La parole comme voie spirituelle : Dialogue avec l’Inde


RÉSUMÉ

Loin de l’anthropocentrisme qui depuis quelques siècles règne en Occident, dans l’Inde ancienne la parole est tenue pour une force qui irrigue toutes les strates de l’être, de l’élémentaire au divin en passant par le végétal et l’animal. Au lieu de nous séparer du non-humain, elle devient alors ce qui nous y relie – tout en se reliant elle-même aux bruissements du monde non moins qu’à la musique. Dans cette perspective, le chanteur s’accorde aux oiseaux, le poète révèle les correspondances qui unissent l’infime au large, et le cœur de l’homme coïncide avec celui de l’univers.
L’Inde vient par là nous rappeler qu’un cheminement spirituel peut prendre la forme d’une quête esthétique. Le dépassement de l’égocentrisme n’y passe plus par l’impératif de se rendre utile, mais par une joie devant la beauté qui, comme la vie, se donne pour rien.
Nourrie par la pratique du yoga, du chant classique de l’Inde et des mantras, cette interrogation revient aux textes fondateurs de différents courants de pensée indiens, des Védas aux Tantras. Et elle les met en résonance avec certains mystiques et philosophes occidentaux, comme avec des thérapeutes de l’âme qui en appellent aussi à la puissance de la parole.





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Le Carnet et les Instants

Sandrine WILLEMS, La parole comme voie spirituelle. Dialogue avec l’Inde, Seuil, 2023, 200 p., 19,50 € / ePub : 13,99 €, ISBN : 9782021493276Dans son dernier essai, l’écrivaine, philosophe, psychanalyste et réalisatrice Sandrine Willems nous invite à un décentrement, nous propose un voyage mental, esthétique et conceptuel loin de l’anthropocentrisme qui a façonné l’Occident. S’ils se voient remis en question de nos jours, de l’intérieur de nos sociétés, l’anthropocentrisme de l’Occident et son primat de l’humain ont eu une incidence sur notre perception de la parole réduite à la sphère humaine, confisquée par cette dernière. L’ouverture de l’esprit aux dimensions qui échappent à la raison se fait sœur d’une expérience…


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Le demi-siècle 1965-2015 fut marqué par une série de crises ou de mutations profondes, dont notre vision du monde occidentale ne pouvait sortir intacte : révélation accrue des crimes nazis et staliniens, conséquences de la décolonisation, contestation de mai 68 et maoïsme, chocs pétroliers, fin de l’U.R.S.S. et déclin du communisme, croissance des pays émergents, etc. Telles sont les turbulences historiques devant lesquelles Éric Clémens, philosophe de formation, a tenté de repenser les bases de la politique et de l’éthique – rappelons notamment son essai Le même entre démocratie et philosophie (Lebeer-Hossman, 1987) –, mais sans éluder la nécessité de l’action concrète, puisqu’il a notamment organisé ou participé à de nombreux débats publics et qu’il milite pour l’attribution à chaque citoyen d’un « revenu de base inconditionnel ». Le livre qui parait aujourd’hui rassemble des textes publiés tout au long de ces années, jalons d’une recherche exigeante et rigoureuse entre interrogation philosophique et écriture poétique ; son titre l’indique, égalité et liberté sont deux préoccupations – éminemment républicaines – qui dominent, ou plutôt arriment le questionnement auquel s’astreint l’auteur. Un tel questionnement imposait au philosophe d’en revenir une fois encore aux origines de l’humanité et à la manière dont ses prédécesseurs les ont expliquées. Pour Clémens, le devenir-homme se détache d’une préhistoire obscure par la formation du langage verbal, lequel relève de la pure fiction  : il n’est nullement le reflet du réel, comme on le croit souvent, et son statut est celui d’une convention entre sujets parlants. C’est par lui pourtant que s’élaborent les fondements de la société humaine : « contrat social » (Hobbes), interdits du meurtre et de l’inceste (Freud), dispositifs éthiques et politiques qui tentent de juguler les multiples divisions entre individus et entre groupes. De fil en aiguille, l’auteur conclut que le noyau primordial de l’éthique est l’interdit de porter atteinte au corps dans sa dimension symbolique, comme le montre a contrario le régime bestial des camps nazis : c’est le respect du corps vivant et parlant, en tant que porteur d’une identité, qui fonde tous les autres prescrits moraux.Il faut donc ne pas confondre la violence dans le monde animal – lutte pour la survie de l’individu et de l’espèce – et la violence entre humains, rendue possible par le verbe : c’est en effet le discours fanatique ou manipulateur qui bloque le dialogue, catalyse la volonté de dominer, induit les comportements que nous qualifions paradoxalement d’« inhumains ». Ainsi Clémens s’interroge-t-il à plusieurs reprises sur les usages que nous faisons de la langue, discernant deux grands registres : le communicatif et le poétique – opposition traitée jadis par Julia Kristeva. Autant le premier est régi par l’impératif de clarté, la continuité logique et les règles de grammaire, autant le second, prenant le risque de l’obscurité et de l’indétermination, tente d’ouvrir l’éventail des possibles en tirant à hue et à dia normes et routines linguistiques. Or, c’est le poétique qui, dans la Grèce antique, a précédé l’invention de la démocratie ! En effet, L’Iliade et L’Odyssée abondent en joutes verbales entre rivaux, mais aussi en personnages intérieurement partagés, ouvrant ainsi la voie au débat public sur l’agora d’Athènes. Il est vrai, cette priorité du poétique sur le politique ne se maintiendra pas constamment au cours des siècles.Il n’en reste pas moins que la liberté de parole est le plus fondamental des droits de l’homme, et qu’elle fonde l’espace politique comme espace de dialogue entre sujets libres et égaux. Hormis le cas des régimes totalitaires, la question est de savoir comment maintenir ouvert ce dialogue, éviter que les médias n’imposent à tous un discours moyen, prêt-à-penser. C’est ici précisément que doit intervenir cette expérience particulière que révèle le travail poétique des Mallarmé, Artaud ou Joyce : telle qu’ils l’emploient, la langue est ce qui fait apparaitre aussi bien ces deux grands contradictoires que sont la division et le lien – c’est pourquoi elle est le lieu par excellence de la liberté. Mais, on l’a dit plus haut, ceci n’élude pas la nécessité de l’action, qui est avec le langage dans une relation de « co-appartenance », sans primat de l’un sur l’autre…  Le livre de Clémens, faut-il le préciser, est cent fois plus riche et plus nuancé que ces quelques propositions glanées au fil des pages. Il est aussi d’une lecture austère, émaillé de supposés-connus et autres formulations très synthétiques : visiblement, le philosophe-poète n’a pas voulu qu’on le comprenne trop vite, craignant…

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