2002, où elle conçoit des soirées « Noises in the dark » en lien avec l’architecture, le son et le mouvement, elle fait un saut à Bruxelles et y noue des liens avec le dessinateur Thierry van Hasselt. Celui-ci la met en contact avec Karine Ponties. Les saisons passent, les deux femmes se retrouvent à Montréal. Là, Karine lui propose de travailler un an à Bruxelles sur la dramaturgie et le développement de sa compagnie Dame de Pic. Le sommet de leur collaboration sera Holeulone, en 2006, spectacle pour lequel Mylène écrit aussi des textes. On retrouve ensuite la Québécoise à Mons, au Centre des Écritures contemporaines et numériques 1 . Elle y est adjointe à la direction, « en somme, responsable de tout », c’est-à-dire des formations, des résidences, des festivals et de la gestion d’équipe. « Ma répétition générale avant la Bellone », reconnait-elle dans un rire. Mylène a aussi été danseuse en France en 2007 et 2009 et performeuse pour Sarah Vanhée à Bruxelles. De son aveu « une expérience indispensable pour comprendre de l’intérieur » les métiers de la scène. Au final, elle aura pratiqué presque tous les métiers qui tournent autour de la création : « la moitié de mon corps est dans la création, l’autre, comme opérateur culturel ». Écrire, dit-elle Sa dernière commande littéraire remonte à une collaboration avec Anne Thuot en 2014. « Je n’ai pas écrit depuis », dit-elle, mais cela ne semble pas lui manquer. « Il y a des gens qui se définissent par leur pratique. J’ai toujours fait plein de choses, je ne me fixe pas dans une identité. J’ai d’ailleurs tout autant l’impression d’écrire en faisant de la programmation. En agençant du sens au service de la poésie. Toutes ces pratiques sont interchangeables, même si je ne m’y engage pas de la même façon. Je ne suis pas attachée aux formes. L’important est avec qui je travaille et pour qui. » Sa candidature à la direction de La Bellone marque un tournant dans son parcours, motivée par « l’envie d’avoir des responsabilités, de diriger un lieu, d’avoir un regard transversal. J’étais prête », affirme-t-elle. Elle conçoit sa mission comme un travail autour et avec « de l’humain, de l’intelligence du vivre ensemble », comme la mise à disposition « d’un bel endroit pour accueillir des gens ». Une maison d’artistes ? Quand on la questionne sur le regard qu’elle porte sur sa ville d’adoption, elle pointe avant tout le bilinguisme, moteur de tension créative et artistique. « Bruxelles est une ville où se vivent des fondements identitaires. On se définit par rapport aux autres. Ce qui engendre une vitalité. Comme Montréal, Bruxelles est traversée au quotidien par ces questions. Mais Montréal est isolé tandis que Bruxelles est au cœur de l’Europe. Il y a ici une circulation de population artistique incroyablement riche. » Cette richesse s’inscrit toutefois dans un cadre institutionnel. La Bellone a cette particularité d’avoir des représentants de la Cocof, de la Ville de Bruxelles et de la FWB au sein de son Conseil d’administration 2 . Cela entraine des missions centrées « sur l’ancrage local, sur l’ouverture et l’enregistrement de traces », via le Centre de documentation. « Toutefois, La Bellone se donne ses propres misions, insiste Mylène. Je suis actuellement sur les deux dernières années d’une convention de quatre ans. En 2017, je proposerai un nouveau projet. » En effet, après quatre années de mise en veille et de redressement financier, l’outil devait être réanimé. Sous la tutelle de Laurent Delvaux, chef de cabinet de l’échevine de la Culture de la Ville de Bruxelles, et de la directrice faisant fonction, Barbara Coeckelbergh, la Maison a dû faire un certain nombre de sacrifices afin d’assainir ses comptes. L’équipe, elle, sans projet et au futur incertain, était dans l’attente d’un élan. Et cette attente fut longue. « Même par rapport au secteur, il y reste beaucoup d’attente, voire un peu de pression. » Le projet de Direction, en effet, demande à être réfléchi. Car La Bellone reste « un outil lourd avec un petit budget artistique ». Soutenue presqu’à part égales par les trois instances à hauteur de 380.000 euros, la Maison ne réserve qu’une part minime aux accueils et aux activités artistiques. « Or, tous les artistes qui viennent travailler à La Bellone y déploient leurs efforts, leur temps et leur intelligence. Mais je n’ai ni les moyens de valoriser ce travail ni de le rendre visible. » La Bellone met actuellement à disposition des espaces dans le studio, la cour ou la galerie - le seul endroit où l’on peut diffuser des œuvres finies. L’idéal serait de pouvoir rémunérer tous ceux qui viennent travailler et partager leur savoir. « Pour l’instant je finance de la recherche fondamentale : trois semaines avec une question, sans rencontre avec le public. L’idée à terme est de communiquer sur la recherche comme service à la société. Il ne s’agit pas que d’enjeux esthétiques mais aussi politiques et sociaux. On est citoyen avant d’être artiste. » Remettre le signifiant au centre Le point névralgique de cette politique est le Centre de documentation. Ce dernier recense dans les quotidiens et les revues spécialisées tout ce qui se passe sur les plateaux, ce qui permet des recherches variées en dramaturgie. Actuellement, sa principale clientèle se compose de chercheurs universitaires en politique culturelle. « Le Centre n’est pas un service lié à un besoin de mémoire en tant que telle mais un outil de recherche en théâtre, un outil qui peut nourrir le questionnement actuel », précise Mylène. S’il stocke un volume important de papier, il faut se rappeler qu’il a été créé au moment où Internet n’existait pas. Maintenant que des plateformes multiples existent (telles que les sites des théâtres ou des méta-sites sur la production contemporaine), se pose la question du service offert à la population par le centre de documentation. « Il doit se recentrer sur des services que d’autres ne font pas, interroger son public et produire de l’analyse, des critiques sur les politiques culturelles via le web ». La Bellone deviendrait-elle un centre de discours sur le spectacle ? « Oui, mais qui permet de produire son propre discours. Ma priorité actuelle n’est pas, par exemple, de produire un spectacle d’art numérique mais plutôt d’organiser une conférence sur la culture numérique, pratique qui n’a pas encore interrogé toutes ses ramifications, que ce soit du côté de l’art ou de la neurologie. Il faut créer des états des lieux, poser la question Où en est-on dans sa pratique? afin de prendre le temps de mesurer le geste qu’on pose dans le monde. » Mylène veut remettre l’étude du signifiant au centre des préoccupations : « C’est cela qui manque à la communauté : un outil qui réfléchit à la dramaturgie. Comment fait-on pour avoir un corpus artistique signifiant ? » Des collaborations choisies En marge de ce travail, la Bellone doit-elle remplir des fonctions de défense des professions de la scène? « La Maison n’a pas vocation de représenter un corps de métier. Je suis une généraliste : elle doit rester un outil de ressources transdisciplinaires. On doit s’attacher à créer du lien et à mutualiser. Mais je ne suis pas convaincue par les fusions. Le CIFAS, le Guichet des arts, le Centre de Doc, Contredanse font chacun du bon travail. Ce qui est important, c’est que ces associations résidentes vibrent à La Bellone. Je ne crois pas aux coupoles mais bien à la multiplicité des initiatives et des échanges, aux mutualisations, aux…

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