La petite n’a qu’un nom. Celui de la famille du père qui est sous-préfet et dont on l’appelle à l’école comme au-devant d’une terreur. Haubert. Elle garde les mains en poche pour cacher qu’elles tremblent. En province, il vaut mieux n’être pas l’enfant du sous-préfet. C’est dans les Vosges, une terre noire plantée de conifères. La pluie fait partie du souvenir. La terre est imbibée d’eau chaque fois nouvelle. La maison des parents de la petite s’élève au-dessus des maisons basses. Elle s’en isole aussi par de hauts murs gris.
De son enfance dans les Vosges, la petite garde quelques souvenirs, et surtout des blessures : le premier jour d’école, le maquillage de craie que l’instituteur lui fit sur l’estrade, les railleries des camarades de classe, les insultes. Et sa réaction muette, sa stupeur, son immobilité face à la violence du monde, ses années perdues. Prostrée au fond de la classe, la petite se taît. Puis la famille déménage. Et la petite poursuit sa vie, devient femme, et traîne toute sa vie ses blessures silencieuses, au gré des voyages.
Ce texte de Pascale Tison dit nos traumatismes d’enfance, dont nous ne pouvons nous dépétrer. La pudeur de l’écriture croise la violence des blessures anciennes.
Auteur de La petite
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