Je possède chez moi , dans le bureau où je travaille, un petit tableau à l’huile, peint dans les années trente du siècle dernier. Il représente ma mère lisant. La facture de ce portrait est délicatement impressionniste et quand je contemple cette scène au climat si paisible, cette femme au regard penché sur un livre ouvert, plongée dans une lecture attentive, je suis partagée entre la tendresse et l’étonnement : comment cette lectrice si tranquille pouvait-elle porter en elle un monde imaginaire si tumultueux et si véhément ? Je connais aujourd’hui la réponse à cette question, mais cette réponse me laisse malgré tout songeuse. Quand j’étais enfant, ma mère était à mes yeux un soleil. Dès qu’elle entrait dans la chambre, j’avais l’impression que tout devenait plus clair et plus chaud. Elle inclinait vers moi sa tête aux doux cheveux noirs et me caressait la joue de ses doigts légers…Un jour, en accomplissant ce rituel affectueux, elle me dit quelque chose d’étrange…
La mère de Pierre est morte en couches seule au milieu des bois. Lorsque son père est rentré…