Les voix et les ombres

RÉSUMÉ

De toutes les émotions de ma vie, il y en a peu d’aussi puissantes que lorsque je suis au seuil d’un univers romanesque, lorsqu’il a pris corps à la distance de la tentation. Je suis alors impatient de savoir ce qui va s’y passer et tenu de contenir mon impatience au risque de précipiter le déroulement des choses et finalement de ne plus rien voir. J’éprouve aussi le sentiment que tout est possible même si l’expérience m’a appris que la narration n’aura qu’un étroit chemin à tracer. Qu’importe, j’ai l’impression d’être à ce moment-là au plus beau, au plus généreux moment du théâtre lorsque les lumières de la salle s’éteignent et que s’approfondit le silence avant l’entrée en scène des acteurs. Ou mieux : je suis au seuil d’une nouvelle vie, plus confondante, plus saisissante que toutes les autres.

La Chaire de poétique de l’Université catholique de Louvain a pour objectif de compléter l’étude des textes littéraires par une approche attentive de la genèse des oeuvres, du geste créateur qui leur a peu à peu donné forme. Un tel enseignement ne peut être confié qu’aux témoins privilégiés de cette gestation : les poètes, les romanciers, les dramaturges, tous ceux qui ont acquis une expérience concrète de ce qui restera toujours, pour une part, « le mystère de la création ».

À PROPOS DE L'AUTEUR
François Emmanuel

Auteur de Les voix et les ombres

Le 3 septembre 1952 naît à Fleurus François Emmanuel Tirtiaux, qui en littérature ne gardera que ses prénoms, laissant à son frère Bernard et à ses romans rutilants comme des vitraux le nom de famille. La famille compte un autre écrivain, l'oncle, Henry Bauchau, son confrère à l'Académie. Il a toujours écrit, confie-t-il, mais ses premières vocations manifestes sont la médecine et le théâtre. Il se perfectionne dans la première discipline jusqu'à la spécialisation en psychiatrie, terminée en 1983. La passion du théâtre va jusqu'à interrompre cet apprentissage, puisqu'en 1981, il passe un an à Wroclaw, au théâtre laboratoire de Grotowski : c'est là que le premier livre commence à s'élaborer. La Nuit d'obsidienne s'appelle d'abord «Périple». Ce texte est donc antérieur aux premiers qu'il publiera, les poèmes de Femmes prodiges et le roman Retour à Satyah, paru en 1989. La Nuit d'obsidienne lui vaudra le prix triennal de la ville de Tournai en 1992, année où paraissent aussi ses nouvelles de Grain de peau, esquisse de ces «romans d'été» où l'auteur, comme le lui dit Yves Namur en l'accueillant à l'Académie, «se donne à être plus léger avec lui-même». Car pour quelques livres, cette différenciation été-hiver se vérifie. Ainsi se distinguent Le Tueur mélancolique, où un exécuteur des hautes œuvres se donne pour un «doux définitif» de La Partie d'échecs indiens, où un policier démissionnaire recherche un ancien partenaire de jeu jusqu'aux rives de l'océan Indien, ou de La Leçon de chant, où l'on sent en filigrane la démarche du psychiatre, métier que l'auteur exerce toujours en dirigeant le Club Antonin Artaud, centre alternatif fondé où la cure est fondée sur les activités artistiques. Le prix Rossel couronne en 1998 La Passion Savinsen, où deux amours interdites se tressent en une tragédie inscrite dans la seconde guerre mondiale. La même époque imprègne ce «récit bref, étrange, provocateur et rédoutable» qu'est, comme le dit Yves Namur, La Question humaine, où les menées de la grande entreprise capitaliste sont présentées comme parentes des méthodes concentrationnaires. Après La Chambre voisine, Le Sentiment du fleuve : cette fois, Yves Namur propose une autre différenciation. Le premier livre serait à classer «du côté de la mère», parce que le thème de la maison s'y impose; le second, «du côté du père» parce que thème de la transmission le domine. Cette «littérature du dévoilement, du clair-obscur» (Namur) rapproche évidemment l'auteur de la poésie, qu'il pratique par ailleurs, lui qui tient les poèmes «pour les seuls textes en suspension dans le vide».

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