Une bande dessinée poignante qui nous plonge dans le quotidien d’un centre d’accueil pour mineurs et lève le voile sur les violences faites aux enfants.
Autrice et illustratrice de Gloria
G travaille comme assistante sociale dans un centre pour mineurs. D’apparence coquette et sportive, fana de selfies, elle dénote avec l’image qu’on se forge d’une professionnelle du domaine, qu’on voudrait les cheveux gras, le sourire éteint et les épaules ployées par la lourdeur des vécus auxquels elle se frotte. Et pourtant G se démène corps et âme pour ses protégés, s’investit dans leur existence cabossée, oublie ses plans personnels, happée qu’elle est par sa mission d’aide à autrui. À cause de son salaire de misère, elle se voit contrainte d’habiter chez ses parents, modestes et aimants, et d’écouter les sermons de ses amies inquiètes de sa situation, sans pour autant se résoudre à cesser sa quête sisyphéenne : « Je sais que mon…
David MERVEILLE et ZIDROU , Amore. Amours à l’italienne , Delcourt, 2021, 128 p., 20,10 € / ePub : 13.99 € , ISBN : 9782413011224 Pour son entrée dans le monde de la bande dessinée, l’auteur et illustrateur David Merveille s’est associé à un scénariste aguerri, son complice de longue date Zidrou. Avec Amore, le tandem nous emmène en Italie. L’album est sous-titré Amours à l’italienne , au pluriel : ce ne sont pas moins de neuf variations sur le même t’aime qui se déploient au fil des pages. Encadrées par un prologue et un épilogue qui mettent en scène un auteur de romans sentimentaux venu chercher (et trouver) l’inspiration à la terrasse d’un café, sept histoires évoquent les différentes facettes de l’amour. Réciproque ou à sens unique, homo ou hétéro, secret ou public, passé, présent, douloureux, éternel, violent, passionnel, vénitien ou sicilien, il est toujours raconté avec subtilité. Amore a quelque chose d’un (bon) recueil de nouvelles. Par son unité thématique, bien entendu, dont l’explication réside dans la genèse du projet. Dans une interview accordée à Branchés culture , David Merveille explique en effet que lui et Zidrou ont d’abord envisagé un album jeunesse, autour d’une seule des histoires qui composent finalement Amore. Zidrou l’avait écrite, son complice travaillait à l’illustration, quand ils ont réalisé que ce court récit n’était pas destinée à un public d’enfants. Est née alors l’idée d’imaginer d’autres histoires sur le thème de l’amour, pour une bande dessinée tout public. Telles des nouvelles, les brèves séquences qui composent l’album dosent admirablement les dits et les non-dits. Qu’elles creusent un instant dans la vie des personnages ou brossent la trajectoire d’une vie, elles laissent aux lecteurs toute latitude pour combler les blancs et investir le livre de leurs propres rêveries.Si les histoires séduisent par leur justesse, que dire alors de leur mise en images ? Chaque planche est composée de peu de vignettes – une seule en compte neuf, la plupart en comportent quatre ou cinq, tandis que plusieurs cases se déploient en pleine page, voire en double page. Le plaisir est double lui aussi : ainsi mise en valeur, chacune se livre d’autant mieux à l’admiration des lecteurs, et l’album appelle à une découverte lente, paisible. David Merveille recourt aux à-plats de couleurs. Chaque histoire présente une teinte dominante qui en définit aussi l’atmosphère, du jaune chaleureux de « Il.Elle » au rouge sang de « La befana » ou au vert d’eau de « Roll over Venezia ». Dans l’interview déjà évoquée , David Merveille précise avoir bénéficié, pour les couleurs (qu’il applique par ordinateur), des conseils de l’affichiste Laurent Durieux , dont il partage l’atelier. Conseils dont il a tiré le meilleur parti, tant le résultat est remarquable. Le sous-titre du livre, Amours à l’italienne , fait écho à une certaine époque du cinéma italien, les Mariage à l’italienne de Vittorio De Sica (1964) et Divorce à l’italienne de Pietro Germi (1961) – et les histoires racontées penchent aussi bien du côté de la désunion que de celui de la lune de miel. Le travail de David Merveille, ses albums dédiés à l’univers de Jacques Tati notamment , est profondément imprégné par le 7e art. Amore confirme cette influence : l’illustrateur et le scénariste jouent avec les ressources de la voix off, les flashbacks, les filtres, et où l’enchainement des cases évoque les mouvements d’une bien habile caméra.Pour « Pietro & Ada », on assiste d’ailleurs à une projection de La dolce vita au cinéma Royal Tivoli. Quant à la Vespa qui orne la couverture et revient çà et là dans l’album, elle offre un plaisant clin d’œil à la virée d’Audrey Hepburn et Gregory Peck. À moins qu’elle rappelle les tribulations de Nanni Moretti.Surtout, elle nous conduit à plein gaz dans ce formidable…
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