C’est peut-être le recueil où apparaît avec le plus d’ampleur le thème essentiel de l’œuvre d’Henri Michaux : le refus de la réalité quotidienne – «sa défaite : le quotidien» – et la revendication d’«autre chose». Cet autre chose souvent proposé, on le sait, sous la forme de situations imaginaires qui témoignent chez le poète du constant besoin d’inventer. Tantôt avec les couleurs apparemment légères de l’humour, tantôt avec celles d’une angoisse existentielle que l’humour ne parvient plus à cacher. Toujours, il est vrai, d’un «lointain intérieur», c’est-à-dire de ces confins du subconscient que Michaux ne se lasse pas d’explorer.
À une autre distance, dirait-on, et sous une forme plus familière qui nous montre que ce poète peut être un merveilleux conteur, son imagination a projeté un personnage, «Plume». À travers les aventures à la fois plaisantes et amères dont il est le héros, Plume est bien ce que les Histoires de la littérature appellent un «type» : un homme dans l’embarras, singulièrement, toujours malmené et mal reçu, parce qu’inadapté aux exigences sociales. C’est le «coupable-né», celui qui, en toutes circonstances, «n’a pas suivi l’affaire» et se refuse à la suivre. Mythe très représentatif d’une époque où le social est particulièrement contraignant – ce qui lui donne sa dimension.
Auteur de Plume
« La poésie est comme la philosophie – ou devrait au moins faire comme elle,…