Petits rituels sacrilèges


RÉSUMÉ

La vie passe comme une pièce de théâtre dont nous sommes à la fois les acteurs et le public. Les rituels (sacrilèges) en exposent la mise en scène et les didascalies textuelles. Ils proposent de jouer, d’enjouer, et de se laisser mettre en joue comme en joie.

En artisan du Langage le poète « bricole » dans l’inquiétude solitaire qui habite et hante probablement tout poète (là pour dire comme le monde…

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À PROPOS DE L'AUTEUR
Werner Lambersy
Auteur de Petits rituels sacrilèges
Mon cher Werner, Pourquoi écrire aux poètes alors qu'ils écrivent si bien eux-mêmes ? Pour leur amour du style ? Je m'en défie car il est rarement l'expression d'un véritable amour et d'un vrai style de vie : si exaltant qu'il soit, Baudelaire ne console pas du drame où se lit par défaut l'incommensurable désir de vivre. Pourtant, j'aime assez ces morts illustres du passé, qui surent rêver de printemps en des hivers d'agonie, pour tenir en amitié les vivants qui composent aujourd'hui le livre des enfances à venir. Je ne t'écrirais pas si je ne prenais à te lire le même plaisir qu'à partager en ta compagnie ces apprêts culinaires et ces humains breuvages dont les heureux excès sont la tempérance des gourmands. Je ne suis sensible qu'aux nourritures affectives. Passe encore pour boire n'importe quoi mais pas avec n'importe qui ! Cependant, il existe un plaisir des mots affinés qui s'accommode mal de ce que les moments ne le soient pas tout autant. Qu'un cordon bleu profère des sottises me désole à l'égal d'un poète impassible devant un chapon aux morilles et au vin de paille. Il y a dans un moment de plaisir tous les plaisirs du monde. Je trouve plaisant, dans l'exaltation du petit matin où le bol de café a le goût délicieusement amer et doux des défis quotidiens, de m'exclamer par ta voix : "Salut ! ainsi qu'aux choses qui sont bonnes avec nous. Le reste n'est qu'une très longue pluie !" Le mardi, jour de marché, me hâtant vers le haut-lieu où mes amis bercent leur nonchalance dans le reflet de bières ambrées, je pâlis au nom sacré et incongru (O Hermès Trismégiste) de triple Westmaelle dont la magie, aussitôt les mots proférés, s'accomplit sur le champ. Et m'exaltant de ces riens qui me sont tout l'espace d'un instant, je pressens dans l'enchantement de l'imminence le "Bistrot sans autre gloire qu'un bruit de verres et d'assiettes" De ces journées où le temps s'écoule sans que j'aie songé à le bien recueillir dans les poches du plaisir, je prends le parti de ton constat désinvolte : "Parfois créant et puis non" Après tout l'obligation de créer n'est plus que l'ennui de travailler. Je lève mon verre à la paresse. N'est-ce pas boire ainsi à ta santé et à la mienne ? Laissons Dieu aux ivrognes, et que la vie nous emporte ! "Demain je dirai le poème où sont tous les poèmes : Personne n'en saura rien et moi non plus !" Il arrive pourtant que j'achoppe sur un mot : "Le pont inachevé de l'âme tend vers l'autre rive" Pour le coup, je me rebiffe, je te cherche querelle dans un dialogue imaginaire : Moi – Il n'y a d'âme que dans les canons Toi – Oui, mais il y a des canons de vin Moi – Donne-moi le vin, je te passe l'âme ! La poésie des propos de table est dans les gestes. Revenant à l'âme je cite l'abbé Dulaurens : « Tâtez mon âme, madame, et dites-moi si pénétrant la vôtre, elle n'aurait pas la grâce de nous élever aux cieux ». Voilà qui a du corps. C'est ce qui nous soutient le mieux parmi les tempêtes "car il ne reste qu'aimer qui se nourrit de rien et brûle sans rien éclairer de la nuit qui nous entoure." Sans doute n'avons-nous de force qu'en notre discrétion : je dirai « humilité » si le mot n'avait pris, à traîner dans les sentines, une odeur de soutane, "Ce que j'écris ne veut pas de gloire seulement faire en secret son chemin." Merci de l'exprimer sans que j'aie à remuer les lèvres. Laisse-moi prendre encore (avec un viel armagnac) : "la création n'a pas de fin la loi la seule est d'être inépuisablement repris" Et dans la même et évidente gorgée : "viendra le chant où je serai sans voix viendra la voix où je ne serai jamais plus seul" Enfin quand descendra sur les ailes du soir, ce doute qui vous jetterait dans tous les combats chimériques à la seule fin de n'être pas reconnu pour seul et véritable ennemi, j'entrerai voluptueusement dans la sérénité du sommeil en murmurant : "Quand l'armée campe aux frontières, qu'elle soit dans la nuit son propre ennemi." Ainsi la poésie fait-elle avec un grand discernement le lit du farniente, car c'est là précisément qu'elle s'éveille pour « mettre le monde au monde et les hommes dans le monde des hommes ». En toute paresse et amitié, R.V. Le 25 avril de l’an XXX (Raoul Vaneigem) DES ŒUVRES QUE JE SOUHAITE FAIRE CONNAÎTRE Mawlana Djalâl-Ud - Dîn, Rumi, Le Divan Le Sefer de Moïse, dans La langue hébraïque restituée de Fabre - D'Olivet Edgar Allan Poe, Euréka Blaise Cendrars, Dan Yack

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