« Le critique de quotidien est un reporter envoyé en première ligne de la bataille des lettres. Il reçoit les livres de plein fouet, se plonge dans leur lecture avant les autres, et couche sur le papier ses impressions. […] Son guide, c’est la recherche de la qualité où qu’elle se trouve et, au-delà, puisqu’il est aux avant-postes, celle de la nouveauté, de ce qui est prometteur d’une voie inexplorée, d’une voix inouïe. »
Jacques De Decker Le présent volume rassemble une…
Auteur de Littérature belge d’aujourd’hui
Romancier, biographe, auteur de théâtre, Jacques De Decker est aussi un passeur littéraire : de par la profession de journaliste littéraire et culturel qu’il a longuement exercée tout d’abord, en tant qu’intervieweur et animateur de rencontres littéraires ou encore comme adaptateur pour le théâtre ensuite, mais également par son attention jamais démentie pour la littérature belge – qu’elle s’écrive en français ou en néerlandais.
Sous les ors du palais des Académies – « pur décorum », nous dit-il, « l’Académie siège dans un palais parce que personne d’autre ne veut d’un bâtiment assorti de telles contraintes » –, il évoque pour Le Carnet et les Instants l’institution dont il devient secrétaire…
Camille Lemonnier, le « Zola belge », déconstruction d’un poncif littéraire
Les clichés, les lieux communs et les poncifs ont la vie dure et parfois nous polluent. Ils s’imposent à l’esprit, à la bouche et à la plume plus vite que la précision, la complexité et la nuance. Il en est en littérature comme ailleurs. Ainsi Camille Lemonnier ne cesse-t-il pas d’être considéré comme le Zola belge. Comme si, par ces mots, on avait tout dit, de son œuvre. Et cela ne date pas d’aujourd’hui. Dans Camille Lemonnier, le « Zola belge », déconstruction d’un poncif littéraire , le critique Frédéric Saenen, fidèle collaborateur du Carnet et les Instants , explique la genèse de ce lieu commun, met en évidence les mécanismes de sa viralité afin de mieux le défaire et avancer des propositions nouvelles. Faut-il le rappeler, Camille Lemonnier (1844-1913) est un écrivain à l’œuvre riche et variée (critique d’art, romans, contes, récits, etc.) et à l’écriture puissante ; il est l’auteur d’une cinquantaine de livres (plusieurs titres sont réédités dans la collection « Espace Nord »). Frédéric Saenen le tient pour le « germe et le socle de Nos Lettres ». Pourtant, au 19e siècle, on le comparait souvent, quand on ne le soupçonnait pas d’en être le plagiaire, à Victor Hugo, Léon Cladel, Jules Barbey d’Aurevilly, Gustave Flaubert. Et bien entendu à Émile Zola, chef de file du mouvement naturaliste, dans lequel Camille Lemonnier s’inscrit en partie, même si, comme le montre Frédéric Saenen, on ne peut l’assigner à un courant littéraire. De là découlera l’appellation de Zola belge. Elle circulera déjà de son vivant, peut-être même dès la parution d’ Un mâle , son roman le plus fameux. Le mot « belge » est d’ailleurs tout aussi important que celui de « Zola » dans ce syntagme car on fera de Lemonnier le premier écrivain belge, et aussi le dernier, si on le considère comme le parangon de l’identité belge. D’ailleurs Frédéric Saenen confirme cette affirmation, tout en précisant, au passage, ce que serait le sillon profond de la littérature belge. Selon lui, il ne s’agirait pas du surréalisme mais de « l’expression directe des pulsions premières et de l’instinct, qui pousse l’individu au passage de la ligne et au seuil de la tragédie intime. »Pour déconstruire le poncif de « Zola belge », Frédéric Saenen ne se contente pas de s’interroger sur la manière dont ce dernier s’est forgé et répandu, mais il analyse, à travers la littérature critique, les liens qui unissaient Lemonnier et son collègue français ainsi que leurs œuvres respectives. Aussi, de page en page, remet-il en lumière ce qui est occulté par le cliché : Lemonnier, réaliste décadent, virtuose du style, écrivain de la péri-urbanité, relecteur de la Bible, explorateur halluciné de l’intime, peintre du peuple belge. En refermant Camille Lemonnier, le « Zola belge », déconstruction d’un poncif littéraire , on ne peut que féliciter Frédéric Saenen d’avoir su démontrer, de façon condensée, la grandeur et l’originalité de l’œuvre de Lemonnier. Nous ne pouvons d’ailleurs qu’adhérer à sa proposition de faire de Camille Lemonnier le…
Avec ce nouveau livre, Frédéric Thomas, docteur en sciences politiques, poursuit…