La Chanson de Nana Sumatra






À PROPOS DE L'AUTEUR
Jacques Crickillon
Auteur de La Chanson de Nana Sumatra
Né à Bruxelles le 13 septembre 1940, l'auteur de La barrière blanche (1974, André de Rache) est licencié en philosophie et lettres. Sa connaissance de l'Afrique et de l'Extrême-Orient, son intérêt pour la sociologie, l'histoire de l'art et des religions s'accompagne d'une passion pour la littérature extra muros. Ce professeur d'Histoire des Littératures au Conservatoire royal de Bruxelles a reçu au fil du temps un grand nombre de distinctions qui soulignent l'intérêt de son oeuvre et la continuité de sa démarche. Citons le Prix Franz De Wever, de l'Académie Royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique, le grand Prix triennal de Littérature du gouvernement belge, le Palmier d'Or du Festival international de la Francophonie à Nice, le Prix Rossel 1980, le Prix Charlier-Anciaux de l'Académie Royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique pour l'ensemble de son oeuvre. Alors que d'aucuns sont encore confinés dans une certaine idée de «la belgitude», Crickillon nous livre des commentaires précieux sur le roman noir, sur les œuvres de Tchekov, Dostoïevsky, Kafka, Faulkner, Michaux, Bosquet, Himes. En réalité, la curiosité de Jacques Crickillon est alimentée par la nécessité profonde de répondre par la sensibilité et l'intelligence aux forces destructrices d'une vie intérieure mouvante et tourmentée. Ce «faiseur d'images» se situe à la hauteur du rêve et de la réflexion. L'artisan opiniâtre et rageur entretient un climat étrange où les mots, les couleurs et les odeurs sont bien ceux d'une aventure totale. Rien n'est gratuit dans le travail de Crickillon, ni la poursuite de la forme et du genre, ni le souci d'échapper aux barrières des paysages et des individus. Rêve ou cauchemar, la séquence isolée par le poète approche de très près une forme de fantastique qui tient davantage aux signaux de l'inconscient qu'à la volonté délibérée d'opter pour une écriture singulière. On a peut-être un peu vite évoqué Saint-John Perse en parlant de l'oeuvre de Crickillon; en effet, si le souffle de l'auteur d'Amers s'y retrouve dans des pages délibérément larges et puissantes, le sens du sacré et celui de la cruauté trouvent bien vite leurs marques dans une expérience de vie continue. Critique littéraire remarquable, romancier débarrassé de toute éthique du roman traditionnel, Crickillon avance son registre propre sans se soucier du genre, un peu comme le fait Jean-Pierre Otte dans d'autres perspectives. Ce Bruxellois qui laisse «transpirer» les murs de sa ville est un voyageur de l'universel; sa solitude est planétaire. Et si le lyrisme luxuriant dont il nous inonde dans la plupart de ses œuvres nous fait approcher une sensualité irradiante, la scansion même de la phrase à la fois périodique et morcelée nous rappelle que le désert de là-bas peut être à l'image de la solitude d'ici. En cela, Jacques Crickillon est décidément un auteur inclassable. L'aspect «dramatique» de son oeuvre prolonge son ambiguïté et son absolue originalité. Enfant naturel de Lautréamont, pionnier des sables lisses, Crickillon est peut-être l'auteur le plus proche de nous par l'inquiétude qui nous habite et qu'il révèle comme les ors un peu troubles d'une toile de Van Gogh ou les masses colorées et odorantes d'un Gauguin prisonnier cruel de sa propre magnificence.

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