Yves-William Delzenne

PRÉSENTATION
Une biographie classique d'Yves-William Delzenne, avec dates et événements précis, s'avère proprement irréalisable. L'auteur a cependant à plusieurs reprises affirmé que la vie était pour lui plus prégnante que l'oeuvre - ce qui est contraire, remarquons-le, à la conception émise par la plupart des écrivains. Mais la vie dont, suivant le mot d'Oscar Wilde et la recommandation d'un maître Zen de la dynastie Tang, Delzenne s'attache à faire une oeuvre d'art, cette vie ne se laisse pas prendre au découpage des heures et des jours. Sur ce point, l'auteur est rusé et secret. Cependant, le Dictionnaire des Belges (Éd. Paul Legrain, Bruxelles) nous apprend qu'il est (serait) né en 1948. L'auteur propose comme possible point de repère à notre sagacité le fait qu'il a pu applaudir la grande cantatrice Clara Clerber dans La Dame aux camélias. La mère de l'écrivain est française, mais elle est polonaise par son père. Le recueil de poèmes intitulé Le Polonais trouve peut-être là une source d'explication, tant il est vrai que l'attention de l'auteur à sa filiation, qu'il définit comme "artiste", n'est pas indifférente. Quant au père d'Yves-William Delzenne, il était d'origine française, d'une famille remontant au quatorzième siècle. A seize ans, Delzenne effectue sa première apparition au théâtre, et il y joue jusqu'à l'âge de dix-huit ans. Il rencontre ensuite son épouse, la pianiste Bernadette Notelet, avec laquelle il donne différents récitals, mêlant poésie et art de l'interprétation pianistique, de 1971 à 1979. Ce sont les années les plus heureuses. En 1980, la dramatique Les Désirables est créée au théâtre de l'Esprit Frappeur, dans le cadre d'Europalia Belgique. Tout au long de ces années, la légende d'Yves-William Delzenne n'a pas cessé de se forger, pour aboutir au présent. Dandy naturel : par ces deux termes en apparence opposés - quoi de plus artificiel que le dandysme?, souffle l'opinion générale - Delzenne définit l'élaboration de sa propre existence (dans une entrevue accordée au journal Le Soir). Comment je saisis cette élaboration : à chaque instant, l'attitude de cet homme se plie aux impératifs du dandysme. Depuis sa façon de nouer son écharpe dans un tramway bruxellois, jusqu'à la lettre aux arabesques excentriques qu'il envoie un soir de novembre de l'hôtel Danieli à Venise, Delzenne ne s'arrête pas de construire cet artefact unique : un personnage fin, délicat, sobre et sophistiqué à la fois, reconnaissable immédiatement, à la mèche blond cendré savamment en bataille comme au grain affecté de la voix. Tel Bela Lugosi, se prenant au jeu, devint le comte Nosferatu, ainsi Delzenne ne cesse-t-il plus d'acter le dandy, sa vie est devenue ce texte-là, nouveau naturel. Importance du dandy : s'il s'attire des inimitiés - et Delzenne sait entretenir différentes hostilités - c'est qu'il dénonce le naturel (le mythe de la spontanéité, de la franchise, de la grossièreté) comme artefact, en offrant une autre vie, un autre naturel, à nos regards étonnés.
NOS EXPERTS EN PARLENT
Le Carnet et les Instants

« Il m’arrive de croire que tout a été mis en péril du jour où l’on coupa les grands beaux arbres qui formaient une promenade devant la villa de mon enfance. »C’est par ce « saccage » du paysage familier, destiné à faire place à une route élargie (« la folie de l’automobile » s’imposait dès la fin des années cinquante), qui est aussi un « saccage » de sa petite enfance, qu’Yves-William Delzenne ouvre son Journal de printemps.Fréquentant très tôt des théâtres où il jouait de petits rôles, des salles de concerts et l’opéra, sur les pas de son père musicien, il garda longtemps, dans ce monde littéraire et artistique qu’il habite intensément, un visage et une allure de « grand enfant tiré à quatre épingles ». Il évoque ses promenades…


Le Carnet et les Instants

« Dans des temps anciens, dans un pays oublié dont certains nieront même l’existence, j’allai à la découverte de Ghandol, où je n’étais arrivé que de quelques semaines« .Dans son dernier roman, C’est ainsi que disparaît un royaume, Yves-William Delzenne déploie une forme de traversée philosophique mais aussi esthétique et politique d’un paysage – l’aventure de l’esprit – où , à travers une multitude de personnages issus de territoires imaginaires (si peu…) on assiste à la configuration et aux obsessions que l’on peut retrouver dans la plupart des états de notre monde.Un certain Eric Olsen ouvre le bal des péripéties et nous allons suivre, au gré de ses rencontres souhaitées ou forcées, l’engloutissement dans le néant des apparences et des bienséances…