Auteur de Fragments imaginaires du journal d'Abraham Stoker
Luc Baba est romancier, poète, et auteur de livres pour enfants, dont trois biographies consacrées à Chaplin, Brel et Ferré. Plusieurs fois récompensé, il a signé une quinzaine de romans, dont Elephant Island, paru chez Belfond en 2016. Il est également chanteur et comédien.
Le projet de cette plaquette de dix pages à peine est si ambitieux qu’il en devient risqué : décrire la genèse d’un monument des lettres fantastiques par le biais de la fiction, et renoncer pour cela à toute exhaustivité. L’auteur est donc contraint en même temps à la conjecture et à la concision, c’est-à-dire qu’il doit mettre en évidence des faits potentiellement significatifs, propres à alimenter un récit des origines, mais que le format l’empêche de multiplier les hypothèses, de sorte que la voie la plus carrossable — celle de l’induction, où de nombreux faits spécifiques sont mis bout à bout — lui est interdite. Il ne reste alors que le hors-piste : une conduite du récit à l’instinct, drastiquement sélective et que menacent mille accidents répondant aux noms d’invraisemblance, de psychanalyse de comptoir ou de cliché gothique.
La forme adoptée, celle de la suite de fragments, entraine forcément un récit décousu. Les dates choisies vont de 1890 à 1907, de la prime genèse de Dracula au déclin de son auteur. Au fil de ces notes sont évoqués les écrivain·e·s Walter Scott, Arthur Conan Doyle, Honoré de Balzac, Violet Hunt et Emily Gerard, les compositeurs Richard Wagner et Franz Liszt, le comédien Henry Irving, le photographe Frank Meadow Sutcliffe, le géographe Arminius Vambery… Non seulement de telles références témoignent d’un réel effort de documentation sur les gouts et les inspirations de Stoker, mais elles brossent de surcroit le portrait d’une époque, et ce, en quelques centaines de mots à peine. L’ensemble est franchement bien ficelé, mais je regrette qu’il soit ramassé au point que le lecteur puisse en concevoir un vertige. On ne peut juger trop sévèrement cet exercice, eu égard aux contraintes qui cadenassaient son écriture, mais il est permis de croire qu’il eût eu plus d’allure développé sur quelques pages supplémentaires.
Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre navigation sur notre site. Parmi ces cookies, les cookies classés comme nécessaires sont stockés sur votre navigateur car ils sont essentiels pour le fonctionnement des fonctionnalités de base du site Web. Nous utilisons également des cookies tiers qui nous aident à analyser et à comprendre comment vous utilisez ce site Web. Ces cookies ne seront stockés dans votre navigateur qu'avec votre consentement. Vous avez également la possibilité de désactiver ces cookies. Mais la désactivation de certains de ces cookies peut avoir un effet sur votre expérience de navigation.
Les cookies nécessaires sont absolument essentiels au bon fonctionnement du site Web. Cette catégorie comprend uniquement les cookies qui garantissent les fonctionnalités de base et les fonctions de sécurité du site Web. Ces cookies ne stockent aucune information personnelle.
Julien Noel
05 mars 2020
Le projet de cette plaquette de dix pages à peine est si ambitieux qu’il en devient risqué : décrire la genèse d’un monument des lettres fantastiques par le biais de la fiction, et renoncer pour cela à toute exhaustivité. L’auteur est donc contraint en même temps à la conjecture et à la concision, c’est-à-dire qu’il doit mettre en évidence des faits potentiellement significatifs, propres à alimenter un récit des origines, mais que le format l’empêche de multiplier les hypothèses, de sorte que la voie la plus carrossable — celle de l’induction, où de nombreux faits spécifiques sont mis bout à bout — lui est interdite. Il ne reste alors que le hors-piste : une conduite du récit à l’instinct, drastiquement sélective et que menacent mille accidents répondant aux noms d’invraisemblance, de psychanalyse de comptoir ou de cliché gothique.
La forme adoptée, celle de la suite de fragments, entraine forcément un récit décousu. Les dates choisies vont de 1890 à 1907, de la prime genèse de Dracula au déclin de son auteur. Au fil de ces notes sont évoqués les écrivain·e·s Walter Scott, Arthur Conan Doyle, Honoré de Balzac, Violet Hunt et Emily Gerard, les compositeurs Richard Wagner et Franz Liszt, le comédien Henry Irving, le photographe Frank Meadow Sutcliffe, le géographe Arminius Vambery… Non seulement de telles références témoignent d’un réel effort de documentation sur les gouts et les inspirations de Stoker, mais elles brossent de surcroit le portrait d’une époque, et ce, en quelques centaines de mots à peine. L’ensemble est franchement bien ficelé, mais je regrette qu’il soit ramassé au point que le lecteur puisse en concevoir un vertige. On ne peut juger trop sévèrement cet exercice, eu égard aux contraintes qui cadenassaient son écriture, mais il est permis de croire qu’il eût eu plus d’allure développé sur quelques pages supplémentaires.