Patrimoine : Norge le proférateur


Dans les années 1970-1980, une opinion est fort répandue en Belgique francophone : nos trois plus grands poètes vivants sont Marcel Thiry, Henri Michaux et Norge, ces deux derniers s’étant hélas expatriés en France depuis de nombreuses années.

Toutefois, si H. Michaux a en effet rompu quasi totalement avec son pays d’origine XX , il n’en va pas de même pour Norge, qui s’est installé à Saint-Paul-de-Vence XX en 1955 mais reste en contact étroit avec son fils Jean Mogin, la famille de celui-ci ainsi que de nombreux amis comme Hermann Closson, Edmond Vandercammen, Yechouroun et Golda Diesenhaus, Jean Tordeur, Charles Bertin, Roger Bodart ou Théodore Koenig.

En 1959, âgé de 61 ans, il reçoit d’ailleurs le « Prix triennal de poésie » pour son recueil Les oignons. Plusieurs autres livres contribuent à sa notoriété, dont deux chez Gallimard : La langue verte (1954), Les quatre vérités (1962).
En janvier 1963, le revoici à Bruxelles pour recevoir une bourse…

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Un prix unique du livre en Belgique francophone

Le Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FW-B) a voté le 18 octobre 2017 le décret relatif à la protection culturelle du livre proposé par la Ministre de la Culture, Madame Greoli.  Ce décret ouvre une nouvelle page de l’histoire du livre en Belgique francophone. Il vise à supprimer progressivement tout mécanisme apparenté à l’ex-tabelle et à réguler le prix du livre dès le 1er janvier 2018 en limitant à 5% durant deux ans (un an pour les bandes dessinées) les possibilités de variation par rapport au prix fixé par l’éditeur. Alda Greoli : «C’est un moment fondateur que l’adoption du décret relatif à la protection culturelle du livre, une manifestation concrète de ce qu’est l’exception culturelle. Un tel projet était attendu depuis trente-cinq ans. Le livre, c’est la manifestation la plus concrète de la culture. Le livre est aussi souvent la première rencontre de l’enfant avec la matérialisation de sa culture. Le prix unique du livre jouera en faveur du maintien d’un nombre élevé et varié de points de vente et d’une offre qualitative et diversifiée.» Le livre est la seconde activité culturelle des Européens et des Belges. C’est un marché qui représente un chiffre d’affaires annuel de près de 245 millions d’euros et un secteur de création majeur, avec notamment la littérature, la bande dessinée et le livre jeunesse. C’est aussi le vecteur de la connaissance scientifique et technique, le support pédagogique principal et un élément clé du débat démocratique. Alda Greoli : «De nombreux pays européens dont nos voisins directs, la France, l’Allemagne et les Pays-Bas, ont légiféré sur le "prix du livre". Tous les exemples étrangers démontrent qu’une protection culturelle du livre permet une distribution et une création de meilleure qualité. À l’inverse, les pays qui ne pratiquent pas de régulation ou qui l’ont abandonnée, se trouvent confrontés à des phénomènes de concentration de distribution et de création préjudiciables à la diversité culturelle.» Le décret est le fruit d’une concertation réussie avec l’ensemble du secteur du livre depuis plus de deux ans. Il entend répondre au mieux aux demandes légitimes de celui-ci : ➢ une plus juste concurrence entre les librairies indépendantes, les grandes surfaces et les sociétés de ventes en ligne en limitant les possibilités de remises ; ➢ la reconnaissance de l’imbrication culturelle et économique des marchés du livre belge francophone et du livre français ; ➢ la maîtrise du prix du livre rendue à l’éditeur ; ➢ la suppression progressive de la « tabelle » appliquée sur un certain nombre de livres venant de France et, par conséquent, la diminution du prix payé par les consommateurs belges pour l’achat de ces livres ; ➢ les spécificités de la production des éditeurs francophones belges, comme celles de la bande dessinées ou des livres juridiques ; ➢ l’accessibilité de la lecture dans les écoles ; ➢ le respect des spécificités du marché du livre numérique, selon des modalités compatibles avec la législation européenne. Principaux éléments du décret / À partir du 1er janvier 2018 ➢ Durant les vingt-quatre premiers mois de vie d’un livre, son prix sera fixe et correspondra à celui déterminé par l’éditeur ou l’importateur. Le détaillant ne pourra appliquer qu’une remise maximale de 5%. ➢ Ce délai est ramené à douze mois pour les bandes dessinées. ➢ Au-delà de ces délais, le prix du livre sera libre. ➢ La vente en ligne est également concernée par le contenu du décret. ➢ Le livre numérique est présent dans le projet de décret avec des mesures propres à ce marché toujours en développement. ➢ Des dérogations sont prévues : une remise de 15% maximum peut être accordée par les détaillants, sur tous les livres, mais uniquement aux établissements scolaires, aux bibliothèques publiques et autres asbl ayant des missions d’éducation, d’alphabétisation ou de promotion de la lecture ; une remise maximale de 25% est autorisée uniquement pour l’achat de manuels scolaires (au sens strict) par les écoles. Le Gouvernement pourra décider de réduire dans un second temps cette remise eu égard à l’évolution du marché. ➢ Un organisme sera désigné par le Gouvernement pour récolter et rendre public gratuitement les informations indispensables au bon fonctionnement du marché du livre : date de mise en vente, prix, identification de l’éditeur, de l’auteur, ISBN… ➢ Une commission indépendante de règlement extrajudiciaire des litiges sera créée, auprès de l’administration, par le Gouvernement au terme d’un appel public à candidatures. ➢ Un comité d’accompagnement sera instauré pour accompagner la mise en œuvre du décret, répondre aux questions des associations professionnelles et proposer au Gouvernement des recommandations. ➢ Dans les trois ans après l’entrée en vigueur du présent décret et ensuite tous les trois ans, le Gouvernement évaluera les mesures d’encadrement du prix du livre. À partir du 1er janvier 2019 : mort annoncée de la tabelle Actuellement, dans les librairies francophones belges, un livre importé de France sur deux porte une petite étiquette masquant le prix imprimé sur la quatrième de couverture. Si vous la décollez, vous découvrirez que le prix initial fixé par l’éditeur a été augmenté de 10 à 17% en passant la frontière ! Cette différence s’explique par une majoration du prix appelée «tabelle» ou « mark up » pratiquée principalement par les deux plus importants distributeurs de livres. Elle était autrefois utilisée pour couvrir les frais de douane et les risques de change entre les francs belges et les francs français. Dans une même communauté linguistique, dans un même marché, dans une même zone monétaire, les arguments pour justifier cette majoration du prix du livre sont devenus anachroniques et difficilement défendables aux yeux du consommateur qui n’hésite pas, du coup, à acheter ses livres sur des sites de vente en ligne gérés par des librairies françaises ou des opérateurs internationaux qui, eux, ne pratiquent pas la tabelle. Grâce au décret, la majoration des prix pratiquée par les distributeurs de livres importés de France sera progressivement supprimée. De manière à permettre l’adaptation des acteurs du marché et éviter une dévalorisation brutale des stocks des livres tabellisés (tant chez les détaillants que chez les distributeurs), une période transitoire est instaurée : du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2019, une tabelle maximale 8 % pourra être appliquée et du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2020, ce taux sera réduit à 4 %. Les livres imprimés à partir du 1er janvier 2021 ne pourront plus être tabellisés du tout. Dernière étape L’État fédéral ayant gardé les compétences résiduaires pour les matières biculturelles et les institutions établies dans la région bilingue de Bruxelles-capitale (qui, en raison de leurs activités, ne peuvent pas être considérées comme appartenant exclusivement à l’une ou l’autre Communauté), le décret régulant le prix du livre en Communauté française et celui régulant la même matière en Communauté flamande ne couvrent pas tous les points de ventes de livres dans la Région bruxelloise. Un accord de coopération entre ces différentes entités est donc indispensable pour éviter toute distorsion de concurrence entre des détaillants situés…

Tenir debout

Félicité, par Alain Gomis Réalisateur rare et exigeant, Alain Gomis n'a réalisé que quatre longs-métrages…

Témoigner la monstruosité de la Shoah. Le devoir de mémoire et de transmission de Vincent Engel et Françoise Lalande

Introduction [page 37 de la version papier]  Dans son essai Fiction : l’impossible nécessité, Vincent Engel XX signale que « le discours sur la littérature de la Shoah est dominé par une insistance sur l’incapacité de ce discours et plus particulièrement sa déclination artistique » XX . De fait, le judéocide fut une expérience d’une monstruosité telle qu’elle paraît se situer au-delà de tout ce qui est humainement imaginable, dicible et transmissible. Cependant, ces trois concepts, Engel les qualifie comme des mots qui ne trahissent que notre incapacité à imaginer, dire et transmettre, « des mots qui ne disent rien sur ce qu’on entend qualifier à travers eux » XX .  Méditant sur le caractère toujours inédit et unique de l’expression de l’indicible, Engel montre comment le parcours du narrateur imaginé par Jean Mattern dans Les Bains de Kiraly XX (2008) atteste que, s’il est possible de surmonter la détresse en construisant un discours sur un événement apparemment inimaginable, indicible et intransmissible, le dépassement de cet inénarrable passe nécessairement par l’élaboration d’un récit personnel. Dans cette étude, nous nous proposons de nous faire l’écho des témoignages de deux voix majeures des lettres belges actuelles, deux romanciers [page 38 de la version papier] appartenant à des générations différentes mais dont les familles, juives, éprouvèrent dans leur chair et leur âme les atrocités nazies : Vincent Engel (°1963) et Françoise Lalande-Keil (°1941). Vincent Engel: Respecter le silence des survivants – Vous pourriez le laisser en prison, l’envoyer en Allemagne, dans un camp... – Vous ne connaissez pas les camps, monsieur de Vinelles ; sans quoi, je crois que vous me supplieriez de le fusiller sur-le-champ   plutôt que de l’y envoyer XX ... Cette réplique de Jurg Engelmeyer, un officier allemand qui a ordonné l’exécution d’un jeune garçon en représailles aux actes commis par son père résistant, ne montre-t-elle pas que la monstruosité du nazisme hante le parcours romanesque de notre auteur pratiquement depuis son début ? Dans son article intitulé « Oubliez le Dieu d’Adam » XX , Engel relate qu’au cours de ses études de philologie romane à l’Université catholique de Louvain, son père lui offrit Paroles d’étranger d’Élie Wiesel, une lecture qui le bouleversa : Par le silence de mon père, par son indifférence à la chose religieuse, je redécouvre le judaïsme. Dans les livres, d’abord, au CCLJ (Centre Communautaire Laïc Juif) ensuite. Et Dieu se voile d’un drap sombre : celui de la souffrance à la puissance infinie d’Auschwitz. Toutes les souffrances se mêlent : celle de ma mère [décédée d’un cancer quelques années plus tôt], celle de la famille de mon père disparue dans les camps. (Idem, p. 72) Pourquoi parler d’Auschwitz ? Cette question, Engel s’astreindra à y répondre dès que cette réalité s’imposera à lui comme une « expérience marquante » bien que non vécue personnellement. La lecture et l’étude approfondie de l’œuvre de Wiesel imprimeront sur sa vision de la Shoah « un vocabulaire et des évidences : un monde était mort à Auschwitz, une société y avait fait faillite, et plus rien ne pouvait être comme avant » XX . D’où la nécessité, poursuit Engel, de « repenser le monde, refonder la morale, instaurer des conditions nouvelles pour la création artistique – pour autant qu’elle fût encore possible XX –, forger des mots neufs pour prononcer l’imprononçable [page 39 de la version papier] [...] » (idem, p. 18-19). D’autres évidences surgiront progressivement dans l’esprit de celui pour qui Auschwitz deviendra vite « une obsession » : celles de constater que la masse des documents publiés « n’ont guère servi à éduquer les gens » (idem, p. 20-21) et que les descendants des survivants, qui ont pour tâche de reprendre le flambeau du témoignage, doivent « trouver d’autres moyens d’expression, car ils n’ont pas vécu l’épreuve » (idem, p. 19). Si ses travaux scientifiques XX lui permirent d’« épuiser » la question « épuisante » de la responsabilité de Dieu devant le génocide juif ou, en tout cas, de tourner une page (ODA, p. 72), par après, c’est principalement à travers la fiction qu’Engel poursuivra cette interrogation sur la Shoah. Une interrogation qui trouve donc sa source directe dans la tragique histoire familiale et dans une identité juive ashkénaze fort ancienne. Comme il le détaille dans quelques interviews et articles XX , ses ancêtres paternels, polonais, étaient des juifs religieux appartenant à la bourgeoisie aisée. Bien que la situation dût se dégrader après la Première Guerre mondiale au cours de laquelle la famille se réfugia à Budapest où son père naquit en 1916, ils sont une famille juive inscrite dans le processus d’assimilation propre à cette période et à leur classe sociale ; les enfants fréquentent des écoles où ils côtoient la bourgeoisie polonaise catholique. Une intégration donc plutôt réussie mais qui n’empêchera pas leur déportation au début des années quarante. De toute la famille paternelle survivront un seul oncle, communiste avant la guerre et rescapé des camps, qui s’en ira faire sa vie à Los Angeles et y deviendra religieux orthodoxe, ainsi que le père de Vincent Engel, parti poursuivre ses études en Belgique vers 1938 et qui, après avoir passé la guerre dans les forces belges de la R.A.F, décidera de s’y installer définitivement : « Plus tard, il me dirait : “N’oublie pas que, pendant la guerre, des Juifs se sont battus”. » (Idem, p. 70.) Quand, à quarante ans, il rencontre son épouse, celle-ci, bien qu’appartenant à une bourgeoisie catholique bruxelloise imbue de solides préjugés, propose de se convertir au judaïsme. Une proposition qui sera rejetée par l’intéressé pour des raisons sur lesquelles l’écrivain ne peut que conjecturer : [page 40 de la version papier] Son athéisme s’était certainement renforcé à l’épreuve de la guerre et des camps. Ou bien, comme d’autres, refusait-il d’inscrire dans une telle tradition de martyre des enfants à venir. Ou bien, plus pragmatiquement, avait-il jugé que les meilleures écoles, à son avis, étaient catholiques. Hypothèse que conforte non seulement le refus de la conversion de sa femme, mais aussi le fait que ses enfants seraient baptisés, inscrits dans des écoles catholiques et feraient leur profession de foi. (Idem, p. 70-71) Une profession de foi qui, chez l’adolescent Engel, ne va pas de soi ! La découverte de l’œuvre de Wiesel et la relecture de Camus lui permettront de régler progressivement le conflit qu’il entretient avec ce christianisme qui prône la soumission, ferme les yeux sur les injustices les plus flagrantes – « Questionner Dieu sur la souffrance, celle d’Auschwitz ou celle de ma mère, accroît l’obscénité de la souffrance, puisque Dieu n’intervient pas et ne répond pas » (idem, p. 74) – et transmet à tous un goût certain pour la culpabilité. Ce qu’Engel (re)découvre dans Camus, la fausseté de la question de Dieu tout comme le devoir pour tout un chacun de suivre un cheminement éthique exigeant, n’est-ce pas en définitive ce que son père lui a transmis ? Évoquant ailleurs la figure paternelle, Engel insiste d’une part sur la certitude de celui-ci « qu’il n’y a pas de droits de l’homme sans le respect de devoirs, et de liberté sans responsabilité » ; d’autre part, sur « [son] impossibilité de dire à ses proches qu’il les aimait ». Et, ajoute-t-il, « pour ce qui est du judaïsme, un silence réduit à l’essentiel. [...] Mais un silence capable de faire passer le judaïsme, le sien, auquel son cadet au moins adhérera pleinement après ses vingt ans » XX . Car ce qui séduit Engel dans le judaïsme, c’est le fait qu’il représente « un rapport à…