L’épreuve

RÉSUMÉ

Dans son préambule, Philippe Lekeuche questionne le sens du travail du poète, après longtemps de poésie. « Faire » de la poésie, dit-il, est un « acte ». « Il n’y a pas de mots d’amour, il n’y a que des preuves d’amour, cela a un prix (par exemple donner sa vie), tout comme cette pratique de la poésie exige des renoncements, et même le sacrifice – je le souligne –, la question restant ouverte : le sacrifice de quoi ? On ne le sait pas, on l’apprend avec les années, dans l’endurance. Je veux dire qu’on le vit, c’est une épreuve. Et quant à la réponse de savoir si cela en vaut la peine, elle fait toujours défaut. Et qu’importe ! On n’a guère besoin d’elle. »

À PROPOS DE L'AUTEUR
Philippe Lekeuche

Auteur de L’épreuve

BIOGRAPHIE Né à Tournai le 19 janvier 1954, Philippe Lekeuche entame, en 1973, des études de psychologie qui le mèneront jusqu’au doctorat (1978). Chercheur et praticien dans les domaines de la psychologie et de la phénoménologie clinique, il a été, à l’Université catholique de Louvain, l’assistant du professeur Jacques Schotte, psychiatre et psychanalyste de renommée mondiale. À cette époque déjà, il avait donné un cours magistral sur Les Frères Karamazov de Dostoïevski. Il enseignera dans cette même université et en deviendra, en 2019, professeur émérite. Il est également membre du Psychological Sciences Research Institute et du Centre de Recherche sur l’imaginaire. Il a été aussi l’initiateur d’un cours inter-facultaire intitulé Psychologie, Littérature et Création auquel il invita de nombreux écrivains. Dans ce cadre, il s’est tout particulièrement penché sur le rapport entre la création en art et son approche psychanalytique, dirigeant ainsi des études sur Kafka, Virginia Woolf, Duras, Nietzsche, etc. Philippe Lekeuche écrit ses premiers poèmes à l’âge de douze ans, il découvre et lit assidûment Charles Péguy. Une autre rencontre importante sera celle, en 1968, de Madeleine Gevers, amie intime de Michel de Ghelderode. Elle enseignera au jeune poète, selon ses propres aveux, «tout ce qui peut s’apprendre de l’art poétique». Ses publications de jeunesse — dont Poème de la folie retrouvée — le seront sous pseudonyme (Maurice Carême, en personne, lui conseillera d’abandonner). En 1978, il fait la connaissance d’Albert Ayguesparse qui publie ses poèmes dans la revue Marginales. En 1983, c’est une étude sur Arthur Rimbaud qui paraît dans Les Cahiers internationaux du symbolisme. Il lit, à cette époque, Rilke, Hölderlin, Kierkegaard, Heidegger, Freud ou Nietzsche dont la fréquentation lui aura appris que la pensée véritable est en rapport intime avec la vie. Ce que Hölderlin avait exprimé par : «Celui qui a pensé le plus profond aime le plus vivant.» Mais sa véritable entrée en littérature, il la signe avec le Chant du destin (Cadex, 1987). On en doit la préface à Jacques De Decker qui se demandait s’il s’agissait là d’une poésie philosophique, mais préférait parler de «folie de la possession par le verbe». Jean Tordeur, de son côté, salua le «surgissement d’un poète vraiment nouveau». Et, lorsque parut, dans la collection Feux que dirigeait Liliane Wouters, Si je vis (Éditions Les Éperonniers, 1988), le même Jean Tordeur fut conquis par sa «fièvre questionneuse». Essentiellement poète, il est également l’auteur de nombreux articles sur des poètes et écrivains contemporains. On lui doit, à ce jour, une vingtaine d’ouvrages récompensés par les prix Polak et Jean Kobs de l’Académie, le prix Carême et le prix triennal de poésie, en 1995, pour Celui de rien (Les Éperonniers, 1993). En 2015, la revue Nu(e), sous la direction de Myriam Watthee-Delmotte, lui consacre un numéro spécial où interviennent poètes et universitaires. Après Si je vis, qui avait attiré l’attention sur le nouveau poète qu’il était, Philippe Lekeuche a publié Quatre écoutes du tonnerre (Cadex-Les Éperonniers, 1990), Celui de rien (Éditions Les Éperonniers, 1993), L’Existence poétique (Éditions Cadex, 1995) ou L’État rebelle (Les Éperonniers, 1998). En 2015, les éditions Le Taillis Pré publient, sous le titre L’Éclat noir du désir, un fort volume accompagné d’un avant-dire de l’auteur ; en fait, une version revue et remaniée de Si je vis, Celui de rien et L’État rebelle. On trouve, dans cet ensemble, quelques balises propres à cerner le conscient et l’inconscient du poète. Ainsi écrira-t-il : «Le poète en moi, quand il existe, est plutôt une sorte d’animal poétique» ou «L’Idéal en poésie touche à l’Abîme» quand ce n’est pas «Le poème ne sert pas plus à quelque chose qu’un arbre, qu’une montagne, qu’une rivière». Dans Une vie mélangée (L’Herbe qui tremble, 2014) il écrira même : « La poésie est un couteau dans la chair.» Poète en équilibre instable, entre une chose et son contraire, maniant cette fameuse «loi des contraires» chère à Héraclite d’Ephèse, parfois tourmenté par les êtres et leurs comportements, par la question du comment vivre, il est fortement interpellé par la figure de Dieu qu’il n’hésite pas à injurier. Il faut, d’ailleurs, parler à son propos d’une tragédie de la Foi ou d’un combat spirituel permanent. Ainsi écrit-il dans Celui de rien : «Je me bats tout le temps avec Dieu.» Quant à la Passion du Christ, c’est un sujet qu’il a plus d’une fois traité, que ce soit, sous la forme de sonnets, dans L’Homme traversé (Cadex, 2003) ou dans L’État rebelle (Les Éperonniers, 1998), recueil où le Christ et Dieu se confondent, comme sa foi, ses colères, ses doutes ou ses injures. D’autres recueils jalonnent encore cette œuvre. Citons, par exemple, Le Plus Fou des hommes (Le Taillis Pré, 2008), Le Feu caché (L’Herbe qui tremble, 2008), Le Jour avant le jour (Le Taillis Pré, 2013), préfacé par Liliane Wouters ou Poème à l’impossible (Le Taillis Pré, 2018). Autant de livres qui abordent les failles de l’existence et, pour emprunter ce mot à Novalis, «le réel absolu» fait de l’amour et ses déceptions, la solitude, le désastre ou la mort. Dans Les Lettres françaises, Jean-Claude Hauc écrivait : «L’extrême abandon à ce que nous ignorons et le refus de toute imposture caractérisent depuis toujours la démarche de Lekeuche, faisant songer au courage poétique dont parle Hölderlin.» C’est de la sorte qu’il faut lire cette œuvre. Philippe Lekeuche a été élu le 29 avril 2017 à l’Académie, il y succède à Liliane Wouters.
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Le Carnet et les Instants

La poésie est sacrifice – sacrifice pour quoi ? – nul ne le sait, mais sacrifice indubitable. L’idée surgit dès le préambule de L’épreuve de Philippe Lekeuche et traverse ses trois mouvements. Le recueil est en effet construit en forme de sonate et sa partition est rythmée par les peintures d’Isabelle Nouwynck. Au fil de ses développements, les thèmes s’introduisent, sont repris, modulés, croisés en contre-chant, mais jamais résolus.Le premier mouvement expose un état. Le poète habite en solitude. Cette solitude est intense de réminiscences et de méditations ; elle est le prélude au poème et l’univers que requiert son travail. Isabelle Nouwynck accompagne ce mouvement d’un dessin représentant…


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Envie de prendre la vie en main ? La vôtre et celle des autres ? Tenté, tentée, depuis longtemps, par les initiatives citoyennes, les rapprochements, les liens sociaux à resserrer ? Marre du déprimant TINA, du gris ambiant dans les têtes ? Envie de positif et de joie ? Désir fou d’être regonflé, de sourire à nouveau ? Pour sûr, il n’y a pas que le film Demain pour faire pétiller. On peut aussi s’immerger dans la poésie résolument positive, amoureuse de la vie et des rencontres, dans la poésie éminemment « sociale » et sociétale de Laurence Vielle. Parce que Laurence Vielle a décidé, une fois pour toutes, de laisser au placard ses petits ou grands problèmes d’ego – ses soucis de gnêgnêtre comme a dit une fois Jean-Pierre Verheggen –, d’être généreuse, de prendre à bras le corps les questions du « vivre ensemble » et du « bien vivre », de considérer la poésie, le fait d’écrire la poésie, comme un acte social, une façon d’accompagner les questions qui traversent ou taraudent bon nombre d’entre nous. Tisser des ponts. Créer des liens. Exalter l’inventif. Le créatif.Pas étonnant, dès lors, que Laurence Vielle ait été, en 2016 et 2017, notre poète nationale. Jamais entendu parler de l’affaire ? Petit rappel historique alors pour ceux et celles qui seraient passés à côté. Début des années 2010, les Maisons de la Poésie de Namur et d’Amay, le PoezieCentrum de Gand et VONK en zonen d’Anvers constatent : de part et d’autre de la frontière linguistique, les poètes et les littérateurs ne se connaissent plus, n’ont aucun lien, quasi, les uns avec les autres. Envie alors de relancer cette vieillerie, disparue dans les années 1940 : se doter d’un ou d’une poète nationale. Le but de l’affaire ? Créer des ponts. Faire en sorte que la poésie et la langue d’une région se fassent lire et entendre dans les autres régions, dans les langues des autres régions. La « tâche » du poète choisi ? Durant deux années, s’inspirer à tout va de la Belgique. De ses clichés, si on le souhaite. De son actualité, si ça vous dit. De ses drames et bonheurs. Des gens que l’on rencontre. Donner ainsi régulièrement à lire des poèmes sur les sites des journaux partenaires et celui dévolu au poète national . Donner à lire ces poèmes sur scène, de part et d’autre de la frontière. C’est Charles Ducal, le néerlandophone, qui essuie les plâtres . Laurence Vielle, la francophone, lui succède avant de passer la main, cette année, à Els Moors, autre poète flamande. Lire aussi : Un dürüm gratuit. Charles Ducal, poète national ( CI n° 188) Domo de Poezia , le nouveau recueil de Laurence Vielle revient sur l’affaire. Donne à lire les poèmes écrits pour la circonstance, dans les trois langues du pays. Mais pas que. C’est que, comme à son habitude, Laurence Vielle a fait sienne, de façon personnelle, radicale et enthousiaste, cette « tâche » venue d’ailleurs. Parce que Laurence Vielle est ainsi : il suffit qu’elle devine à quel point ce qu’on lui demande lui permettra d’inventer des passerelles, pour que, pan !, la machine Laurence Vielle se mette en branle. Et ici, pour le coup, on est gâtés. Laurence Vielle, la généreuse, la débordante, s’est littéralement surpassée. Écrivant des ritournelles entêtantes et douces en l’honneur de ceux et celles qui triment, des laissés pour compte, des vivants et des morts, de ceux qui rêvent encore. Écrivant en deux langues parfois, invitant ses amis flamands à faire avec elle un Tour de Belgique à pied, à chercher le centre poétique de la Belgique, co-écrivant avec Charles Ducal une pièce de théâtre bilingue, etc., etc.Et puis, cerise sur le gâteau, un CD accompagne l’affaire. Comme sur le CD accompagnant Ouf , le précédent recueil de Laurence Vielle , c’est Vincent Granger qui est aux manettes. Son parti-pris ? Faire des voix et des mots des textures. Ne pas subordonner la musique aux textes. Ça lorgne tout aussi bien du côté de la musique électro, de la b.o. du film Demain , du côté de la « simple » déclamation ou de la chanson. Musiques minimalistes. Éthérées. Inventives. Douces. Joyeuses et plaisantes. Vincent Tholomé Domo de Poezia / bouteilles à la mer… Ce sont les poèmes écrits par Laurence Vielle, pendant le temps de son rôle « poélitique » de poétesse nationale (2016-2017), accompagnés d'un CD où Vincent Granger, aux clarinettes, aux claviers, aux sons, y apporte son talent de musicien. Des poèmes en lien avec la ville, les mouvements du monde, un voyage en Indonésie, les journées de la femme, de la poésie, une traversée de Saint-Amand, de la Belgique, des mers, du pays, de la vie. Un appel à ouvrir chacun une maison de la poésie. Des mots comme bouteille à la mer, tu viens de la ramasser sur le rivage, toi lecteur. Ouvre-la. C'est pour toi. Domo de Poezia / flessenpost... Dit zijn de gedichten die Laurence Vielle schreef tijdens haar «poëlitieke» functie van dichter des vaderlands (2016-2017). Ze worden vergezeld door een cd waarop Vincent Granger met klarinet, klavier en klank zijn muzikale talent de vrije loop laat. 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