Peut-être ses lecteurs seront-ils un peu déçus par le dernier recueil de W. Cliff, au style et aux contenus plus prosaïques que jamais. Davantage encore que dans ses livres précédents, l’auteur prend à bras le corps l’ordinaire de la vie en évitant toute espèce d’embellissement. Pour la plupart, les textes prennent – ou semblent prendre – leur source dans une anecdote vécue personnellement, laquelle devient matière à réflexion sinon à méditation généralisante. Le paradoxe, c’est qu’ils adoptent la forme de poèmes, versifiés selon une métrique généralement régulière : décasyllabes, alexandrins, heptasyllabes, etc., avec recours à l’assonance plutôt qu’à la rime. Il en résulte une tension constante, caractéristique de…
Comment trouver la juste cadence d’une vie ? William Cliff la cherche dans les alexandrins qu’il tend comme des filets au travers des années. Elle est dans ces liasses de poèmes jetés au hasard de l’existence et qui restent comme l’écume après la marée. Cette vie qui n’en finit plus de se dérober, de se défaire à l’horizon du lendemain, William Cliff tente de la faire tenir dans la forme stricte et compacte du sonnet. Matières fermées en explore les variations possibles : on y trouve des sonnets classiques, des sonnets shakespeariens – qui rappellent que William Cliff a traduit les poèmes du dramaturge anglais –, mais aussi des sonnets « polaires », où deux quatrains encadrent les tercets. Cette forme rappelle le souvenir de Baudelaire, qui la pratiqua,…
William CLIFF, Immortel et périssable, choix anthologique et postface de Gérard Purnelle, Impressions Nouvelles, coll. « Espace Nord », 2019, 240 p., 10 €, ISBN : 978-2-87568-424-0Il porte un nom (pseudonyme) d’acteur américain, une gueule pareille ; il est à faire se damner un saint, William Cliff. Mais plutôt que de s’exhiber sur les écrans tout en longueur du cinématographe, c’est sur d’autres surfaces blanches qu’il a inscrit son corps, sa vie (matière quasi exclusive de son œuvre, avec l’espèce humaine) : celles des pages des recueils de poésie et des romans. Bien qu’on puisse l’entendre murmurer qu’il est malcontent :de quelle insatisfaction souffrez-vous (c’est la gloire la gloire qui me manque),il est un des poètes contemporains les plus reconnus(oui…
Il est une des modalités de la lecture qu’Umberco Eco regrettait mais estimait inévitable : le titre d’un livre s’avère presque toujours déjà une clef interprétative. Ainsi se prépare-t-on, peut-être, à lire LE TEMPS suivi de NOTRE-DAME comme une réflexion philosophique versifiée (au regard de l’indication générique : Poésie) prolongé d’un hommage à la cathédrale parisienne dont la flèche et une partie du toit ont été détruits il y a un an. Une fois le livre ouvert et six pages tournées, en découvrant que le titre dédié à la première et principale partie du recueil a perdu ses capitales (même à l’initiale) pour devenir le temps, on recadre.On se recale. On se rappelle que William Cliff a toujours rechigné aux majuscules ; que ses vers commencent…
Dans les recueils de William Cliff, les vers font naître des étincelles à l’instar de deux corps qui s’étreignent. Des étincelles de vie, de beauté arrachée à la gueule du néant. D’une composition circadienne rythmée par vingt-parties qui sont autant de livres d’heures, Des destins dessine une géographie de l’aventure organique des éléments et des êtres (portraits des proches, des amants, des garçons aimés, rencontres, instantanés de vie, cigarettes, lunettes, forêt, évocations de Joseph Orban, de Paul Claudel, du printemps…).Taillés dans la forme du sonnet, élisant l’alexandrin, les poèmes accomplissent un mouvement rétrospectif, font de la réminiscence, du retour vers le passé l’énergie catalysant l’écriture. Ils interrogent moins l’implacable…