Ce n’était qu’une simple photographie. Banale, jaunie, mal prise d’ailleurs. Mais je ne l’avais jamais enlevée de son cadre agressivement doré et, depuis des années déjà je l’avais dans ma chambre, accrochée au mur, près d’un coin. Je devais avoir six ou sept ans sur ce cliché. Un souvenir de mon enfance, m’avait-on toujours dit. On ne voyait pas mon visage. Je regardais un mur de briques qui formait un angle. Dans ce mur, il y avait une petite porte; on aurait pu jurer qu’elle devait être verte. Derrière ce mur, une gigantesque façade sans fenêtres. C’était sans doute à cause de cette succession de plans lisses, sinistres, que j’avais gardé la photo. Mais je compris la véritéque beaucoup plus tard.Quand un soir, après avoir erré dans un quartier que je ne connaissais pas, je me retrouvai devant le décor de la photo. La petite porte était verte, en effet. Un enfant regardait le mur de briques. Il devait avoir six ou sept ans. On ne voyait pas son visage. Inutile d’en douter, c’était bien l’enfant de la photo que j’avais chez moi. J’avais toujours cru que cette photo me représentait, mais ce n’était pas vrai. Je le savais à présent. Elle représentait cet enfant qui m’était inconnu, ce paysage de briques qui sans doute… Car je n’eus pas besoin de pousser la petite porte verte pour savoir ce qui m’attendait derrière ce mur.
Auteur de La géométrie dans la terreur
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