Marguerite Duras, Les socles d’une personnalité insoumise

L’œuvre de Marguerite Duras est chevillée aux moments forts de sa vie. Elle est le produit même de ses tourments, de ses angoisses, de ses réussites et de ses rares périodes apaisées… En recherche constante de l’impossible, de l’absolu, l’écrivain imagine des figures hantées par la séparation et l’oubli, dévastées par la douleur et le désespoir, folles de passion et dépassées par la violence du désir.

L’écriture elle-même peut être rupture de ban quand elle obéit à des remuements intérieurs et qu’elle est essentiellement dictée par la nécessité, voire l’extrême urgence… Mais ce déséquilibre-là lui est malléable et fécond… L’exigence qui l’habite lui inflige (à elle et aux autres), une dynamique de travail éprouvante, souvent articulée autour de ses amis, sa garde rapprochée…

Maîtresse d’un opus aux multiples facettes, elle a voulu être l’auteure, l’actrice, la réalisatrice, assurant tout à la fois l’idée porteuse,…

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À PROPOS DE L'AUTEUR
Michel Joiret

Auteur de Marguerite Duras, Les socles d’une personnalité insoumise

Né à Bruxelles, le 31 janvier 1942. Professeur de français dans l'enseignement secondaire. Depuis 1980, détaché pédagogique, chargé de mission du C.P.O.N.S. (Conseil de Pouvoirs Organisateurs de l'Enseignement Officiel Neutre Subventionné) pour la Réforme de l'Enseignement Professionnel, actuellement conseiller pédagogique à la Province de Hainaut. Organisateur de débats, foires du livre; conférencier. Animateur de la revue Le Non-Dit. Michel Joiret est aussi critique littéraire, et a collaboré à de nombreuses revues, dont Jalons, Le Thyrse, Marginales, Le Taureau. Il anime la revue Le Non-dit. Animateur littéraire et pédagogue, il donne encore des conférences en France, en Belgique et aux Pays-Bas. Au sein de sa génération, Michel Joiret occupe, c'est incontestable, une place à part, particulièrement dans le domaine poétique. Né en 1942, ce poète qui écrit et publie au reste très tôt manifeste, dès ses débuts certes, mais en son âge mûr surtout, un curieux esprit de réaction, voire d'opposition plus ou moins consciente aux dilections de presque tous ses compagnons de route. On se souvient que, de Jacques Izoard à Christian Hubin en passant par Gaspard Hons ou Werner Lambersy, tous les poètes belges du temps avaient pour ambition de tordre le cou à l'éloquence, d'économiser au maximum les moyens, de fuir l'incandescence et le drapé lyrique. Seules exceptions : Jacques Crickillon et Michel Joiret. Encore ce qui les rapproche ) la défiance sinon la fuite devant ce que j'appellerais, après tant d'autres, le minimalisme poétique d'une part, et l'utilisation volontaire de tous les registres du langage d'autre part ) est-il moins significatif que ce qui les sépare. Pour Crickillon, l'écriture, comme la vie, est un grand théâtre désert et crépusculaire. Un enchanteur désenchanté y arpente, avec un évident néo romantisme et le malaise existentiel du malaimé, des ruines où le marbre se mêle à l'ordure. La démarche de Joiret est plus directe et, Marcel Moreau ne s'y est pas trompé, plus directement humaine. Car l'œuvre entière de Michel Joiret nous raconte l'éternelle et poignante histoire d'un homme jeté par hasard dans la vie, sauvé de l'absurde par le recours au corps de l'être aimé, puis, l'âge venant, condamné, Sisyphe de l'érotisme, à combler par la chair et la frénésie vitale, le trou béant d'une mort qui, malgré la peur et les refus, lui va comme un gant. Tentons donc de voir comment et pourquoi ce jeune et sage poète presque académique s'est soudain, au cours des années septante, métamorphosé en un ironiste décapant, blessé vif aux tessons de la vie.


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Les langues en indonésie. Pas de néerlandisation, mais une anglicisation

[ Traduit du néerlandais par Marcel Harmignies.] Les indonésiens sont extrêmement susceptibles quand il s’agit de leur territoire, mais n’ont jamais éprouvé le besoin de se battre pour leur propre langue. néanmoins, le néerlandais n’a jamais réussi à s’imposer dans les anciennes indes néerlandaises.                                                                               *                                                                              *    * Une évolution de la langue indonésienne me chiffonne et me met mal à l’aise, il s’agit du mélange avec l’anglais. Au cours des quarante dernières années, de plus en plus de mots et d’expressions anglais ont été introduits, mais on éprouve moins le besoin de les transposer en indonésien. Les personnes que je qualifie d’anglicisées (keminggris en javanais) sont de plus en plus nombreuses. Comme si tous ces emprunts étaient généralement acceptés et compris par tout un chacun. Pourquoi les Indonésiens font-ils un tel méli-mélo de leur langue et sont-ils à ce point dépourvus de nationalisme linguistique? Pourtant, les Indonésiens ne sont-ils pas réputés pour le nationalisme qui les a délivrés du colonialisme néerlandais? Les réponses à ce genre de questions, on ne les obtient qu’en analysant plus de trois cents ans d’histoire coloniale. Colonisés par une entreprise Qui connaît l’histoire de l’Indonésie supposera peut-être que l’indonésien est plus proche du néerlandais que de l’anglais. Les Néerlandais ont quand même régné sur l’archipel trois siècles durant. Alors pourquoi les Indonésiens ne parlent-ils donc plus le néerlandais, tandis que dans le Timor oriental, petit pays voisin, le portugais est toujours utilisé ? Quand on appelait encore «malais» la langue indonésienne, elle cohabitait bien avec les langues locales et le néerlandais. J’ai été élevé par mes grands-parents à Malang, Est de Java, dans les années 60 et 70 du siècle dernier, et je baignais dans trois langues: le néerlandais, le javanais et l’indonésien. Mes grands-parents parlaient néerlandais entre eux car ils avaient fréquenté des écoles néerlandaises, et ils m’apprirent à le parler et à l’écrire. Mes premiers petits mots furent peut-être du néerlandais et non du javanais. Le javanais, je l’ai appris dans la rue, et il me fut ensuite enseigné à l’école, avec l’indonésien. J’ai appris cependant aussi à ne pas mélanger ces langues. Ma grand-mère soulignait que beaucoup de ceux qui parlaient javanais et indonésien ne comprenaient pas du tout le néerlandais. Plus tard, j’ai appris également à l’école l’anglais et l’allemand, mais les professeurs veillaient à nous éviter que nous mélangions les langues. Le faire était pécher par insuffisance linguistique. Je suis convaincu que ma maîtrise du néerlandais est une exception. Les gens de ma génération et de celle de mes professeurs ne le parlent guère. Seule la petite communauté des Indos, métis ayant choisi de rester en Indonésie après l’indépendance, l’utilise encore. Je parlais aussi néerlandais avec mes trois camarades de classe indos quand nous étions entre nous. Quand je suis parti en 1980 à l’université de Salatiga, Java central, j’ai pu continuer à le pratiquer avec les Indos et les enseignants néerlandais qui travaillaient là. Mais j’ai déjà remarqué alors que le nombre d’Indonésiens parlant encore le néerlandais diminuait rapidement, tandis que l’usage de l’anglais était précisément en plein essor. Lorsqu’en 1987 je me suis installé aux Pays-Bas pour travailler au département indonésien de Radio Pays-Bas internationale, je n’ai eu aucune peine à pratiquer le néerlandais. Il m’a suffi de deux semaines de cours chez les chanoinesses de Vught, dans le Brabant-Septentrional. Dans le cadre de mon travail, je n’avais pas à écrire en néerlandais. Je devais seulement être capable de traduire des dépêches du néerlandais en indonésien. Mon expression écrite en néerlandais s’en est trouvée négligée. Si je l’avais aussi appris à l’école, il en aurait sans doute été autrement. Aux Pays-Bas, je me suis consacré de plus en plus à l’histoire, surtout à ce que nous appelons l’époque néerlandaise (zaman Belanda). J’ai découvert que l’Indonésie est le seul pays où l’on ne parle plus la langue de l’ancien colonisateur. Dans les anciennes colonies britanniques de Malaisie et Singapour, on continue à parler l’anglais et beaucoup d’auteurs locaux écrivent dans cette langue. Aux Philippines aussi, qui furent cédées au XIXe siècle par les Espagnols aux Américains, de nombreux auteurs publient en anglais. Le Timor oriental, à la fin de l’occupation indonésienne, a choisi le portugais comme première langue nationale. De même, dans les anciennes colonies françaises du Maghreb, l’enseignement supérieur est toujours bilingue: arabe et français. L’auteur marocain Bensalem Himmich écrit ses romans en français et en arabe. En Indonésie, il n’est plus un seul auteur qui écrive en néerlandais. C’était déjà un peu ce qui se produisait durant l’époque néerlandaise. En néerlandais ne publièrent guère que Raden Adjeng Kartini (1879-1904), Noto Soeroto (1888-1951) et Soewarsih Djojopoespito (1912-1977). Leurs livres furent reconnus aux Pays-Bas aussi comme des œuvres littéraires, mais on peut les considérer comme des accidents de l’histoire. Je croyais initialement, conformément au fanatisme historique que j’avais apporté d’Indonésie, que le nationalisme indonésien avait évacué tout ce qui évoquait les Néerlandais. Le Soempah Pemoeda (Serment de la jeunesse), prêté en 1928 par les jeunes nationalistes, joua un rôle majeur en la circonstance. Il exhortait à: une terre, une nation et une langue. Mais peu à peu cette conviction disparut qui, à mon avis, est dépourvue de tout fondement historique. 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Les Européens parlaient bien le néerlandais dans la capitale Batavia, et le portugais se trouva relégué derrière le malais en position de seconde langue utilisée, mais l’usage du néerlandais ne fut pas encouragé. On invoquait comme prétexte le fait que les Indes néerlandaises possédaient déjà…