En 2015, le silence aura été quelque peu assourdissant autour du trentième anniversaire de la disparition de Conrad Detrez. Si ce n’est en septembre une rencontre au Blues-sphere (en Outremeuse à Liège) qui réunissait les témoignages de William Cliff et André-Joseph Dubois, deux écrivains l’ayant connu personnellement, pas un événement, pas un article, pas un salut, fût-ce à Paris, son ultime fief. Il n’est par bonheur jamais trop tard pour rendre hommage à Detrez et réaffirmer sa position éminente dans le paysage littéraire francophone…
Conrad Detrez fut, avant d’autres figures du monde intellectuel, tels Michel Foucault ou Hervé Guibert, l’une des premières victimes du SIDA. Le rappeler n’est pas dresser…
On n’achète pas un livre – et a fortiori on ne le rachète pas – au simple motif qu’il a changé de couverture. L’argument pourrait cependant suffire concernant la republication au catalogue Espace Nord des trois volumes de l’autobiographie hallucinée de Conrad Detrez. L’option graphique crève l’étal des librairies. Pour chaque titre, un autoportrait, façon photomaton en noir et blanc, nous montre leur auteur, clope au bec ou aux doigts. Jamais son regard ne croise l’objectif : par deux fois il s’oriente vers le haut, là où se tiennent paraît-il la transcendance et l’imaginaire ; ou il s’absorbe de biais, comme pour interroger le terre-à-terre. Comme si, des pupilles, Detrez rejouait seul le dialogue d’Aristote et Platon dans le célèbre tableau renaissant…
Donc…