Camille, veuve et assistante vétérinaire, vit son existence à très basse intensité, dans un appartement qui surplombe un zoo. L’exubérance la bouscule, les autres la confrontent. Chaque voisin est source de stridence pour son onde intime discrète. Recroquevillée dans son quant-à-soi entre un lapin, un chat et les rares contacts avec sa mère Suzanne – de nature joviale et inquiète pour l’introversion radicale de sa fille – elle est toute entière suspendue dans l’attente d’autre chose, sans savoir même ce qui comblerait ce creux en elle. Une négligence au travail qui manque de coûter la vie à un chien la pousse à s’isoler encore davantage dans un maison-refuge, aux confins des Ardennes. Elle s’imagine y cheminer, loin de tout, dissoute dans l’environnement,…
Trente ans ! C’est le temps qu’il a fallu à Isabelle Bielecki pour comprendre que ses poèmes adressés à la mer, alors écrits « d’un jet brûlant », parlent en vérité de sa mère. L’amniotique homophonie est restée inconsciente tout ce temps. Ce sont les photos à grand format de son compagnon Pierre Moreau qui ont réveillé ses textes longtemps enfouis. Ils forment aujourd’hui la première partie du recueil Miroirs à marée basse.
La mer / Est tellement fière — La mer / File en arrière — La mer / Jusqu’en enferLa mer / Se désespère — La mer / Des jours amers — La mer / Au cœur de pierre
Au centre, un cahier soigné de six images très vives laissent le ciel prendre tout l’espace au-dessus de la plage. La solitude y répond à…
Martine ROUHART, Les fantômes de Théodore, Murmure des soirs, 2020, 116 p., 16 €, ISBN : 978-2-930657-60-8Comme tous les dimanches, Charlie rend visite à son père Théodore. Ces deux-là sont unis par une belle complicité où les mots sont superflus : contemplatifs, ils aiment se gorger des petites contingences de la vie.Nous aimons les mêmes choses immatérielles et un peu inutiles, le roucoulement des tourterelles, le vent dans les feuilles, la couleur du ciel avant l’aube. Nous aimons souvent ne rien faire, dans le silence, sans nous ennuyer. Juste le plaisir d’être ensemble. Entre lui et moi, c’est une complicité tendre, tissée d’évidences qui ont la texture de ce qui nous relie aux arbres et à la terre. […] J’ai choisi de lui apporter cette fois un volume…
De sages paysages aux doux pastels jalonnent ce nouveau recueil de Martine Rouhart, comme autant d’instantanés prenant par la main et le chemin des saisons. Loin des routes agitées, les sons de la nature, dont surtout le coulis de l’eau, sont pris en charge par la plume murmurante de l’auteure, perceptible à l’oreille, transformant son écriture en une rivière de mots légers et parfumés ; quoique sans plus d’illusions.Je suis encore dans mes motsà éveiller le printemps parler la languedu ruisseaufleurir des cheminsvers nulle partC’est, malgré tout, Martine à la campagne, en balade de cailloux en épis, de sentiers en vallons, de petite voix intérieure en paroles « me rappelant / seulement / les mots / que je chantais ». Le sentiment…
Premier dessin après trois poèmes : une femme s’éloigne dans la campagne et l’herbe écrit des mots de loin en proche, depuis l’horizon jusqu’à l’avant-plan. Je marche / en écrivant des phrases / qui se composent / se décomposent / comme la calligraphie / des oiseaux / dans le bleu.Deuxième dessin après vingt-trois poèmes : un arbre s’effiloche dans la page et le vent invente des mots depuis le tronc jusques au sol. Elles chantent lentement / assoupies / comme des pensées / les feuilles dorées / étincelles d’un soleil attardé.Troisième dessin après cinq poèmes et avant dix derniers : un papillon s’écaille dans l’air et son abdomen repose sur des mots figurant mille pattes. Déplier / les papillons endormis / au creux de l’âme.Dans le refuge de…
Le nouvel opus de Martine Rouhart se présente sous la forme d’un journal de bord divisé en vingt-trois tableaux. L’autrice nous y relate un fragment de sa vie réelle, lorsqu’elle a dû se battre contre un cancer il y a quelques années.Habitée par la volonté de partager l’impartageable et d’écrire pour ne pas oublier, Martine Rouhart nous fait part de ses réflexions sur sa vie bouleversée suite à une retraite forcée chez elle. Alors que tout un chacun continue de vivre son quotidien, elle s’isole loin des bruits du monde afin de se retirer à l’intérieur de soi, là où les pensées et les émotions se bousculent, envisageant la maladie comme une chance de s’enrichir et de se recentrer sur l’essentiel.Obligée de mettre au repos son corps rendu impuissant par la…
Dans l’ « avant-lire » qui ouvre le recueil paru aux éditions Le Coudrier, Anne-Marielle Wilwerth cite opportunément Chateaubriand : Les poètes sont des oiseaux : tout bruit les fait chanter. Les (trop rares) illustrations de Catherine Berael nous donnent à voir de ces oiseaux quelques crayonnés, de rouge et de noir, composés dans ces attitudes qui sont familières et que certains poèmes évoquent.Patrick Devaux et Martine Rouhart déposent dans ce volume allègre et heureux, feuille à feuille, des poèmes composés à quatre mains. Quatre mains enlacées, complices, solidaires de l’émotion poétiques : elles ne sont pas identifiées. Au lecteur de tenter le jeu d’attribuer à l’une ou à l’autre telle ou telle fulgurance, telle ou telle image verbale, telle ou telle…
Martine Rouhart, qui choisit d’intituler son dernier recueil Il faut peu de mots, joint le geste à la parole en proposant une poignée de textes brefs et sans apprêt. L’on y rencontre une parole poétique méditative, réflexive et ludique.Il faut peu de mots, livre de poèmes, vient de paraître aux Éditions du Cygne (Paris). Son titre évoque une ébauche d’art poétique que le recueil mettra traditionnellement en œuvre. Les textes de Martine Rouhart n’y excèdent pas six vers, eux-mêmes remarquables de brièveté. Écrire peu pour dire beaucoup, voilà qui semble le projet avoué de l’écrivaine qui cheminera avec agilité autour de cette idée.Il faut peu de motspour livrerde grands fragmentsde soiOuvrant douze des quarante-quatre poèmes, l’anaphore du titre y joue le…
L’inconnu dans le jardin héberge la perspective d’une rencontre entre une écrivaine de soixante-huit ans, qui a choisi son jardin pour muse, et une forme obscure, s’adossant au tronc d’un érable durant les insomnies de la narratrice. Ce jardin, « entre le visible et l’invisible », conditionne le regard de l’autrice : les animaux et végétaux qui le peuplent ne traversent pas son champ de vision et, pourtant, elle les sait présents, « en espoir de quelque chose ». Sensible à cette fausse absence, elle se laisse donc envahir par cette ombre, ce prétendu inconnu, aux apparitions irrégulières, qui finit par peupler sa pensée diurne.À la manière d’un carnet de bord, se succèdent ces journées en attente de la nuit révélatrice – ou non – de l’ombre qui…