« S’il n’émeut le salaud à quoi bon le poète » : Fabien Abrassart résume ici le dilemme qu’Adorno formulait ainsi : « Comment encore écrire de la poésie après Auschwitz ? ». Auschwitz a en effet prouvé l’échec de la culture allemande, européenne, occidentale : après Auschwitz et dans cette culture, il ne peut y avoir d’art que selon Auschwitz, en fonction d’Auschwitz. Aucune image ne peut masquer Auschwitz. Après le nazisme, tout langage est devenu problématique. L’autre pôle dialectique du livre d’Abrassart, c’est la référence à Jérusalem, nom qui évoque le culte du dieu des Cananéens, Shalem, divinité de la création, de l’exhaustivité et du soleil couchant. L’étymologie de la ville repose sur deux racines chaldéennes :…
Quatre rouleaux pour une marée de mots. Quatre rouleaux-chapitres mus par les replis des vagues absentes, peut-être sur les berges de la Mer Morte, aux alentours de Qumrân et qui forment l’ossature du dernier recueil de Fabien Abrassart, Vers la joie. Poète discret et exigeant, auteur de quatre livres en 20 ans, il semble approfondir ici une réflexion entamée dans son précédent livre, Si je t’oublie, publié en 2017 chez le même éditeur. Quelle poésie, quels mots pour dire l’atrocité, pour parler après l’atroce ? Comment repousser, repenser le néant avec les mots de la tribu ?Fabien Abrassart cherche une langue qui puise aux seuils de l’indicible pour parvenir à faire entendre ce que l’on ne dit pas ou plus. En puisatier, le poète fouaille la langue pour en faire…