Les écrivains du passé n’ont jamais cessé de nous parler.
Il nous appartient de les écouter, même si l’écoulement du temps a pu érailler leurs voix, même si les relais de lecture intergénérationnels sont aujourd’hui moins assidus, même si la primauté de l’image a pu dérouter les chemins d’écriture. L’œuvre des Illustres est l’ADN de chacun de nous.
Quand l’oreille intérieure et l’œil se font moins vifs et sortent du champ de lecture, il nous reste le trésor des pierres, des lieux signifiants – comme les aubépines de Marcel au Pré Catelan –, l’intimité d’une table, d’une plume et d’un encrier – comme l’écritoire de Jean-Jacques à Montmorency. Comme l’écrit Pierre Mertens dans son avant-dire : « Allons ! Comment se lasserait-on de ces retours aux sources sur les lieux du crime – ce crime fameusement “impuni” : la lecture ? »
Ou la relecture ?…
Au fil de ses voyages, ses rencontres et ses chemins d’écriture, la revue « Le Non-Dit » nous emmène sur les traces d’Alain-Fournier, Marcel Proust, Pierre de Ronsard, Pierre Loti, François-René de Chateaubriand, George Sand, Maurice Leblanc, Madame de Sévigné, Alexandre Dumas, François Rabelais, Michel de Montaigne, Erasme, Colette, Blaise Cendrars, Pierre Mac Orlan, Francis Carco, Georges Brassens, Jean-Jacques Rousseau, Maurice Maeterlinck, Marguerite Duras, Jean Cocteau, Louis Aragon, Elsa Triolet…
Auteur de Voyage en pays d’écriture
Auteur de Voyage en pays d’écriture
Il existe entre un livre et son auteur un espace d’exploration littéraire que Michel Joiret appelle en collaboration avec Noëlle Lans, « Voyage en pays d’écriture ». Le principe en est cristallin : partir sur les traces des écrivains, là où ils ont commis leur œuvre et y découvrir ce que les sens de la présence sur place peuvent offrir. C’est-à-dire les non-dits des auteurs et l’esprit des lieux d’écriture.Depuis 1995, la revue Le Non-Dit, entreprise compagnonique, guide ses lecteurs-voyageurs dans l’environnement des écrivains et fait « parler les pierres qui leur ont servi de refuge ». Il en est ainsi du premier colloque à Epineuil-Le-Fleuriel où est située l’école d’Alain-Fournier, auteur…
Faire vivre l’opéra, un art qui donne sens au monde, Entretiens
À l’occasion de la septantième édition du festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence, un festival que Bernard Foccroulle dirige depuis douze ans, paraît un recueil d’entretiens au fil desquels celui qui fut auparavant le directeur du Théâtre royal de la Monnaie (1992-2007), livre son regard sur l’opéra, ses devenirs, son avenir, ses enjeux actuels. Pour couronner sa dernière saison à la tête du festival d’Aix, il dresse un bilan, une cartographie de la vitalité de l’opéra contemporain, interroge sa place dans la cité, son actualité, sa capacité à penser les mutations du monde. Si, loin d’être devenu une institution muséale, tournée vers le passé, l’opéra affiche de nos jours une créativité audacieuse et une connexion à un monde qu’il questionne, c’est, entre autres, grâce à l’engagement de directeurs ouverts non seulement aux grandes œuvres du répertoire — des œuvres recréées, réinterprétées par l’action conjointe de la direction musicale, du metteur en scène, des interprètes — mais aux nouvelles créations. La vie des chefs-d’œuvre est éternelle, leur richesse étant gage d’une relance infinie des interprétations, des visions qu’on porte sur eux. Non seulement, la manière de chanter, de mettre en scène, de se rapporter aux œuvres du répertoire ne cesse d’évoluer, mais les lectures que Pierre Boulez/Patrice Chéreau, René Jacobs/Trisha Brown, Marc Minkovski/Olivier Py, Sir Simon Rattle/Stéphane Braunschweig, Louis Langrée/Peter Sellars ont produit de Janacek ( Dans la maison des morts ), Monteverdi ( L’Orfeo ), Mozart ( Idoménée, roi de Crête ), Wagner (la Tétralogie, L’Anneau du Nibelung ), Mozart ( Zaïde ), plus que de simplement les dépoussiérer, les ont revitalisés dans des directions insoupçonnées. Apport des chorégraphes dans la mise en espace, élargissement du geste lyrique aux petites formes (mise en scène des lieder de Schubert de Winterreise , spectacle Trauernacht autour de J. S. Bach…), l’opéra renouvelle son langage, ses horizons, repense sa fonction dans un monde globalisé. Partisan de dialogues interculturels, de rencontres entre la forme européenne de l’opéra et les formes « opératiques » du reste du monde — nô, kabuki, opéra chinois, musique arabe, sud-américaine… —, soucieux de ne pas reconduire la domination de la culture occidentale sur les autres, conscient des pièges à éviter, Bernard Foccroulle met en garde contre les risques de standardisation, d’uniformisation que génère la mode actuelle du cross-over, de la world music qui brasse des clichés folkloriques de traditions extra-occidentales dont elle détruit l’âme, la profondeur. « Je vois une différence radicale entre les créations interculturelles et le cross-over qui est une tendance actuelle, une manière commerciale et superficielle d’inclure des ingrédients « exotiques « — ce qui ne mène à rien d’autre qu’à une culture consumériste standardisée ».Né en Italie au début du XVIème siècle, ayant renouvelé son écriture, ses formes, ayant accompagné l’évolution des pensées, des mentalités dans les pays européens, l’opéra connaît aux XXème et XXIème siècles un succès sous toutes les latitudes. Bernard Foccroulle insiste sur les défis qu’il se doit de relever afin de demeurer une scène où les consciences interrogent leur époque et proposent des alternatives à l’état de choses. L’un de ces défis a trait à son extension mondialisée, à l’inventivité dont il devra faire preuve musicalement, artistiquement afin de ne pas succomber à la facilité d’un art non plus total mais global, avalé dans l’industrie du spectacle.Davantage qu’une fenêtre ouverte sur un monde en évolution, l’opéra en sa multitude de formes (opérette, comédie musicale, opéra-comique…) en est une des caisses de résonance, un des acteurs qui a à prendre à bras le corps, par la revisitation des mythes ou une narration contemporaine, les problèmes et défis actuels (inégalités sociales, réchauffement climatique, crise migratoire, crise environnementale…).Signalons la parution simultanée du très beau livre illustré L’Opéra, miroir du monde, Festival d’Aix-en-Provence 2007-2018 également chez Actes Sud, lequel retrace les spectacles qui ont été montés sous Bernard…