J’ai écrit ce livre pour parler de choses dont je ne parlais pas, de choses dont pendant très longtemps je n’avais même pas conscience. J’ai écrit ce livre pour parler de mes anciennes peurs qui ne me paralysent plus, de mes indignations qui ne s’éteignent pas, et aussi de mes nouveaux désirs qui me font me sentir plus forte. J’ai écrit ce livre pour parler des choses dures qui se reproduisent alors qu’on voudrait qu’elles changent mais aussi pour parler des choses douces qui passent trop vite et qu’on ne veut pas perdre.
Ça parle de sexisme ordinaire, de grands-mères qui vendent de la glace, de fracture sociale, de vêtements qu’on achète et qu’on ne met pas, de bus qu’on prend la nuit, ça parle des mots des autres, ça parle de consentement, ça parle de désir, ça parle de ce qu’on devient et de ce qu’on refuse de devenir, ça parle de pain qu’on fait brûler et qu’on mange quand même, ça parle de bibliothèques, ça parle de violence de classe, de pain au citron et à l’huile, de grands-pères qui mangent les lapins qu’ils tuent eux-mêmes, de grands-pères qui ressemblent à Clint Eastwood, d’aisselles qui ressemblent à toutes les aisselles, ça parle de films qu’on a trop regardés, de films qu’on a aimés et puis qu’on a détestés, ça parle de ce qu’on veut oublier et de ce qu’on veut retenir.
Ça raconte l’histoire d’une fille, on appelle ça souvent une jeune fille et même parfois une petite jeune fille, qui un jour se met à parler et qui ne s’arrête plus et ce n’est pas une question de devenir une femme parce que qu’est-ce que ça veut dire devenir une femme, c’est plutôt devenir autre chose que ce qu’on était, autre chose que ce qu’on devrait être.
Autrice de Je n’arrive pas à parler et à dire des choses en même temps
es gouttes, considérées chacune dans sa particularité, ne forment pas pour autant ce que l’on perçoit comme étant de la pluie. Mais la pluie se compose bel et bien de l’ensemble de ces gouttes, qui tombent les unes après les autres, les unes à côté des autres, dans leur rythme, leur humidité et leur orientation propres. Le recueil d’Éva Mancuso crée une impression similaire. Des phrases, sans les indicateurs classiques marquant le début et la fin, qui se présentent une à une, en faibles précipitations ; ou qui se densifient à certains moments, au sein des paragraphes, en ondées. Des énonciations, souvent à l’imparfait, qui mouillent de remémorations, de souvenirs, de récits brefs. Et si ces phrases sont envisagées dans leur globalité, alors seulement…
Rien dans cette longue confidence qui ne soit placé sous le signe de l'amour. Il y a d'abord celui…