Aimé, un enfant d’une dizaine d’années au crâne rasé, vit à Taxandria, une ville en ruines, emplie de colonnes corinthiennes et de grands palais déserts. Suite à un mystérieux cataclysme, les lois de « l’Éternel Présent » ont été promulguées à Taxandria : toute allusion au passé et au futur y a été interdite, toutes les machines ont été bannies.
Aimé découvre un livre d’images qui relate ces terribles événements. Il est bouleversé par cette lecture et plus rien ne peut désormais l’arrêter. Parviendra-t-il à échapper à l’emprise sinistre du monde de l’Éternel Présent ?
Auteur de Les cités obscures : Souvenirs de l’éternel présent : variation sur Taxandria de Raoul Servais
Illustrateur de Les cités obscures : Souvenirs de l’éternel présent : variation sur Taxandria de Raoul Servais
François Schuiten est né à Bruxelles. Il se tourne très tôt vers la bande dessinée et suit les cours de l'Institut Saint-Luc. Dès 1978, en compagnie de son frère scénariste Luc, il élabore le cycle des Terres Creuses dont trois albums sont parus aux Humanoïdes Associés. Depuis 1981, il travaille avec son ami Benoît Peeters à la série Les Cités Obscures. Il a également collaboré à la conception graphique de deux films : Gwendoline de Just Jaeekin et Taxandria de Raoul Servais et travaille à des projets d'adaptation des Cités Obscures. Francçois Schuiten a reçu le Grand prix d'Angoulême 2002 pour l'ensemble de son œuvre.
David MERVEILLE et ZIDROU , Amore. Amours à l’italienne , Delcourt, 2021, 128 p., 20,10 € / ePub : 13.99 € , ISBN : 9782413011224 Pour son entrée dans le monde de la bande dessinée, l’auteur et illustrateur David Merveille s’est associé à un scénariste aguerri, son complice de longue date Zidrou. Avec Amore, le tandem nous emmène en Italie. L’album est sous-titré Amours à l’italienne , au pluriel : ce ne sont pas moins de neuf variations sur le même t’aime qui se déploient au fil des pages. Encadrées par un prologue et un épilogue qui mettent en scène un auteur de romans sentimentaux venu chercher (et trouver) l’inspiration à la terrasse d’un café, sept histoires évoquent les différentes facettes de l’amour. Réciproque ou à sens unique, homo ou hétéro, secret ou public, passé, présent, douloureux, éternel, violent, passionnel, vénitien ou sicilien, il est toujours raconté avec subtilité. Amore a quelque chose d’un (bon) recueil de nouvelles. Par son unité thématique, bien entendu, dont l’explication réside dans la genèse du projet. Dans une interview accordée à Branchés culture , David Merveille explique en effet que lui et Zidrou ont d’abord envisagé un album jeunesse, autour d’une seule des histoires qui composent finalement Amore. Zidrou l’avait écrite, son complice travaillait à l’illustration, quand ils ont réalisé que ce court récit n’était pas destinée à un public d’enfants. Est née alors l’idée d’imaginer d’autres histoires sur le thème de l’amour, pour une bande dessinée tout public. Telles des nouvelles, les brèves séquences qui composent l’album dosent admirablement les dits et les non-dits. Qu’elles creusent un instant dans la vie des personnages ou brossent la trajectoire d’une vie, elles laissent aux lecteurs toute latitude pour combler les blancs et investir le livre de leurs propres rêveries.Si les histoires séduisent par leur justesse, que dire alors de leur mise en images ? Chaque planche est composée de peu de vignettes – une seule en compte neuf, la plupart en comportent quatre ou cinq, tandis que plusieurs cases se déploient en pleine page, voire en double page. Le plaisir est double lui aussi : ainsi mise en valeur, chacune se livre d’autant mieux à l’admiration des lecteurs, et l’album appelle à une découverte lente, paisible. David Merveille recourt aux à-plats de couleurs. Chaque histoire présente une teinte dominante qui en définit aussi l’atmosphère, du jaune chaleureux de « Il.Elle » au rouge sang de « La befana » ou au vert d’eau de « Roll over Venezia ». Dans l’interview déjà évoquée , David Merveille précise avoir bénéficié, pour les couleurs (qu’il applique par ordinateur), des conseils de l’affichiste Laurent Durieux , dont il partage l’atelier. Conseils dont il a tiré le meilleur parti, tant le résultat est remarquable. Le sous-titre du livre, Amours à l’italienne , fait écho à une certaine époque du cinéma italien, les Mariage à l’italienne de Vittorio De Sica (1964) et Divorce à l’italienne de Pietro Germi (1961) – et les histoires racontées penchent aussi bien du côté de la désunion que de celui de la lune de miel. Le travail de David Merveille, ses albums dédiés à l’univers de Jacques Tati notamment , est profondément imprégné par le 7e art. Amore confirme cette influence : l’illustrateur et le scénariste jouent avec les ressources de la voix off, les flashbacks, les filtres, et où l’enchainement des cases évoque les mouvements d’une bien habile caméra.Pour « Pietro & Ada », on assiste d’ailleurs à une projection de La dolce vita au cinéma Royal Tivoli. Quant à la Vespa qui orne la couverture et revient çà et là dans l’album, elle offre un plaisant clin d’œil à la virée d’Audrey Hepburn et Gregory Peck. À moins qu’elle rappelle les tribulations de Nanni Moretti.Surtout, elle nous conduit à plein gaz dans ce formidable…
Récit qui valut à son auteur le prix Goncourt lors de sa parution en pleine guerre, en 1916, Le feu d’Henri Barbusse, sous-titré Journal d’une escouade, relate la boucherie de la Première Guerre mondiale. Bien que farouche partisan du pacifisme, Henri Barbusse s’engage comme volontaire en 1914. C’est de l’expérience des tranchées, de sa vie de soldat en première ligne qu’il tire un des romans les plus saisissants sur le basculement des nations dans le premier conflit mondial. À l’occasion de la commémoration des cent ans de la fin de la guerre 1914-1918, l’auteur et scénariste Patrick Pécherot et l’illustrateur, le scénariste de BD, Joe Pinelli publient une adaptation graphique du Feu de Barbusse. Le titre, Das Feuer , témoigne de leur choix : transposer la narration du côté allemand, évoquer l’enfer vécu par des soldats allemands, Kurt, Müller, Kropp… Une poignée de soldats, pris entre les feux de l’armée française, cherche à tâtons la tranchée qui va les sauver. Porté par un dessin en noir et blanc, Das Feuer balance un voyage au bout de la nuit, entre attaques de l’ennemi et creusements des tranchées. Le rythme est celui de l’hallucination, de la dérive mentale, le tempo est celui des corps hagards, écrasés par des pluies de feu, ensevelis sous la boue charriant les cadavres des camarades morts. Le texte d’Henri Barbusse roule ses phrases dans « la grande plaine de la guerre », dans le « cloaque, matrice universelle, mère qui nous absorbe et nous accouche ». En treize chapitres, Das Feuer déroule la saga des obus et des fusées, les hommes réduits à l’état de bêtes de somme et dont la raison défaille. Boyaux qui s’effondrent, enlisement des hommes du régiment dans des terres devenues marécages, monticules de macchabées… la chair humaine hurle, la seule logique est celle de la gadoue, des explosions et de la mort. Parsemée de trous, de fondrières, de charniers, la terre n’est plus que piège. Visages gris aux yeux vides sur paysages désolés, hérissés de barbelés. Kamerad. Camarade, Graben. Fossé, Streifzug. Dégagement, Morast. Marécage, Stimmen. Voix, Morgenröte. L’Aube… les treize chapitres ne reprennent qu’exceptionnellement les titres des vingt-quatre chapitres du récit de Barbusse.« TAC ! TAC ! BAOUM ! BAOUM ! Les coups de fusils, la canonnade autour de moi. Partout ça crépite et ça roule, longues rafales et coups séparés. Sombre et flamboyant orage qui ne cesse jamais. Je suis enterré au fond d’un éternel champ de bataille. Depuis quinze mois, depuis mille cinq cents jours, du soir au matin sans repos, du matin au soir sans répit. La fusillade, le bombardement ne s’arrêtent pas. Comme le TIC-TAC des horloges de nos maisons, aux temps d’autrefois, dans le passé quasi légendaire. On n’entend que cela lorsqu’on écoute. TAC ! TAC ! BAOUM ! BAOUM ! » L’horreur de la Première Guerre mondiale transposée dans le camp ennemi, c’est ce que Joe Pinelli tente de nous faire toucher du doigt en adaptant du côté allemand Le Feu, d’Henri Barbusse, écrivain…