De Rimbaud à Duras, de Simenon à Bourdouxhe, de Steeman à Aymé, rares sont les écrivains qui n’ont pas entretenu un lien – étroit ou non – avec le cinéma. Entre adaptations, réécritures et translations, les relations de la littérature avec le septième art prennent des formes innombrables et variées. Elles ont donné lieu à des chefs-d’œuvre et à des échecs, démontrant parfois que le « passage sur un autre plan » provoque inévitablement « du gagné et du perdu », comme le signale François Emmanuel. « La littérature et le cinéma forment un couple, pour le meilleur… et parfois pour le pire » rappelle Yves Namur en guise de préambule au colloque sur la littérature et le cinéma qui s’est tenu…
Le mouvement romantique en Belgique (1815-1850). II Vers un romantisme national
À propos du livre Nonum prematur in annum L'exigeant précepte d'Horace a trouvé, cette fois, sa rigueur dépassée, puisque c'est de 1948 qu'est daté le premier tome du présent ouvrage. Bien malgré nous, il est vrai : des occupations professorales absorbantes, la maladie ensuite, puis de cruelles épreuves familiales ont, trop longtemps sans doute, retardé la rédaction, la mise au point et l'achèvement de ce tome II et dernier. On s'en excuse. Après un tel délai, peut-être n'est-il pas inutile de rappeler à cette place le dessein qui n'a pas cessé d'être le nôtre. C'est de poursuivre, dans le milieu belge, entre 1815 et 1850, une enquête attentive sur l'évolution des idées, des tendances et des réputations littéraires. La suivant à la trace, nous avons cherché à en préciser la marche dans les esprits et dans les écrits de ce temps. Revues et journaux, préfaces et critiques nous ont fourni l'essentiel de notre documentation. Nous avons tenu le plus grand compte des influences étrangères, et singulièrement de celle du romantisme français, dont la contrefaçon multiplie alors les oeuvres parmi nous. Et nous n'avons pas négligé de mesurer, quand il y avait lieu, les répercussions des événements politiques ou sociaux sur le devenir, en nos provinces, de la «chose littéraire». Notre propos a donc été, dans l'essentiel, l'étude d'un mouvement d'idées. On aurait tort de chercher ici un relevé complet des auteurs belges de l'époque romantique et un catalogue de leurs ouvrages. Nous avons, pour notre modeste part, essayé de tracer un tableau abrégé de cette époque de notre passé littéraire dans quelques chapitres de la grande Histoire illustrée des lettres françaises de Belgique, dont nous avons naguère dirigé la publication avec notre savant confrère et collègue, M. Joseph Hanse. On nous permettra d'y renvoyer. Ici, la production nationale nous intéresse avant tout dans la mesure où elle rend témoignage de la marche des idées littéraires ou en illustre le cheminement. Volontairement réduites au minimum, nos indications bibliographiques sont, strictement, celles des textes qui ont fourni nos citations ou autorisé nos conclusions. En d'autres termes, notre dessein a été ici, avant tout d'apporter une contribution valable à l'histoire des idées, er souhaitant qu'elle puisse servir à illustrer un jour ce que notre regretté maître Fernand Baldensperger appelait «une sorte de philosophie de la vie et du mouvement en littérature». Nous ne nous flattons pas d'y avoir réussi. Du moins espérons nous qu'on pourra trouver aux pages du présent tome, comme à celles du précédent, des citations nouvelles ou peu connue: et des témoignages inédits,…
Littérature belge d’aujourd’hui : La Brosse à relire
Se présenter comme « critique littéraire » peut s’avérer une entreprise périlleuse. N’est-ce pas un rictus de défiance, voire de mépris, qui se dessine sur le visage de l’interlocuteur ? Quoi, « critique » ? Parasite, oui. Un bonhomme qui, incapable de torcher correctement un livre, épuise sa vie à passer au crible ceux des autres. Il les descend avec rancœur quand ils lui paraissent trop bons, ou les exhausse s’il est sûr qu’ils ne feront point trop d’ombre à son chef-d’œuvre en sempiternelle gestation. Jacques De Decker n’est pas critique littéraire, et pas parce qu’il a fait ses preuves de romancier, d’essayiste, d’homme de théâtre. Jacques De Decker est un passeur de littérature. Écrire un article est bien peu de chose. Résumer une intrigue, décrire les tropes et les inflexions d’un style, évoquer un contexte, décrypter même une symbolique cachée… N’importe quel habile étudiant en rhéto’ peut s’en sortir haut la main. Mais tendre un livre à un inconnu, le convaincre qu’il va, par là, à la rencontre d’une singularité, d’une voix, d’un regard, et que cette expérience le travaillera longtemps au corps, à l’âme, jusqu’à le transformer, immanquablement : voilà le vrai travail de celui que l’on nomme par paresse, par commodité, le « critique littéraire ».De Decker ne se contente donc pas de régurgiter, en un brouet plus aisé à mâcher mais forcément affadi, les nourritures spirituelles qu’il a ingurgitées. Il fonctionne par cercles concentriques, partant du plus large (contexte de l’œuvre, ancrage identitaire et historique), cernant ensuite avec minutie le propos et son auteur (parfois de façon très intimiste), visant enfin au noyau (la langue et sa portée musicale, les symboles, les lignes de force). Et cela fait plus de quarante ans qu’à chaque article, « ça prend ». Pour Amélie Nothomb et William Cliff, Véronique Bergen et Jean Muno, Jacques Sternberg et Jean-Pierre Verheggen, Suzanne Lilar et Conrad Detrez. Et pour les quelque trente autres de qui, dans les pages du journal Le Soir , De Decker s’est attaché à saluer le talent, l’humour, la puissance, la beauté, l’esprit.Ce recueil d’articles ne se lira pas d’une traite, certes, ni toujours en accord parfait avec les engouements et les choix de leur signataire. Il s’extraira du rayon avec en tête la question « Tiens, qu’en a dit De Decker ? » ; et à tous ceux qui débutent dans cette expérience d’authentique partage qu’est la Critique majuscule, il servira, par son élégance et sa finesse, de leçon d’écriture.…