Le narrateur, Jérôme Mortensen, décide de s’installer chez son oncle dont il vient d’hériter. Vivre au jour le jour dans cet appartement est pour lui une façon d’en savoir davantage sur ce seul parent qui lui reste et que d’ailleurs il n’a pas connu. Mais c’est peut-être une mauvaise idée. L’immeuble est vétuste, la ville poursuivie par une mauvaise réputation (elle a enterré son fleuve), et l’oncle ne pratiquait pas un métier ordinaire puisqu’il gérait, non sans bizarreries, ce qu’il est convenu d’appeler un cabinet d’enquêtes. Quelques scellés sur la porte de son bureau attestent d’ailleurs que sa mort quelque peu mystérieuse a interessé les autorités locales.
Qu’à cela ne tienne, la vie recommence autour de Jérôme comme autour de son oncle Isaïe, la femme de ménage revient proposer ses services et d’anciens clients se manifestent. A la faveur de ces réapparitions, les langues vont peu à peu se délier, éclairant et voilant l’énigme de la disparition du vieil enquêteur. Car qui était cet homme dont Jérôme ne dispose que d’une photo ? Dans quelle nuit est-il disparu ? Et pourquoi, à son contact, le narrateur se voit-il peu à peu renvoyé à sa propre histoire ?
Dans un climat discrètement fantastique, comme si une réalité basculait lentement au profit d’une autre, François Emmanuel renoue ici avec sa veine policière
Auteur de Le sentiment du fleuve
L’Arbre du retour est le dernier roman en date du poète et romancier belge Luc Baba. L’auteur retrace dans ce récit l’histoire familiale de James Williams, père et grand-père afro-américain, qui se…
Roman Quand il ne rend pas visite à son oncle Alain incarcéré à la prison de Forest, Jean parcourt la Belgique…
L’endroit défriché par le fou : Carnets d’une Côte d’Or
L’endroit défriché par le fou : quel titre étrange ! C’est ainsi que le Romains auraient appelé Sclessin, Scloeticinus , où le narrateur a grandi. Quant aux Carnets d’une Côte d’Or , ils font référence à la rue où vécut sa famille. La Belgique est terre de comédiens et de comédiennes. Parmi ces nombreux artistes, Christian Crahay n’est pas le moindre. Il a travaillé aux côtés de Lucas Belvaux, Jean-Pierre et Luc Dardenne, Peter Brook, Isabelle Pousseur, Benno Besson, Kore-Eda Hirokazu, Chantal Akerman, Adrian Brine pour n’en citer que quelques-unꞏeꞏs. Ce que le public ignorait, c’est qu’il avait également un talent de plumes, comme le révèle L’endroit défriché par le fou . Ce livre est l’évocation sensible de la vie du comédien, à peine déguisée, à travers des notes et des esquisses où il revisite notamment Liège et en particulier Sclessin. Comme l’auteur, son narrateur, Victor, est comédien et passe par les lieux qui l’ont formé. Mais il met surtout en scène une incroyable galerie de personnages dont on devine qu’ils ont dû être proches de Christian Crahay. On pense à l’oncle José, fossoyeur surnommé Tati Cimetière, qui s’est constitué une belle cave à vins dans les sépultures. Il y a aussi le père, Fernand, architecte, qui fut nommé citoyen courageux pour s’être jeté dans la Meuse depuis le Pont d’Ougrée afin de sauver un désespéré. Dans l’orbe familial, il y a aussi la grand-mère Fernande, une féministe avant l’heure, qui officia bénévolement comme écrivaine publique, donna des cours de français aux travailleurs étrangers, fonda le magazine L’action parallèle en 1936, imagina dans un manifeste la Journée internationale des devoirs des hommes, entendez à l’égard des femmes. Elle trouva notamment son inspiration auprès de Lucie Dejardin, hiercheuse de fond durant son enfance qui deviendra la première femme députée socialiste à la Chambre en 1929.À travers des évocations intimistes, écrites avec tendresse, c’est donc aussi un regard décalé sur la Belgique que proposent ces textes. C’est ainsi quel’auteur/narrateur se souvient qu’il a été comédien dans le film de Raoul Peck consacré à l’assassinat de Patrice Lumumba. Tout en citant le discours d’Indépendance prononcé le 30 juin 1960 par le tout jeune premier ministre qui mérite d’être lu et relu, Christian Crahay dénonce clairement le rôle joué par les autorités belges dans l’élimination de cet homme élu par la population congolaise.L’ensemble du livre est empreint d’émotions et de nostalgie, à travers des évocations de la cité ardente et notamment de sa gastronomie avec quelques recettes typiques reprises à la fin de l’ouvrage, sans oublier « les lacquemants, pas lacquements ni laquemants, mais lackmants, ou peut-être lakements, enfin comme vous voudrez . » Michel Torrekens Au commencement, il y a Sclessin, Scloeticinus, ou l’endroit défriché par le fou, comme l’appelaient les Romains. Et il y a le père, dont la prospérité et le déclin incarnent le sort de cette banlieue liégeoise, aujourd’hui sinistrée, au passé industriel prestigieux. Revenu sur le tard habiter le quartier de son enfance, Victor, le fils, comédien, remonte le temps, poussé par le besoin de comprendre un homme attachant…