De tous temps, la littérature a inspiré les créateurs d’images. Il suffit de penser à la longue histoire des adaptations visuelles de la Bible. Logiquement, les médias et techniques mis à contribution se sont diversifiés au cours du temps, comme le montre l’évolution des rapports entre texte et image dans le roman: romans illustrés au 18e siècle (la pratique de l’illustration n’est pas tombée en désuétude depuis, loin de là, mais elle s’est en partie déplacée vers la couverture des livres), adaptations théâtrales (au 19e siècle, le succès d’un roman allait de pair avec son transfert à la scène), puis cinématographiques et radiophoniques (très en vogue dès l’émergence de ces médias), déclinaisons sous forme de téléfilms ou de séries télévisées, et aujourd’hui, de manière presque massive, de «traductions» en bande dessinée. * Levons tout de suite un malentendu persistant: ce qu’on appelle «roman graphique»…
Auteur de Du roman à la bande dessinée
Dictionnaire illustré de la bande dessinée belge de la libération aux fifties (1945-1950)
Essayiste spécialisé en bande dessinée, Frans Lambeau, à qui l’on doit déjà un ouvrage sur la bande dessinée belge sous l’Occupation ( Dictionnaire illustré de la bande dessinée belge sous l’Occupation , André Versailles, 2013), s’est penché sur l’évolution du genre au sortir de la seconde guerre mondiale. Dans ce dictionnaire qui se veut exhaustif, l’expert fait part de ses recherches approfondies consacrées à cette période bien particulière, caractérisée par un essor important de la presse écrite. Alors que la Belgique a découvert le 9e Art durant l’entre-deux-guerres à la faveur de la diffusion de comics américains, la source se tarit dès 1941 et l’édition fait appel aux illustrateurs locaux pour remplir les pages des hebdomadaires de divertissement. À la Libération, l’offre se développe abondamment. Au-delà de Tintin et Spirou , de nombreux journaux aujourd’hui oubliés prospéraient dans les kiosques : L’aiglon , Bimbo , Annette , Heroic-albums … tous ces périodiques ont contribué à ce développement majeur de la bande dessinée belge de l’après-guerre. Cette prolifération, nous n’en gardons aujourd’hui que peu de souvenirs. Afin de préserver la mémoire de cette riche période, Frans Lambeau s’est attelé à la tâche de rassembler dans cet ouvrage très complet les auteurs, illustrateurs, héros, séries, magazines et éditeurs qui ont marqué cette époque précise. Si bien des noms sont méconnus, certains font toujours partie des parutions actuelles des éditeurs. Ainsi, l’auteur nous détaille les débuts d’ Alix , en 1948, ou de Blake et Mortimer , en 1946, tous deux dans le journal Tintin , ou encore de Lucky Luke en 1947 dans Spirou . Bien des figures emblématiques sont apparues à cette époque. Une chose frappe : la prédominance du récit d’aventure. Que ce soit le western, la guerre, la trame policière, l’écrasante majorité des publications d’après-guerre y sont consacrées. Le 9e Art s’est depuis lors fort heureusement diversifié.Ce Dictionnaire illustré de la bande dessinée belge de la libération aux fifties témoigne d’une période pendant laquelle s’est dessiné ce qui allait être le socle fondateur du 9e Art en Belgique. Cet éclairage sur ses origines permet de comprendre la bande dessinée franco-belge telle qu’elle s’est longtemps exprimée de façon exclusive. Un coup d’œil dans le rétro…