Georges Simenon et Stanislas-André Steeman

1. LES CHEMINS PARALELLES En comparant le cheminement de ces deux « géants », non seulement du roman criminel, mais aussi des lettres belges, on ne peut qu’être frappé, quoi qu’on en dise, par l’étonnant parallélisme de leurs carrières respectives.

Tâchons d’en explorer rapidement les étapes principales avant d’en venir aux rapprochements qui s’effectueront à l’époque du « Jury », alors que tous deux auront accédé à la notoriété.

Étonnant de constater que Georges Simenon est né dans la nuit du jeudi 12 au vendredi 13 février 1903 et que Stanislas-André Steeman publie en 1931 une de ses œuvres fortes intitulée précisément La Nuit du 12 au 13, puis en 1961 Peut-être un vendredi, son avant-dernier roman.
Étonnant toujours et curieux hasard, cette nouvelle de Simenon publiée quelques années plus tôt dans Froufrou 1 , signée du pseudonyme de Gom Gut et titrée La Nuit du 14 au 15 !

Surprenant aussi que nos deux auteurs ne se…

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“Guerre et Térébenthine”, un livre magistral de Stefan Hertmans

L'écrivain flamand Stefan Hertmans (né en 1951) avait en sa possession depuis plus de trente ans des cahiers remplis par son grand-père, avant d'oser prendre connaissance de leur contenu. C'est ce que nous explique l'auteur dans les premières pages de Guerre et Térébenthine (Gallimard, 2015), tout de suite après avoir évoqué ses souvenirs les plus anciens de cet homme énigmatique mais aussi secret qui avait survécu aux horreurs vécues dans les tranchées pendant la Première Guerre mondiale, qui fut mis à la retraite pour cause d'invalidité de guerre à l'âge de 45 ans et se concentra par la suite sur ce qui était devenu pour lui plus qu'un violon d'Ingres: la peinture - il avait obtenu un " brevet de capacité en peinture et dessin anatomique ". Hertmans découvre et nous livre graduellement, par étapes, la poignante réalité de ce "plus". Résister pendant trente ans à la tentation de lire ces cahiers pourrait sembler pathétique, une forme de Wichtigtuerei, une manière de se rendre intéressant. Le livre basé sur ces cahiers n'offre cependant aucun prétexte à une telle interprétation. Hertmans est totalement dépourvu de pathos et, dans ce livre, il excelle plus que jamais par un style à la fois lucide, objectivant et extrêment précis, poétique, style qui s'insinue lucidement dans le monde de l'objectivité mais qui en même temps témoigne de la prise de conscience du fait qu'il subsiste toujours des traces insaisissables et propices à la nostalgie auxquelles se heurte désespérément le langage le plus raffiné.  Il hésitait à ouvrir ces cahiers plus tôt parce qu'il se rendait compte que les utiliser et les incorporer dans un récit le pousserait, lui, l'écrivain, dans ses derniers retranchements. Il redoutait l'échec paralysant, ce que le lecteur ne comprend que trop bien après avoir lu Guerre et Térébenthine. Le grand-père de Hertmans, Urbain Martien, vécut de 1891 à 1981. L'écrivain a donc connu son grand-père suffisamment longtemps pour pouvoir confronter les mémoires de celui-ci avec ses propres souvenirs. Ce qui est surprenant dans ces mémoires, du moins pour ce qui en constitue la pièce de résistance, c'est-à-dire la Première Guerre mondiale (la Seconde est liquidée en moins d'une page), c'est qu'ils ont été écrits près d'un demi-siècle après les événements. Le vécu d'Urbain Martien doit littéralement avoir laissé une impression à ce point marquante, doit s'être incrusté dans sa mémoire comme s'il s'agissait de blessures dont les cicatrices témoignaient encore de la douleur plusieurs décennies après qu'elles furent infligées. À partir de 1963, Martien s'est consacré pendant pas moins de dix-sept ans à son manuscrit de six cents pages au total. Hertmans estime qu'en écrivant, son grand-père s'aventurait toujours plus profondément dans les tranchées de ses souvenirs. Guerre et Térébenthine constitue véritablement un tour de force. En gros, la première partie est placée sous le signe de la térébenthine, c'est-à-dire de la peinture du grand-père, la deuxième sous celui de la guerre, et les deux se retrouvent entremêlées dans la troisième partie. Mais certains fragments, dont quelques-uns parmi les plus boulevesants, remontent plus loin dans le temps encore. Ils parlent du père du grand-père, ou plutôt de l'amour intense que celui-ci nourrissait pour Céline, femme fière, d'un milieu aisé où l’on n’admettait pas qu’une fille " de bonne famille " puisse s'acoquiner avec un homme d'origine modeste. D'une beauté sublime est l'image de Franciscus et d'Urbain dans le silence sacré d'une église où le premier, tout en haut d'une échelle, devient presque partie intégrante des scènes peintes qu'il est en train de restaurer, tandis que son fils, en bas, fait figure d'auxiliaire. Tout aussi impressionnante, fût-ce surtout déchirante, est la déclaration d'amour posthume, anxieusement camouflée, du grand-père Urbain à sa première femme prématurément décédée, la Maria Emelia idéalisée, éclairée partiellement dans les dernières pages du livre seulement, et là aussi la peinture se voit attribuer un rôle de premier plan, cette fois-ci comme porteuse d'un chagrin intense, de douleur et de sublimation. Il s'agit là incontestablement d'une formidable prouesse, que l'auteur réalise sans recourir à aucun artifice. Hertmans ne semble éprouver aucune difficulté à conférer à ces vies qui appartiennent à des générations antérieures une proximité physique et émotionnelle evidente, souvent déconcertante. Qu'il y ait des décalages importants et très variables dans le temps est manifeste et ressort de nombreux passages dûment documentés, d'événements historiques évoqués en passant ou d'aspects courants de la vie, mais l'empathie qui caractérise l'écrivain, combinée bien sûr avec les informations puisées dans les cahiers du grand-père, parvient à chaque fois à les abolir. Bien que se tenant à l'arrière-plan, Hertmans n'en relate pas moins sa quête, en formulant les doutes et les difficultés auxquels il s'est vu confronté. De plus, il projette de temps à autre discrètement le rapport père-fils (de Franciscus et d'Urbain) sur sa propre vie, car lui aussi est fils d'un père et père d'un fils. Le livre couvre de la sorte une période d'un siècle et demi sans que le lecteur ait jamais l'impression que ces vies éloignées dans le temps ne présentent plus qu’un intérêt historique, comme s'il s'agissait de données quasi abstraites dans un continuum grisâtre de générations qui se succèdent. 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Le livre comporte des aspects documentaires, tient de l'essai et présente des traits philosophiques, mais tous ces éléments découlent toujours logiquement, presque organiquement, du dessein littéraire. Que des historiens présentent la Première Guerre mondiale comme une rupture sans pareille est ainsi illustré de manière extrêmement concrète - et je dois me limiter à un seul exemple:     "La rupture de style est intervenue dans l'éthique de la violence, écrit Hertmans. La génération de soldats belges qui fut conduite dans la gueule monstrueuse des mitrailleuses allemandes au cours de la première année de guerre avait encore grandi selon l'éthique exaltée du XIXe siècle, avec un sentiment de fierté, un sens de l'honneur et des idéaux naïfs. (...) Les soldats se lisaient entre eux des petits livres (...), souvent même de la poésie. (...) Un militaire devait constituer un exemple pour la population qu'il était tenu de protéger. La piété, une aversion radicale pour les abus sexuels, une grande mesure dans la consommation d'alcool, parfois même une abstinence totale." De tous ces idéaux il ne subsistait plus rien dans les tranchées. Ils ont toutefois bel et bien survécu - et c'est ce qui rend tellement attachant ce livre magistral - dans l’existence de ce grand-père réservé, naïf, qui réprimait son chagrin, écrivait et peignait. Cyrille Offermans (Tr. W. Devos) STEFAN HERTMANS, Guerre et Térébenthine (titre original : Oorlog en terpentijn), traduit du néerlandais par Isabelle Rosselin, éditions Gallimard, Paris, 2015, 402 p. (ISBN 978 2 07 014633 8). Rappelons que le n° 3 / 2014 de Septentrion contient des…