Résultats de recherche pour “Veronika Mabardi” 1 à 29 (29)

Sauvage est celui qui se sauve
J’écris : voici mon frère, il n’a fait que passer , mais la phrase ment. Alors je cherche les traces qu’il a laissées dans le regard des…

La narratrice évoque la figure de sa mère, Denise, et des souvenirs que celle-ci lui contait de la guerre et de sa rencontre avec Arthur Vain, un Indien Navajo enrôlé dans…

VERONIKA MABARDI - Prix triennal de littérature dramatique en langue française 2018 from Cinémathèque Fédération W-B on Vimeo . Loin de Linden est un dialogue entre les deux…

«Il est tard. Il fait noir et la neige continue à tomber.Julie ferme les rideaux et monte se coucher. C'estalors que quelqu'un sonne à la porte. Julie se dépêched'ouvrir : quand on…

Quand l’art du récit se noue à la voix du conte, les mots se soulèvent pour évoquer le monde de ceux qui n’ont pas droit au chapitre. Les exilés, les êtres que traverse la fêlure,…

En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. Toujours dans cette dynamique d’ écrire ensemble , tu as rassemblé les récits de différentes personnes sur leurs maisons d’enfance 1 . En faisant ça, est-ce que cela t’a permis de savoir ce que serait ta maison idéale maintenant ? J’ai passé mon enfance à parler de ma maison idéale avec mon père. C’était un des grands thèmes entre nous. Il avait dessiné une maison-bibliothèque où tout était articulé autour d’une cage d’escaliers-bibliothèque. Et on se demandait : « Où mettrait-on tel livre ? » Mon problème plus concret est que je n’ai pas appris à changer une prise. Pourquoi je ne peux pas changer un robinet alors que je peux dessiner des concepts de maison ? Par contre, ce qui était particulier dans Maisons d’enfance , c’est qu’il était mené dans le Brabant wallon, d’où je viens. Ça me ramenait donc à un endroit où j’avais vécu et que j’avais quitté assez fâchée. Ça m’a raccrochée. C’était un projet coordonné par le Centre Culturel du Brabant wallon, avec l’IAD-Théâtre, et j’étais engagée pour récolter ces témoignages et en faire une pièce de théâtre. J’ai été rencontrer des gens, ils racontaient, on riait, on pleurait et je ne pensais pas beaucoup à la pièce de théâtre. J’étais dans la rencontre, j’enregistrais tout – comme toi – et puis, je suis rentrée, j’ai transcrit et, comme d’habitude, c’est magnifique, il n’y a rien à ajouter, peut-être juste à enlever pour mettre en lumière des choses. Il y avait une dizaine de témoignages et j’avais droit à quelques minutes par personne dans le texte. J'étais dans la matière – des portraits, des listes à la Perec et un carnet de bord –, plongée dans ce travail de peaufiner le portrait. Je rencontre le directeur de l’IAD à l’époque qui me dit : « Alors, comment ça marche, tu vas nous écrire une belle pièce ? » Je réponds : « Non, je ne crois pas... En fait, c’est tellement beau en soi, je n’ai vraiment pas envie d'ajouter une fiction à ces histoires-là, je crois que ça va être des monologues. » Il me dit : « Comment, il n’y aura pas de dialogues ? » « Des dialogues pourront s’inventer dans les trous, dans les espaces, mais je crois que je vais me limiter à la parole des gens qui est trop belle, je n’ai jamais rien entendu de pareil sur l'expérience d'habiter et d'être enfant donc ça va être ça. » Ça a été la crise avec les acteurs. Ils étaient inquiets de ne rien avoir à jouer. Je déclarais : « Non tu n’as rien à jouer, tu as juste à transmettre des choses, c’est magnifique, tu laisses passer ça dans ton corps, comme j’ai laissé passer ça dans mes doigts et tu respires aux endroits où ils respirent et tu vas sentir plein de choses. » Clash avec la professeure qui dit : « Si on fait ça, alors c’est quoi le théâtre ? » J’ai dit que, ça, ce n’était pas mon problème. Personnellement, le théâtre où les gens me montrent qu’ils font du théâtre, ça ne m’intéresse pas trop. C’est une belle question de se demander pourquoi on est touchés par ça et pas par des histoires rocambolesques et surjouées. C’était tous des gens adorables mais c’était la crise. Il y avait un étudiant qui était tellement fâché qu'il a dit qu’il ne travaillerait pas et qu’il s’en fichait. C’était un monologue d’un adulte qui se souvenait que son attachement, enfant, était avec un chien. Le comédien s’est alors assis sur une chaise, son chien à ses pieds et il a lu le livre, chargé par ce défi, qui rejoignait d'une certaine manière l'émotion de la personne qui avait parlé. C'était magnifique. Mon erreur, à l'époque, c'est de n'avoir pas pris le risque d'inviter les étudiants et leur professeure au dialogue, de n'avoir pas partagé avec eux en quoi je trouvais ces paroles théâtrales, il y avait beaucoup de place entre les mots pour la création. Quand Giuseppe Lonobile a monté Linden, c’est à cet endroit-là qu’il s’est placé : il a invité les actrices à se laisser traverser par le texte, ponctuation, rythme, résonances comprises. Je trouve que c'est très théâtral, se mettre à l’endroit de la parole de quelqu’un d’autre, dans le respect de cette dernière. Les actrices sont merveilleuses, elles se coulent dans la parole, c’est une transmission en chaîne. Et c’est là que ça devient intéressant, on rencontre des fantômes, on rencontre des autres. D’ailleurs, tu donnes une définition en creux du théâtre dans Sauvage , quand tu dis aimer les trébuchements, les indécences, les faux-pas, les silences, les ratés et qu’au milieu de ce foutoir, quelque chose émerge. J’adore cette définition, quand c’est tout lisse, il y a quelque chose d’angoissant. Tu en parlais pour dire que parfois le théâtre fait plus vrai que la réalité. Pour le moment, je fais une expérience super intéressante, je travaille avec Françoise Berlanger qui met en scène un texte, Maman de l’autre côté , où j’ai vraiment exagéré : de longs récits se télescopent avec de toutes petites phrases. Le texte est troué, plein de non-dits. Elle, elle transpose tout dans l’espace. Elle prend des risques, compose avec les mots, le son et toutes les dimensions. Ce que tu disais du volume , elle le recrée dans l’espace avec la musique. Ce que je pensais être du silence entre les phrases est en train de se remplir de regards, d'actions, de distances, de sons, de vie. Ce que j'imaginais suspendu entre les mots s'incarne entre les corps dans l’espace. C’est quand, ce prochain texte ? C’est du 17 au 28 janvier au Théâtre de la Vie . Est-ce que le théâtre te permet plus de liberté que le roman par rapport au métissage du langage, comme dans Linden, avec les segments de phrase en flamand ? Dans Linden, c’est tout bêtement parce qu’il y a un personnage flamand. Dans la prochaine pièce, il y a un personnage qui vit aux États-Unis. Il y avait du texte anglais, on l’a traduit parce qu’une des comédiennes ne parle pas cette langue et, dans la salle, il y aura des gens qui ne la parleront pas non plus. Quand on est dans la salle et qu’on ne comprend pas, on se sent exclu. Le temps qu'on pense qu’on ne comprend pas une chose qu’on est censé comprendre, on ferme tout et on rate une marche... C’était dommage, j’ai changé. Parfois, je me dis que tel écrit est du roman, que c’est pour quelqu’un qui a le temps de réfléchir, relire, regarder dans un dictionnaire ce que ça veut dire. Au théâtre, c’est immédiat. Par rapport au flamand, c’est différent : si quelqu’un dans la salle ne parle pas flamand, tant pis pour lui, on est en Belgique. Après tout, je suis aussi flamande. Avec l’anglais, je n’ai pas envie d’être dans ce rapport. Tes romans sont très différents. J’ai un peu feuilleté Rue du Chêne qui évoquait les romans du XVIIIe avec des noms de chapitres suivis de périphrases synthétiques avec ce qu’il va s’y passer alors que Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage se rangent plus du côté de la poésie, où les idées viennent par vagues. Comment réfléchis-tu à la forme de tes romans ? Dans les romans que j’ai créés avec Anne Leloup (éditions Esperluète),…

En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. Toujours dans cette dynamique d’ écrire ensemble , tu as rassemblé les récits de différentes personnes sur leurs maisons d’enfance 1 . En faisant ça, est-ce que cela t’a permis de savoir ce que serait ta maison idéale maintenant ? J’ai passé mon enfance à parler de ma maison idéale avec mon père. C’était un des grands thèmes entre nous. Il avait dessiné une maison-bibliothèque où tout était articulé autour d’une cage d’escaliers-bibliothèque. Et on se demandait : « Où mettrait-on tel livre ? » Mon problème plus concret est que je n’ai pas appris à changer une prise. Pourquoi je ne peux pas changer un robinet alors que je peux dessiner des concepts de maison ? Par contre, ce qui était particulier dans Maisons d’enfance , c’est qu’il était mené dans le Brabant wallon, d’où je viens. Ça me ramenait donc à un endroit où j’avais vécu et que j’avais quitté assez fâchée. Ça m’a raccrochée. C’était un projet coordonné par le Centre Culturel du Brabant wallon, avec l’IAD-Théâtre, et j’étais engagée pour récolter ces témoignages et en faire une pièce de théâtre. J’ai été rencontrer des gens, ils racontaient, on riait, on pleurait et je ne pensais pas beaucoup à la pièce de théâtre. J’étais dans la rencontre, j’enregistrais tout – comme toi – et puis, je suis rentrée, j’ai transcrit et, comme d’habitude, c’est magnifique, il n’y a rien à ajouter, peut-être juste à enlever pour mettre en lumière des choses. Il y avait une dizaine de témoignages et j’avais droit à quelques minutes par personne dans le texte. J'étais dans la matière – des portraits, des listes à la Perec et un carnet de bord –, plongée dans ce travail de peaufiner le portrait. Je rencontre le directeur de l’IAD à l’époque qui me dit : « Alors, comment ça marche, tu vas nous écrire une belle pièce ? » Je réponds : « Non, je ne crois pas... En fait, c’est tellement beau en soi, je n’ai vraiment pas envie d'ajouter une fiction à ces histoires-là, je crois que ça va être des monologues. » Il me dit : « Comment, il n’y aura pas de dialogues ? » « Des dialogues pourront s’inventer dans les trous, dans les espaces, mais je crois que je vais me limiter à la parole des gens qui est trop belle, je n’ai jamais rien entendu de pareil sur l'expérience d'habiter et d'être enfant donc ça va être ça. » Ça a été la crise avec les acteurs. Ils étaient inquiets de ne rien avoir à jouer. Je déclarais : « Non tu n’as rien à jouer, tu as juste à transmettre des choses, c’est magnifique, tu laisses passer ça dans ton corps, comme j’ai laissé passer ça dans mes doigts et tu respires aux endroits où ils respirent et tu vas sentir plein de choses. » Clash avec la professeure qui dit : « Si on fait ça, alors c’est quoi le théâtre ? » J’ai dit que, ça, ce n’était pas mon problème. Personnellement, le théâtre où les gens me montrent qu’ils font du théâtre, ça ne m’intéresse pas trop. C’est une belle question de se demander pourquoi on est touchés par ça et pas par des histoires rocambolesques et surjouées. C’était tous des gens adorables mais c’était la crise. Il y avait un étudiant qui était tellement fâché qu'il a dit qu’il ne travaillerait pas et qu’il s’en fichait. C’était un monologue d’un adulte qui se souvenait que son attachement, enfant, était avec un chien. Le comédien s’est alors assis sur une chaise, son chien à ses pieds et il a lu le livre, chargé par ce défi, qui rejoignait d'une certaine manière l'émotion de la personne qui avait parlé. C'était magnifique. Mon erreur, à l'époque, c'est de n'avoir pas pris le risque d'inviter les étudiants et leur professeure au dialogue, de n'avoir pas partagé avec eux en quoi je trouvais ces paroles théâtrales, il y avait beaucoup de place entre les mots pour la création. Quand Giuseppe Lonobile a monté Linden, c’est à cet endroit-là qu’il s’est placé : il a invité les actrices à se laisser traverser par le texte, ponctuation, rythme, résonances comprises. Je trouve que c'est très théâtral, se mettre à l’endroit de la parole de quelqu’un d’autre, dans le respect de cette dernière. Les actrices sont merveilleuses, elles se coulent dans la parole, c’est une transmission en chaîne. Et c’est là que ça devient intéressant, on rencontre des fantômes, on rencontre des autres. D’ailleurs, tu donnes une définition en creux du théâtre dans Sauvage , quand tu dis aimer les trébuchements, les indécences, les faux-pas, les silences, les ratés et qu’au milieu de ce foutoir, quelque chose émerge. J’adore cette définition, quand c’est tout lisse, il y a quelque chose d’angoissant. Tu en parlais pour dire que parfois le théâtre fait plus vrai que la réalité. Pour le moment, je fais une expérience super intéressante, je travaille avec Françoise Berlanger qui met en scène un texte, Maman de l’autre côté , où j’ai vraiment exagéré : de longs récits se télescopent avec de toutes petites phrases. Le texte est troué, plein de non-dits. Elle, elle transpose tout dans l’espace. Elle prend des risques, compose avec les mots, le son et toutes les dimensions. Ce que tu disais du volume , elle le recrée dans l’espace avec la musique. Ce que je pensais être du silence entre les phrases est en train de se remplir de regards, d'actions, de distances, de sons, de vie. Ce que j'imaginais suspendu entre les mots s'incarne entre les corps dans l’espace. C’est quand, ce prochain texte ? C’est du 17 au 28 janvier au Théâtre de la Vie . Est-ce que le théâtre te permet plus de liberté que le roman par rapport au métissage du langage, comme dans Linden, avec les segments de phrase en flamand ? Dans Linden, c’est tout bêtement parce qu’il y a un personnage flamand. Dans la prochaine pièce, il y a un personnage qui vit aux États-Unis. Il y avait du texte anglais, on l’a traduit parce qu’une des comédiennes ne parle pas cette langue et, dans la salle, il y aura des gens qui ne la parleront pas non plus. Quand on est dans la salle et qu’on ne comprend pas, on se sent exclu. Le temps qu'on pense qu’on ne comprend pas une chose qu’on est censé comprendre, on ferme tout et on rate une marche... C’était dommage, j’ai changé. Parfois, je me dis que tel écrit est du roman, que c’est pour quelqu’un qui a le temps de réfléchir, relire, regarder dans un dictionnaire ce que ça veut dire. Au théâtre, c’est immédiat. Par rapport au flamand, c’est différent : si quelqu’un dans la salle ne parle pas flamand, tant pis pour lui, on est en Belgique. Après tout, je suis aussi flamande. Avec l’anglais, je n’ai pas envie d’être dans ce rapport. Tes romans sont très différents. J’ai un peu feuilleté Rue du Chêne qui évoquait les romans du XVIIIe avec des noms de chapitres suivis de périphrases synthétiques avec ce qu’il va s’y passer alors que Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage se rangent plus du côté de la poésie, où les idées viennent par vagues. Comment réfléchis-tu à la forme de tes romans ? Dans les romans que j’ai créés avec Anne Leloup (éditions Esperluète),…

En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. Toujours dans cette dynamique d’ écrire ensemble , tu as rassemblé les récits de différentes personnes sur leurs maisons d’enfance 1 . En faisant ça, est-ce que cela t’a permis de savoir ce que serait ta maison idéale maintenant ? J’ai passé mon enfance à parler de ma maison idéale avec mon père. C’était un des grands thèmes entre nous. Il avait dessiné une maison-bibliothèque où tout était articulé autour d’une cage d’escaliers-bibliothèque. Et on se demandait : « Où mettrait-on tel livre ? » Mon problème plus concret est que je n’ai pas appris à changer une prise. Pourquoi je ne peux pas changer un robinet alors que je peux dessiner des concepts de maison ? Par contre, ce qui était particulier dans Maisons d’enfance , c’est qu’il était mené dans le Brabant wallon, d’où je viens. Ça me ramenait donc à un endroit où j’avais vécu et que j’avais quitté assez fâchée. Ça m’a raccrochée. C’était un projet coordonné par le Centre Culturel du Brabant wallon, avec l’IAD-Théâtre, et j’étais engagée pour récolter ces témoignages et en faire une pièce de théâtre. J’ai été rencontrer des gens, ils racontaient, on riait, on pleurait et je ne pensais pas beaucoup à la pièce de théâtre. J’étais dans la rencontre, j’enregistrais tout – comme toi – et puis, je suis rentrée, j’ai transcrit et, comme d’habitude, c’est magnifique, il n’y a rien à ajouter, peut-être juste à enlever pour mettre en lumière des choses. Il y avait une dizaine de témoignages et j’avais droit à quelques minutes par personne dans le texte. J'étais dans la matière – des portraits, des listes à la Perec et un carnet de bord –, plongée dans ce travail de peaufiner le portrait. Je rencontre le directeur de l’IAD à l’époque qui me dit : « Alors, comment ça marche, tu vas nous écrire une belle pièce ? » Je réponds : « Non, je ne crois pas... En fait, c’est tellement beau en soi, je n’ai vraiment pas envie d'ajouter une fiction à ces histoires-là, je crois que ça va être des monologues. » Il me dit : « Comment, il n’y aura pas de dialogues ? » « Des dialogues pourront s’inventer dans les trous, dans les espaces, mais je crois que je vais me limiter à la parole des gens qui est trop belle, je n’ai jamais rien entendu de pareil sur l'expérience d'habiter et d'être enfant donc ça va être ça. » Ça a été la crise avec les acteurs. Ils étaient inquiets de ne rien avoir à jouer. Je déclarais : « Non tu n’as rien à jouer, tu as juste à transmettre des choses, c’est magnifique, tu laisses passer ça dans ton corps, comme j’ai laissé passer ça dans mes doigts et tu respires aux endroits où ils respirent et tu vas sentir plein de choses. » Clash avec la professeure qui dit : « Si on fait ça, alors c’est quoi le théâtre ? » J’ai dit que, ça, ce n’était pas mon problème. Personnellement, le théâtre où les gens me montrent qu’ils font du théâtre, ça ne m’intéresse pas trop. C’est une belle question de se demander pourquoi on est touchés par ça et pas par des histoires rocambolesques et surjouées. C’était tous des gens adorables mais c’était la crise. Il y avait un étudiant qui était tellement fâché qu'il a dit qu’il ne travaillerait pas et qu’il s’en fichait. C’était un monologue d’un adulte qui se souvenait que son attachement, enfant, était avec un chien. Le comédien s’est alors assis sur une chaise, son chien à ses pieds et il a lu le livre, chargé par ce défi, qui rejoignait d'une certaine manière l'émotion de la personne qui avait parlé. C'était magnifique. Mon erreur, à l'époque, c'est de n'avoir pas pris le risque d'inviter les étudiants et leur professeure au dialogue, de n'avoir pas partagé avec eux en quoi je trouvais ces paroles théâtrales, il y avait beaucoup de place entre les mots pour la création. Quand Giuseppe Lonobile a monté Linden, c’est à cet endroit-là qu’il s’est placé : il a invité les actrices à se laisser traverser par le texte, ponctuation, rythme, résonances comprises. Je trouve que c'est très théâtral, se mettre à l’endroit de la parole de quelqu’un d’autre, dans le respect de cette dernière. Les actrices sont merveilleuses, elles se coulent dans la parole, c’est une transmission en chaîne. Et c’est là que ça devient intéressant, on rencontre des fantômes, on rencontre des autres. D’ailleurs, tu donnes une définition en creux du théâtre dans Sauvage , quand tu dis aimer les trébuchements, les indécences, les faux-pas, les silences, les ratés et qu’au milieu de ce foutoir, quelque chose émerge. J’adore cette définition, quand c’est tout lisse, il y a quelque chose d’angoissant. Tu en parlais pour dire que parfois le théâtre fait plus vrai que la réalité. Pour le moment, je fais une expérience super intéressante, je travaille avec Françoise Berlanger qui met en scène un texte, Maman de l’autre côté , où j’ai vraiment exagéré : de longs récits se télescopent avec de toutes petites phrases. Le texte est troué, plein de non-dits. Elle, elle transpose tout dans l’espace. Elle prend des risques, compose avec les mots, le son et toutes les dimensions. Ce que tu disais du volume , elle le recrée dans l’espace avec la musique. Ce que je pensais être du silence entre les phrases est en train de se remplir de regards, d'actions, de distances, de sons, de vie. Ce que j'imaginais suspendu entre les mots s'incarne entre les corps dans l’espace. C’est quand, ce prochain texte ? C’est du 17 au 28 janvier au Théâtre de la Vie . Est-ce que le théâtre te permet plus de liberté que le roman par rapport au métissage du langage, comme dans Linden, avec les segments de phrase en flamand ? Dans Linden, c’est tout bêtement parce qu’il y a un personnage flamand. Dans la prochaine pièce, il y a un personnage qui vit aux États-Unis. Il y avait du texte anglais, on l’a traduit parce qu’une des comédiennes ne parle pas cette langue et, dans la salle, il y aura des gens qui ne la parleront pas non plus. Quand on est dans la salle et qu’on ne comprend pas, on se sent exclu. Le temps qu'on pense qu’on ne comprend pas une chose qu’on est censé comprendre, on ferme tout et on rate une marche... C’était dommage, j’ai changé. Parfois, je me dis que tel écrit est du roman, que c’est pour quelqu’un qui a le temps de réfléchir, relire, regarder dans un dictionnaire ce que ça veut dire. Au théâtre, c’est immédiat. Par rapport au flamand, c’est différent : si quelqu’un dans la salle ne parle pas flamand, tant pis pour lui, on est en Belgique. Après tout, je suis aussi flamande. Avec l’anglais, je n’ai pas envie d’être dans ce rapport. Tes romans sont très différents. J’ai un peu feuilleté Rue du Chêne qui évoquait les romans du XVIIIe avec des noms de chapitres suivis de périphrases synthétiques avec ce qu’il va s’y passer alors que Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage se rangent plus du côté de la poésie, où les idées viennent par vagues. Comment réfléchis-tu à la forme de tes romans ? Dans les romans que j’ai créés avec Anne Leloup (éditions Esperluète),…

En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. Toujours dans cette dynamique d’ écrire ensemble , tu as rassemblé les récits de différentes personnes sur leurs maisons d’enfance 1 . En faisant ça, est-ce que cela t’a permis de savoir ce que serait ta maison idéale maintenant ? J’ai passé mon enfance à parler de ma maison idéale avec mon père. C’était un des grands thèmes entre nous. Il avait dessiné une maison-bibliothèque où tout était articulé autour d’une cage d’escaliers-bibliothèque. Et on se demandait : « Où mettrait-on tel livre ? » Mon problème plus concret est que je n’ai pas appris à changer une prise. Pourquoi je ne peux pas changer un robinet alors que je peux dessiner des concepts de maison ? Par contre, ce qui était particulier dans Maisons d’enfance , c’est qu’il était mené dans le Brabant wallon, d’où je viens. Ça me ramenait donc à un endroit où j’avais vécu et que j’avais quitté assez fâchée. Ça m’a raccrochée. C’était un projet coordonné par le Centre Culturel du Brabant wallon, avec l’IAD-Théâtre, et j’étais engagée pour récolter ces témoignages et en faire une pièce de théâtre. J’ai été rencontrer des gens, ils racontaient, on riait, on pleurait et je ne pensais pas beaucoup à la pièce de théâtre. J’étais dans la rencontre, j’enregistrais tout – comme toi – et puis, je suis rentrée, j’ai transcrit et, comme d’habitude, c’est magnifique, il n’y a rien à ajouter, peut-être juste à enlever pour mettre en lumière des choses. Il y avait une dizaine de témoignages et j’avais droit à quelques minutes par personne dans le texte. J'étais dans la matière – des portraits, des listes à la Perec et un carnet de bord –, plongée dans ce travail de peaufiner le portrait. Je rencontre le directeur de l’IAD à l’époque qui me dit : « Alors, comment ça marche, tu vas nous écrire une belle pièce ? » Je réponds : « Non, je ne crois pas... En fait, c’est tellement beau en soi, je n’ai vraiment pas envie d'ajouter une fiction à ces histoires-là, je crois que ça va être des monologues. » Il me dit : « Comment, il n’y aura pas de dialogues ? » « Des dialogues pourront s’inventer dans les trous, dans les espaces, mais je crois que je vais me limiter à la parole des gens qui est trop belle, je n’ai jamais rien entendu de pareil sur l'expérience d'habiter et d'être enfant donc ça va être ça. » Ça a été la crise avec les acteurs. Ils étaient inquiets de ne rien avoir à jouer. Je déclarais : « Non tu n’as rien à jouer, tu as juste à transmettre des choses, c’est magnifique, tu laisses passer ça dans ton corps, comme j’ai laissé passer ça dans mes doigts et tu respires aux endroits où ils respirent et tu vas sentir plein de choses. » Clash avec la professeure qui dit : « Si on fait ça, alors c’est quoi le théâtre ? » J’ai dit que, ça, ce n’était pas mon problème. Personnellement, le théâtre où les gens me montrent qu’ils font du théâtre, ça ne m’intéresse pas trop. C’est une belle question de se demander pourquoi on est touchés par ça et pas par des histoires rocambolesques et surjouées. C’était tous des gens adorables mais c’était la crise. Il y avait un étudiant qui était tellement fâché qu'il a dit qu’il ne travaillerait pas et qu’il s’en fichait. C’était un monologue d’un adulte qui se souvenait que son attachement, enfant, était avec un chien. Le comédien s’est alors assis sur une chaise, son chien à ses pieds et il a lu le livre, chargé par ce défi, qui rejoignait d'une certaine manière l'émotion de la personne qui avait parlé. C'était magnifique. Mon erreur, à l'époque, c'est de n'avoir pas pris le risque d'inviter les étudiants et leur professeure au dialogue, de n'avoir pas partagé avec eux en quoi je trouvais ces paroles théâtrales, il y avait beaucoup de place entre les mots pour la création. Quand Giuseppe Lonobile a monté Linden, c’est à cet endroit-là qu’il s’est placé : il a invité les actrices à se laisser traverser par le texte, ponctuation, rythme, résonances comprises. Je trouve que c'est très théâtral, se mettre à l’endroit de la parole de quelqu’un d’autre, dans le respect de cette dernière. Les actrices sont merveilleuses, elles se coulent dans la parole, c’est une transmission en chaîne. Et c’est là que ça devient intéressant, on rencontre des fantômes, on rencontre des autres. D’ailleurs, tu donnes une définition en creux du théâtre dans Sauvage , quand tu dis aimer les trébuchements, les indécences, les faux-pas, les silences, les ratés et qu’au milieu de ce foutoir, quelque chose émerge. J’adore cette définition, quand c’est tout lisse, il y a quelque chose d’angoissant. Tu en parlais pour dire que parfois le théâtre fait plus vrai que la réalité. Pour le moment, je fais une expérience super intéressante, je travaille avec Françoise Berlanger qui met en scène un texte, Maman de l’autre côté , où j’ai vraiment exagéré : de longs récits se télescopent avec de toutes petites phrases. Le texte est troué, plein de non-dits. Elle, elle transpose tout dans l’espace. Elle prend des risques, compose avec les mots, le son et toutes les dimensions. Ce que tu disais du volume , elle le recrée dans l’espace avec la musique. Ce que je pensais être du silence entre les phrases est en train de se remplir de regards, d'actions, de distances, de sons, de vie. Ce que j'imaginais suspendu entre les mots s'incarne entre les corps dans l’espace. C’est quand, ce prochain texte ? C’est du 17 au 28 janvier au Théâtre de la Vie . Est-ce que le théâtre te permet plus de liberté que le roman par rapport au métissage du langage, comme dans Linden, avec les segments de phrase en flamand ? Dans Linden, c’est tout bêtement parce qu’il y a un personnage flamand. Dans la prochaine pièce, il y a un personnage qui vit aux États-Unis. Il y avait du texte anglais, on l’a traduit parce qu’une des comédiennes ne parle pas cette langue et, dans la salle, il y aura des gens qui ne la parleront pas non plus. Quand on est dans la salle et qu’on ne comprend pas, on se sent exclu. Le temps qu'on pense qu’on ne comprend pas une chose qu’on est censé comprendre, on ferme tout et on rate une marche... C’était dommage, j’ai changé. Parfois, je me dis que tel écrit est du roman, que c’est pour quelqu’un qui a le temps de réfléchir, relire, regarder dans un dictionnaire ce que ça veut dire. Au théâtre, c’est immédiat. Par rapport au flamand, c’est différent : si quelqu’un dans la salle ne parle pas flamand, tant pis pour lui, on est en Belgique. Après tout, je suis aussi flamande. Avec l’anglais, je n’ai pas envie d’être dans ce rapport. Tes romans sont très différents. J’ai un peu feuilleté Rue du Chêne qui évoquait les romans du XVIIIe avec des noms de chapitres suivis de périphrases synthétiques avec ce qu’il va s’y passer alors que Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage se rangent plus du côté de la poésie, où les idées viennent par vagues. Comment réfléchis-tu à la forme de tes romans ? Dans les romans que j’ai créés avec Anne Leloup (éditions Esperluète),…

En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. Toujours dans cette dynamique d’ écrire ensemble , tu as rassemblé les récits de différentes personnes sur leurs maisons d’enfance 1 . En faisant ça, est-ce que cela t’a permis de savoir ce que serait ta maison idéale maintenant ? J’ai passé mon enfance à parler de ma maison idéale avec mon père. C’était un des grands thèmes entre nous. Il avait dessiné une maison-bibliothèque où tout était articulé autour d’une cage d’escaliers-bibliothèque. Et on se demandait : « Où mettrait-on tel livre ? » Mon problème plus concret est que je n’ai pas appris à changer une prise. Pourquoi je ne peux pas changer un robinet alors que je peux dessiner des concepts de maison ? Par contre, ce qui était particulier dans Maisons d’enfance , c’est qu’il était mené dans le Brabant wallon, d’où je viens. Ça me ramenait donc à un endroit où j’avais vécu et que j’avais quitté assez fâchée. Ça m’a raccrochée. C’était un projet coordonné par le Centre Culturel du Brabant wallon, avec l’IAD-Théâtre, et j’étais engagée pour récolter ces témoignages et en faire une pièce de théâtre. J’ai été rencontrer des gens, ils racontaient, on riait, on pleurait et je ne pensais pas beaucoup à la pièce de théâtre. J’étais dans la rencontre, j’enregistrais tout – comme toi – et puis, je suis rentrée, j’ai transcrit et, comme d’habitude, c’est magnifique, il n’y a rien à ajouter, peut-être juste à enlever pour mettre en lumière des choses. Il y avait une dizaine de témoignages et j’avais droit à quelques minutes par personne dans le texte. J'étais dans la matière – des portraits, des listes à la Perec et un carnet de bord –, plongée dans ce travail de peaufiner le portrait. Je rencontre le directeur de l’IAD à l’époque qui me dit : « Alors, comment ça marche, tu vas nous écrire une belle pièce ? » Je réponds : « Non, je ne crois pas... En fait, c’est tellement beau en soi, je n’ai vraiment pas envie d'ajouter une fiction à ces histoires-là, je crois que ça va être des monologues. » Il me dit : « Comment, il n’y aura pas de dialogues ? » « Des dialogues pourront s’inventer dans les trous, dans les espaces, mais je crois que je vais me limiter à la parole des gens qui est trop belle, je n’ai jamais rien entendu de pareil sur l'expérience d'habiter et d'être enfant donc ça va être ça. » Ça a été la crise avec les acteurs. Ils étaient inquiets de ne rien avoir à jouer. Je déclarais : « Non tu n’as rien à jouer, tu as juste à transmettre des choses, c’est magnifique, tu laisses passer ça dans ton corps, comme j’ai laissé passer ça dans mes doigts et tu respires aux endroits où ils respirent et tu vas sentir plein de choses. » Clash avec la professeure qui dit : « Si on fait ça, alors c’est quoi le théâtre ? » J’ai dit que, ça, ce n’était pas mon problème. Personnellement, le théâtre où les gens me montrent qu’ils font du théâtre, ça ne m’intéresse pas trop. C’est une belle question de se demander pourquoi on est touchés par ça et pas par des histoires rocambolesques et surjouées. C’était tous des gens adorables mais c’était la crise. Il y avait un étudiant qui était tellement fâché qu'il a dit qu’il ne travaillerait pas et qu’il s’en fichait. C’était un monologue d’un adulte qui se souvenait que son attachement, enfant, était avec un chien. Le comédien s’est alors assis sur une chaise, son chien à ses pieds et il a lu le livre, chargé par ce défi, qui rejoignait d'une certaine manière l'émotion de la personne qui avait parlé. C'était magnifique. Mon erreur, à l'époque, c'est de n'avoir pas pris le risque d'inviter les étudiants et leur professeure au dialogue, de n'avoir pas partagé avec eux en quoi je trouvais ces paroles théâtrales, il y avait beaucoup de place entre les mots pour la création. Quand Giuseppe Lonobile a monté Linden, c’est à cet endroit-là qu’il s’est placé : il a invité les actrices à se laisser traverser par le texte, ponctuation, rythme, résonances comprises. Je trouve que c'est très théâtral, se mettre à l’endroit de la parole de quelqu’un d’autre, dans le respect de cette dernière. Les actrices sont merveilleuses, elles se coulent dans la parole, c’est une transmission en chaîne. Et c’est là que ça devient intéressant, on rencontre des fantômes, on rencontre des autres. D’ailleurs, tu donnes une définition en creux du théâtre dans Sauvage , quand tu dis aimer les trébuchements, les indécences, les faux-pas, les silences, les ratés et qu’au milieu de ce foutoir, quelque chose émerge. J’adore cette définition, quand c’est tout lisse, il y a quelque chose d’angoissant. Tu en parlais pour dire que parfois le théâtre fait plus vrai que la réalité. Pour le moment, je fais une expérience super intéressante, je travaille avec Françoise Berlanger qui met en scène un texte, Maman de l’autre côté , où j’ai vraiment exagéré : de longs récits se télescopent avec de toutes petites phrases. Le texte est troué, plein de non-dits. Elle, elle transpose tout dans l’espace. Elle prend des risques, compose avec les mots, le son et toutes les dimensions. Ce que tu disais du volume , elle le recrée dans l’espace avec la musique. Ce que je pensais être du silence entre les phrases est en train de se remplir de regards, d'actions, de distances, de sons, de vie. Ce que j'imaginais suspendu entre les mots s'incarne entre les corps dans l’espace. C’est quand, ce prochain texte ? C’est du 17 au 28 janvier au Théâtre de la Vie . Est-ce que le théâtre te permet plus de liberté que le roman par rapport au métissage du langage, comme dans Linden, avec les segments de phrase en flamand ? Dans Linden, c’est tout bêtement parce qu’il y a un personnage flamand. Dans la prochaine pièce, il y a un personnage qui vit aux États-Unis. Il y avait du texte anglais, on l’a traduit parce qu’une des comédiennes ne parle pas cette langue et, dans la salle, il y aura des gens qui ne la parleront pas non plus. Quand on est dans la salle et qu’on ne comprend pas, on se sent exclu. Le temps qu'on pense qu’on ne comprend pas une chose qu’on est censé comprendre, on ferme tout et on rate une marche... C’était dommage, j’ai changé. Parfois, je me dis que tel écrit est du roman, que c’est pour quelqu’un qui a le temps de réfléchir, relire, regarder dans un dictionnaire ce que ça veut dire. Au théâtre, c’est immédiat. Par rapport au flamand, c’est différent : si quelqu’un dans la salle ne parle pas flamand, tant pis pour lui, on est en Belgique. Après tout, je suis aussi flamande. Avec l’anglais, je n’ai pas envie d’être dans ce rapport. Tes romans sont très différents. J’ai un peu feuilleté Rue du Chêne qui évoquait les romans du XVIIIe avec des noms de chapitres suivis de périphrases synthétiques avec ce qu’il va s’y passer alors que Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage se rangent plus du côté de la poésie, où les idées viennent par vagues. Comment réfléchis-tu à la forme de tes romans ? Dans les romans que j’ai créés avec Anne Leloup (éditions Esperluète),…

En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. Toujours dans cette dynamique d’ écrire ensemble , tu as rassemblé les récits de différentes personnes sur leurs maisons d’enfance 1 . En faisant ça, est-ce que cela t’a permis de savoir ce que serait ta maison idéale maintenant ? J’ai passé mon enfance à parler de ma maison idéale avec mon père. C’était un des grands thèmes entre nous. Il avait dessiné une maison-bibliothèque où tout était articulé autour d’une cage d’escaliers-bibliothèque. Et on se demandait : « Où mettrait-on tel livre ? » Mon problème plus concret est que je n’ai pas appris à changer une prise. Pourquoi je ne peux pas changer un robinet alors que je peux dessiner des concepts de maison ? Par contre, ce qui était particulier dans Maisons d’enfance , c’est qu’il était mené dans le Brabant wallon, d’où je viens. Ça me ramenait donc à un endroit où j’avais vécu et que j’avais quitté assez fâchée. Ça m’a raccrochée. C’était un projet coordonné par le Centre Culturel du Brabant wallon, avec l’IAD-Théâtre, et j’étais engagée pour récolter ces témoignages et en faire une pièce de théâtre. J’ai été rencontrer des gens, ils racontaient, on riait, on pleurait et je ne pensais pas beaucoup à la pièce de théâtre. J’étais dans la rencontre, j’enregistrais tout – comme toi – et puis, je suis rentrée, j’ai transcrit et, comme d’habitude, c’est magnifique, il n’y a rien à ajouter, peut-être juste à enlever pour mettre en lumière des choses. Il y avait une dizaine de témoignages et j’avais droit à quelques minutes par personne dans le texte. J'étais dans la matière – des portraits, des listes à la Perec et un carnet de bord –, plongée dans ce travail de peaufiner le portrait. Je rencontre le directeur de l’IAD à l’époque qui me dit : « Alors, comment ça marche, tu vas nous écrire une belle pièce ? » Je réponds : « Non, je ne crois pas... En fait, c’est tellement beau en soi, je n’ai vraiment pas envie d'ajouter une fiction à ces histoires-là, je crois que ça va être des monologues. » Il me dit : « Comment, il n’y aura pas de dialogues ? » « Des dialogues pourront s’inventer dans les trous, dans les espaces, mais je crois que je vais me limiter à la parole des gens qui est trop belle, je n’ai jamais rien entendu de pareil sur l'expérience d'habiter et d'être enfant donc ça va être ça. » Ça a été la crise avec les acteurs. Ils étaient inquiets de ne rien avoir à jouer. Je déclarais : « Non tu n’as rien à jouer, tu as juste à transmettre des choses, c’est magnifique, tu laisses passer ça dans ton corps, comme j’ai laissé passer ça dans mes doigts et tu respires aux endroits où ils respirent et tu vas sentir plein de choses. » Clash avec la professeure qui dit : « Si on fait ça, alors c’est quoi le théâtre ? » J’ai dit que, ça, ce n’était pas mon problème. Personnellement, le théâtre où les gens me montrent qu’ils font du théâtre, ça ne m’intéresse pas trop. C’est une belle question de se demander pourquoi on est touchés par ça et pas par des histoires rocambolesques et surjouées. C’était tous des gens adorables mais c’était la crise. Il y avait un étudiant qui était tellement fâché qu'il a dit qu’il ne travaillerait pas et qu’il s’en fichait. C’était un monologue d’un adulte qui se souvenait que son attachement, enfant, était avec un chien. Le comédien s’est alors assis sur une chaise, son chien à ses pieds et il a lu le livre, chargé par ce défi, qui rejoignait d'une certaine manière l'émotion de la personne qui avait parlé. C'était magnifique. Mon erreur, à l'époque, c'est de n'avoir pas pris le risque d'inviter les étudiants et leur professeure au dialogue, de n'avoir pas partagé avec eux en quoi je trouvais ces paroles théâtrales, il y avait beaucoup de place entre les mots pour la création. Quand Giuseppe Lonobile a monté Linden, c’est à cet endroit-là qu’il s’est placé : il a invité les actrices à se laisser traverser par le texte, ponctuation, rythme, résonances comprises. Je trouve que c'est très théâtral, se mettre à l’endroit de la parole de quelqu’un d’autre, dans le respect de cette dernière. Les actrices sont merveilleuses, elles se coulent dans la parole, c’est une transmission en chaîne. Et c’est là que ça devient intéressant, on rencontre des fantômes, on rencontre des autres. D’ailleurs, tu donnes une définition en creux du théâtre dans Sauvage , quand tu dis aimer les trébuchements, les indécences, les faux-pas, les silences, les ratés et qu’au milieu de ce foutoir, quelque chose émerge. J’adore cette définition, quand c’est tout lisse, il y a quelque chose d’angoissant. Tu en parlais pour dire que parfois le théâtre fait plus vrai que la réalité. Pour le moment, je fais une expérience super intéressante, je travaille avec Françoise Berlanger qui met en scène un texte, Maman de l’autre côté , où j’ai vraiment exagéré : de longs récits se télescopent avec de toutes petites phrases. Le texte est troué, plein de non-dits. Elle, elle transpose tout dans l’espace. Elle prend des risques, compose avec les mots, le son et toutes les dimensions. Ce que tu disais du volume , elle le recrée dans l’espace avec la musique. Ce que je pensais être du silence entre les phrases est en train de se remplir de regards, d'actions, de distances, de sons, de vie. Ce que j'imaginais suspendu entre les mots s'incarne entre les corps dans l’espace. C’est quand, ce prochain texte ? C’est du 17 au 28 janvier au Théâtre de la Vie . Est-ce que le théâtre te permet plus de liberté que le roman par rapport au métissage du langage, comme dans Linden, avec les segments de phrase en flamand ? Dans Linden, c’est tout bêtement parce qu’il y a un personnage flamand. Dans la prochaine pièce, il y a un personnage qui vit aux États-Unis. Il y avait du texte anglais, on l’a traduit parce qu’une des comédiennes ne parle pas cette langue et, dans la salle, il y aura des gens qui ne la parleront pas non plus. Quand on est dans la salle et qu’on ne comprend pas, on se sent exclu. Le temps qu'on pense qu’on ne comprend pas une chose qu’on est censé comprendre, on ferme tout et on rate une marche... C’était dommage, j’ai changé. Parfois, je me dis que tel écrit est du roman, que c’est pour quelqu’un qui a le temps de réfléchir, relire, regarder dans un dictionnaire ce que ça veut dire. Au théâtre, c’est immédiat. Par rapport au flamand, c’est différent : si quelqu’un dans la salle ne parle pas flamand, tant pis pour lui, on est en Belgique. Après tout, je suis aussi flamande. Avec l’anglais, je n’ai pas envie d’être dans ce rapport. Tes romans sont très différents. J’ai un peu feuilleté Rue du Chêne qui évoquait les romans du XVIIIe avec des noms de chapitres suivis de périphrases synthétiques avec ce qu’il va s’y passer alors que Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage se rangent plus du côté de la poésie, où les idées viennent par vagues. Comment réfléchis-tu à la forme de tes romans ? Dans les romans que j’ai créés avec Anne Leloup (éditions Esperluète),…

En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. Toujours dans cette dynamique d’ écrire ensemble , tu as rassemblé les récits de différentes personnes sur leurs maisons d’enfance 1 . En faisant ça, est-ce que cela t’a permis de savoir ce que serait ta maison idéale maintenant ? J’ai passé mon enfance à parler de ma maison idéale avec mon père. C’était un des grands thèmes entre nous. Il avait dessiné une maison-bibliothèque où tout était articulé autour d’une cage d’escaliers-bibliothèque. Et on se demandait : « Où mettrait-on tel livre ? » Mon problème plus concret est que je n’ai pas appris à changer une prise. Pourquoi je ne peux pas changer un robinet alors que je peux dessiner des concepts de maison ? Par contre, ce qui était particulier dans Maisons d’enfance , c’est qu’il était mené dans le Brabant wallon, d’où je viens. Ça me ramenait donc à un endroit où j’avais vécu et que j’avais quitté assez fâchée. Ça m’a raccrochée. C’était un projet coordonné par le Centre Culturel du Brabant wallon, avec l’IAD-Théâtre, et j’étais engagée pour récolter ces témoignages et en faire une pièce de théâtre. J’ai été rencontrer des gens, ils racontaient, on riait, on pleurait et je ne pensais pas beaucoup à la pièce de théâtre. J’étais dans la rencontre, j’enregistrais tout – comme toi – et puis, je suis rentrée, j’ai transcrit et, comme d’habitude, c’est magnifique, il n’y a rien à ajouter, peut-être juste à enlever pour mettre en lumière des choses. Il y avait une dizaine de témoignages et j’avais droit à quelques minutes par personne dans le texte. J'étais dans la matière – des portraits, des listes à la Perec et un carnet de bord –, plongée dans ce travail de peaufiner le portrait. Je rencontre le directeur de l’IAD à l’époque qui me dit : « Alors, comment ça marche, tu vas nous écrire une belle pièce ? » Je réponds : « Non, je ne crois pas... En fait, c’est tellement beau en soi, je n’ai vraiment pas envie d'ajouter une fiction à ces histoires-là, je crois que ça va être des monologues. » Il me dit : « Comment, il n’y aura pas de dialogues ? » « Des dialogues pourront s’inventer dans les trous, dans les espaces, mais je crois que je vais me limiter à la parole des gens qui est trop belle, je n’ai jamais rien entendu de pareil sur l'expérience d'habiter et d'être enfant donc ça va être ça. » Ça a été la crise avec les acteurs. Ils étaient inquiets de ne rien avoir à jouer. Je déclarais : « Non tu n’as rien à jouer, tu as juste à transmettre des choses, c’est magnifique, tu laisses passer ça dans ton corps, comme j’ai laissé passer ça dans mes doigts et tu respires aux endroits où ils respirent et tu vas sentir plein de choses. » Clash avec la professeure qui dit : « Si on fait ça, alors c’est quoi le théâtre ? » J’ai dit que, ça, ce n’était pas mon problème. Personnellement, le théâtre où les gens me montrent qu’ils font du théâtre, ça ne m’intéresse pas trop. C’est une belle question de se demander pourquoi on est touchés par ça et pas par des histoires rocambolesques et surjouées. C’était tous des gens adorables mais c’était la crise. Il y avait un étudiant qui était tellement fâché qu'il a dit qu’il ne travaillerait pas et qu’il s’en fichait. C’était un monologue d’un adulte qui se souvenait que son attachement, enfant, était avec un chien. Le comédien s’est alors assis sur une chaise, son chien à ses pieds et il a lu le livre, chargé par ce défi, qui rejoignait d'une certaine manière l'émotion de la personne qui avait parlé. C'était magnifique. Mon erreur, à l'époque, c'est de n'avoir pas pris le risque d'inviter les étudiants et leur professeure au dialogue, de n'avoir pas partagé avec eux en quoi je trouvais ces paroles théâtrales, il y avait beaucoup de place entre les mots pour la création. Quand Giuseppe Lonobile a monté Linden, c’est à cet endroit-là qu’il s’est placé : il a invité les actrices à se laisser traverser par le texte, ponctuation, rythme, résonances comprises. Je trouve que c'est très théâtral, se mettre à l’endroit de la parole de quelqu’un d’autre, dans le respect de cette dernière. Les actrices sont merveilleuses, elles se coulent dans la parole, c’est une transmission en chaîne. Et c’est là que ça devient intéressant, on rencontre des fantômes, on rencontre des autres. D’ailleurs, tu donnes une définition en creux du théâtre dans Sauvage , quand tu dis aimer les trébuchements, les indécences, les faux-pas, les silences, les ratés et qu’au milieu de ce foutoir, quelque chose émerge. J’adore cette définition, quand c’est tout lisse, il y a quelque chose d’angoissant. Tu en parlais pour dire que parfois le théâtre fait plus vrai que la réalité. Pour le moment, je fais une expérience super intéressante, je travaille avec Françoise Berlanger qui met en scène un texte, Maman de l’autre côté , où j’ai vraiment exagéré : de longs récits se télescopent avec de toutes petites phrases. Le texte est troué, plein de non-dits. Elle, elle transpose tout dans l’espace. Elle prend des risques, compose avec les mots, le son et toutes les dimensions. Ce que tu disais du volume , elle le recrée dans l’espace avec la musique. Ce que je pensais être du silence entre les phrases est en train de se remplir de regards, d'actions, de distances, de sons, de vie. Ce que j'imaginais suspendu entre les mots s'incarne entre les corps dans l’espace. C’est quand, ce prochain texte ? C’est du 17 au 28 janvier au Théâtre de la Vie . Est-ce que le théâtre te permet plus de liberté que le roman par rapport au métissage du langage, comme dans Linden, avec les segments de phrase en flamand ? Dans Linden, c’est tout bêtement parce qu’il y a un personnage flamand. Dans la prochaine pièce, il y a un personnage qui vit aux États-Unis. Il y avait du texte anglais, on l’a traduit parce qu’une des comédiennes ne parle pas cette langue et, dans la salle, il y aura des gens qui ne la parleront pas non plus. Quand on est dans la salle et qu’on ne comprend pas, on se sent exclu. Le temps qu'on pense qu’on ne comprend pas une chose qu’on est censé comprendre, on ferme tout et on rate une marche... C’était dommage, j’ai changé. Parfois, je me dis que tel écrit est du roman, que c’est pour quelqu’un qui a le temps de réfléchir, relire, regarder dans un dictionnaire ce que ça veut dire. Au théâtre, c’est immédiat. Par rapport au flamand, c’est différent : si quelqu’un dans la salle ne parle pas flamand, tant pis pour lui, on est en Belgique. Après tout, je suis aussi flamande. Avec l’anglais, je n’ai pas envie d’être dans ce rapport. Tes romans sont très différents. J’ai un peu feuilleté Rue du Chêne qui évoquait les romans du XVIIIe avec des noms de chapitres suivis de périphrases synthétiques avec ce qu’il va s’y passer alors que Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage se rangent plus du côté de la poésie, où les idées viennent par vagues. Comment réfléchis-tu à la forme de tes romans ? Dans les romans que j’ai créés avec Anne Leloup (éditions Esperluète),…

En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. Toujours dans cette dynamique d’ écrire ensemble , tu as rassemblé les récits de différentes personnes sur leurs maisons d’enfance 1 . En faisant ça, est-ce que cela t’a permis de savoir ce que serait ta maison idéale maintenant ? J’ai passé mon enfance à parler de ma maison idéale avec mon père. C’était un des grands thèmes entre nous. Il avait dessiné une maison-bibliothèque où tout était articulé autour d’une cage d’escaliers-bibliothèque. Et on se demandait : « Où mettrait-on tel livre ? » Mon problème plus concret est que je n’ai pas appris à changer une prise. Pourquoi je ne peux pas changer un robinet alors que je peux dessiner des concepts de maison ? Par contre, ce qui était particulier dans Maisons d’enfance , c’est qu’il était mené dans le Brabant wallon, d’où je viens. Ça me ramenait donc à un endroit où j’avais vécu et que j’avais quitté assez fâchée. Ça m’a raccrochée. C’était un projet coordonné par le Centre Culturel du Brabant wallon, avec l’IAD-Théâtre, et j’étais engagée pour récolter ces témoignages et en faire une pièce de théâtre. J’ai été rencontrer des gens, ils racontaient, on riait, on pleurait et je ne pensais pas beaucoup à la pièce de théâtre. J’étais dans la rencontre, j’enregistrais tout – comme toi – et puis, je suis rentrée, j’ai transcrit et, comme d’habitude, c’est magnifique, il n’y a rien à ajouter, peut-être juste à enlever pour mettre en lumière des choses. Il y avait une dizaine de témoignages et j’avais droit à quelques minutes par personne dans le texte. J'étais dans la matière – des portraits, des listes à la Perec et un carnet de bord –, plongée dans ce travail de peaufiner le portrait. Je rencontre le directeur de l’IAD à l’époque qui me dit : « Alors, comment ça marche, tu vas nous écrire une belle pièce ? » Je réponds : « Non, je ne crois pas... En fait, c’est tellement beau en soi, je n’ai vraiment pas envie d'ajouter une fiction à ces histoires-là, je crois que ça va être des monologues. » Il me dit : « Comment, il n’y aura pas de dialogues ? » « Des dialogues pourront s’inventer dans les trous, dans les espaces, mais je crois que je vais me limiter à la parole des gens qui est trop belle, je n’ai jamais rien entendu de pareil sur l'expérience d'habiter et d'être enfant donc ça va être ça. » Ça a été la crise avec les acteurs. Ils étaient inquiets de ne rien avoir à jouer. Je déclarais : « Non tu n’as rien à jouer, tu as juste à transmettre des choses, c’est magnifique, tu laisses passer ça dans ton corps, comme j’ai laissé passer ça dans mes doigts et tu respires aux endroits où ils respirent et tu vas sentir plein de choses. » Clash avec la professeure qui dit : « Si on fait ça, alors c’est quoi le théâtre ? » J’ai dit que, ça, ce n’était pas mon problème. Personnellement, le théâtre où les gens me montrent qu’ils font du théâtre, ça ne m’intéresse pas trop. C’est une belle question de se demander pourquoi on est touchés par ça et pas par des histoires rocambolesques et surjouées. C’était tous des gens adorables mais c’était la crise. Il y avait un étudiant qui était tellement fâché qu'il a dit qu’il ne travaillerait pas et qu’il s’en fichait. C’était un monologue d’un adulte qui se souvenait que son attachement, enfant, était avec un chien. Le comédien s’est alors assis sur une chaise, son chien à ses pieds et il a lu le livre, chargé par ce défi, qui rejoignait d'une certaine manière l'émotion de la personne qui avait parlé. C'était magnifique. Mon erreur, à l'époque, c'est de n'avoir pas pris le risque d'inviter les étudiants et leur professeure au dialogue, de n'avoir pas partagé avec eux en quoi je trouvais ces paroles théâtrales, il y avait beaucoup de place entre les mots pour la création. Quand Giuseppe Lonobile a monté Linden, c’est à cet endroit-là qu’il s’est placé : il a invité les actrices à se laisser traverser par le texte, ponctuation, rythme, résonances comprises. Je trouve que c'est très théâtral, se mettre à l’endroit de la parole de quelqu’un d’autre, dans le respect de cette dernière. Les actrices sont merveilleuses, elles se coulent dans la parole, c’est une transmission en chaîne. Et c’est là que ça devient intéressant, on rencontre des fantômes, on rencontre des autres. D’ailleurs, tu donnes une définition en creux du théâtre dans Sauvage , quand tu dis aimer les trébuchements, les indécences, les faux-pas, les silences, les ratés et qu’au milieu de ce foutoir, quelque chose émerge. J’adore cette définition, quand c’est tout lisse, il y a quelque chose d’angoissant. Tu en parlais pour dire que parfois le théâtre fait plus vrai que la réalité. Pour le moment, je fais une expérience super intéressante, je travaille avec Françoise Berlanger qui met en scène un texte, Maman de l’autre côté , où j’ai vraiment exagéré : de longs récits se télescopent avec de toutes petites phrases. Le texte est troué, plein de non-dits. Elle, elle transpose tout dans l’espace. Elle prend des risques, compose avec les mots, le son et toutes les dimensions. Ce que tu disais du volume , elle le recrée dans l’espace avec la musique. Ce que je pensais être du silence entre les phrases est en train de se remplir de regards, d'actions, de distances, de sons, de vie. Ce que j'imaginais suspendu entre les mots s'incarne entre les corps dans l’espace. C’est quand, ce prochain texte ? C’est du 17 au 28 janvier au Théâtre de la Vie . Est-ce que le théâtre te permet plus de liberté que le roman par rapport au métissage du langage, comme dans Linden, avec les segments de phrase en flamand ? Dans Linden, c’est tout bêtement parce qu’il y a un personnage flamand. Dans la prochaine pièce, il y a un personnage qui vit aux États-Unis. Il y avait du texte anglais, on l’a traduit parce qu’une des comédiennes ne parle pas cette langue et, dans la salle, il y aura des gens qui ne la parleront pas non plus. Quand on est dans la salle et qu’on ne comprend pas, on se sent exclu. Le temps qu'on pense qu’on ne comprend pas une chose qu’on est censé comprendre, on ferme tout et on rate une marche... C’était dommage, j’ai changé. Parfois, je me dis que tel écrit est du roman, que c’est pour quelqu’un qui a le temps de réfléchir, relire, regarder dans un dictionnaire ce que ça veut dire. Au théâtre, c’est immédiat. Par rapport au flamand, c’est différent : si quelqu’un dans la salle ne parle pas flamand, tant pis pour lui, on est en Belgique. Après tout, je suis aussi flamande. Avec l’anglais, je n’ai pas envie d’être dans ce rapport. Tes romans sont très différents. J’ai un peu feuilleté Rue du Chêne qui évoquait les romans du XVIIIe avec des noms de chapitres suivis de périphrases synthétiques avec ce qu’il va s’y passer alors que Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage se rangent plus du côté de la poésie, où les idées viennent par vagues. Comment réfléchis-tu à la forme de tes romans ? Dans les romans que j’ai créés avec Anne Leloup (éditions Esperluète),…

En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. Toujours dans cette dynamique d’ écrire ensemble , tu as rassemblé les récits de différentes personnes sur leurs maisons d’enfance 1 . En faisant ça, est-ce que cela t’a permis de savoir ce que serait ta maison idéale maintenant ? J’ai passé mon enfance à parler de ma maison idéale avec mon père. C’était un des grands thèmes entre nous. Il avait dessiné une maison-bibliothèque où tout était articulé autour d’une cage d’escaliers-bibliothèque. Et on se demandait : « Où mettrait-on tel livre ? » Mon problème plus concret est que je n’ai pas appris à changer une prise. Pourquoi je ne peux pas changer un robinet alors que je peux dessiner des concepts de maison ? Par contre, ce qui était particulier dans Maisons d’enfance , c’est qu’il était mené dans le Brabant wallon, d’où je viens. Ça me ramenait donc à un endroit où j’avais vécu et que j’avais quitté assez fâchée. Ça m’a raccrochée. C’était un projet coordonné par le Centre Culturel du Brabant wallon, avec l’IAD-Théâtre, et j’étais engagée pour récolter ces témoignages et en faire une pièce de théâtre. J’ai été rencontrer des gens, ils racontaient, on riait, on pleurait et je ne pensais pas beaucoup à la pièce de théâtre. J’étais dans la rencontre, j’enregistrais tout – comme toi – et puis, je suis rentrée, j’ai transcrit et, comme d’habitude, c’est magnifique, il n’y a rien à ajouter, peut-être juste à enlever pour mettre en lumière des choses. Il y avait une dizaine de témoignages et j’avais droit à quelques minutes par personne dans le texte. J'étais dans la matière – des portraits, des listes à la Perec et un carnet de bord –, plongée dans ce travail de peaufiner le portrait. Je rencontre le directeur de l’IAD à l’époque qui me dit : « Alors, comment ça marche, tu vas nous écrire une belle pièce ? » Je réponds : « Non, je ne crois pas... En fait, c’est tellement beau en soi, je n’ai vraiment pas envie d'ajouter une fiction à ces histoires-là, je crois que ça va être des monologues. » Il me dit : « Comment, il n’y aura pas de dialogues ? » « Des dialogues pourront s’inventer dans les trous, dans les espaces, mais je crois que je vais me limiter à la parole des gens qui est trop belle, je n’ai jamais rien entendu de pareil sur l'expérience d'habiter et d'être enfant donc ça va être ça. » Ça a été la crise avec les acteurs. Ils étaient inquiets de ne rien avoir à jouer. Je déclarais : « Non tu n’as rien à jouer, tu as juste à transmettre des choses, c’est magnifique, tu laisses passer ça dans ton corps, comme j’ai laissé passer ça dans mes doigts et tu respires aux endroits où ils respirent et tu vas sentir plein de choses. » Clash avec la professeure qui dit : « Si on fait ça, alors c’est quoi le théâtre ? » J’ai dit que, ça, ce n’était pas mon problème. Personnellement, le théâtre où les gens me montrent qu’ils font du théâtre, ça ne m’intéresse pas trop. C’est une belle question de se demander pourquoi on est touchés par ça et pas par des histoires rocambolesques et surjouées. C’était tous des gens adorables mais c’était la crise. Il y avait un étudiant qui était tellement fâché qu'il a dit qu’il ne travaillerait pas et qu’il s’en fichait. C’était un monologue d’un adulte qui se souvenait que son attachement, enfant, était avec un chien. Le comédien s’est alors assis sur une chaise, son chien à ses pieds et il a lu le livre, chargé par ce défi, qui rejoignait d'une certaine manière l'émotion de la personne qui avait parlé. C'était magnifique. Mon erreur, à l'époque, c'est de n'avoir pas pris le risque d'inviter les étudiants et leur professeure au dialogue, de n'avoir pas partagé avec eux en quoi je trouvais ces paroles théâtrales, il y avait beaucoup de place entre les mots pour la création. Quand Giuseppe Lonobile a monté Linden, c’est à cet endroit-là qu’il s’est placé : il a invité les actrices à se laisser traverser par le texte, ponctuation, rythme, résonances comprises. Je trouve que c'est très théâtral, se mettre à l’endroit de la parole de quelqu’un d’autre, dans le respect de cette dernière. Les actrices sont merveilleuses, elles se coulent dans la parole, c’est une transmission en chaîne. Et c’est là que ça devient intéressant, on rencontre des fantômes, on rencontre des autres. D’ailleurs, tu donnes une définition en creux du théâtre dans Sauvage , quand tu dis aimer les trébuchements, les indécences, les faux-pas, les silences, les ratés et qu’au milieu de ce foutoir, quelque chose émerge. J’adore cette définition, quand c’est tout lisse, il y a quelque chose d’angoissant. Tu en parlais pour dire que parfois le théâtre fait plus vrai que la réalité. Pour le moment, je fais une expérience super intéressante, je travaille avec Françoise Berlanger qui met en scène un texte, Maman de l’autre côté , où j’ai vraiment exagéré : de longs récits se télescopent avec de toutes petites phrases. Le texte est troué, plein de non-dits. Elle, elle transpose tout dans l’espace. Elle prend des risques, compose avec les mots, le son et toutes les dimensions. Ce que tu disais du volume , elle le recrée dans l’espace avec la musique. Ce que je pensais être du silence entre les phrases est en train de se remplir de regards, d'actions, de distances, de sons, de vie. Ce que j'imaginais suspendu entre les mots s'incarne entre les corps dans l’espace. C’est quand, ce prochain texte ? C’est du 17 au 28 janvier au Théâtre de la Vie . Est-ce que le théâtre te permet plus de liberté que le roman par rapport au métissage du langage, comme dans Linden, avec les segments de phrase en flamand ? Dans Linden, c’est tout bêtement parce qu’il y a un personnage flamand. Dans la prochaine pièce, il y a un personnage qui vit aux États-Unis. Il y avait du texte anglais, on l’a traduit parce qu’une des comédiennes ne parle pas cette langue et, dans la salle, il y aura des gens qui ne la parleront pas non plus. Quand on est dans la salle et qu’on ne comprend pas, on se sent exclu. Le temps qu'on pense qu’on ne comprend pas une chose qu’on est censé comprendre, on ferme tout et on rate une marche... C’était dommage, j’ai changé. Parfois, je me dis que tel écrit est du roman, que c’est pour quelqu’un qui a le temps de réfléchir, relire, regarder dans un dictionnaire ce que ça veut dire. Au théâtre, c’est immédiat. Par rapport au flamand, c’est différent : si quelqu’un dans la salle ne parle pas flamand, tant pis pour lui, on est en Belgique. Après tout, je suis aussi flamande. Avec l’anglais, je n’ai pas envie d’être dans ce rapport. Tes romans sont très différents. J’ai un peu feuilleté Rue du Chêne qui évoquait les romans du XVIIIe avec des noms de chapitres suivis de périphrases synthétiques avec ce qu’il va s’y passer alors que Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage se rangent plus du côté de la poésie, où les idées viennent par vagues. Comment réfléchis-tu à la forme de tes romans ? Dans les romans que j’ai créés avec Anne Leloup (éditions Esperluète),…

En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. En une dernière pirouette, Veronika Mabardi défend la parole brute et le théâtre-foutoir, révèle la beauté du déploiement d’un texte troué sur scène, clame la liberté de forme de ses écrits, revendique la perméabilité de ses mots, réveille les odeurs des Cerfs, Peau de louve et Sauvage et épingle ce qu’il convient d’ôter de sa pensée. Toujours dans cette dynamique d’ écrire ensemble , tu as rassemblé les récits de différentes personnes sur leurs maisons d’enfance 1 . En faisant ça, est-ce que cela t’a permis de savoir ce que serait ta maison idéale maintenant ? J’ai passé mon enfance à parler de ma maison idéale avec mon père. C’était un des grands thèmes entre nous. Il avait dessiné une maison-bibliothèque où tout était articulé autour d’une cage d’escaliers-bibliothèque. Et on se demandait : « Où mettrait-on tel livre ? » Mon problème plus concret est que je n’ai pas appris à changer une prise. Pourquoi je ne peux pas changer un robinet alors que je peux dessiner des concepts de maison ? Par contre, ce qui était particulier dans Maisons d’enfance , c’est qu’il était mené dans le Brabant wallon, d’où je viens. Ça me ramenait donc à un endroit où j’avais vécu et que j’avais quitté assez fâchée. Ça m’a raccrochée. C’était un projet coordonné par le Centre Culturel du Brabant wallon, avec l’IAD-Théâtre, et j’étais engagée pour récolter ces témoignages et en faire une pièce de théâtre. J’ai été rencontrer des gens, ils racontaient, on riait, on pleurait et je ne pensais pas beaucoup à la pièce de théâtre. J’étais dans la rencontre, j’enregistrais tout – comme toi – et puis, je suis rentrée, j’ai transcrit et, comme d’habitude, c’est magnifique, il n’y a rien à ajouter, peut-être juste à enlever pour mettre en lumière des choses. Il y avait une dizaine de témoignages et j’avais droit à quelques minutes par personne dans le texte. J'étais dans la matière – des portraits, des listes à la Perec et un carnet de bord –, plongée dans ce travail de peaufiner le portrait. Je rencontre le directeur de l’IAD à l’époque qui me dit : « Alors, comment ça marche, tu vas nous écrire une belle pièce ? » Je réponds : « Non, je ne crois pas... En fait, c’est tellement beau en soi, je n’ai vraiment pas envie d'ajouter une fiction à ces histoires-là, je crois que ça va être des monologues. » Il me dit : « Comment, il n’y aura pas de dialogues ? » « Des dialogues pourront s’inventer dans les trous, dans les espaces, mais je crois que je vais me limiter à la parole des gens qui est trop belle, je n’ai jamais rien entendu de pareil sur l'expérience d'habiter et d'être enfant donc ça va être ça. » Ça a été la crise avec les acteurs. Ils étaient inquiets de ne rien avoir à jouer. Je déclarais : « Non tu n’as rien à jouer, tu as juste à transmettre des choses, c’est magnifique, tu laisses passer ça dans ton corps, comme j’ai laissé passer ça dans mes doigts et tu respires aux endroits où ils respirent et tu vas sentir plein de choses. » Clash avec la professeure qui dit : « Si on fait ça, alors c’est quoi le théâtre ? » J’ai dit que, ça, ce n’était pas mon problème. Personnellement, le théâtre où les gens me montrent qu’ils font du théâtre, ça ne m’intéresse pas trop. C’est une belle question de se demander pourquoi on est touchés par ça et pas par des histoires rocambolesques et surjouées. C’était tous des gens adorables mais c’était la crise. Il y avait un étudiant qui était tellement fâché qu'il a dit qu’il ne travaillerait pas et qu’il s’en fichait. C’était un monologue d’un adulte qui se souvenait que son attachement, enfant, était avec un chien. Le comédien s’est alors assis sur une chaise, son chien à ses pieds et il a lu le livre, chargé par ce défi, qui rejoignait d'une certaine manière l'émotion de la personne qui avait parlé. C'était magnifique. Mon erreur, à l'époque, c'est de n'avoir pas pris le risque d'inviter les étudiants et leur professeure au dialogue, de n'avoir pas partagé avec eux en quoi je trouvais ces paroles théâtrales, il y avait beaucoup de place entre les mots pour la création. Quand Giuseppe Lonobile a monté Linden, c’est à cet endroit-là qu’il s’est placé : il a invité les actrices à se laisser traverser par le texte, ponctuation, rythme, résonances comprises. Je trouve que c'est très théâtral, se mettre à l’endroit de la parole de quelqu’un d’autre, dans le respect de cette dernière. Les actrices sont merveilleuses, elles se coulent dans la parole, c’est une transmission en chaîne. Et c’est là que ça devient intéressant, on rencontre des fantômes, on rencontre des autres. D’ailleurs, tu donnes une définition en creux du théâtre dans Sauvage , quand tu dis aimer les trébuchements, les indécences, les faux-pas, les silences, les ratés et qu’au milieu de ce foutoir, quelque chose émerge. J’adore cette définition, quand c’est tout lisse, il y a quelque chose d’angoissant. Tu en parlais pour dire que parfois le théâtre fait plus vrai que la réalité. Pour le moment, je fais une expérience super intéressante, je travaille avec Françoise Berlanger qui met en scène un texte, Maman de l’autre côté , où j’ai vraiment exagéré : de longs récits se télescopent avec de toutes petites phrases. Le texte est troué, plein de non-dits. Elle, elle transpose tout dans l’espace. Elle prend des risques, compose avec les mots, le son et toutes les dimensions. Ce que tu disais du volume , elle le recrée dans l’espace avec la musique. Ce que je pensais être du silence entre les phrases est en train de se remplir de regards, d'actions, de distances, de sons, de vie. Ce que j'imaginais suspendu entre les mots s'incarne entre les corps dans l’espace. C’est quand, ce prochain texte ? C’est du 17 au 28 janvier au Théâtre de la Vie . Est-ce que le théâtre te permet plus de liberté que le roman par rapport au métissage du langage, comme dans Linden, avec les segments de phrase en flamand ? Dans Linden, c’est tout bêtement parce qu’il y a un personnage flamand. Dans la prochaine pièce, il y a un personnage qui vit aux États-Unis. Il y avait du texte anglais, on l’a traduit parce qu’une des comédiennes ne parle pas cette langue et, dans la salle, il y aura des gens qui ne la parleront pas non plus. Quand on est dans la salle et qu’on ne comprend pas, on se sent exclu. Le temps qu'on pense qu’on ne comprend pas une chose qu’on est censé comprendre, on ferme tout et on rate une marche... C’était dommage, j’ai changé. Parfois, je me dis que tel écrit est du roman, que c’est pour quelqu’un qui a le temps de réfléchir, relire, regarder dans un dictionnaire ce que ça veut dire. Au théâtre, c’est immédiat. Par rapport au flamand, c’est différent : si quelqu’un dans la salle ne parle pas flamand, tant pis pour lui, on est en Belgique. Après tout, je suis aussi flamande. Avec l’anglais, je n’ai pas envie d’être dans ce rapport. Tes romans sont très différents. J’ai un peu feuilleté Rue du Chêne qui évoquait les romans du XVIIIe avec des noms de chapitres suivis de périphrases synthétiques avec ce qu’il va s’y passer alors que Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage se rangent plus du côté de la poésie, où les idées viennent par vagues. Comment réfléchis-tu à la forme de tes romans ? Dans les romans que j’ai créés avec Anne Leloup (éditions Esperluète),…

Au gré des sillons creusés par Les Cerfs (2014), Peau de louve (2019) et Sauvage est celui qui se sauve (2022), ce deuxième pan d’entretien se diffracte en divers faisceaux : l’identité multiple, les fonctions de l’art, la légitimité et l’universalité des émotions, l’écriture de la perte et de l’adoption, la mémoire matérielle, les prises de paroles révoltées et construites ensemble. Au gré des sillons creusés par Les Cerfs (2014), Peau de louve (2019) et Sauvage est celui qui se sauve (2022), ce deuxième pan d’entretien se diffracte en divers faisceaux : l’identité multiple, les fonctions de l’art, la légitimité et l’universalité des émotions, l’écriture de la perte et de l’adoption, la mémoire matérielle, les prises de paroles révoltées et construites ensemble. Outre le détricotage du langage, la question de l’identité multiple traverse Les Cerfs, Peau de louve et Sauvage de long en large. J’ai adoré l’image du « visage-palimpseste » dans Sauvage , et aussi le fait que Blanche ( Les Cerfs ) est consciente qu’un personnage peut être triple, en l’occurrence, Ian, l’adulte avec lequel elle joue et s’aventure en forêt. Il y a le Ian qui va revenir, le Ian qui ne revient pas et le Ian guerrier qui veut gagner le jeu de dames. Il y en a plein, oui. Et ça c’est aussi quelque chose qu’on perd peut-être en voulant nommer les choses. Puis, Blanche qui plie son nom avant d’arriver en forêt. Il y avait un travail de déchargement des étiquettes. Je me demande si, en écrivant, tu le fais aussi pour toi, tu te rends compte des étiquettes qu’on fait porter sur toi ? Oui, j’ai aussi une pratique de psychanalyse. C’est très séparé en fait. D’un côté, je travaille tout ce que je pourrais dire à ma famille ou aux gens avec qui je suis en conflit ou à moi-même et de l’autre côté, quand je commence à écrire, je retrouve vraiment cet état d’enfance, de dire « aujourd’hui, on voyage là et là ». Après, je me retrouve généralement avec un grand chaos de petits bouts de « on voyage là, on voyage là » et le travail commence. Ça devient très pénible de mettre ça sur une ligne, c’est un apprentissage. Mon éditrice 1 est importante dans le processus, c’est une vraie rencontre. Le premier texte que je lui ai proposé était un texte en forme de plan : il y avait un plan de ville, toutes les rues étaient nommées et à chaque rue correspondait un texte. C’était comme un plan de Bruxelles, les rues communiquaient les unes avec les autres. Je m’étais beaucoup amusée et ça me permettait de rester dans l’étendue. Et puis Anne m’a dit : « C’est une belle idée mais c’est une installation donc soit tu fais une installation, soit, si tu veux faire un livre, tu conduis le lecteur d'un début à une fin. Certains lecteurs vont commencer par le début et d’autres vont commencer par le milieu, mais toi, à un moment, tu dois organiser le trajet et savoir ce que tu racontes. Ça ne veut pas dire développer une thèse, mais juste quel est le trajet que toi tu fais dans ton plan ». J’ai dit : « Il y en a mille ». Et elle a répondu : « Choisis-en un, fais un livre, et on en fera un deuxième après ». Elle m’a libérée de l'inquiétude de figer le chemin et j’ai pu commencer à jouer, à mettre une chose à côté d'une autre, à agencer. Ça a mis deux ans. C’est ça, se faufiler dans ce plan. Oui, elle m’a aidée à accepter de me mettre sur une ligne et de lutter avec la ligne plutôt que de la refuser. Surtout que vu que tu es comédienne, tu côtoies la multiplicité. Tu dis souvent dans les interviews que tu aimes bien changer d’identité. Pour créer un livre, ça doit être difficile de choisir une ligne. En fait, il n’y en a jamais, sauf dans Peau de louve où, clairement, il y a la conteuse. Dans les autres, le point de vue change tout le temps, ce qu’on m’a reproché. On m’a beaucoup dit « Parle normalement, exprime-toi clairement, une chose après l'autre, ne te lance pas avant d’avoir réfléchi, adopte un point de vue et tiens-toi à celui-ci ». Cela ne marche pas : j’ai décidé de ne pas parler normalement, de laisser parler puis de réfléchir dans le retravail et d’accepter de glisser d'un point de vue à l'autre. En faisant comme ça, je trouve ma place d’écriture. Toutes les choses qu’on m’a dites de ne pas faire, c’est précisément celles qu’il faut que je fasse le plus. Pour aborder un autre aspect de la question de l’identité, dans Les Cerfs et Sauvage , il y a cette absence de miroir, d’images. Pour Blanche, les miroirs sont trop hauts, c’est comme si elle n’existait pas. Pour ton frère ( Sauvage ) aussi et, alors il oublie son visage. Tu parles du fait qu’il y a peu de représentations des personnes asiatiques à la télévision en Belgique à cette époque-là, alors que lui est né en Corée. Je trouvais ça intéressant car on a besoin de ces espèces de béquilles pour se définir. L’art permet de le faire aussi. C’est intéressant ce rapport à l’art parce que je trouve qu’il y a quelque chose de dangereux. En réfléchissant à l’histoire de mon frère, je tombe sur cette chose qu'on entend souvent : « Si tu es tourmenté, exprime-toi dans l’art » mais, en fait, ça n’empêche pas d’être tourmenté et l’art est le seul bénéficiaire de cela. Cependant, la personne continue à souffrir. En écrivant ce livre, je me suis dit : « Bon, mettons qu’on puisse guérir les traumas, ne pas les nier et les soigner, quel type d’art on produirait ? » J’ai entendu une émission passionnante où l’on parlait de l’injonction à être créateur quand on était en souffrance. Ça me parle. Si l’art sert à s’exprimer, si les chants désespérés sont les chants les plus beaux, alors, soyons désespérés pour produire de beaux chants... Par contre, si on dit que les chants joyeux sont les chants les plus beaux, est-ce qu’on n’arriverait pas à un autre monde, avec d’autres artistes, d’autres révolutionnaires aussi ? Si on disait « La valeur, c’est la joie » et pas « La valeur, c’est la souffrance ». Tu parviens tout de même à dépasser cet art-réceptacle de la souffrance mais qui ne permet pas de s’en défaire. Dans Peau de louve, il y a en effet ce langage qu’on lave de tout ce qui a été dit avant. Ce travail-là mène tout de même à la guérison d’une certaine manière. Oui, mais surtout, on guérit par l’autre. Je relie encore ça au patriarcat. Si l'art est un idéal qui vaut la peine qu’on en crève, on est dans un rapport vertical, on remplace finalement dieu par l’art et dieu n’est pas mort. Mais que se passe-t-il si on se dit que l’art est au service des êtres humains ? L’art est quelque chose que l’on partage, qui appartient à tout le monde, qui évolue et qui se transforme. Ce n’est pas la sacro-sainte trace idéale pour les siècles des siècles. C’est ici, maintenant. Je dis ça mais je ne le vis pas encore physiquement. J’ai fait beaucoup de danse classique, c’est sur une pointe d'orteil vers le haut et pas un gramme de chair en trop. Je me dis : « Peut-on revenir ici maintenant, en horizontalité, avec les gens ? » mais, en même temps, je signe toujours mes textes et j’accepte toujours d’être dans des listes de prix avec des premiers et des derniers. Ça fait partie du jeu, de la mise en scène. Par rapport au patriarcat, cela me fait songer à tous ces regards qu’on vient placer sur le corps. Muriel ( Peau de louve ) se rend compte qu’elle va devoir cacher son corps car il est lacéré de regards qui pensent des choses sur elle, de regards qui vont la définir, tout comme il n’y pas vraiment de moment pour s’arrêter lorsque des adultes vont chuchoter et qualifier ton frère et ta sœur (d’origine coréenne) de geisha ou de samouraï ( Sauvage ). C’est très juste cette remarque quant au regard qui vient nous figer dans…

Entretien fleuve avec Veronika Mabardi (I) Une chose n'existe pas séparée de toutes les autres
Accoudé sur Les Cerfs (2014),…

Accoudé sur Les Cerfs (2014), Peau de louve (2019) et Sauvage est celui qui se sauve (2022), ce premier volet d’entretien se déploie autour de trois axes : le langage, les frontières et la déconstruction. Accoudé sur Les Cerfs (2014), Peau de louve (2019) et Sauvage est celui qui se sauve (2022), ce premier volet d’entretien se déploie autour de trois axes : le langage, les frontières et la déconstruction. Pour commencer, rappelons brièvement le fil que déroule Les Cerfs. Il s’accroche à Blanche, une petite fille qui a perdu sa mère et qui ne parle pas. Elle est recueillie par Annie, qui habite contre la forêt et qui pose des mots sur tout. Avec cette forêt et Ian, le compagnon d’Annie, Blanche entre en contact. Dans cet ouvrage ainsi que dans Peau de louve et Sauvage, il y a une représentation du langage assez similaire, c’est quelque chose qu’on évite et qui évite ce qui est à dire : « Blanche aime les choses qui poussent, les arbres, les animaux, tout ce qui vit et qui ne parle pas, comme elle. » (« Les Cerfs » , p.11) « Ce qui m’intéresse, depuis le début, c’est ce qui échappe au langage. Le vide entre les mots trace un chemin. » (« Sauvage » , p.94) Il est donc très pertinent que le dessin s’immisce dans ces trois ouvrages, comme si c’était une concrétisation du fait que quelque chose nous échappe. C’était très réconfortant pour le lecteur parce que c’est angoissant de se dire que ce qui nous relie normalement (le langage) nous échappe, et là il y avait quelque chose pour nous raccrocher. Comment fais-tu pour appréhender ce langage-là que tu dépeins dans toutes ses contradictions ? Ce n’est pas quelque chose que je fais en surplomb, je ne réfléchis pas du tout au statut du langage. J’aime énormément lire des gens qui réfléchissent sur ça. Au moment où j’écris, il n’y pas de langage chez moi. C’est vraiment plus un mouvement et puis, en me relisant, je perçois le sens de ce que j’écris, donc c’est en deux étapes. Je commence à pouvoir mettre des mots dessus après trois tentatives où je raconte la même chose. Mon gros problème, mon problème d’adulte, d’écriture, est le même que celui de Blanche dans Les Cerfs : dès qu’on dit une chose, forcément on ne dit pas toutes les autres. Une chose n’existe pas séparée de toutes les autres. C’est comme d’identifier quelqu’un en lui-même et de dire quelle est sa personnalité sans tenir compte de tous les miroirs que les autres lui renvoient et de ce qu’elle ou il est à l’intérieur des autres aussi, qui est aussi elle ou lui. Quand j’étais petite, je faisais beaucoup de danse et c’est bizarre que j’écrive car là on ne peut dire qu’une chose à la fois et on ne peut parler que dans une langue à la fois. Or j’ai été élevée bilingue et donc je sais que les choses peuvent se dire de deux manières et déjà signifier deux choses différentes. Dès le moment où je réfléchis à l’écriture, je ne sais plus écrire car je mens quoi que je dise et donc je me suis beaucoup battue avec ça, jusqu’au moment où je me suis donné le droit d’aller dans une petite fille qui, elle, n’a pas toutes ces censures et toutes ces injonctions à nommer. Nous sommes dans une époque où nommer est très important, j’en suis absolument consciente sauf que, pour ce que je veux nommer, les mots, ça ne va pas. Il y a une phrase qui, pour moi, est le centre des Cerfs, je m’en suis rendu compte en travaillant avec la traductrice polonaise : « Un jour, je ferai un chemin, une phrase assez belle, avec des trous, pour que tu puisses t’asseoir avec moi ». « Un jour, Blanche prendra les bruits. Elle fera une phrase. Elle fera une phrase avec le monde entier dedans, comme le chemin entre les hautes herbes, le jardin, la prairie, la forêt, le ciel, toute fine, pas droite du tout, qui n’arrête jamais, on ne pourra la retenir, elle changera tout le temps, on sera dedans, on avancera avec elle, en même temps, on oubliera où elle a commencé et ne saura pas où elle finit, on sera avec elle, à l’intérieur. Elle fera une phrase pour être en même temps jusqu’au ciel. Une phrase pour le renard. » L’idée est reprise dans Sauvage, je n’ai pas fait exprès. C’est la chose sur laquelle j’ai travaillé pendant dix ans. Le fait que cette petite fille dise ça, j’ai pu petit à petit me l’approprier comme adulte et me dire, non je ne suis pas niaise si je dis ça, puis je me suis retrouvé face à Wittgenstein 1 qui dirait que ça vient de lui-même, qu’on ne le comprendra pas, je n’ai pas de problème à ne pas tout comprendre. J’étais vraiment intéressée par son idée d’abord que le langage est un système de relations et que donc ce n’est pas le réel, ce n’est qu’un système. J’aimais énormément aussi le fait qu’il dise que ce dont on ne peut pas parler, on ne peut pas en parler. C’est une tautologie mais les tautologies sont parfois bien utiles, plutôt que les métaphores. Je trouve que les métaphores sont dangereuses et les tautologies peuvent mettre les doigts sur les choses. Dire que je ne peux pas en parler et que, donc, je n’en parle pas, ça ne veut pas dire que je ne peux pas parler du tout, je peux parler d’autre chose et je peux chanter, je peux danser. J’aimais bien l’idée d’écrire des mots qui donnent une place pour qu’on sente qu’il y a quelque chose qu’on ne peut pas dire mais qui est là. D’ailleurs, tu concrétises parfois ces sensations qu’on ne nomme pas mais qui sont là, comme le fait d’appréhender des choses par un autre sens. Il y a cette idée qu’on entend les mots par les yeux ( Les Cerfs ), qu’on boit un visage ( Sauvage ) ou quand Blanche entend le brame du cerf, elle se met les mains sur la bouche ( Les Cerfs ). C’est drôle, ce langage qui s’exprime par d’autres sens, cela m’a beaucoup touchée, tout comme le fait que ce soit une petite fille. Je trouve que c’est intéressant de pouvoir retourner à cet état d’enfance où la métaphore n’existe pas, où tout est réel. Si je dis que je me sens brouillardeuse, ce n’est pas une métaphore, c’est vrai que mes cellules sont brouillardeuses. Si on commence à dire « je suis dans le brouillard » et à penser que c’est une métaphore, on se déporte, on n’est plus dans la réalité de la sensation. La petite fille donne plein de permissions. On ne s’autorise pas à penser certaines choses car ce ne serait pas adulte et intelligent. En plus, je n’ai pas du tout fait d’études universitaires : je suis avec ce bagage de diplôme d’humanité, faut pas que je la ramène, j’ai vécu avec ça très longtemps. La métaphore, c’est le pas de côté, la figure de style qui regarde le langage et là il n’y a pas du tout cette contemplation du langage. La langue dit des tas de choses en elle-même. À un moment, elle ne dit qu’elle-même. Comment fait-on pour épuiser le langage et pouvoir se taire après sans que le silence soit une chape de béton ? Blanche perçoit très vite qu’il y a des limites au langage. Quand quelqu’un lui parle, elle est directement perturbée par le fait qu’elle comprend d’autres choses que les mots. Il y a tout ce côté au-delà du langage, ce qu’on perd parfois en étant adulte en s’en tenant au sens stricto sensu. C’est le problème d’Annie ( Les Cerfs ). Elle est dans le langage. Elle a beau abandonner les livres, elle ne peut pas abandonner le langage, elle ne peut pas percevoir qu’il se passe mille choses. Comme elle a mis le mot « amour » sur sa relation avec Ian, elle ne voit plus la relation qu’elle a avec lui et toutes les possibilités de cette relation, car elle est dans une relation livresque, quelque chose de phrasé. Quand Blanche commence une autre relation avec Ian, ça doit être super troublant pour l’adulte. Que se passe-t-il entre les deux ? Et on se sent troublés aussi. Ce que je trouve incroyable, c’est que Blanche influe directement sur le langage d’Annie puisqu’avant elle dit qu’elle parlait droit et…

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