Auteur de Oeuvres complètes de Jacques Izoard : Poésies III (2000-2008)
Sur La Rupture des falaises de Pierre Bartholomée
Autour de La Rupture des falaises , une œuvre musicale du compositeur et chef d’orchestre Pierre Bartholomée, créée en 2008, récemment enregistrée, une autre partition, de dessins et de poèmes, retentit, tissant des harmoniques visuels et scripturaux. Les dessins de Pierre Tréfois , les textes poétiques d’ Alain Dantinne , d’ André Doms et de Jean-Louis Rambour forment comme un quatuor qui traduit le champ sonore dans un espace autre. Des vagues de poèmes et de dessins montent à l’assaut de la création de Pierre Bartholomée, laquelle évoque la figure de la mystique et poétesse Hadewijch d’Anvers. Nés de l’écoute de l’œuvre musicale, d’une source sonore, les dessins intitulés « Érosion-Rébellion » et les poèmes inscrivent leurs interrogations esthétiques dans un geste activiste en phase avec le mouvement Extinction-Rebellion. Rapproche la falaisede tes pensées.Face aux étoilestu as eu ta chance.Que n’as-tu abandonné ? (Alain Dantinne)Les falaises sur lesquelles les poèmes viennent se jeter sont celles d’Étretat, des côtes de Bretagne, d’Angleterre, victimes d’écroulement, de l’érosion des sols. Une érosion liée au réchauffement climatique, à la multiplication des tempêtes, des intempéries, à la violence des marées que ce dernier entraîne. André Doms évoque la circulation, la « filière » du thème de la falaise d’Achille Chavée à Philippe Jones, de Pierre Bartholomée à ce recueil qui se construit dans le sillage du ressac des « falaises mortes » (Jean-Louis Rambour), au creux des noces devenues furieuses (en raison des actions humaines) entre la mer et le minéral. Le verbe se met au diapason des sentinelles de granit, des herbes agitées par le vent, en vient à douter de lui-même, de ses aptitudes orphiques, voire de sa simple pertinence. Pardon de vouloir penser encore,pardon de ne plus rien savoir d’une touffed’herbes, de n’avoir plus les motspour la chaleur, pour l’eau salée, pourla lenteur des paupières qui se ferment,pour l’orbite idéale des corps célestes. Pardon de penser en simples fétus de mots (Jean-Louis Rambour)L’effondrement des roches millénaires entraîne le reflux de l’écriture plongée dans le non-savoir. Dans une translation de la géologie à la métaphysique, l’érosion touche tant le règne minéral que l’espace psychique d’une humanité confrontée au chaos, avalée par le brouillard des mers déchaînées. La blancheur d’écume des falaises normandes, anglaises, irlandaises emportées par des éboulements ne laisse à la poésie que le territoire de la désorientation.L’écoute s’affirme comme la basse fondamentale de ce recueil à quatre mains, de ce quatuor branché sur la composition de Pierre Bartholomée, l’oreille collée aux cathédrales de pierre des littoraux, aux altérations de la nature d’origine anthropique, aux hautes marées qui percutent la matière et l’esprit. Merqui percutes flancs escarpésd’éclats…