Entre 18 et 25 ans, la cuisine a tenu une place immense dans la vie de Benoît Peeters. Après un repas chez les Frères Troisgros à Roanne, alors le restaurant le plus célèbre de France, le jeune homme apprend la cuisine avec passion, en autodidacte. Quand il laisse tomber la préparation du concours de Normale Sup et que ses parents lui coupent les vivres, Benoît tente de devenir cuisinier à domicile ! Entre deux articles et un job dans une librairie, il s’essaie aux recettes les plus subtiles… et se confronte à la rudesse du réel.
Auteur de Comme un chef
Benoît Peeters est un intellectuel de multiples talents. Écrivain, critique, biographe (Hergé, Paul Valéry, Jacques Derrida), éditeur, co-auteur des célèbres Cités Obscures avec François Schuiten, il est aussi, ce que l’on savait peut-être moins, un authentique gastronome – tant en dégustation qu’en préparation. Peut-être inspiré par Le gourmet solitaire de Jirō Taniguchi dont il est friand, il publie chez Casterman, dans la collection culte « Écritures », Comme un chef, une autobiographie culinaire sous forme de roman graphique avec, aux dessins, Aurélia Aurita, bien connue pour Fraise et chocolat, bande dessinée autofictive et érotique.Que l’histoire s’inspire directement des années…
Les saisons de la vie : Grisailles (tome 3)
En cet hier 1938, Bastien Colleaux se sent vieux, très vieux, et, pour tout dire, plus bon à rien. Il est devenu grincheux et morose, perclus de douleurs qui lui imposent le fauteuil, la chaleur et la diète. Assis seul au coin du feu, il ressasse ses souvenirs et s'irrite…
L’arbre de mon père (volume 1) : Mémoire d’une famille grecque en Égypte (1948-1955)
Bruxelles, 2013, une pièce peuplée de livres, de plantes et de photographies. Un homme aux cheveux gris souris, de petites lunettes juchées sur son nez, pointe du doigt un garçonnet au centre d’un cliché en noir et blanc : « Alors, là, c’est moi dans les bras de ma mère. Elle m’appelait Kostaki. Ça veut dire petit Kosta en grec. » Avec son autre index, sur une carte cette fois : « Et tu vois ce petit point-là ? C’est Mansourah, ma ville. » C’est ainsi que débute l’exploration de l’histoire familiale des Saitas, sous les crayons d’Émilie et à travers les mots de son père, un Grec ayant grandi dans l’Égypte nassérienne. Les premières évocations, dispersées légèrement dans leur lourdeur manifeste, concernent les avortements subis par la grand-mère, Yaya Fifi, prise en charge par une madame Pétain (sans lien avec le Maréchal, même si tous deux ont exercé à la même époque). Puis – là les lunettes se posent et la tête trouve refuge dans une main – un autre souvenir, celui d’un séjour à l’hôpital grec d’Alexandrie pour une infection pulmonaire, au sortir de la guerre. Kosta a alors un an. Pendant des mois, il y aura la dégradation de son état de santé (malgré la pénicilline dénichée dans des établissements britanniques, grâce à la position d’un oncle officier au Canal de Suez), l’inquiétude des proches (le costume noir mortuaire était prêt), la maltraitance des infirmières (des religieuses allemandes considérant d’un œil mauvais et d’une main leste les soins préférentiels accordés au bébé), et finalement la guérison, sinon qui narrerait cet épisode et l’interromprait par pudeur ou trop-plein d’émotion… ?Une salutaire contextualisation socio-politico-économique est alors envisagée, dont la limpidité rivalise avec la beauté des illustrations. Kostaki voit le jour dans une configuration particulière : le crépuscule de la tutelle britannique en Égypte. À ce moment, des murs invisibles se dressent et des tensions palpables se perçoivent entre les couches populaires meurtries par le choléra et les inégalités, le roi et la noblesse bien en pâte, et les Occidentaux nantis (Français, Italiens, Britanniques et « Égyptiotes ») dont les jours sur le territoire sont comptés. Chacun vivant (dans) des réalités parallèles, comme le comprend très vite le petit Kostaki : Et moi, dans cette petite cuisine, je me sentais coincé entre deux mondes. D’un côté, les Grecs ; de l’autre, les Égyptiens. Dans le salon, mes parents recevaient les invités avec des nappes en dentelles et des coupes de fruits protégées par des moustiquaires. Et dans la cuisine… il y avait Abdu. Ces deux mondes séparés par les moustiquaires, ces voiles et dentelles sont autant de filtres déformants qui nous séparent du reste du monde. Saitas profite admirablement de la liberté (de codes, de couleurs, de mises en page) que lui confère la bande dessinée. Ainsi, grâce à un travail de reconstruction et de documentation considérable, ses illustrations et sa narration collent au plus près du mouvement de la mémoire : passer du portrait d’un membre de la famille à la vulgarisation d’événements historiques, enjamber des flash-backs et dénouer des liens familiaux, donner de l’étoffe par des anecdotes cocasses… Tout en précisant, par la bouche de la Tante Dolly, que « [leur] famille n’est pas plus folle qu’une autre… puisque chaque famille est composée d’êtres imparfaits ».Tout est juste et délicat dans l’entreprise de Saitas. On attend la suite de ce premier tome (couvrant les années 1948-1955) : le retour au pays des racines, la Grèce. Samia Hammami « L'Arbre de mon père » est le premier volume d'un récit familial en trois tomes, qui retrace l'enfance de Kosta, le père de l'auteure. À travers son histoire, on découvre celle de la communauté des Égyptiotes, les Grecs d'Égypte. En quelques pages d'introduction très claires, on en apprend plus sur cette communauté majoritairement bourgeoise, enrichie par le commerce du coton et vivant tous dans le même quartier, à l'écart du reste de la population égyptienne. Entre anecdotes d'enfance et réflexions sur la communauté, son récit nous plonge aussi dans l'Égypte de l'après Seconde Guerre mondiale, période décisive au cours de laquelle le pays s'affranchit du protectorat britannique avec l'arrivée au pouvoir de Nasser. Émilie Saitas compose un livre…