Cécile, une danseuse habituée à maîtriser son corps, découvre, dans sa vingt-deuxième année, qu’elle est atteinte de la maladie de Hodgkin.
L’occasion pour elle de s’interroger sur sa vie. Sur la vie. L’amour, la souffrance, la mort, le regard des autres.
Cécile se parle. Se découvre. Et, à l’intersection de ce dialogue, une autre voix se fait entendre. Celle du médecin qui la soigne. Il n’est pas malade, lui. Mais ça ne l’empêche pas de porter ses propres souffrances. Ses propres espérances. Et la voix du médecin fait ainsi étrangement écho à celle de Cécile. Ces deux voix qui avancent sur des chemins parallèles parviendront-elles à se rejoindre ?
Première édition
Éditeur : Labor
Date : 1993
Format : Livre
Auteur de Nu-tête
Nu-tête, paru chez Albin Michel, vient de valoir à Anne François le Prix NCR, chose qui ne doit pas lui peser davantage que son couronnement au prix Rossel. Anne François joue les frêles, mais c’est pour mieux ne pas gaspiller cette étonnante volonté qui transforme les êtres éprouvés en vrais écrivains. Ecrire, dit-elle, comme on filme. Un film que nul ne verrait jamais sur grand écran, un film destiné à l’intime projection de la lecture. A quel cinéma joue-t-on ? Deux personnages, le médecin et la danseuse, s’apprivoisent en un long champ/contre-champ de cent quarante pages. Très « Nouvelle vague », ils ne se disent presque rien, le corps suffit d’abord à faire plier tous les langages. Ils racontent, chacun à leur tour, et sans désordre,…
La deuxième à droite, et droit devant jusqu’au matin !
L’histoire commence le 3 octobre 2017 à Paris. Gabriel Brown, présentateur-vedette du journal de 20h sur la chaine de télé TV08 perd le contrôle de son véhicule. Immédiatement après ce choc, nous voilà propulsés le 17 juillet 1999 à Biarritz avec l’évocation d’une souffrance extrême : « je ne survivrais pas à cette nuit : j’avais trop mal (…) J’allais devenir fou. (…) Ma vie n’avait plus aucun sens » . Mais alors, quand commence cette histoire ? Si on ne peut vous le révéler sans déflorer l’intrigue, on peut vous dire que ce récit repose tout entier sur des allées et venues entre ces deux temporalités. Et Gabriel Brown en guise de trait d’union. Dans le présent , on suit le jeune homme de trente-sept ans au sommet de sa carrière et tout proche de réaliser son rêve de devenir journaliste d’investigation. Gabriel Brown qui se retrouve propulsé aux devants de la scène médiatique avec un article-people publié dans Starmag . On s’attache à lui d’autant qu’on cherche à comprendre ce qui l’a poussé, ce 3 octobre, à foncer à toute berzingue sur le pont de l’Alma. La soif de relever de nouveaux défis ? La peur d’assumer le désir d’enfant de son épouse Sam ? À moins qu’il ne s’agisse d’autre chose ?Dans le passé . On suit Gabriel à 19 ans par le biais de flash-backs qui nous permettent de comprendre en quoi cette année 1999 est charnière pour l’homme en devenir.1999, année du décès de son grand-père, ce monstre sacré du journalisme à qui il a tant envie de ressembler.1999, l’année des débuts de Gabriel en tant que journaliste. L’année de sa rencontre avec Sami, devenue son épouse entre temps. L’année de sa rencontre avec Jo.Jo qui l’obsède tant.En construisant La deuxième à droite, et droit devant jusqu’au matin ! sur un compte à rebours, Christophe Pirotte esquisse par touches la personnalité de Gabriel, cette identité qui se façonne au fil des rencontres et donne à voir l’entourage de Brown : Agathe, Julia, Sami, Jo. Mais aussi ses parents. Et sa grand-mère. Et de voir comment tout ce beau monde s’est mêlé et se mêle de qui est Gabriel Brown.Le premier roman de Christophe Pirotte fonctionne comme une enquête où les infos, distillées au goutte à goutte, ménagent une belle tension narrative narrative (on déplore uniquement le fait que les révélations – nombreuses – nous soient plus souvent « expliquées » que « données à vivre »). La chronologie perturbée force la concentration (si tous les flash-backs se situent en 1999, cela ne veut pas pour autant dire qu’ils apparaissent de manière chronologique). Il revient donc au lecteur d’agencer les pièces entre elles pour que surgisse le motif tissé par Pirotte. Ou plutôt les motifs. Car comme souvent dans un premier roman, nombreux sont les thèmes abordés.La place et le rôle des grands-parents dans la construction identitaire, mais aussi le poids de la famille et de la reproduction , comme inévitable, quand on en ignore les secrets. Ou encore la question de la (sur)exposition d’un personnage public et de la chaleur, suffocante, des projecteurs quand ils sont placés un peu trop près.Au final, derrière cette histoire d’ascension et de chute, se posent surtout les questions « c’est quoi réussir sa vie ? » et « comment poursuivre ses rêves ? ». Surtout quand on se rend compte de l’écart qui peut exister entre la matérialisation du rêve et le rêve lui-même. La réalité fait-elle toujours le poids face au fantasme ? Et si l’ombre valait mieux que la lumière ? Parce que réaliser ses rêves, c’est aussi grandir (on le comprend dès le titre en référence à Peter Pan). Quitter l’enfance pour rejoindre la rive vacillante du monde adulte. Et toute la souffrance qu’implique cet arrachement.Gabriel Brown aurait-il uniquement peur de grandir ou cherche-t-il à faire la part des choses entre ce qui lui convient vraiment de l’ombre ou de la lumière ?Et y arrivera-t-il ? Car il est aussi question de santé mentale, dans ce livre. Et de la difficulté à accepter la maladie. À moins que ce ne soient les soins qui s’avèrent pénibles à accueillir ? Et si c’était le fait d’aller bien qui faisait le plus peur ?Pirotte, en travaillant la matière riche de tous ces thèmes, resserre le filet autour de cet accident du 3 octobre, le moment où bascule la vie de son héros. A moins qu’elle n’ait basculé depuis longtemps, déjà ? Parce que c’est bien de cela dont il est question dans ce récit : de savoir quand commence l’histoire . Ou plutôt quand commence notre histoire, celle avec son lot d’événements, de traumas, de ceux qui nous déterminent, et nos actions, sans que l’on n’en sache plus…