La création en langue(s), entre liberté d’expression et discriminations glottophobes

Il faut commencer par un constat : tous les textes juridiques internationaux de protection des droits humains et de protection contre les discriminations, dont plusieurs ratifiés et donc applicables par la France, considèrent les droits linguistiques comme des droits fondamentaux et l’empêchement d’utiliser sa langue / l’obligation d’en utiliser une autre pour accéder à ses droits comme une discrimination interdite et condamnée.
Discriminer, c’est traiter des personnes de façon différente en s’appuyant sur un critère arbitraire, injuste, illégitime. Depuis 2001, certaines discriminations sont illégales en France : une loi, modifiée trois fois (la dernière fois en novembre 2016), a établi 23 critères illégaux de traitement différencié. Il aura fallu attendre le XXIe siècle pour que le pays qui se dit des Droits de l’Homme et la République si fière de ses valeurs (parmi lesquelles le refus annoncé des discriminations), condamne des discriminations.…

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Vie du livre : La librairie labellisée, un lieu de qualité pour le lecteur et la promotion du livre

Poussez les portes des librairies labellisées ! Vous serez certain d’y trouver l’accueil digne du lecteur que vous êtes. La fête du livre y est perpétuelle : rencontres avec des auteurs, des illustrateurs, des éditeurs, heures du conte, ateliers thématiques, clubs de lecture pour tous les âges, expositions, séances de dédicaces, nocturnes... l’imagination est au pouvoir. Depuis 2007, un label des librairies contribue à valoriser un métier essentiel à la vie culturelle en Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB). Actuellement, 54 librairies sont labellisées en Wallonie et à Bruxelles (v. la liste en bas de page* ). Vous les identifierez grâce au logo du label qu’elles affichent. Onze critères, définis en concertation avec le Syndicat des libraires francophones de Belgique, permettent de déterminer les bénéficiaires du label « le libraire ». Ces critères ont fait l’objet en juillet 2013 d’un arrêté du Gouvernement de la Communauté française fixant le règlement d’usage et de contrôle de la marque « le libraire ». Ils peuvent se résumer en quelques mots clés : Primauté du livre, accueil par des libraires professionnels bien outillés et formés, acceptant la commande à l’unité et proposant un assortiment de nouveautés, d’ouvrage de fonds et de titres d’auteurs belges sans restriction de distributeur ou de maison d'édition. Ce label donne accès aux aides de la FWB qui sont principalement de trois ordres : des subventions pour l’organisation de rencontres littéraires et pour des abonnements à des outils bibliographiques professionnels, ainsi que des prêts sans intérêts pour l’aménagement et l’équipement des lieux. En 2016, la FWB a financé 314 animations littéraires dans 33 librairies labellisées et ceci ne représente qu’une petite partie du programme culturel développé par les libraires dans leurs murs ou en partenariat avec des théâtres, des centres culturels, des festivals, des écoles... La lecture : un enjeu global et territorial Pour qu’écoles, bibliothèques publiques, centres culturels mais également auteurs et éditeurs puissent agir ensemble pour le développement de la lecture, le déploiement d’un réseau dense de librairies indépendantes est essentiel. La lecture est un enjeu global et territorial capital : là où se développent bibliothèques et librairies, la démocratie se renforce. Les mandataires politiques qui s’emparent de cet enjeu territorial fort contribuent au vivre ensemble grâce au livre et à la lecture. Cette volonté politique peut notamment se concrétiser par le choix des critères d’attribution de marchés publics d’achat de livres permettant un véritable partenariat entre écoles, bibliothèques, centres culturels d’une part et librairies indépendantes d’autre part. Un accord-cadre Les collectivités locales et pouvoirs organisateurs des bibliothèques mais aussi des écoles sont confrontés à la passation de marchés publics de livres sans être toujours outillés pour fonder leur sélection sur des critères de qualité. C’est donc souvent le taux de remise qui détermine le choix. Dans cette logique, les librairies sont amenées à forcer leurs ristournes, risquant ainsi de mettre leur commerce en difficulté et les collectivités locales sont conduites à sélectionner des fournisseurs peu performants, voire défaillants. L’accord-cadre portant sur un marché de fournitures de livres (imprimés et numériques) du Ministère de la Communauté française vise à mettre fin à cette situation. Ce vaste marché public est accessible à tous les services de la Fédération Wallonie-Bruxelles mais également aux 102 pouvoirs adjudicateurs bénéficiaires qui s’y sont ralliés (villes, communes, pouvoirs organisateurs de bibliothèques...). Ce marché a été attribué en janvier 2017 à l’Association momentanée de libraires indépendants (AMLI) pour une durée de quatre ans. Cette association est composée de 50 librairies réparties sur tout le territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Les différents pouvoirs adjudicateurs pourront donc commander indifféremment dans ces établissements sans limitation d’aucune sorte et selon leur nécessité du moment. Par cet accord-cadre, la Fédération Wallonie-Bruxelles renforce son soutien aux bibliothèques publiques et au secteur de la librairie. Un décret pour soutenir entre autres les librairies Le réseau de la librairie indépendante, véritable poumon culturel et économique local, a été parfois mis à mal ces dernières années par différents mouvements économiques. Il revient aux autorités publiques de soutenir ce réseau constitué souvent de toutes petites entreprises pour maintenir la liberté de choix du lecteur, la profusion et la diversité culturelles, aux profits des auteurs, des éditeurs et de tous les citoyens, mais aussi pour éviter le processus de concentration tel qu’il s’est développé au Royaume-Uni, en Italie, en Flandre où les librairies indépendantes disparaissent au profit de chaînes qui influencent de manière restrictive les choix éditoriaux des éditeurs. Le projet de « Décret relatif à la protection culturelle du livre » est actuellement examiné par le Conseil d’État. Il devrait être voté fin 2017 pour entrer en application en 2018. Il a pour finalité de construire, en Fédération Wallonie-Bruxelles, une politique de soutien à la création, à la diffusion et à l’accessibilité des livres en limitant les remises autorisées et en abolissant la pratique de la « tabelle » ou mark-up (surcoût appliqué au prix des livres importés de France). Il a été rédigé après une concertation menée avec les associations professionnelles (la Maison des auteurs, l’Association des Éditeurs belges, le Syndicat des Librairies francophones, ProDiPresse, Espace Livre & Création) et les instances d’avis compétentes en la matière (le Conseil du Livre, le Conseil des Bibliothèques Publiques, la Commission d’Aide à l’Edition, la Commission d’Aide à la Librairie) et entend répondre aux demandes légitimes du secteur du livre. Parmi les nombreuses motivations exprimées par celui-ci, on relèvera notamment la protection de la diversité culturelle, la démocratisation du livre et la promotion de la lecture, la suppression de la « tabelle » devant mener à une diminution du prix payé par les consommateurs pour l’achat de livres édités en France (soit plus de 70% des livres achetés en Belgique francophone), une juste concurrence entre les librairies, les grandes surfaces et les sociétés de vente en ligne. « Le présent dispositif veut inscrire, dans les outils législatifs de la Communauté française, une mesure de politique culturelle globale visant le soutien aux acteurs du livre et plus spécifiquement aux créateurs (auteurs, illustrateurs, traducteurs...) et aux diffuseurs culturels que sont les différentes catégories de détaillants, et en particulier les libraires de premier et second niveaux. Il vient renforcer la politique du livre développée, entres autres, grâce au "Plan Lecture" (lutte contre l’illettrisme et le décrochage scolaire, promotion de la lecture dès le plus jeune âge...) »  (extrait de l’exposé des motifs de l’avant-projet de décret) Le décret devrait ainsi définir les acteurs autorisés à déterminer le prix des livres (imprimés et numériques) vendus en Communauté française ; il devrait également fixer les limites des variations de prix, à la hausse comme à la baisse, en pourcentage et leur cadre temporel ; il déterminera les dérogations accordées pour l’achat de livres par certains organismes. Cette régulation du livre devrait permettre de faire respecter le prix créé par l’éditeur qui en gardera la maîtrise. Tous les détaillants pourront être en concurrence, non plus sur les taux de remise sans rapport avec la valeur réelle du livre, mais bien sur la fiabilité des services fournis, la variété, la disponibilité…

Le pari de créer en dialogue : De part et d’autre / Over en weer

On peut créer à deux langues et à quatre mains : c’est ce qu’ont fait Marc Dugardin et Marleen de Crée dans l’ouvrage De part et d’autre/Over en weer, paru en 2011 aux éditions P où, partant d’une lecture de Kertész et, à travers lui, de Celan, le poète francophone et la poétesse néerlandophone se sont mis en dialogue pour écrire un livre qui se constitue par ricochets, l’un répondant à l’autre, chacun écrivant dans sa langue. Le traducteur Stefaan van den Bremt sert de passeur pour les lecteurs à venir, et Goedele Peeters ajoute à cet espace d’échange le langage du visuel par des gravures empreintes de leur propre poésie. Rarement la création hétérolingue a été aussi loin et donné lieu à un ensemble aussi abouti. Le 15 octobre 2015, l’Association Charles Plisnier proposait, en collaboration avec Passa Porta, une soirée consacrée à ce moment de grâce d’échange intercommunautaire qui souligne ce qui est la fonction première de la culture : penser plus haut que l’horizon et unir les hommes, tant dans leurs douleurs que dans leurs rêves communs. Le livre s’ouvre sur cette double adresse au lecteur : Au lecteur Un premier poème, écho d’une lecture d’imre Kertész et, à travers lui, de la « Fugue de la mort » de Paul Celan. Puis, dans la quête de notre propre chant, une lutte avec l’ombre, l’écoute de l’autre, la confrontation parfois, la confiance qui se tisse peu à peu. Une sorte de contrepoint, entre tension et apaisement. Deux langues, deux voix poétiques, puis une troisième qui, d’un geste, vient jeter une passerelle vers le lecteur. À lui, à présent, de se saisir du thème, d’en donner à entendre une autre part. Lees maar een eerste gedicht, waarin de stem van imre Kertész naklinkt en, via hem, Paul Celans ‘todesfuge’. Daarbij, bij het zoeken naar ons eigen lied, een partijtje schaduwboksen, luisteren naar de ander en, in confrontatie soms, elkaars vertrouwen winnen. een soort contrapunct, tussn spanning en rust. twee talen, twee poëtische stemmen, daarna nog een derde die, beeldend, een brug slaat naar de lezer toe. aan hem nu om zich het thema toe te eigenen en nog een partij te laten meeklinken.                                                                       * Le projet témoigne à la fois d’ambition et de modestie : il met en œuvre une polyphonie qui fait fi des bornes linguistiques, tout en interrogeant les limites du verbal. Il emmène vers l’est de l’Europe durant la seconde Guerre Mondiale, vers ce moment sombre de l’Histoire qu’est la Shoah, pour questionner la puissance évocatoire du poétique, tenter de voir ce que lui apportent le plurilinguisme et le dialogue des arts. En guise de réponse, le recueil souligne ce qui, tel un négatif photographique, se révèle lorsque plusieurs modes langagiers s’entrelacent pour approcher de l’indicible. Le texte poétique démontre à quel point la langue, lorsqu’elle prétend traduire une certaine réalité, met surtout en évidence le gouffre qui la sépare de cette réalité. Avec humilité, les mots ne peuvent témoigner que d’un échec descriptif. Le souvenir de Kertész et de Celan hante ce recueil. Celui-ci écrivit sa Fugue de mort (Todesfüge) dès la fin des années 1940. Au fil du temps, ce texte a pris un statut de symbole: celui de la survivance du chant poétique face à la terreur des camps de concentration. Ce poème témoigne du fait que quelque chose résiste, qu’aucune langue ne parviendra jamais à « (r)attraper ». Parallèlement, quelque chose reste aussi au-delà de ce qui fait que deux langues diffèreront toujours, en dépit des influences et des échanges. Vu sous cet angle, le duo de Marc Dugardin et Marleen de Crée (tout en minuscules et dépourvu de toute ponctuation) parle de ce qui demeure à jamais perdu, autant que de ce qui, paradoxalement, s’épanouit dans le dire poétique et dans l’échange. Si la poésie est, comme le pensait Verlaine, « de la musique avant toute chose », la polyphonie conscientise ici le lecteur-auditeur de ce qu’au plus profond de lui résidera toujours un espace ouvert à ce qui se fait percevoir dans son altérité. Telle est l’invitation formulée dans le poème de clôture : quoi en nous d’inexplicable où quelqu’un n’en finit pas d’écouter? wát aan ondoorgrondelijks in ons waar iemand eindeloos luistert? Pour rendre leur propos sensible, Marleen de Crée et Marc Dugardin se sont livrés à Passa Porta à la lecture de leurs textes, leur donnant souffle, rythme, intonation, ainsi que la singularité de leurs voix. Ils se sont aussi prêtés aux questions pour éclairer leur projet si peu ordinaire. On a ainsi appris que le projet est né de l’intérêt de la dessinatrice Goedele Peeters – complice éditoriale de Marleen de Crée depuis plusieurs années – pour l’art poétique de Marc Dugardin. Que la poétesse flamande interpelle l’écrivain namurois, et que celui-ci propose le thème de l’échange. Que chacun ne peut, durant l’élaboration du recueil qui dure un an et demi, entreprendre aucun autre travail, car il les requiert totalement. Que Goedele Peters n’entend pas illustrer le propos du livre, mais seulement rendre visible par des images de ponts et de miroitements, des jeux d’ombres et de lumières, sa perception personnelle de l’art poétique. Que le traducteur Stefaan van den Bremt travaille au fur et à mesure de l’élaboration, opérant des choix qui exigent une sensibilité poétique aiguisée à faire jouer du français vers le néerlandais et réciproquement, ce qui est particulièrement rare et remarquable. Chacun est revenu sur ce que ce projet si peu commun lui avait apporté. Il est frappant que les poètes aient signalé qu’ils n’auraient pas pu entreprendre un travail sur un sujet si ardu s’ils ne l’avaient pas réalisé dans le cadre de cet échange, qui s’est avéré stimulant de part en part, même s’il a comporté des difficultés. En particulier, chacun a approfondi sa propre expérience poétique de par sa mise à l’écoute de la poéticité de la langue de l’autre. Ce projet a été une interpellation à aller plus loin que soi, à se mettre en état de totale disponibilité, condition première de l’avènement poétique. « Le rapport que l’on a avec une œuvre dépend de ce que l’on dégage dans sa vie pour l’accueillir ; et de la manière dont on s’engage dans ce rapport: c’est le début de la vie poétique », écrit Yannick Haenel (À mon seul désir, 2005). Pari tenu que de se mettre ici en disposition d’écoute pour entendre ce qui, au-delà des mots et des langues, fait signe poétiquement. Pari à relever ensuite par nous, lecteurs : bonté qui ricoche vers la rive de l’autre         goedheid kiskassend naar de oever van de ander. © Matthieu Sergier,…