Gens des rues


RÉSUMÉ

Grâce aux persévérantes et sagaces recherches de Paul Delsemme, l’Académie est à même de publier pour la première fois Gens des rues, cent onze ans après les essais infructueux de Paul Heusy de lui trouver un éditeur. De même que Un coin de la vie de misère, réédité par l’Académie en 1942, Gens des rues est un constat impitoyable de la détresse quotidienne des pauvres à la fin du dix-neuvième siècle. Cet appel à la conscience de l’humanité est singulièrement…


DOCUMENT(S) ASSOCIÉ(S)
Lire un extrait Vers dix heures, la femme Delpon, qui l'a recueillie, à la mort de ses parents, dans la baraque de planches qu'elle occupe avec son mari, le marchand de peaux de lapins, rue Saussure, en face des ateliers de la Compagnie des chemins de fer de l'Ouest, lui donna un gros quignon de pain, lui mit au bras un panier d'osier et l'envoya, comme de coutume, ramasser des morceaux de charbon par les routes. Henriette sortit. La veille et l'avant-veille, une neige abondante était tombée sans relâche, et depuis le soir précédent, il ventait fort et il gelait dur. Plusieurs fois, la nuit, tandis que les murailles de la baraque craquaient au choc des rafales, la petite s'était réveillée transie sous sa maigre couverture de laine jaune. Mais, en ce moment, le soleil s'étalait, éblouissant, au bas du ciel pâle et ses rayons, en effleurant la neige blanche que la gelée avait émiettée, la poudraient de mille étincelles diamantées. Henriette, le corps enfermé dans une vieille jupe qu'un lambeau d'écharpe d'homme à couleurs crues serrait à la ceinture et qui s'arrêtait à ses genoux, des sabots aux pieds, des bas troués autour de ses jambes grêles de gamine, nu-tête, commença à courir, les mains cachées sous son tablier. Elle était toute joyeuse. Ces blancheurs brillantes qui s'étendaient à droite, à gauche, en avant d'elle, la charmaient sans qu'elle s'en rendit compte. Il ne lui semblait pas qu'il fît bien froid. Le souvenir de ses longs frissonnements de la nuit lui rendait légères les piqûres de la bise qui rougissaient ses joues et mouillaient ses yeux. Elle était ravie de s'agiter, ravie d'écouter le bruit de la neige qui criait sous ses pas, ravie de regarder les paillettes scintillantes dont le sol se couvrait. Comme elle franchissait, alerte et la mine riante, la porte d'Asnières, un des employés de l'octroi, qui grelottait malgré son épais caban vert, s'écria : – Tiens! voilà la nièce aux Delpon! Ca n'a pas dix ans, ça ne mange pas, ça n'est pas habillé, ça sort en cheveux par tous les temps et ça se porte mieux que nous. – C'est pas étonnant, dit un autre en goguenardant lourdement, de la graine de rouleuse! Cependant la petite avait avisé, à deux ou trois mètres de la grille, une mare prise et essayait, à coups de sabot, d'en casser la glace. Après maints efforts vains, elle secoua insouciamment la tête et reprit sa course.
Table des matières Préface Graine de rouleuse Laurent le tondeur de chiens La Malle Sa fille Le Lapin Le Vieux Débardeur Le Sabot de Charles Mme Marion, marchande de journaux Comment se fabrique un mendiant La Mère Robert Le Côtier Hendricks Un ménage de chiffonniers La Boîte de dominos La Vigne de Rissagou Une expulsion La Duchenin Une représentation de saltimbanques au village L'Oncle Clément Le Repas au chantier. Souvenir du pays wallon Madeleine, du Café de Portugal Le Poney À la fête de Neuilly Une rafle au Bois de Boulogne Les Vieilles de la Bourse Les Deux Pauvresses La Journée de la grande Thérèse La Fin de Henri Legrand Le Greffier Fabre Le Petit Marchand d'ail «Vive la Nouvelle» Pêche nocturne L'Homme et le chien Le Broyeur de salsepareille Le manuscrit de Gens des rues

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