André Goosse n’est pas seulement le nom d’un des meilleurs grammairiens de la langue française, ce qui suffirait cependant à sa notoriété. Il est le label d’un ouvrage indispensable à tous ceux qui veulent se servir du français en le respectant et en s’en laissant inspirer. Le bon usage, dont André Goosse poursuivit et développa l’élaboration dans la ligne de son prédécesseur Maurice Grevisse, est un monument de savoir, de réflexion et d’initiation dont la réputation internationale n’est plus à faire.
Sait-on que par ailleurs, parallèlement à son enseignement à l’Université catholique de Louvain, et avant de présider le Conseil international de la langue française et d’exercer la fonction de Secrétaire perpétuel de l’Académie royale de langue et de littérature françaises, André Goosse a, quinzaine après quinzaine, et ce pendant près d’un quart de siècle (de 1966 à 1990), publié dans le quotidien belge La libre Belgique des chroniques de langage intitulées Façons de parler ? Par la richesse de leur documentation et la précision de leurs raisonnements, elles ont la rigueur d’articles de revues savantes, mais, rédigées dans un style simple et souriant, elles ont su séduire d’innombrables amoureux de la langue française.
Conscients que ces trésors sont devenus aujourd’hui largement inaccessibles, Christian Delcourt et Michèle Lenoble-Pinson, tous deux membres belges du Conseil international de la langue française, ont jugé indispensable de réunir celles de ces Façons de parler qui — universalité du français oblige — ne trouvent qu’un écho discret dans Le bon usage : les chroniques qu’André Goosse a consacrées, en tout ou en partie, au français de Belgique.
Auteur de Façons belges de parler
Le vocabulaire professionnel du Houilleur borain : Étude dialectologique
Les patois se meurent, la chose est entendue. Mais du moins, l'agonie de certains se prolongera-t-elle encore longtemps. Le borain semble bien être un de ceux-ci. Et même le jour où il ne sera plus que du français régional, un domaine subsistera cependant qui conservera encore une partie du vocabulaire dialectal. C'est le domaine de l'industrie houillère. De même que le paysan gallo-romain a continué à parler de ses techniques propres avec nombre de mots des aïeux gaulois, de même le houilleur borain, pendant une durée indéterminée mais probablement longue encore, continuera d'employer les termes traditionnels. Car l'enseignement obligatoire, la radio, la presse et le snobisme, fourriers ordinaires de la langue française chez les patoisants, sont bien empêchés de fournir, dans ce domaine, des vocables de remplacement. À part un nombre somme toute restreint de termes généraux dispensés par les écoles techniques, porions et ingénieurs emploient les mots des ouvriers :…
Études de syntaxe descriptive (tome 2) : La syntaxe de l'interrogation
Au public qui a bien voulu prendre intérêt à notre première série de recherches dans le domaine de la syntaxe descriptive , nous présentons aujourd'hui de nouvelles observations portant, cette fois, sur la syntaxe de l'interrogation. Nous ne réitérerons pas ici notre conviction, exprimée déjà dans l'avant-propos de notre précédent volume, quant à la nécessité d'un perpétuel remodelage des grandes synthèses de linguistique française au moyen de monographies consacrées à des problèmes particuliers. Certes, on ne saurait prétendre que la doctrine soit muette sur la syntaxe de l'interrogation : bien au contraire, commentaires et remarques fourmillent, mais en ordre dispersé et il faut aller les découvrir sous les rubriques les plus diverses, et cheminer péniblement du pronom interrogatif aux principes de la phonétique syntactique, pour revenir à l'adverbe interrogatif après un crochet par la morphologie du verbe, sans oublier, bien entendu, une halte prolongée au chapitre de l'ordre des mots. Nous avons pris occasion d'un article de Léopold Gautier qui se posait et posait à ses confrères la question de savoir ce qu'il fallait penser de l'insertion de la périphrase interrogative dans les subordonnées d'interrogation indirecte. De fil en aiguille, nous sommes ainsi remonté à travers les innombrables ramifications du problème de l'expression de l'interrogation en français. Aidé de la doctrine, nous appuyant sur des textes, nous avons tenté d'ordonner la matière dans un cadre commode, de fournir des points de repère, de délimiter les questions, de suggérer des solutions. Sans doute les vues originales paraîtront-elles singulièrement clairsemées dans les pages qui suivent et dont le seul mérite est d'ouvrir çà et là une perspective nouvelle. Nous avons eu — les spécialistes le savent — un prédécesseur illustre. Il y a quarante ans, Lucien Foulet consacrait une centaine de pages de la Romania au sujet qui a fourni la matière du présent volume. Refaire le travail de Foulet serait une entre-prise téméraire. Révoquer en doute, sauf sur de très rares points de détail, la pertinence de ses analyses toujours fines et pénétrantes serait une tentative vouée à l'échec et au ridicule. En fait, nous n'avons nullement visé à remplacer une oeuvre qui garde à nos yeux sa pleine valeur. Beaucoup plus simplement, nous avons pensé qu'il importait de faire déboucher sur la langue actuelle une étude qui avait été menée essentiellement d'un point de vue diachronique et fortement centrée sur les états anciens de la langue. Et si, finalement, notre travail a quelque mérite, ce ne pourra être que grâce à celui…