Présentation

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Quand elle se montre elle-même, dans son roman Pétronille sorti à la rentrée littéraire de 2014, dédicaçant ses livres dans une librairie et entrant en commerce avec une jeune auteure, Amélie Nothomb sacrifie à l’un des mécanismes narratifs majeurs de la fiction contemporaine en langue française, à savoir la représentation de la vie littéraire de son temps, avec ses scènes typiques et sa galerie de portraits codés. Nothomb rejoint ainsi, pour ne parler que des années 2000, Éric Chevillard, Marie Nimier, Michel Houellebecq, Michel Ragon, Dany Laferrière, Christine Angot ou encore Nathalie Rheims dans les rangs des écrivains qui ont mis en scène la vie littéraire et proposé des figurations des personnages qui l’animent. 2
La recrudescence actuelle, par le biais notamment de l’autofiction, des romans de la vie littéraire, coïncide avec un intérêt de plus en plus marqué de la recherche en littérature pour les questions relatives à l’auteur. Les…

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Études de syntaxe descriptive. Tome I : La conjonction «si» et l'emploi des formes verbales

À propos du livre (texte de l'Avant-propos) Dès que l'on entreprend quelques fouilles en profondeur dans la «littérature» consacrée à notre langue, on reste confondu devant l'extraordinaire efflorescence qu'elle a connue depuis que, voici maintenant plus de six cents ans, se sont fait entendre en Angleterre, pour des raisons historiques fort évidentes, les premiers balbutiements de la grammaire française. Alors, pourquoi une nouvelle pierre à un édifice déjà si monumental? D'abord, parce qu'en fait, du point de vue où nous entendons nous placer, on ne peut guère considérer qu'avant 1850 environ, des contributions importantes et directes aient été apportées à l'élaboration d'une sorte d'atlas anatomique du français. Non point que nous visions à contester les immenses mérites des défricheurs, ni que nous estimions devoir anéantir d'un trait de plume quelque deux cents ans de patiente ciselure. Renan avait certes raison de s'écrier : «Ah! ne dites pas qu'ils n'ont rien fait, ces obscurs beaux esprits dont la vie se passa à instruire le procès des mots et à peser des syllabes. Ils ont fait un chef-d'oeuvre, la langue française. Ils ont rendu un service inappréciable à l'esprit humain… en nous préservant de cette liberté indéfinie qui perd les langues, en traçant autour de nous ces précieuses limites qui nous obligent à torturer dix fois notre pensée avant de l'avoir amenée à un cadre possible et vrai.» Mais s'il est établi que les Malherbe, les Vaugelas, les Bouhours, les d'Olivet et tant d'autres encore ont forgé collectivement une des plus fines mécaniques de communication qui se puisse concevoir, il n'en reste pas moins qu'aucun d'entre eux — sauf peut-être, dans une certaine mesure, Condillac — n'a jamais pu se dégager d'un pragmatisme tendant à rechercher avant tout des règles et des normes et débouchant en dernière analyse sur l'édification d'une langue de caste : la préoccupation, naïvement avouée par l'Académie à propos de l'orthographe, de distinguer «les gents de lettres… d'avec les ignorants», on la sent présente à des degrés divers, dans toutes les discussions et dans tous les traités, bien au-delà de l'effondrement de l'ancien régime et du type de société qu'il représentait. Il est bien certain qu'après la réorientation imprimée à la philologie en général par l'école allemande et à la «romanistique» en particulier par Diez et ses émules, la linguistique française ne pouvait en rester à cette conception étroite et essentiellement «dirigiste» de son objet. À la grammaire de l'honnête homme devait inévitablement se superposer la grammaire de l'homme de science, soucieuse non de ce qui doit ou devrait être, mais de ce qui est, et attentive à saisir dans les modes d'expression le reflet des structures mentales. L'histoire de la grammaire descriptive du français est dès maintenant jalonnée de grandes synthèses et marquée de noms illustres. Les arbres, toutefois, ne doivent pas nous empêcher de voir la forêt : les grands maîtres d'oeuvre, qu'ils s'appellent Nyrop, Brunot, Sandfeld, Damourette et Pichon, Le Bidois, De Boer ou Tobler — nous citons sans choisir — savent fort bien ce qu'ils doivent à l'immense armée des obscurs collecteurs de documents et des modestes auteurs de monographies. Or, qu'il s'agisse de synchronie ou de diachronie, l'ère de ces monographies n'est nullement révolue. D'une part, l'exploration des strates anciennes du français est loin d'être achevée. N'a-t-il pas fallu attendre nos années soixante pour voir paraître les index complets — dans le seul domaine lexical — des tragédies de nos grands classiques? N'entamons-nous pas à peine les expériences d'application de la cybernétique aux dépouillements lexicographiques? D'autre part, aussi longtemps qu'un système linguistique demeure vivant dans l'usage, il évolue à la fois dans sa structure, dans son fonctionnement et dans ses éléments constitutifs. La phonétique expérimentale a prouvé que, d'une génération à l'autre, la prononciation subit de menues atteintes dont le cumul se traduit, à la longue, par des cassures extrême-ment nettes. Le phénomène est moins perceptible en morphologie, mais il est patent dans le domaine du matériel lexical et l'observateur attentif en retrouve les effets dans le vaste secteur de la syntaxe. L'étude descriptive de la langue s'appliquant à une masse de faits en perpétuel devenir, il est inévitable qu'elle doive sans cesse se dépasser, se préciser et se corriger sur une multitude de points de détail. Les deux monographies que nous proposons au lecteur décrivent, l'une, l'éventail des procédés dont use la langue pour exprimer l'interrogation, l'autre, la concurrence des formes verbales dans les propositions auxquelles la conjonction «si» sert de commun dénominateur, mais qui, pour le reste, se révèlent à l'analyse de valeurs signifiantes fort diverses. Il nous est arrivé, comme à tous les «liseurs» qu'une curiosité intellectuelle bien précise oriente vers les problèmes d'expression, de découvrir des tours au premier abord déroutants et de vouloir dégager à leur propos ce qu'on pourrait appeler les coordonnées de la doctrine. On a beau savoir qu'il y a — et qu'il est presque normal qu'il y ait — «autant de grammaires que de grammairiens, et même davantage», on n'en est pas moins tenté par le besoin de synthétiser toutes les données éparses et de mettre en parallèle les théories et l'usage. De là l'aspect un peu touffu de notre étude, la progression parfois pénible de l'exposé et l'effort que, malgré les sages conseils de la Bruyère, nous imposons ainsi au lecteur. La question se posera peut-être de savoir si nous nous sommes bien cantonné sur le terrain de la grammaire descriptive. Le fait est que nous sommes conscient d'avoir plus d'une fois piétiné les plates-bandes du voisin. Est-ce parfois le domaine de l'esthétique littéraire que nous avons effleuré au passage ou est-ce bel et bien cette stylistique dont on parle tant et pour laquelle chaque spécialiste semble avoir sa petite définition personnelle? Qu'importe, d'ailleurs? Ne sont-ce pas là fautes vénielles au prix de ce péché capital dont nous pourrions nous être rendu coupable en portant, à propos de certains tours, des jugements de valeur? Disons-le tout cru : nous avons donné, çà et là, dans la grammaire normative, autrement dit, dans un «genre» que Madame Vildé-Lot tient pour «dépassé… depuis plusieurs dizaines d'années». Dépassé? Et pourquoi donc? Pourquoi le grammairien ferait-il de cette impassibilité le gage même de son objectivité scientifique alors que le français, objet de son étude, peine et souffre visiblement? Que l'on nous permette de citer ici un excellent syntacticien. Appelant à la rescousse un illustre confrère, Aurélien Sauvageot, H. Glâttli écrivait il n'y a pas si longtemps : «Il n'est pas indifférent, en effet, qu'on fasse d'une grande langue de civilisation telle que le français une langue simplifiée, appauvrie de ses nuances, voire de ses subtilités.» Nous sommes, quant à nous, tout à fait d'accord avec Glâttli pour proclamer que la tâche du grammairien comme du linguiste «ne saurait consister à enregistrer simplement des entorses à la syntaxe, à considérer les fautes de français comme matière d'observation scientifique. Par leurs connaissances et leur instruction, ils devraient se sentir responsables du maintien de la langue». Nous croyons que c'est là une opinion toute de sagesse et qu'à la grammaire descriptive incombe, entre autres missions, celle de servir d'assise à une grammaire normative saine et débarrassée des traditions sclérosées. Au lecteur, à présent, de juger si nous avons bien transposé nos principes dans nos recherches. De toute manière, nous n'avons pas nourri un seul instant l'illusion de faire oeuvre à la fois infaillible et exhaustive, comme parlent les doctes. Nous avons réuni des matériaux, beaucoup…

Hergé écrivain

L’œuvre d’Hergé, qui transforme la bande dessinée en genre littéraire, invente un nouvel équilibre entre…

Le fantastique dans l’oeuvre en prose de Marcel Thiry

À propos du livre Il est toujours périlleux d'aborder l'oeuvre d'un grand écrivain en isolant un des aspects de sa personnalité et une des faces de son talent. À force d'examiner l'arbre à la loupe, l'analyste risque de perdre de vue la forêt qui l'entoure et le justifie. Je ne me dissimule nullement que le sujet de cette étude m'expose ainsi à un double danger : étudier l'oeuvre — et encore uniquement l'oeuvre en prose de fiction — d'un homme que la renommée range d'abord parmi les poètes et, dans cette oeuvre, tenter de mettre en lumière l'élément fantastique de préférence à tout autre, peut apparaître comme un propos qui ne rend pas à l'un de nos plus grands écrivains une justice suffisante. À l'issue de cette étude ces craintes se sont quelque peu effacées. La vérité est que, en prose aussi bien qu'en vers, Marcel Thiry ne cesse pas un instant d'être poète, et que le regard posé sur le monde par le romancier et le nouvelliste a la même acuité, les mêmes qualités d'invention que celui de l'auteur des poèmes. C'est presque simultanément que se sont amorcées, vers les années vingt, les voies multiples qu'allait emprunter l'oeuvre littéraire de M. Thiry pendant plus de cinquante années : la voie de la poésie avec, en 1919, Le Coeur et les Sens mais surtout avec Toi qui pâlis au nom de Vancouver en 1924; la voie très diverse de l'écriture en prose avec, en 1922, un roman intitulé Le Goût du Malheur , un récit autobiographique paru en 1919, Soldats belges à l'armée russe , ou encore, en 1921, un court essai politique, Voir Grand. Quelques idées sur l'alliance française . Cet opuscule relève de cette branche très féconde de son activité littéraire que je n'étudierai pas mais qui témoigne que M. Thiry a participé aux événements de son temps aussi bien sur le plan de l'écriture que sur celui de l'action. On verra que j'ai tenté, aussi fréquemment que je l'ai pu, de situer en concordance les vers et la prose qui, à travers toute l'oeuvre, s'interpellent et se répondent. Le dialogue devient parfois à ce point étroit qu'il tend à l'unisson comme dans les Attouchements des sonnets de Shakespeare où commentaires critiques, traductions, transpositions poétiques participent d'une même rêverie qui prend conscience d'elle-même tantôt en prose, tantôt en vers, ou encore comme dans Marchands qui propose une alternance de poèmes et de nouvelles qui, groupés par deux, sont comme le double signifiant d'un même signifié. Il n'est pas rare de trouver ainsi de véritables doublets qui révèlent une source d'inspiration identique. Outre l'exemple de Marchands , on pourrait encore évoquer la nouvelle Simul qui apparaît comme une certaine occurrence de cette vérité générale et abstraite dont le poème de Vie Poésie qui porte le même titre recèle tous les possibles. Citons aussi le roman Voie-Lactée dont le dénouement rappelle un événement réel qui a aussi inspiré à M. Thiry la Prose des cellules He La. Je n'ai donc eu que l'embarras du choix pour placer en épigraphe à chaque chapitre quelques vers qui exprimaient ou confirmaient ce que l'analyse des oeuvres tentait de dégager. Bien sûr, la forme n'est pas indifférente, et même s'il y a concordance entre les thèmes et identité entre les motifs d'inspiration, il n'y a jamais équivalence : le recours à l'écriture en prose est une nécessité que la chose à dire, à la recherche d'un langage propre, impose pour son accession à l'existence. C'est précisément aux «rapports qui peuvent être décelés entre ces deux aspects» de l'activité littéraire de Marcel Thiry que Robert Vivier a consacré son Introduction aux récits en prose d'un poète qui préface l'édition originale des Nouvelles du Grand Possible . Cette étude d'une dizaine de pages constitue sans doute ce que l'on a écrit de plus fin et de plus éclairant sur les caractères spécifiques de l'oeuvre en prose; elle en arrive à formuler la proposition suivante : «Aussi ne doit-on pas s'étonner que, tout en gardant le vers pour l'examen immédiat et comme privé des émotions, il se soit décidé à en confier l'examen différé et public à la prose, avec tous les développements persuasifs et les détours didactiques dont elle offre la possibilité. Et sa narration accueillera dans la clarté de l'aventure signifiante plus d'un thème et d'une obsession dont son lyrisme s'était sourdement nourri.» Car, sans pour autant adopter la position extrême que défend, par exemple, Tzvetan Todorov dans son Introduction à la littérature fantastique, et qui consiste à affirmer que la poésie ne renvoie pas à un monde extérieur à elle-même, n'est pas représentative du monde sensible (et d'en déduire — j'y reviendrai dans la quatrième partie — que poésie et fantastique sont, pour cette raison, incompatibles), on peut cependant accepter comme relativement sûr que la traduction en termes de réalité ne s'opère pas de la même façon lors de la lecture d'un texte en prose ou d'un poème. C'est donc tout naturellement qu'un écrivain recourra à la prose, dont l'effet de réel est plus assuré, dont le caractère de vraisemblance est plus certain, chaque fois qu'il s'agira pour lui, essentiellement, d'interroger la réalité pour en solliciter les failles, d'analyser la condition humaine pour en déceler les contraintes ou en tester les latitudes. Le développement dans la durée permet l'épanouissement d'une idée, la mise à l'épreuve d'une hypothèse que la poésie aurait tendance à suspendre hors du réel et à cristalliser en objet de langage, pour les porter, en quelque sorte, à un degré supérieur d'existence, celui de la non-contingence. Il n'est sans doute pas sans intérêt de rappeler que, dans un discours académique dont l'objet était de définir la fonction du poème, M. Thiry n'a pas craint de reprendre à son compte, avec ce mélange d'audace et d'ironie envers lui-même qui caractérise nombre de ses communications, cette proposition de G. Benn et de T. S. Eliot pour qui la poésie n'a pas à communiquer et qui ne reconnaissent comme fonction du poème que celle d'être. La projection dans une histoire, l'incarnation par des personnages, la mise en situation dans un décor comme l'utilisation de procédés propres à la narration permettent une mise à distance qui favorise l'analyse et la spéculation et qui appelle en même temps une participation du lecteur. Parallèlement, on peut sans doute comprendre pourquoi presque toute l'oeuvre de fiction est de nature fantastique ou, dans les cas moins flagrants, teintée de fantastique. Car la création d'histoires où l'étrange et l'insolite ont leur part est aussi une manière de manifester ce désir de remettre en cause les structures du réel ou tout au moins de les interroger. Pour l'auteur d' Échec au Temps , la tentation de l'impossible est une constante et l'événement fantastique est le dernier refuge de l'espérance. Son oeuvre se nourrit à la fois de révolte et de nostalgie. Révolte contre l'irréversibilité du temps humain dans Échec au Temps , révolte contre le caractère irréparable de la mort qui sépare ceux qui s'aiment dans Nondum Jam Non , dans Distances , révolte contre l'injustice des choix imposés à l'homme dans Simul , révolte contre les tyrannies médiocres du commerce dans Marchands … Nostalgie du temps passé, du temps perdu, du temps d'avant la faute, nostalgie de tous les possibles non réalisés, de la liberté défendue, de la pureté impossible. Nostalgie complémentaire de la révolte et qui traverse toute l'oeuvre de Marcel Thiry comme un leitmotiv douloureux. Comme l'écrit Robert Vivier, «le thème secret et constant de Thiry, c'est évidemment l'amour anxieux du bonheur de vivre ou plus exactement peut-être le désir, perpétuellement menacé par la lucidité, de trouver du bonheur à vivre». Où trouver, où retrouver un bonheur que la vie interdit sinon dans la grande surprise du hasard qui suspendrait les lois du monde? La première maîtresse de ce hasard est justement la…