Sodome et grammaire

RÉSUMÉ

Sodome et Grammaire. Ou Sodome et Grosso Modo si l’on préfère ! Nous sommes en effet en Presque-Poésie. A l’orée. A l’oreille et Hardy comme il a déjà été dit et redit. Aux bords. Aux confins : entre à-peu-près, pataquès, persiflage – voire franche provocation ! – et joyeuse parodie. Aux limites imprécises. Là où les frontières sont tantôt floues tantôt fluides. Là où également tous les coups sont permis pourvu qu’ils mettent en évidence les infinies ressources de notre belle langue française tout en la défendant contre qui la voudrait aujourd’hui plus démunie et déshumanisée que jamais ou davantage surchargée de préciosités ridicules. Un uppercut donc – à la Cravan, s’entend ! – aux rappeurs Camembert ; un swing ou deux savates aux slameurs pompiers ; une claque en passant à la novlangue technologique ; une solide peignée au branchouille mode d’emploi sans oublier une chiquenaude amicale aux grands ancêtres d’anthologie car nul n’est parfait, n’est-ce pas ? Surtout pas l’auteur qui dans une ultime pirouette d’autodérision prend congé de lui-même en s’exclamant : salut l’Autiste ! Salut !

À PROPOS DE L'AUTEUR
Jean-Pierre Verheggen

Auteur de Sodome et grammaire

 Jean-Pierre Verheggen n'accorde que peu d'importance à une biographie académique. Il ne révèle d'ailleurs que l'essentiel, c'est-à-dire ce qui influe directement sur son oeuvre. Comme il se plaît à le souligner, au-delà de cette limite, tout portraicket de lui n'est plus valable.Sa naissance, le 6 juin 1942, à Gembloux, l'inscrit déjà dans la mouvance linguistique. Son père est originaire d'Orléans, sa mère est wallonne. Français et wallon se côtoient et se mêlent dans son oeuvre comme dans sa vie. En effet, si Verheggen vit à Mazy, dans le Namurois, il n'en manie pas moins la belle langue française, mieux même, il l'enseigna à l'Athénée royal de Gembloux. Il fréquenta l'ULB, ce lieu où il n'est pas bon de se prendre pour un écrivain, et, plus précisément, la section de philologie romane. Quelques années plus tard, son mariage avec l'Italienne Gisèle Fusani l'immergera un peu plus encore dans les langues, langues multiples et plurielles d'où naîtra sa langue.Il est malaisé de dénouer le fil des influences qui ont joué sur l'oeuvre de Verheggen. Il se recommande en effet de tous - de tout même! - et de personne. Notons qu'il eut pour professeur de littérature Raoul Vaneigem et qu'André et Cécile Miguel, ses voisins, le guidèrent, sans l'orienter. Rappelons aussi que le Namurois est la patrie de Michaux et de Rops. Pour le reste, demandez à Verheggen quelles sont ses sources d'inspiration. Il vous répondra volontiers, et le plus sérieusement du monde : Badoit, Volvic, Spa Monopole, Chaudfontaine...De plus, pour lui, être écrivain ne veut pas dire limiter sa curiosité au seul domaine littéraire. Toutes les formes d'expression retiennent son attention : la peinture, par exemple, mais aussi les moyens audio-visuels. La langue, en effet, est multiple.L'épisode biographique maoïste résonne dans Le degré Zorro de l'écriture, Divan le terrible, et Vie et mort pornographique de Madame Mao. Le vécu a imprégné ces textes d'un leitmotiv : lézarder les images figées et sacralisées des Pères du monde. Mao rejoint ainsi Nietzsche, Platini, Tintin, Sade, Buck Danny, Lénine et tout autre prétendant au piédestal. L'auteur y compris.À chaque instant, derrière chaque mot, se retrouve donc la biographie rejouée de l'auteur. La vie et la langue s'imbriquent indissociablement. Miséréré, qui clôture Stabat Mater, voit Verheggen nous livrer ses impressions post-opératoires.Le bistouri du chirurgien qui le taillade lacère son texte. Pour l'auteur, c'est très clair : plus rien ne distingue son oeuvre de sa vie. Pénétrer l'une, c'est s'immiscer au coeur même de l'autre.Le voyeurisme est pourtant ardu. La démesure peut occulter la pudeur d'un homme qui se livre avec une sophistication non fardée comme dans cette Lettre d'amour à Gisella Fusani au coeur du Ridiculum vitae.

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Slam femme & autres textes

Laurent Demoulin (1966) a étudié à l’université de Liège, où il a reçu les enseignements de Jacques Dubois et de Jean-Marie Klinkenberg. Il y enseigne aujourd’hui. Son premier roman, Robinson , obtint le prix Victor-Rossel 2017. Son frère, le peintre Antoine Demoulin , dit Demant, illustre le présent recueil. Il avait déjà publié d’autres dessins en frontispice d’autres recueils : Filiation , Même mort , Palimpseste insistant et l’édition revue et largement augmentée d’ Ulysse Lumumba . Les deux frères avaient aussi publié une œuvre singulière à quatre mains, Homo saltans , où le texte et l’image s’entrelacent en un pas de deux très réussi. «  Rien de plus déprimant que d’imaginer le Texte comme un objet intellectuel (…). Le Texte est objet de plaisir  » écrivait Roland Barthes . Ce Bookleg de Laurent Demoulin recèle, dans son apparente diversité, de nombreux plaisirs stylistiques. Le choix des textes ne retient que des pièces destinées à être lues à haute voix. Slam femme est donc la juxtaposition d’une forme et d’un thème : la narration scandée librement, de manière rythmée, avec pour personnage central Greta Thunberg, jeune autiste Asperger et militante écologique. L’autisme, thème central de son remarquable roman Robinson , est donc une fois de plus présent chez l’auteur dans ces poèmes sous forme imprimée de textes destinés d’abord à l’oralité :(…) Ta pure volonté oui-autiste et sévèreQue tu deviens persona non grataChez les gris grisonnants qui méprisent le vert,Mais pour nous Great Greta, à jamais et basta !Tu es persona Greta (…)Que ce soit dans le domaine thématique ou stylistique, Slam femme & autres textes n’est pourtant ni disparate ni réducteur. Car la thématique de l’autisme pose une série de questions ayant trait à nos rapports au monde et aux autres.Utilisant la rime et les formes de manière à la fois classique et assez libre, avec des pastiches  empruntés à l’histoire de la poésie française, de la Renaissance à l’Oulipo et à la chanson contemporaine, Demoulin joue avec la langue et les images, la syntaxe et le vocabulaire, manie l’humour et le double sens, comme avant lui, celui qui, le premier, fit du slam à Liège : Jacques Bernimolin (1923-1995), auquel Demoulin consacra une belle approche critique . À propos de ce poète atypique, Izoard disait : «  Jeux de mots, calembours, cut-up, détournement de sens, faux lyrisme, humour décapant, sentimentalisme à rebrousse-poil, voilà quelques-uns des procédés utilisés par ce poète à la fois tendre et doux-amer  ». Malgré leurs différences, les manières d’écrire, chez Bernimolin et Demoulin, font indubitablement partie de la même parentèle. Mais derrière le ludisme des formes, on perçoit la gravité des interrogations : Bernimolin aborde des atmosphères oniriques et parfois angoissantes, Demoulin traite de problématiques sociétales qui bouleversent notre civilisation et n’ont rien d’apaisant : la violence, envers la Nature, les femmes, l’être humain comme l’interrogation de nos identités et modes de vie y sont présentes.Un autre type de violence est celui qui réside dans tout type d’incommunicabilité. Sur ce plan, l’autisme est exemplaire. À propos du roman Robinson , J.P. Lebrun écrit  : «  La pertinence clinique de ce véritable travail d’écriture auquel s’est tenu Laurent Demoulin tient précisément dans ce qu’il nous fait partager ce à quoi Robinson n’accède pas, à savoir ce qu’implique ce que l’auteur appelle « la quatrième dimension – celle du langage – dans laquelle il est si douloureux d’entrer – car on y rencontre le mot ‘mort’ et le mot ‘jamais’ – et dont il est impossible de sortir «  . Tout dans la description particulièrement fine de cette co-vivance entre père et fils, tout vient nous rappeler que n’a pas pu prendre place entre eux ce lien via le langage articulé qui définit notre espèce. » C’est pourtant dans cette coexistence entre le Livre et une autre écriture (l’écriture de l’Autre) , pour le dire comme Barthes, que survient la possibilité d’une compréhension des fragments réciproques de nos quotidiennetés et donc un désamorçage de la violence. Cette problématique est particulièrement sensible dans un poème comme « Minimum minimorum  » et la série intitulée « Poèmes que je n’écrirai qu’une seule fois ».Au-delà de l’éblouissante virtuosité verbale de Demoulin, son inventivité, ses traits ludiques, sa capacité de mise à distance et son oralité, on sera attentif à la dramaturgie de l’être humain, à ses silences, ses murs intérieurs, ses souffrances et à la violence innée qui l’habite, aux peurs qui déterminent ses rapports aux autres et au monde…                                                                     …