Blues pour trois tombes et un fantôme


RÉSUMÉ

On n’habite jamais une ville, seulement l’idée que l’on s’en fait. C’est l’imaginaire et la mythologie, le territoire mental de chacun, qui se surimposent à la ville réelle. Dans ce premier livre, Philippe Marczewski dérive dans le pays qui est le sien depuis son enfance. Ce pourrait être Sheffield, Amiens, Essen ou Gênes. Ce pourrait être n’importe quelle ville. C’est Liège, ses banlieues et sa campagne limitrophe.

Passant d’une antique chênaie arrachée à des terrils devenus collines boisées, d’une montagne en escalier d’où l’on aperçoit presque la mer à des usines spectrales se découpant sur l’horizon forestier, l’auteur écluse des bières dans la banlieue rouge, foule la tombe anonyme d’un guitariste de génie, bouscule le fantôme d’un Chet Baker émacié, et se laisse emporter par la mélancolie nocturne d’un fleuve encagé. Ici les grands hommes ne sont pas statues mais formes à peine visibles, corps tapis dans l’ombre, fumées évanescentes.

Avec ce récit qui rappelle Henri Calet, Jean-Paul Kauffmann (Remonter la Marne), Philippe Vasset ou le psychogéographe anglais Iain Sinclair, Philippe Marczewski dessine la géographie intime d’une ville et de ses habitants, passés et actuels.





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Il est des livres qui détendent et donnent envie d’allonger les jambes sur le divan, et d’autres qui vous obligent à d’incessants aller-retours vers votre bibliothèque et votre collection de disques, qui vous font vérifier telle photographie ou tel détail cartographique sur Internet, et puis qui immanquablement vous tirent de chez vous, ne vous apaisent qu’une fois sur la route. Blues pour trois tombes et un fantôme est de ces livres-là : il se met en branle quand on l’ouvre, et continue de vivre quand on le pose, nous chuchotant à l’oreille des injonctions de promenades et de découvertes, existant de plus en plus en nous au fur et à mesure que l’on explore les pistes qu’il nous propose.Philippe Marczewski nous embarque dans dix…


Karoo

Dans Blues pour trois tombes et un fantôme, on lit de Liège à la fois tout le mal et tout le bien que l’on en pense. C’est une réjouissante lecture cathartique autant qu’une plongée sensible dans les plis d’un paysage, que celui-ci soit ou pas familier au lecteur.


On pourrait platement dire, si l’on voulait prestement vendre ce livre à des amis, que Blues pour trois tombes et un fantôme est un livre sur Liège écrit par un Liégeois. Mais Blues... est d’abord un livre sur toutes les villes du monde, surtout celles qui n’existent qu’en esprit. C’est aussi un très beau livre écrit par quelqu’un qui a longuement étudié la ville avec ses pieds. Il est connu que la marche stimule le cerveau, et c’est ce même frétillement…


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Celle qu’on aurait plutôt envie d’appeler Destroy tant elle connait un destin chahuté depuis son lent déclin économique (entamé dans les années 1950 et qui aboutit, après la crise des Subprimes, à ce qu’on déclare la ville en faillite, en 2013).Detroit, protagoniste de ce récit au même titre que la narratrice, dans ce court roman de 63 pages.«  Produire ses propres légumes est devenu une arme citoyenne pour lutter contre la crise et se réapproprier le territoire  »«  On a besoin de nouvelles énergies et de nouvelles idées, de renouer avec nos racines pour bâtir une société nouvelle et éviter d’autres crises  »D’emblée le ton est donné. Nancy (meilleure amie de la mère de la narratrice), son mari Bob et leurs enfants ont pris la décision de quitter Detroit. La vie, là-bas, n’est plus possible : le lycée où Nancy travaille est sur le point de fermer vu que le gouvernement ne veut plus financer d’école. Il préfère financer des établissement dans des quartiers où les banques (ré)investissent. Pas surprenant quand on sait que Detroit s’est vidée des deux-tiers de sa population depuis que les usines ne fournissent plus de travail et que seuls les gens qui en ont les moyens fuient pour trouver un salaire ailleurs, laissant les populations précarisées se démerder dans des quartiers où près d’une maison sur cinq est laissée à l’abandon.S’occuper d’un potager collectif (agriculture urbaine, tentative d’autosubsistance) est donc bel et bien un outil de lutte dans ce contexte particulier.L’annonce du départ de Nancy fonctionne comme une sonnette d’alarme pour la famille de la narratrice. Seront-ils les derniers à rester ou seront-ils les prochains à devoir quitter leur vie, leur ville ? Le temps d’une année scolaire, la jeune narratrice traverse différents obstacles liés à l’avenir de Detroit. Autant de prétexte à raconter l’histoire de ceux à qui «  on promet que la richesse des uns va ruisseler vers les autres, que les investisseurs vont relever la ville  ».Alors qu’en vrai c’est «  la privatisation et la spéculation immobilière qui nettoient les quartiers populaires pour faire revenir les Blancs. Et les autres, les invisibles, les oubliés du renouveau ? Tous ceux qui ont perdu leur emploi ? Midtown est en train de devenir le nouveau terrain de jeu des riches. (…) On va tous être chassés d’ici, soit parce que les loyers seront trop chers, soit parce qu’ils décideront de raser nos maisons pour nous chasser sans risquer un procès  ».Ce récit porte très bien son nom – Bulldozer – quand l’on sait que le verbe, to bull-doze signifie intimider. 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Cette ville, la plus grande de l’État du Michigan, en déclin économique depuis des décennies, a même fini par être déclarée en faillite ! Des quartiers entiers ont ensuite été voués à la démolition et leurs habitants menacés d’expulsion. Une ville nouvelle se dessine à présent qui risque de n’être peuplée que de nantis majoritairement blancs. L’histoire de Detroit a intrigué et passionné Aliénor Debrocq. À tel point qu’elle a décidé d’écrire une fiction qui aurait pour cadre l’ancienne capitale de l’automobile. Cette auteure de romans et de nouvelles qui enseigne la littérature dans nos écoles d’art, est aussi journaliste : le travail d’investigation, elle maîtrise ! Sa narratrice – on ne connaitra pas son prénom – est une jeune adolescente. Sa mère a quitté l’Europe pour venir étudier aux États-Unis, son père, un natif de l’endroit, fut ingénieur dans l’industrie automobile. Elle a une toute petite sœur. Un matin, ses parents reçoivent une lettre d’expulsion. 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