En couverture de ses souvenirs littéraires, il s’affichait au Portugal, entre ombre et lumière ; sur celle de son journal de voyage, Marc Hanrez a choisi un cliché qui le campe dans une pose conquérante, entre insolence et insolation, sur les marches du théâtre d’Épidaure.« Vous avez dit : un Journal de voyage ? », et aussitôt s’installe dans l’esprit du lecteur la terrible perspective d’avoir à effeuiller l’album-photo d’un autre, commentaires et exclamations à l’appui… Au moins, quand on est invité chez un couple d’amis qui insèrent une clef USB dans le téléviseur en frétillant à l’idée de vous faire défiler, et donc partager, leur bonheur vacancier, on se console en se gavant de chips et de limonade, bien calé dans le sofa. Mais là, presque…
Faut-il s’étonner que, dans la liste des essayistes pionniers à avoir traité de Louis-Ferdinand Céline, deux soient d’origine belge ? Sans doute appartenait-il mieux à des périphériques qu’à des Hexagonaux de s’emparer d’une figure aussi complexe et épineuse, au lendemain de sa disparition en juillet 1961, qui avait vu les passions se ranimer à son égard… En 1963, Pol Vandromme faisait ainsi paraître un mince volume, tout en verve hussarde, sur l’Abominable Homme des Lettres. Le plus parisien des carolorégiens avait été précédé sur cette voie par un jeune universitaire de l’ULB, de qui Roger Nimier avait accepté une étude à paraître dans la naissante collection « La Bibliothèque idéale » chez Gallimard. L’ouvrage à la couverture rose fuchsia et à…
Il vient de paraître aux Éditions de Paris / Max Chaleil un mince volume intitulé Poste restante et décrit en sous-titre comme un « Journal littéraire 1954-1993 ». Son auteur est photographié en couverture. Il porte beau ainsi, de trois quarts, une longue pipe aux lèvres, les yeux ombragés par un rayon de soleil oblique qui lui tombe sur le visage et révèle au passage, derrière lui, le fragment d’une affiche, où l’on peut lire en portugais : « Lucha por tu libertad ». Voici Marc Hanrez, saisi dans sa profondeur et nimbé de mystère, à Lisbonne en 1981.Ce que le cliché ne montre pas, c’est la foisonnante richesse intérieure de cet authentique personnage de roman et l’importance de sa mémoire pour nos Lettres comme pour celles de France. L’évidence n’éclate…