Écrits du voyage : Italiques

À PROPOS DE L'AUTEUR
André DOMS

Auteur de Écrits du voyage : Italiques

Si André Doms est d'abord poète, il convient toutefois, avant de se pencher sur son œuvre poétique, de souligner qu'il n'a cessé de mener une action portant sur la diffusion d'œuvres poétiques peu connues. Cette action, cet engagement même, qui relève d'une éthique, s'est déployée à travers la direction du Journal des poètes, la traduction et la critique.André Doms fut rédacteur du Journal des poètes entre 1976 et 1991. D'un tel rôle, on retiendra la qualité première qu'il suppose : l'ouverture à l'autre.Quant à l'activité de la traduction, on peut relever qu'elle supprime les frontières que les langues instaurent, tout en veillant à préserver ce que les œuvres renferment de spécifique dans leur langue propre. Elle est encore un exercice d'attention, ainsi que de connivence avec l'autre.La critique, enfin, vise à faire affleurer la vérité profonde des oeuvres. Il s'agit, une nouvelle fois, de traduire dans la langue commune (par laquelle peut circuler quelque chose comme l'entendement, même s'il ne repose que sur l'acceptation d'un ensemble de conventions) une langue autre, dont la différence réside en ceci qu'elle est poétique. Mais ici, il y a encore à dire. Car la plupart des poètes sur lesquels André Doms a porté son regard critique présentent une particularité : tous ont vécu et ont élaboré leur oeuvre en retrait de «la vie littéraire», et aussi du souci de publier. Ces marginaux auraient-ils été voués à l'oubli si quelqu'un ne s'était astreint à rassembler leurs textes épars et à les commenter? On ne peut que le supposer. Il est vrai : la question ne se pose plus depuis qu'André Doms a exhumé l'oeuvre de Jean Glineur et salué celles de Pierre Bourgeois puis, tout récemment, d'Arthur Praillet.1932 : Naissance, le 9 mars, à Bruxelles.1942-50 : Adolescence fortement marquée par la religion chrétienne (dans la croyance, puis la contestation).1950-54 : Études de philologie romane à l'U.L.B.. Il commence à enseigner, comme étudiant, durant ses propres études. C'est aussi à cette période qu'il commence à s'intéresser sérieusement à la littérature, notamment dans l'amitié de Henry Fagne (qu'il connaît depuis 1949 et avec qui il collabore).1954-82 : Période pendant laquelle il enseigne : le français et l'espagnol. L'Espagne, d'ailleurs, le fascine. A partir de ses dix-huit ans, et cela jusqu'en 1965, il s'y rendra chaque année. Entre 1960 et 1965 il rédige des critiques pour la revue Marginales. La fin des années soixante le voit père de quatre enfants, nés de son mariage avec Claire Anne Magnès. Il cesse de voyager et travaille activement à sa maison de Corroy-le-Grand. Entre 1972 et 1975, il se remet à voyager. Il se rend, cette fois, en Hongrie et en Yougoslavie pour raisons touristiques et littéraires. Il réalisera, par la suite, de nombreuses traductions de ces langues au français, surtout avec Mira qu'il rencontre en 1980 à Struga et avec qui il vivra de 1980 à sa mort en 1993. A signaler aussi : c'est en 1976 qu'il devient rédacteur du Journal des Poètes. Il le demeurera jusqu'en 1991. Outre la littérature, il se passionne pour la musique, l'archéologie, «la justesse historique», la physique contemporaine et la philosophie des sciences. Il quitte l'enseignement en 1982.1982-87 : Voyage beaucoup (en France, Hongrie, Tchécoslovaquie) Traductions. Séjourne régulièrement en Macédoine et en Serbie.
NOS EXPERTS EN PARLENT...
Le Carnet et les Instants

Le poète André Doms nous livre, en trois denses volumes – Italiques, Ibériques, Balkaniques -, ses Écrits du voyage. Portés par une invocation vibrante : « en soi et par soi-même, le voyage m’emporte, m’ouvre, et je m’y adonne comme à un alcool de vie ».Attirée par Italiques, je lisais avec plaisir : « l’Italie, première qui me donne à vivre les clartés méditerranéennes, physiques et métaphysiques ».Son rapport majeur à l’Italie fut littéraire. De la rencontre avec l’écrivain et traducteur Franco Prete et quelques amis, initiateurs de la belle aventure d’Origine, pariant sur la reconnaissance mutuelle des poésies italienne et française, incarnée par de nombreuses publications…


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Le fantastique dans l’oeuvre en prose de Marcel Thiry

À propos du livre Il est toujours périlleux d'aborder l'oeuvre d'un grand écrivain en isolant un des aspects de sa personnalité et une des faces de son talent. À force d'examiner l'arbre à la loupe, l'analyste risque de perdre de vue la forêt qui l'entoure et le justifie. Je ne me dissimule nullement que le sujet de cette étude m'expose ainsi à un double danger : étudier l'oeuvre — et encore uniquement l'oeuvre en prose de fiction — d'un homme que la renommée range d'abord parmi les poètes et, dans cette oeuvre, tenter de mettre en lumière l'élément fantastique de préférence à tout autre, peut apparaître comme un propos qui ne rend pas à l'un de nos plus grands écrivains une justice suffisante. À l'issue de cette étude ces craintes se sont quelque peu effacées. La vérité est que, en prose aussi bien qu'en vers, Marcel Thiry ne cesse pas un instant d'être poète, et que le regard posé sur le monde par le romancier et le nouvelliste a la même acuité, les mêmes qualités d'invention que celui de l'auteur des poèmes. C'est presque simultanément que se sont amorcées, vers les années vingt, les voies multiples qu'allait emprunter l'oeuvre littéraire de M. Thiry pendant plus de cinquante années : la voie de la poésie avec, en 1919, Le Coeur et les Sens mais surtout avec Toi qui pâlis au nom de Vancouver en 1924; la voie très diverse de l'écriture en prose avec, en 1922, un roman intitulé Le Goût du Malheur , un récit autobiographique paru en 1919, Soldats belges à l'armée russe , ou encore, en 1921, un court essai politique, Voir Grand. Quelques idées sur l'alliance française . Cet opuscule relève de cette branche très féconde de son activité littéraire que je n'étudierai pas mais qui témoigne que M. Thiry a participé aux événements de son temps aussi bien sur le plan de l'écriture que sur celui de l'action. On verra que j'ai tenté, aussi fréquemment que je l'ai pu, de situer en concordance les vers et la prose qui, à travers toute l'oeuvre, s'interpellent et se répondent. Le dialogue devient parfois à ce point étroit qu'il tend à l'unisson comme dans les Attouchements des sonnets de Shakespeare où commentaires critiques, traductions, transpositions poétiques participent d'une même rêverie qui prend conscience d'elle-même tantôt en prose, tantôt en vers, ou encore comme dans Marchands qui propose une alternance de poèmes et de nouvelles qui, groupés par deux, sont comme le double signifiant d'un même signifié. Il n'est pas rare de trouver ainsi de véritables doublets qui révèlent une source d'inspiration identique. Outre l'exemple de Marchands , on pourrait encore évoquer la nouvelle Simul qui apparaît comme une certaine occurrence de cette vérité générale et abstraite dont le poème de Vie Poésie qui porte le même titre recèle tous les possibles. Citons aussi le roman Voie-Lactée dont le dénouement rappelle un événement réel qui a aussi inspiré à M. Thiry la Prose des cellules He La. Je n'ai donc eu que l'embarras du choix pour placer en épigraphe à chaque chapitre quelques vers qui exprimaient ou confirmaient ce que l'analyse des oeuvres tentait de dégager. Bien sûr, la forme n'est pas indifférente, et même s'il y a concordance entre les thèmes et identité entre les motifs d'inspiration, il n'y a jamais équivalence : le recours à l'écriture en prose est une nécessité que la chose à dire, à la recherche d'un langage propre, impose pour son accession à l'existence. C'est précisément aux «rapports qui peuvent être décelés entre ces deux aspects» de l'activité littéraire de Marcel Thiry que Robert Vivier a consacré son Introduction aux récits en prose d'un poète qui préface l'édition originale des Nouvelles du Grand Possible . Cette étude d'une dizaine de pages constitue sans doute ce que l'on a écrit de plus fin et de plus éclairant sur les caractères spécifiques de l'oeuvre en prose; elle en arrive à formuler la proposition suivante : «Aussi ne doit-on pas s'étonner que, tout en gardant le vers pour l'examen immédiat et comme privé des émotions, il se soit décidé à en confier l'examen différé et public à la prose, avec tous les développements persuasifs et les détours didactiques dont elle offre la possibilité. Et sa narration accueillera dans la clarté de l'aventure signifiante plus d'un thème et d'une obsession dont son lyrisme s'était sourdement nourri.» Car, sans pour autant adopter la position extrême que défend, par exemple, Tzvetan Todorov dans son Introduction à la littérature fantastique, et qui consiste à affirmer que la poésie ne renvoie pas à un monde extérieur à elle-même, n'est pas représentative du monde sensible (et d'en déduire — j'y reviendrai dans la quatrième partie — que poésie et fantastique sont, pour cette raison, incompatibles), on peut cependant accepter comme relativement sûr que la traduction en termes de réalité ne s'opère pas de la même façon lors de la lecture d'un texte en prose ou d'un poème. 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