Elle rougit. Je la suis vers la villa. Nous pénétrons dans la cuisine où elle m’invite à me laver les mains à l’évier. Elle fait de même, puis me précède dans le salon « Prenez place, je vous prie. Ne faites pas attention au désordre. Le temps d’allumer le percolateur et je suis à vous. » La formule finale me plaît. Sa voix est flûtée, timide. Une fois encore, elle rougit. Je m’enfonce dans un divan en
cuir souple. Très confortable ! Le mobilier de la pièce est ancien et de goût. Je m’y sens bien. Du coin de l’oeil, je vois une porte s’ouvrir et une tête blonde apparaître. Ah ! La belle n’est donc pas seule ! Deux yeux verts m’observent un instant en silence, puis une fillette entre et s’approche à pas feutrés.
Auteur de Un abri pour l’hiver
Monsieur Satie : L'homme qui avait un petit piano dans la tête
Pour découvrir l'oeuvre d'Erik Satie à travers une histoire et des extraits des plus célèbres pièces du compositeur. Mélancolique et triste à souhait, cet album-CD n’en est pas moins magnifique. Parler d’Erik Satie - le solitaire, le marginal, l’excentrique souvent incompris -impliquait un ton décalé, gentiment moqueur et grinçant, que rend très bien la voix du récitant François Morel (qui doit sa célébrité, rappelons-le, à l’émission télévisée des Deschiens sur Canal +). Ce n’est pas une araignée au plafond mais juste un petit piano que Monsieur Satie a dans la tête. Les notes de musique y trottent, y vagabondent sans relâche. Il est audacieux, anticonformiste, se moque du wagnérisme et des vaniteux. De son cœur s’échappent des mélodies simples pour rêveurs et poètes, un public qui lui ressemble. « Monsieur Satie parle parfois à la lune. » Et parfois aussi, « Monsieur Satie met son smoking pour écrire une partition. » Il compose, explore, mélange les genres au risque d’être méprisé. Certains l’admirent cependant, comme Cocteau ou Picasso. L’illustratrice Elodie Nouhen évoque bien l’esprit des surréalistes et la solitude du petit monsieur perdu dans le tourbillon des notes. Touches de piano, métronome, partitions…sont surdimensionnés par rapport au musicien qui ne semble pas plus haut que trois chapeaux. Ce que Raymond Lulle appelait « la tristesse par surabondance de pensée » s’applique…