La séduction du prince des ténèbres, la fascination pour les forces obscures n’ont pas disparu, loin de là.
Dans cet ouvrage, Arnaud de la Croix retrace l’histoire inédite d’un pacte qui a traversé les siècles et découvre, derrière les légendes ou les cas bien réels, les raisons qui ont conduit les uns à imaginer et les autres à signer un engagement avec le démon, personnification du mal.
Apparu chez saint Augustin vers 427, le thème du pacte avec le diable vise d’abord ceux qui, dans un monde en voie de christianisation, s’adonnent encore à des rites magiques païens. Au Moyen Âge, avec Thomas d’Aquin, ce sont les magiciens savants, praticiens de l’alchimie ou invocateurs d’esprits, qui sont à leur tour incriminés. Le véritable Faust, mage de la Renaissance allemande, sera le plus célèbre mais aussi le plus méconnu d’entre eux. Aux XVIe et XVIIe siècles, les sorciers et sorcières populaires, par milliers, sont soupçonnés de s’être voués à Satan. Au XXe siècle, le blues et le rock, de Robert Johnson à David Bowie en passant par les Rolling Stones et Led Zeppelin, sont également suspects d’accointance avec Mister D.
Auteur de Le pacte avec le diable. De saint Augustin à David Bowie
Philosophe, historien dont les essais interrogent les marges, les traits passés sous silence de l’Histoire (Les illuminati, Les templiers, La religion d’Hitler, Treize complots qui ont fait l’histoire, Himmler et le Graal…), Arnaud de la Croix analyse dans Le pacte avec le diable la généalogie du motif d’un commerce avec les démons. Apparaissant dans l’œuvre de saint Augustin, l’idée du pacte diabolique se transforme dans ses attendus au fil des siècles, recouvrant diverses pratiques. Dans le chef de l’évêque d’Hippone, père de l’Église, auteur de La cité de Dieu, l’accusation d’entente avec le prince des ténèbres revêt un sens stratégique : à l’heure où, au 4e, 5e siècle, la chrétienté doit affermir ses bases et triompher…
Que peuvent nous apprendre les prédictions de l' Almanach de Mathieu Laensbergh en matière d'éveil aux idées de Lumières, au XVIIIe siècle? Quel changement de mentalité à l'égard des pratiques magico-religieuses laissent entrevoir les commentaires du livret de pèlerinage à Saint-Hubert en Ardenne? C'est à de telles questions que tâchent de répondre les essais contenus dans le présent ouvrage, à partir d'une documentation associant littérature « populaire », journaux, catalogues de libraires, chansons, etc. La communication orale y trouve une place importante, notamment quand elle se fait dialectale. La diffusion de valeurs et d'interrogations communes s'opère aussi par le théâtre, où drames sérieux, vaudevilles et opéras-comiques — nous sommes au pays de Grétry — composent un véritable «paysage culturel» moyen. On verra ainsi comment le Laensbergh ou les mémoires rédigés à l'occasion de procès opposant des communautés rurales aux autorités manifestent le progrès du rationalisme critique, à travers un lexique où le bourgeois sensible côtoie l'aristocrate éclairé . De leur côté, les livrets de pèlerinage offrent une mutation du regard sur la «neuvaine» contre la rage, la protection sacrée cédant la place à la conception du contrat marchand et à l'hygiénisme. La réflexion sur l'«amélioration de l'espèce humaine», avec les questions de l'eugénisme, de l'alimentation des enfants et de la vaccination, entrent dans le débat qu'entretiennent le Journal encyclopédique et le Giornale enciclopedico di Liegi . Comment s'étonner de la vigueur avec laquelle les classes populaires verviétoises vont combattre l'ancien régime dans les années qui précèdent sa chute? Une figure d'exception domine intellectuellement et pratiquement l'événement : Nicolas Bassenge. La chanson «patriotique» donne la mesure de son charisme et de l'évolution que connaît celui-ci, quand se développera l'aspiration à une société pacifiée. Une même exigence de conciliation et de pragmatisme s'observe dans le traitement accordé au wallon sous un régime français moins jacobin qu'on ne l'a parfois dit. Y a-t-il continuité ou rupture entre le catalogue de la lecture à la fin du XVIIIe siècle et celui de l'époque romantique? Quelles nouveautés foncières se font jour, à côté d'une tradition persistante du livre «utile» visant désormais l'entrepreneur balzacien? Quelle réception pour un romantisme souvent jugé «dégoûtant»? Avec Georges Sand et les Vésuviennes de 1848, la revendication féministe fera irruption sur la scène locale, tandis qu'alterneront dans la chanson de conscrit complaintes de la fille-mère…