Les dix dollars de Mademoiselle Rubens

À PROPOS DE L'AUTEUR
Paul Neuhuys

Auteur de Les dix dollars de Mademoiselle Rubens

Paul Neuhuys est né à Anvers, au milieu d'une «Belle Époque» dont il aimait rappeler que l'année 1897 avait vu la création de Cyrano de Bergerac et la parution des Nourritures terrestres d'André Gide : La terre appartient à celui qui éprouve le plus intensément la sensation de vivre.Son grand-père paternel, originaire des Pays-Bas, s'est fixé à Anvers où il a étudié la peinture à l'Académie des Beaux-Arts de la ville. Son père fonde une manufacture de cigares. Il épouse la jeune Anna Bürgi, de dix ans sa cadette, qui menait des études de théologie protestante. Paul Neuhuys est le deuxième des trois fils de ce couple. Son aîné deviendra artiste peintre. En âge de scolarité, il se souvient d'avoir été chétif, tourmenté par l'angoisse, attiré comme par compensation par les livres, à défaut d'avoir des compagnons de jeu : Les garçons ne me voulaient aucun bien ni les filles. Je me rabattis donc sur les livres, mes seuls amis. Je pris goût des lectures contrastées : philosophie, histoire, roman, avec une prédilection toujours accrue pour les poètes.En 1914, la publication de ses premiers poèmes lui vaut d'être renvoyé de l'athénée d'Anvers, à moins que ce ne soient les illustrations que leur avait données le peintre Paul Joostens, ce qui fit écrire à Paul Neuhuys : La poésie, tout au moins au départ, fut pour moi un délit.Grâce à ce premier recueil, toutefois, Paul Neuhuys entre en contact avec un groupe de jeunes qui se réunissent à Missembourg chez Marie Gevers. Il y fait la connaissance de Willy Koninck, avec qui il créera plus tard la revue Ça ira.Anvers, au début du siècle, est une ville de province endormie où les goûts esthétiques de la bourgeoisie d'affaires valorisent la tradition et suspectent de supercherie toute nouveauté. Henry Van de Velde ne trouvera-t-il pas la consécration en Allemagne surtout, et davantage à Paris que dans sa province natale? En littérature, les sursauts provoqués dans la jeunesse par le choc de la Première Guerre mondiale vont éveiller un état d'esprit favorable aux idées de l'avant-garde. Le pacifisme sensibilise à la nécessité de créer un internationalisme de la vie de l'esprit. L'exemple de la Révolution d'Octobre, en Russie, fascine et suscite des sympathies pour le communisme nouveau. Enfin, paradoxalement, la revendication d'une autonomie linguistique en Flandre favorise un nationalisme qui séduit même ceux qui s'expriment en français. Des revues de langue flamande comme Ruimte et Het Overzicht cohabitent avec des revues de langue française comme Lumière et Ça ira. Les uns se reconnaissent dans les valeurs de l'expressionnisme humanitaire venu d'Allemagne, les autres, avides d'expériences nouvelles, s'ouvriront comme naturellement aux tentations ravageuses et décoiffantes de Dada.A partir de 1917, Paul Neuhuys fréquente le poète Max Elskamp avec qui il se lie d'amitié et qui lui écrira une préface pour son deuxième recueil, Loin du tumulte. Après la Première Guerre mondiale, il séjourne à Paris. Il suit une formation littéraire réservée aux étrangers, à la Sorbonne.De retour à Anvers, il constitue avec des amis le groupe Ça ira qui publiera une revue et des éditions du même nom. La revue est encouragée à Paris par André Salmon puis par Cocteau, Cendrars et Pascal Pia. Elle noue des contacts avec les avant-garde européennes. Elle fera connaître des figures aujourd'hui devenues célèbres : Charles Plisnier, connu à l'époque pour son engagement communiste, Clément Pansaers, le dadaïste belge du groupe parisien, Marcel Sauvage, Paul Joostens, Norge, Henry Michaux (qui signait son nom avec y) pour Les rêves et la jambe, Michel de Ghelderode pour ses Masques Ostendais et son Cavalier bizarre ainsi que, dans les milieux du surréalisme belge, Marcel Lecomte, Paul Colinet, Marcel Mariën et Fernand Dumont. Rétrospectivement, quel palmarès pour une revue provinciale!En 1924, Paul Neuhuys se marie. Deux fils jumeaux naîtront en 1926. Il a repris la manufacture de cigares de son père qu'il dirigera jusqu'en 1946, tout en poursuivant ses activités littéraires. En 1932, il a ainsi repris, seul, les éditions Ça ira.Après la Seconde Guerre mondiale, l'entreprise familiale périclite. Des années difficiles s'annoncent. Engagé par un galeriste d'art, le poète rédige le catalogue des ventes. A partir de 1952, il assure un cours de littérature française à l'Institut Vandervelde à Anvers.De 1961 à 1965, il publie Les soirées d'Anvers où l'on trouvera rassemblés des classiques comme Hugo ou Fromentin, des contemporains comme Joostens, Dewalhens, Frans Hellens, Ghelderode et de jeunes poètes flamands en traduction.En 1968, Paul Neuhuys perd son épouse.En 1980, les éditions Belfond publient une anthologie de ses poèmes préfacés par Alain Bosquet. En 1984, la collection Espace Nord l'accueille. Une exposition lui est consacrée dans le hall du palais des Beaux-Arts, à Bruxelles. Il meurt en septembre 1984.Toujours ironique, Paul Neuhuys écrivait en 1971 : C'est l'année des Mémoires. De tous côtés et à tout propos on me demande de raconter l'époque vibrante de Ça ira, les écrivains que j'ai connus, les peintres que j'ai rencontrés au cours d'une carrière qui touche à sa fin, et les femmes aussi que j'ai frôlées au féminin pluriel? Sémiologie ou sémiotique, la vie des signes et du "design". Il faut que je donne signe de vie.

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