Noé par Noé. (Musique)

Avant toute chose, c’est avant la vie et avant ce qui viendra, maintenant. Entretien avec Noé, auteur-compositeur-interprète bruxellois de 23 ans, à l’occasion de la sortie de son premier album.

                                                                * J’ai écouté attentivement son album et voici que nous nous retrouvons autour d’un café dans un bistrot Saint-Gillois où il n’a pas ses habitudes. Je l’interromps dans sa lecture, il m’interrompt dans la mienne. Aparté au milieu d’autres conversations, dans les bruits de fourchettes, d’assiettes et de tasses de thé, les voix se mélangeant, une après-midi de novembre. Il voudrait bien demander qu’on coupe la musique, mais il ne le fera pas. Derrière le noir dont il est vêtu, derrière sa voix singulière, se cache une inquiétude. Crier…

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« Vive la rigolade ». La frivolité sexuelle dans les «sixties » et les «seventies»

( Traduit du néerlandais par Marcel Harmignies.  Les notes sont du traducteur ) « Ça picolait et ça baisait / l’Europe entière n’était qu’un grand matelas », écrivit dans un poème l’écrivain néerlandais Remco Campert (° 1929) à propos des années d’après-guerre, même si la griserie de cette nouvelle liberté demeura limitée à un petit groupe d’artistes et d’auteurs qui vivaient à la petite semaine dans le lointain Paris. Le reste de l’Europe s’activait au relèvement dans le cadre des valeurs et des normes d’avant-guerre. C’est seulement dans le courant des années 1960 que l’image du matelas associée à la consommation d’alcool commença à sortir de la sphère bohème, pour s’épanouir totalement dans les années 1970. À la base de ce qui est maintenant connu comme «la révolution sexuelle» se trouvent deux éléments: l’argent, autrement dit l’expansion économique, et une contraception fiable (la pilule). Sans ces deux conditions, le concept du matelas n’aurait pas eu l’ombre d’une chance. Beaucoup trop dangereux pour les jeunes filles et les femmes. Née en 1954, j’appartiens moi-même à la fin de la génération du baby-boom, et n’ai jamais connu autre chose que la liberté sexuelle. À dix-sept ans, lorsque je partis étudier et emménageai dans une chambre d’une résidence universitaire, il régnait là une totale liberté. C’était un immeuble qui venait juste de devenir mixte (auparavant ne résidaient là que des garçons) avec un seul WC, un urinoir, une seule douche et une petite cuisine pour seize occupants. Un couple vivait dans une chambre de 3 m sur 3,5 m, des filles se baladaient, qui n’habitaient pas là, mais venaient passer la nuit avec leur petit ami. Rien de tout cela ne me semblait curieux ou déplacé, même si la cohabitation hors mariage et le flirt avec des petits copains ne faisaient certainement pas partie des valeurs inculquées à la maison. Je n’avais moi-même pas franchi le pas durant cette première année d’études, mais je savais que, le moment venu, ce serait en toute liberté. De la révolte étudiante parisienne de mai 1968 on dit parfois que la revendication portait en fait sur l’abolition de la ségrégation sexuelle dans les résidences étudiantes, le libre accès des garçons aux chambres des filles et réciproquement. Évidemment, dans l’ensemble du monde occidental, les étudiants étaient remontés contre les structures de pouvoir autoritaires, ils revendiquaient la participation à tous les niveaux et occupèrent un an plus tard la Maagdenhuis XX à Amsterdam. En Amérique, les contestations émanèrent du civil rights movement et de la fureur suscitée par la guerre du Vietnam, mais, cela mis à part, les étudiants revendiquaient aussi l’abolition de réglementations restrictives relatives à leurs conditions d’hébergement. Une exigence qui fut satisfaite rapidement et sans bruit, car comment continuer à interdire les relations sexuelles à de jeunes adultes qui ont le droit de conduire et de voter, et qui peuvent être mobilisés dans l’armée pour périr à l’autre bout du monde? La mise à disposition de la pilule pour les femmes célibataires (ultérieurement même pour les jeunes filles mineures, sans autorisation parentale) constitua une énorme impulsion pour la libération sexuelle de la femme. Par la simple prise d’une petite pilule quotidienne, une femme pouvait avoir des relations sexuelles, comme les hommes en avaient l’habitude: les avantages, pas les inconvénients. Ce qui, d’ailleurs, ne faisait pas des hommes et des femmes des partenaires équivalents dans le domaine du sexe et des relations. On était encore loin de la modernisation des rapports homme-femme. Je voyais ça dans ma résidence où, chaque jour, l’élément féminin de ce couple en concubinage s’affairait devant ses casseroles, après quoi ils prenaient leur repas ensemble dans leur chambre. Une routine qui m’horrifiait - pas tant le fait de voir la fille à son fourneau, mais le spectacle de ce petit couple étriqué me semblait d’une monotonie étouffante. Comme s’ils reproduisaient la vie de leurs parents! Le féminisme fit son apparition quelques années après la révolution sexuelle. Ce n’est pas une question de hasard si les deux mouvements de libération n’eurent pas lieu en même temps, comme ce fut le cas avec le combat pour les droits civiques des Noirs et la révolte générale de la jeunesse contre les autorités. En plus d’une lutte autonome des femmes pour se dégager des structures patriarcales (discrimination dans l’enseignement et sur le marché du travail), le féminisme était aussi une réaction à cette même révolution sexuelle. La pilule s’était révélée une arme à double tranchant qui certes accordait aux femmes la liberté d’avoir des relations sexuelles quand et avec qui elles voulaient, mais en même temps rendait plus difficile d’éconduire les hommes. La crainte de la grossesse, excuse éprouvée durant des siècles pour parer des avances importunes, ne pouvait soudain plus être invoquée comme argument pour refuser un rapport. Ce n’était plus possible dans le cadre de relations stables, mais pas non plus dans celui des relations amoureuses libres, où toute jeune femme se devait de prendre la pilule, ne serait-ce que par mesure de précaution. Deux tendances du féminisme se dessinèrent dès le début: l’égalitarisme à orientation sociétale, qui tendait à un traitement identique des sexes dans tous les domaines, et le différentialisme qui brandissait le mot d’ordre «ce qui est personnel est politique». Dans l’égalitarisme, les différences biologiques liées au sexe étaient minimisées. Dans le différentialisme qui avait tendance à présenter la femme ou bien comme faible et victime potentielle, ou bien juste comme d’une essence (moralement) supérieure, elles étaient maximisées. Les deux courants de pensée visaient à la libération de la femme et, sans surprise, le sexe était le grand sujet de controverse. La révolution sexuelle, c’était en premier lieu «vive la rigolade». À une allure rapide on se défaisait des entraves sociales et inspirées de la religion. Le sexe pouvait fort bien exister avant et hors mariage sur un mode ludique, il était bien admis qu’avoir une liaison n’était même pas nécessaire, l’homosexualité, la sexualité de groupe, le sadomasochisme et les clubs échangistes avaient leur place - même la pédophilie connut une certaine faveur dans les années 1970. Une piqûre d’idéologie inspirée de la pensée marxiste populaire à l’époque mena à l’expérimentation de communautés dans lesquelles toute propriété privée, y compris les relations personnelles, était bannie. La jalousie et la revendication passaient dans ces cercles pour des inclinations bourgeoises entravant la véritable liberté. Ce furent les féministes du différentialisme qui mirent un coup de frein à la liberté sexuelle sans limites en pointant les différentes situations initiales encore inhérentes aux sexes. «Vive la rigolade», c’était très bien, mais des femmes continuaient à être exploitées dans la pornographie et la prostitution, couraient le risque d’être maltraitées et violées dans et hors le cadre de relations, étaient harcelées, jugées sur leur apparence, confrontées au date rape XX et, si elles disaient «non», elles n’étaient pas prises au sérieux ou traitées de bégueules. Bref, les femmes étaient non seulement reléguées au second plan et victimes de la domination masculine dans la société, mais aussi, précisément, dans leur environnement personnel. La révolution sexuelle servait surtout les appétits masculins démesurés, tandis qu’on méprisait les souhaits des femmes elles-mêmes. Mélancolie La révolution sexuelle est calmée depuis assez longtemps. Le déclin fut amorcé avec l’apparition du virus du sida au milieu des années 1980. Même si les homosexuels et les héroïnomanes…

Le commencement de quelque chose (in Littérature - Literatur)

Basculer. Comme une terre retournée. La vie au fond, la mort dessus. Je le sais. Jadis, on retournait la terre au plus abyssal. On appelait des herbes « mauvaises ». On fabriquait du fétide. On était debout sur le tracteur, conquérant, face au vent, la main levée. Le sens, c’était le sillon. Droit, profond, droit. Toute la main de l’Homme mise sur la nature, en cloche bruyante de Corybantes. Toute la nature dépullulée, juste pulée par manie de l’Homme, depuis tête de l’Homme, en copié-collé d’image dans tête de l’Homme, purement, totalement Homme. C’était le pur de la nature, c’est-à-dire la nature pure produit de la main, de la tête de l’Homme. Avec l’intelligence de l’Homme, s’essayant à l’intouchabilité du label « Pur Esprit », Pur, Pur, Pur, s’extirpant en rêve de son appartenance au grouillant dégoûtant, tentant de couper le cordon, de s’affranchir, de se déconnecter, avec force nucléairesque, de son corps et de son socle terrestre – de ses cohabitants, animaux, végétaux, minéraux. Avec sa science microlorgnique, avec sa machine macromordeuse. Avec sa vitesse, efficiente, effarante, effaceuse. C’était Pure Maîtrise de Homme. C’était tout de go l’arasement de la vie. Et bientôt même celle de Homme. Mais Homme, il ne le savait pas. Peut-être oubliait de le savoir. Homme a fait de même avec toutes les cultures, avec toutes les sortes de cultures. Homme a fait de même avec les langues, avec les langages. Homme a fait de même avec les façons multiples des gens. Homme a fait de même avec la sculpture, avec la peinture, et le dessin, et le théâtre et la musique et la poésie. Homme a fait encore de même avec ceux qui exposent gratuitement les arts. Homme est tout seul. Parfois Homme est quelques uns, tout juste quelques uns. Les gens se demandent où vont les choses. Les gens se demandent si ce n’est pas la fin. La fin des cultures ou même la fin des gens. Homme n’entend pas les gens. Ne veut pas. N’en a cure. Sait. Homme sait. N’a pas besoin des gens. Homme, docte, dicte. Homme tranche, taille, élague, écarte, épure. Homme ne conserve que quelques tableaux, que quelques poèmes, que quelques langues. Homme s’en fout. Il dit que Dieu lui a dit. Ou se dit que, sans dieux, ce serait alors Lui-Même qui dit. Lui le Dieu. En confortable monothée. Beaucoup de gens savent ceci : « Quand le barrage n’abreuve plus l’oued, l’oued n’est pas fini. » Beaucoup de gens savent cette histoire : « Un jour des gens ont planté des arbres. Beaucoup de gens. Beaucoup d’arbres. Beaucoup de petits arrosoirs. Peut-être était-ce des gens, peut-être d’autres créatures. Un fourmillement a sculpté la forêt. Et les arbres ont séduit les nuages. Et la pluie est venue. » Basculer. Comme bousculer les habitudes. Comme on mit un terme un jour au labour abyssal. La mort au fond, la vie dessus. Comme laisser pousser les herbes. Sans les qualifier : ni de « bonnes », ni de mauvaises. Post Scriptum La fin d’une œuvre, la fin d’un œuf ? La fin de l’œuf n’est pas la fin de la poule. La fin de la poule n’est pas la fin de l’œuf. Il y a beaucoup de poules cachées. Il y a toujours une poule qu’on n’a pas débusquée. Il y a toujours un microbe qui fabriquera un jour une descendance       qui s’en ira vers un œuf qui s’en ira vers une poule qui s’en ira vers un œuf. Dominique Massaut, 5 septembre 2016                                                                    * DER ANFANG VON ETWAS (traduction allemande par Bruno Kartheuser) Umkippen. Wie umgegrabene Erde. Das Leben unten, der Tod drüber. Ich weiß es. Früher grub man die Erde unendlich tief um. Die Gräser nannte man „Unkraut“. Man stellte Übelriechendes her. Man stand auf seinem Traktor, als Eroberer, dem Wind zugewandt, mit erhobener Hand. Der Sinn war die Furche. Gerade, tief, gerade. Die ganze Hand des Menschen legte sich auf die Natur, wie eine lärmende Glocke von Korybanten. Die ganze Natur entvölkert, eben mal durch Menschenhand manipuliert, ausgehend vom Kopf des Menschen, als Kopie des Bildes im Kopf des Menschen, nur Mensch, vollständig Mensch. Es war die reine Substanz der Natur, die reine Natur von Hand gefertigt, aus dem Kopf des Menschen. Mit der Intelligenz des Menschen, sich messend an der Unberührbarkeit des Labels „Reiner Geist“. Rein, rein, rein, sich im Traum befreiend aus seiner Zugehörigkeit zum abstoßenden Gewimmel, bemüht, die Nabelschnur zu durchtrennen, sich zu befreien, sich mit nuklearesker Kraft abzukoppeln von seinem Körper und seinem irdenen Sockel, von seinen Mitbewohnern, den Tieren, Pflanzen, Mineralen. Mit seiner mikroschielenden Wissenschaft, seiner makrofressenden Maschine. Mit seiner wirkungsvollen, verstörenden, auslöschenden Geschwindigkeit. Es war die reine Herrschaft des Menschen. Es war das radikale Schleifen des Lebens. Und bald sogar des Menschen. Aber Mensch wusste es nicht. Vielleicht vergaß er, es zu wissen. Mensch hat dasselbe mit allen Kulturen, mit allen Arten von Kulturen gemacht. Mensch hat dasselbe mit den Sprachen, den Ausdruckformen gemacht. Mensch hat dasselbe mit den unterschiedlichen Lebensweisen der Leute gemacht. Mensch hat dasselbe mit der Skulptur, der Malerei, der Zeichenkunst, dem Theater, der Musik und der Poesie gemacht. Mensch hat auch dasselbe mit denen gemacht, die gratis Kunst ausstellen. Mensch ist ganz allein. Manchmal ist Mensch einige Menschen, gerade ein paar. Die Leute fragen sich, wohin die Dinge sich entwickeln. Die Leute fragen sich, ob das nicht das Ende ist. Das Ende der Kulturen oder sogar das Ende der Leute. Mensch hört die Leute nicht. Will nicht. Sorgt sich nicht darum. Er weiß. Mensch weiß. Hat die Leute nicht nötig. Mensch diktiert, allwissend. Mensch schneidet, hackt, beschneidet, beseitigt, säubert. Mensch bewahrt nur wenige Gemälde, wenige Gedichte, wenige Sprachen. Mensch pfeift drauf. Er sagt, Gott habe ihm gesagt. Oder sagt sich, dass ohne Götter Er Selbst derjenige wäre, der sagt. Er Gott. Als bequemer Monotheist. Viele Leute wissen : „Wenn der Stausee das Wadi nicht mehr tränkt, ist das Wadi nicht zu Ende.“ Viele Leute kennen diese Geschichte: „Eines Tages haben die Leute Bäume gepflanzt. Viele Leute. Viele Bäume. Viele kleine Gießkannen. Vielleicht waren es Leute, vielleicht andere Kreaturen. Ein Gewimmel hat den Wald geformt. Und die Bäume haben die Wolken verführt. Und der Regen ist gekommen.“ Kippen. Wie die Gewohnheiten brüskieren. Wie man eines Tages der abyssalen Arbeit ein Ende gesetzt hat. Der Tod unten, das Leben drüber. So wie man Gräser wachsen lässt. Ohne sie zu bewerten: weder gute Kräuter, noch „Unkraut“. Post Scriptum Das Ende eines Werks, das Ende eines Eis? Das Ende des Eis ist nicht das Ende des Huhns. Das Ende des Huhns ist nicht das Ende des Eis. Es gibt viele verborgene Hühner. Es gibt immer ein Huhn, das man noch nicht aufgescheucht hat. Es gibt immer eine Mikrobe, die eines Tages eine Nachkommenschaft zeugt,    die zu einem Ei geht, das zu einem Huhn geht, das zu einem Ei geht. © Dominique Massaut, 2016    Übersetzung…