« Les créateurs de mode sont des dictateurs de goût. » Karl Lagerfel
Homme caméléon, retranché derrière ses masques, Karl Lagerfeld a créé un personnage devenu mythique. Styliste mais aussi photographe, designer, éditeur, le Kaiser de la mode n’a cessé de fictionner sa vie et de développer une œuvre multiple, unique, riche et fascinante, à la rencontre des XXe et XXIe siècles.
Ce livre propose de se confronter à cette œuvre à travers les inspirations, la vie et les réalisations de celui qui fut l’une des figures centrales du monde de la mode. Un moyen de comprendre son langage, son esthétique et de revoir ses plus belles créations pour Chanel, Fendi ou Chloé.
Autrice de Karl Lagerfeld
Les éditions EPA inaugurent une nouvelle série, dédiée au monde de la mode, en collaboration avec le magazine spécialisé Silhouette. Consacrés respectivement à Karl Lagerfeld et Alexander McQueen, les deux volumes liminaires sont signés par Véronique Bergen. Il y a (au moins) deux manières de lire Karl Lagerfeld et Alexandre McQueen : par l’image ou par le texte. EPA a en effet résolument misé sur des beaux-livres, à la ligne graphique dynamique et inventive, et offrant une iconographie aussi abondante que somptueuse. Écrin luxueux pour un sujet, la mode, lui-même associé au luxe et à la sophistication. Les illustrations retenues mettent en avant les créations des deux designers, et nous emmènent sur les…
Faire vivre l’opéra, un art qui donne sens au monde, Entretiens
À l’occasion de la septantième édition du festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence, un festival que Bernard Foccroulle dirige depuis douze ans, paraît un recueil d’entretiens au fil desquels celui qui fut auparavant le directeur du Théâtre royal de la Monnaie (1992-2007), livre son regard sur l’opéra, ses devenirs, son avenir, ses enjeux actuels. Pour couronner sa dernière saison à la tête du festival d’Aix, il dresse un bilan, une cartographie de la vitalité de l’opéra contemporain, interroge sa place dans la cité, son actualité, sa capacité à penser les mutations du monde. Si, loin d’être devenu une institution muséale, tournée vers le passé, l’opéra affiche de nos jours une créativité audacieuse et une connexion à un monde qu’il questionne, c’est, entre autres, grâce à l’engagement de directeurs ouverts non seulement aux grandes œuvres du répertoire — des œuvres recréées, réinterprétées par l’action conjointe de la direction musicale, du metteur en scène, des interprètes — mais aux nouvelles créations. La vie des chefs-d’œuvre est éternelle, leur richesse étant gage d’une relance infinie des interprétations, des visions qu’on porte sur eux. Non seulement, la manière de chanter, de mettre en scène, de se rapporter aux œuvres du répertoire ne cesse d’évoluer, mais les lectures que Pierre Boulez/Patrice Chéreau, René Jacobs/Trisha Brown, Marc Minkovski/Olivier Py, Sir Simon Rattle/Stéphane Braunschweig, Louis Langrée/Peter Sellars ont produit de Janacek ( Dans la maison des morts ), Monteverdi ( L’Orfeo ), Mozart ( Idoménée, roi de Crête ), Wagner (la Tétralogie, L’Anneau du Nibelung ), Mozart ( Zaïde ), plus que de simplement les dépoussiérer, les ont revitalisés dans des directions insoupçonnées. Apport des chorégraphes dans la mise en espace, élargissement du geste lyrique aux petites formes (mise en scène des lieder de Schubert de Winterreise , spectacle Trauernacht autour de J. S. Bach…), l’opéra renouvelle son langage, ses horizons, repense sa fonction dans un monde globalisé. Partisan de dialogues interculturels, de rencontres entre la forme européenne de l’opéra et les formes « opératiques » du reste du monde — nô, kabuki, opéra chinois, musique arabe, sud-américaine… —, soucieux de ne pas reconduire la domination de la culture occidentale sur les autres, conscient des pièges à éviter, Bernard Foccroulle met en garde contre les risques de standardisation, d’uniformisation que génère la mode actuelle du cross-over, de la world music qui brasse des clichés folkloriques de traditions extra-occidentales dont elle détruit l’âme, la profondeur. « Je vois une différence radicale entre les créations interculturelles et le cross-over qui est une tendance actuelle, une manière commerciale et superficielle d’inclure des ingrédients « exotiques « — ce qui ne mène à rien d’autre qu’à une culture consumériste standardisée ».Né en Italie au début du XVIème siècle, ayant renouvelé son écriture, ses formes, ayant accompagné l’évolution des pensées, des mentalités dans les pays européens, l’opéra connaît aux XXème et XXIème siècles un succès sous toutes les latitudes. Bernard Foccroulle insiste sur les défis qu’il se doit de relever afin de demeurer une scène où les consciences interrogent leur époque et proposent des alternatives à l’état de choses. L’un de ces défis a trait à son extension mondialisée, à l’inventivité dont il devra faire preuve musicalement, artistiquement afin de ne pas succomber à la facilité d’un art non plus total mais global, avalé dans l’industrie du spectacle.Davantage qu’une fenêtre ouverte sur un monde en évolution, l’opéra en sa multitude de formes (opérette, comédie musicale, opéra-comique…) en est une des caisses de résonance, un des acteurs qui a à prendre à bras le corps, par la revisitation des mythes ou une narration contemporaine, les problèmes et défis actuels (inégalités sociales, réchauffement climatique, crise migratoire, crise environnementale…).Signalons la parution simultanée du très beau livre illustré L’Opéra, miroir du monde, Festival d’Aix-en-Provence 2007-2018 également chez Actes Sud, lequel retrace les spectacles qui ont été montés sous Bernard…
Mémoires pour nuire à l’histoire artistique de mon temps
Davantage que simplement donner le ton, le titre résonne comme un manifeste esthétique. C’est dans l’espace littéraire du peintre, graveur, dessinateur et illustrateur Félicien Rops (1833-1898) que nous entrons. Le recueil Mémoires pour nuire à l’histoire artistique de mon temps se compose de textes sélectionnés par Hélène Védrine, souvent tirés de la correspondance de l’artiste, au fil desquels l’on découvre ses théories esthétiques, sa conception (mouvante, multifibrée) de la modernité, la centralité de l’érotisme, son invention d’une forme de dandysme inspirée par Baudelaire, forme qu’il appelle le druidisme. Ce qui frappe dans la pratique épistolaire mais aussi dans les articles de Félicien Rops, c’est son individualisme forcené qu’il érige en principe d’existence et de création. Un individualisme radical qui implique de se soustraire aux modes, aux goûts mais aussi aux sirènes du succès. Dès qu’une brochette de critiques de renom (Octave Mirbeau, Joséphin Péladan, Joris-Karl Huysmans, Edmond Picard…) loue ses œuvres, Rops répond par un pas de côté en direction de l’hermétisme, de l’élitisme. La modernité qu’affectionne Rops est teintée de décadentisme, d’une aura Fin-de-siècle qui lorgne vers l’occulte, l’asocialité et le refus de tout public comme de toute publicité. J’ai en horreur les expositions (…) En art, j’ai la haine de toutes les popularités et de toutes les démocratisations. Contrairement à tous ceux qui croient que l’on travaille à sauver la société en faisant un croquis ou un sonnet, je crois que l’art doit rester un DRUIDISME, ou se perdre. Alors qu’au 21e siècle, nombreux sont les artistes à courtiser la gloire — syndrome Andy Warhol du quart d’heure de renommée pour tout un chacun —, Rops revendique l’hermétisme de celui qui se pose en « éternel indompté » dont l’art est à jamais non soluble dans la sphère officielle. Porteuses d’un parfum de scandale, ses œuvres, son art érotique ( Pornokratès ), ses attaques anticléricales ( La tentation de saint Antoine ) ont choqué le monde de l’art. Illustrateur de génie des œuvres de Charles De Coster, de Baudelaire, de Barbey d’Aurevilly, Rops donne libre cours à ce qu’il nomme ses « ropsodies hongroises », carnets de voyage qui retracent sa quête d’origines hongroises, son sentiment d’étrangeté par rapport à la Belgique.Le ton acerbe, la pratique de l’autodérision parcourent ces textes qui ne ménagent pas leurs attaques contre toutes les écoles, tous les mouvements artistiques. Résolument anti-grégaire, Rops en appelle à l’énergie érotique ( lato sensu ) comme combustion de la création : fureurs érotiques et fureurs créatrices sont sœurs l’une de l’autre. Lui qui sent vibrer en lui l’âme des Magyars, place le champ de l’art sous la lumière de la pulsion sexuelle, du cycle vital.Dans une lettre adressée à Octave Mirbeau en 1886, il affirme une fois de plus sa solitude, sa rupture avec l’ordre des artistes bourgeois : « j’aime mieux les porchers et les porcs que ces êtres faussement artistes et véritablement imbéciles ! ». Grand maître des eaux-fortes, Rops grogne, mord, persifle, débusque les artistes aseptisés, les moutons de Panurge, les arrivistes, sans jamais s’exempter des foudres qu’il réserve à ses confrères. Véronique Bergen Cet ouvrage vise à rendre compte des projets littéraires de Félicien Rops. Empruntant à l’artiste les titres qu’il avait lui-même suggérés, cette sélection propose moins une reconstitution précise du projet inachevé de Rops qu’une mise en lumière des aspects divers de son écriture. Sous le titre Mémoires pour nuire à l’histoire artistique de mon temps sont réunis les textes, sélectionnés par Hélène Védrine au sein de l’abondante correspondance de l’artiste, qui ont valeur de manifeste et de théorie artistiques. Ils ont été classés selon les principaux axiomes de son œuvre: l’eau-forte, la modernité, l’art érotique, le druidisme. Les rares articles publiés de son vivant y ont été ajoutés. Dans chacune de ces parties, les textes sont présentés chronologiquement, afin de saisir l’évolution d’une écriture et d’une pensée.…