Edito : Passages


Le Carnet et les instants, 185e numéro.

Sans doute cette livraison de la revue des Lettres belges étonnera-t-elle ses fidèles lecteurs par son format inhabituel. C’est que Le Carnet entame un important travail de rénovation.

Avec une première (r)évolution – numérique : la bibliographie et les recensions, incontournables de la revue, paraîtront désormais sur le blog le-carnet-et-les-instants.net. Les chroniqueurs chevronnés du Carnet y partageront toujours leur passion pour les livres, rejoints par plusieurs nouvelles plumes.

Autre nouveauté : les recensions paraissent à présent à un rythme bimensuel. Le passage au numérique rend possible ce tempo de publication plus soutenu et une meilleure adéquation avec l’actualité éditoriale. Les recensions seront par ailleurs classées à l’aide de mots-clés et archivées sur le blog, pour une consultation aisée à tout moment et par tou-te-s, bien au-delà du cercle des abonné-e-s.

Pour les abonné-e-s, un Carnet…

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Editorial

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Traduction littéraire pour enfants: Emmanuèle Sandron, Maurice Lomré

La traduction littéraire est un champ vaste et trop peu connu. Si nous avons la chance d’avoir accès à la pensée et à la sensibilité de Mark Twain, Léon Tolstoï, Toni Morrison, Gabriel García Márquez, Karen Blixen, Virginia Woolf, Italo Calvino, Elsa Morante…, c’est grâce à une profession qui reste trop souvent dans l’ombre. Il est essentiel que les œuvres voyagent, et il en est de même en littérature jeunesse. La traduction de livres pour enfants et adolescents présente des spécificités propres à son lectorat. Si, à première vue, l’exercice pourrait paraitre plus facile (phrases plus courtes, syntaxe plus simple…), il n’en est rien. L’écriture destinée à la jeunesse ne demande pas moins de précision et de maitrise. Nous avons rencontré une traductrice et un traducteur belges aux parcours très différents. Emmanuèle Sandron est traductrice de formation, autrice et psychanalyste. Elle traduit de l’anglais, du néerlandais, de l’allemand, du letton et de l’italien. Maurice Lomré est bibliothécaire de formation et autodidacte. Il travaille pour la maison d’édition L’école des loisirs dont il assure la diffusion et la promotion en Belgique. Il traduit du néerlandais et de l’anglais. Tous deux ont en commun le goût de la lecture et la passion des langues.   *   Chemins vers la traduction. Comment devient-on traductrice, traducteur? Parfois on y arrive plus ou moins par hasard, parfois par détermination. «Au départ, je voulais être autrice, explique Emmanuèle Sandron, qui a d’ailleurs écrit et publié plusieurs livres. J’ai souhaité devenir écrivaine à l’âge d’onze ans, et à seize ans je me suis rendu compte que je n’en vivrais pas. Le moyen que j’entrevoyais pour vivre de ma plume était de devenir traductrice littéraire. Les langues sont apparues très tôt dans ma vie et m’ont tout de suite intéressée. J’ai choisi de suivre un master en traduction à l’école d’interprètes internationaux à Mons, et j’ai commencé par un boulot de traductrice commerciale. J’ai ensuite suivi un troisième cycle en traduction littéraire au CETL [Centre Européen de Traduction Littéraire (Bruxelles), ndlr]. Plus tard, j’y ai d’ailleurs enseigné la traduction littéraire, ainsi qu’à l’Université de Liège. Après mes études, j’ai écrit mon premier roman, et puis tout s’est enchainé: la publication de mon livre et mon premier contrat de traduction avec Luce Wilquin, puis avec Albin Michel.» Par la suite, Emmanuèle Sandron a écrit des articles pour la revue de traduction littéraire TransLittérature, avant d’en devenir la rédactrice en chef pendant six ans. «Dans ce cadre-là, j’ai écrit quantité d’articles, de portraits de traducteurs, dont certains qui écrivent aussi. Ma pratique est toujours nourrie d’une réflexion sur la traduction: comment traduit-on? Comment font les autres?»   Maurice Lomré, lui, ne se prédestinait pas à la traduction. «Cela a commencé dès la création de Pastel [l’antenne belge de L’école des loisirs, ndlr] en 1988. Christiane Germain, l’éditrice fondatrice de Pastel, a senti que j’avais envie de travailler sur les textes. Elle m’a très vite proposé de relire les textes qu’elle publiait (créations et traductions). Puis elle m’a confié des traductions. D’abord depuis l’anglais, puis depuis le néerlandais.» N’ayant suivi aucun cursus en traduction, Maurice Lomré a beaucoup étudié les langues par lui-même. «Il y a chez moi des centaines de dictionnaires et de grammaires anglais et néerlandais… des plus pointus aux plus ordinaires. Cela me rassure de les avoir autour de moi. Bien entendu, je regrette de n’avoir jamais vécu dans un pays anglophone ou néerlandophone. Ma connaissance est donc plus livresque et littéraire que quotidienne. En revanche, avant de me lancer dans la traduction, j’avais déjà énormément lu de littérature pour la jeunesse ainsi que de littérature pour adultes. Et je lis toujours beaucoup aujourd’hui. J’ai dans la tête une armoire remplie de tiroirs dans lesquels je puise pour trouver la voix, le ton ou le registre de langue qui, à mes yeux, serviront le mieux le texte que j’envisage de traduire.»   * Spécificité de la traduction en littérature jeunesse La traduction exige une double maitrise: celle de la langue d’origine et celle de la langue d’arrivée. La maitrise de cette dernière est essentielle. De plus, alors qu’un auteur développe souvent un style qui lui est propre, le traducteur doit s’adapter à celui du livre qu’il traduit. Austérité ou fantaisie, phrases longues ou courtes, alambiquées ou fluides: il s’agit de maitriser tous les registres. Et ce point est particulièrement pertinent en littérature jeunesse lorsqu’on traduit pour des tranches d’âges différentes. L’exercice n’est pas simple. «Au départ, mon rêve était de traduire du roman pour adultes, explique Emmanuèle Sandron. J’ai commencé par des polars chez Luce Wilquin, et Albin Michel m’a confié la traduction des romans policiers de Pieter Aspe. Cela m’a appris le métier. Puis, à la naissance de mes enfants, j’ai découvert la littérature jeunesse. Je racontais des albums chaque soir à mes enfants et j’ai découvert des trésors d’inventivité. Progressivement, j’ai traduit de plus en plus d’albums et de romans pour jeunes lecteurs. Quand j’ai reçu le prix Scam de la traduction pour mon travail en jeunesse, ça a été un moment de bascule: je me suis spécialisée en livres pour enfants et adolescents. Je les trouve beaucoup plus complexes à traduire que les livres destinés à un lectorat adulte. Peut-être que la littérature jeunesse mobilise une autre case du cerveau. Quand je traduis pour les adultes, c’est mon moi d’adulte et de chercheuse qui travaille. Quand je traduis pour les enfants, c’est mon moi poète. Et là, c’est plutôt une question d’inspiration, de fulgurance… C’est aussi un travail extrêmement précis sur la langue, il s’agit d’opérer des choix lexicaux très fins, de trouver le mot juste, de jouer avec les sonorités. Mon moi psy s’allume aussi et surveille ce qui se passe. Il faut faire attention quand on s’adresse aux enfants, on ne peut pas commettre d’impair. Et puis, il y a mon moi enfant: je suis aussi une petite fille quand je traduis.»   Cette proximité avec l’enfance caractérise aussi le rapport de Maurice Lomré à la traduction: «J’aime particulièrement traduire pour les enfants de 10-12 ans. Je pense que la raison en est que je me souviens extrêmement bien de moi à cet âge-là. Nous sommes tous habités par les différents âges que nous avons eus, et le garçon de cet âge-là est particulièrement vivant en moi.»   * Un penchant pour la traduction de l’album illustré   Tous deux font une comparaison similaire. «Je traduis les albums plus joyeusement que les romans, explique Maurice Lomré. Traduire un roman, c’est un peu comme escalader un col à vélo: c’est souvent difficile. J’aime surtout le moment où j’arrive en haut, pour reprendre la métaphore cycliste. Disons que j’aime le résultat. Les albums, je les traduis avec une espèce de joie. Je compare l’album à la chanson en raison de l’articulation de deux langages: la musique et les mots dans le cas de la chanson, les images et les mots dans le cas de l’album. L’un ne va pas sans l’autre. J’aime ce genre littéraire qui se réinvente sans cesse. Le livre le plus amusant que j’ai traduit est un album anglais, Orange Pear Apple Bear, d’Emily Gravett. Il ne comporte que quatre mots et semblait intraduisible, car l’album combine ces quatre mots en jouant sur les sonorités. Je me suis assis à mon bureau et j’ai décidé que je ne le quitterais pas avant d’avoir trouvé une solution satisfaisante en français. Et j’ai trouvé! Hourra! Ce jour-là, je me suis dit que j’étais peut-être devenu traducteur (rires).» «Ce que je préfère, ce sont les albums, confie également Emmanuèle…