111 films. Chroniques de cinéma (1970-1983)

RÉSUMÉ

Chroniques de l’hebdomadaire bruxellois Spécial, rassemblées, éditées et préfacées par André SempouxÀ propos du livre

Quand un grand écrivain assiste, pour des raisons journalistiques, à l’effervescence d’une des époques les plus excitantes de l’histoire du cinéma, il n’en reste pas moins un grand écrivain, même dans la pénombre d’une salle de vision. Et il en résulte des articles qui, à l’époque de leur parution dans le magazine pour lequel…

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À PROPOS DE L'AUTEUR
Guy Vaes

Auteur de 111 films. Chroniques de cinéma (1970-1983)

Guy Vaes fut longtemps l'auteur d'un livre, qui se nimba bientôt d'une aura mythique : Octobre, long dimanche. Il parut en 1956, l'auteur avait trente ans. Il y avait été préparé par une enfance et une jeunesse dans le milieu des intellectuels francophones d'Anvers, en avait écrit les premières pages au lendemain de la deuxième guerre. D'emblée, Vaes avait compris que l'écriture demande une longue maturation. Né le 27 janvier 1927, Vaes est le fils d'un fonctionnaire de la commission d'assistance publique de la cité scaldéenne. Très lettré, il était collaborateur de la revue Lumière dirigée par son beau-frère Roger Avermaete. Le fils de ce dernier, devenu sous le nom d'Alain Germoz homme de lettres et journaliste, deviendra l'ami et complice de toujours de son cousin. Les livres abondent dans la maison familiale : Jules Verne et Stevenson s'imposent comme auteurs de prédilection, et le resteront. Plus tard, Vaes s'en expliquera : «Pour éliminer la psychologie et aborder la métaphysique, on peut être amené à utiliser la couverture d'un genre traditionnel : l'allégorie, le policier ou le fantastique.» L'exode, puis l'occupation, sont une nouvelle occasion de se gaver de lectures : Kafka, Woolf, Melville, Faulkner, qui fourniront plus tard la matière d'analyse d'un superbe essai sur le temps, La flèche de Zénon. Une certaine conception d'un présent absolu s'y précise, que l'on suit comme un fil d'Ariane dans les romans. Un service militaire pas trop absorbant dans l'immédiat après-guerre, puis un long congé de maladie, quelques autres périodes de disponibilité réparties sur une dizaine d'années favorisent l' écriture d'Octobre long dimanche qui, dès sa parution chez Plon, suscite des commentaires très élogieux, de Pascal Pia à Julio Cortazar, et devient, au fil des années, une livre-culte. D'autant que le roman suivant va se faire attendre longtemps. Les besognes alimentaires, en l'occurrence journalistiques, empêchant de se consacrer en suffisance à l'écriture, la photographie va, durant plus de vingt ans, compenser le manque. Londres en est le point focal : un livre de méditation urbaine, Londres ou le labyrinthe brisé va être complété par un album où textes et clichés alternent, Les cimetières de Londres. En 1983 paraît enfin le deuxième roman, L'Envers, et le flux fictionnel repart pour de bon avec ce livre qui sera couronné la même année par le prix Rossel. Bruno s'y refuse à revoir son ami Broderick, dont il lui est dit qu'il aurait survécu à la chute fatale qu'il a faite au pied d'une falaise de Skye. Il capte pourtant son message, celui de l'inexistence du temps, qui ne serait qu'une perception de la conscience. Le tempo de parution des romans, dès lors, s'accélère relativement. L'Usurpateur paraît en 1993 avec une préface de l'auteur flamand Hubert Lampo, qui suggère de qualifier le réalisme pratiqué par Vaes non pas de magique, comme on le fait d' ordinaire, mais plutôt de mythique : le roman de s'inspire-t-il pas du labyrinthe et de son Minotaure? Guy Vaes s'est éteint le 26 février 2012

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Le fonds Jean Muno ( in La chronique des Archives & musée de la littérature )

Mon héros – le seul que je puisse comprendre de l’intérieur – sera [...] cette part décriée de moi-même et de mon lecteur, le « petit bourgeois » d’aujourd’hui, le petit homme occidental. Mon sujet : son inquiétude, son inadaptation, sa rébellion larvée, sa souffrance. XX Les archives de Jean Muno (1924-1988), léguées aux AML en 2008 par sa veuve, Jacqueline Burniaux, sont à l’image de son auteur : discrètes mais passionnantes. Désormais entièrement dépouillées et encodées sous les cotes ML 11140 à ML 11173, elles proposent au chercheur des manuscrits, des articles, les fragments d’un journal, des correspondances, des photographies,... qui touchent au plus près à l’identité complexe de ce natif de Molenbeek-Saint-Jean (« Ni Flamand ni Wallon ni même Bruxellois. Un mélange des trois, oui, une addition bizarre, assez inopportune, d’appartenances imparfaites » XX ) dont le destin se fixe dès les années 1950 dans une commune symptomatiquement dénommée Malaise, à cheval sur la future frontière linguistique. Sur cette identité « en creux » vient se greffer une blessure plus profonde, née du lien qui unit Jean Muno, de son vrai nom Robert Burniaux, à ses parents, Constant Burniaux et Jeanne Taillieu, tous deux instituteurs et écrivains. Une relation envahissante, entre rejet et ressemblance (père et fils siégeront, notamment, au sein de l’Académie royale de langue et de littérature française de Belgique), autour de laquelle se sont échafaudés la plupart de ses écrits. Si ceux-ci échappent au tragique, c’est parce que Muno s’est très vite emparé de deux armes de distanciation essentielles : l’humour et le fantastique. Le fantastique est avec l’humour une dimension constante, d’ailleurs très belge, de mon œuvre. Ce sont deux manières de prendre ses distances par rapport au réel sans rompre avec lui, sans cesser de l’appréhender. XX C’est en 1949 que, parallèlement à son travail d’enseignant, la carrière littéraire de Jean Muno démarre. Il écrit alors une pièce radiophonique intitulée Un petit homme seul, dont les archives, hélas, ne gardent pas trace. Qu’à cela ne tienne, on retrouvera ce personnage, sorte de double littéraire, de manière récurrente dans toute son œuvre, aussi bien dans les romans écrits à partir de 1955, que dans les nombreuses nouvelles qui paraissent en revues (dans Marginales et dans Audace, pour ne citer qu’elles). Le fonds, riche en manuscrits, propose au chercheur différentes versions des romans comme L’homme qui s’efface (1963), L’île des pas perdus (1967), Le Joker (1972) et Ripple-marks (1976), ainsi que des manuscrits de nouvelles plusieurs fois retravaillés pour les recueils La Brèche (1973), Histoires singulières (Prix Rossel 1979, rééd. 2015), Contes naïfs (1980) et Entre les lignes (1983, avec les étonnants dessins de Royer). Le fonds compte également quelques inédits ainsi que les manuscrits d’exploitations radiophoniques, théâtrales ou cinématographiques de certains textes. Ainsi, l’exemple de Comptine en 1966, tiré de la nouvelle Fumées sans feu et qui obtint le Grand Prix international de la fiction radiophonique Paul Gilson. À côté des manuscrits, le fonds présente aussi de nombreuses notes de travail ainsi qu’un fragment de journal (pour la période du 31 août 1952 au 7 avril 1957). Ils constituent une source précieuse pour le chercheur puisqu’ils plongent aux sources de la création et illustrent les conflits intérieurs, voire les révoltes de l’écrivain. Des documents à mettre en parallèle avec Rages et ratures, les pages inédites d’un journal de 1975 à 1986, dont un dossier retrace les étapes de l’édition posthume aux Éperonniers, en 1998. Des « dossiers d’édition » existent également pour certaines œuvres. C’est le cas pour le roman Histoire exécrable d’un héros brabançon qui, à défaut de manuscrits, reprend les maquettes de la couverture des éditions Jacques Antoine, avec les illustrations drolatiques de Jacques Faton en 1982. Caméléon, l’adaptation scénique de Patrick Bonté d’après plusieurs romans de Muno, est un cas similaire : pas de manuscrits, mais un dossier fort complet de la tournée du Théâtre de l’Esprit frappeur en Belgique, en Suisse et au Canada. L’œuvre fictionnelle ne doit pas faire oublier le Muno essayiste. S’il s’est souvent penché sur le statut de l’écrivain belge et, par extension, sur son propre statut – songeons, notamment, à ses interventions dans les Cahiers du Groupe du Roman –, la collaboration de Muno avec Robert Frickx a abouti à deux essais sur la littérature belge, l’un dans la collection Que sais-je ? en 1973 (rééd. 1980) et l’autre aux éditions québécoises Naaman en 1979. Quant aux lectures attentives du Muno critique, elles laissent entrevoir ses goûts littéraires et, notamment, sa grande estime pour les romans de Conrad Detrez. Un échantillon d’articles est bien entendu présent dans le fonds. Celui-ci se clôt par des dossiers de correspondances qui restituent, à travers des lettres d’auteurs amis comme Gaston Compère, Jacques Crickillon, Marcel Moreau ou Paul Willems... l’écho de la voix de Jean Muno. Mettons en exergue la volumineuse et désopilante correspondance de Jacques-Gérard Linze à Muno qui, avec plus d’une centaine de lettres – à compléter avec les lettres de Muno à Linze déjà présentes aux AML – nous content l’histoire d’une amitié savoureuse et indéfectible. Rappelons qu’une sélection de ces archives Muno est mise en valeur dans les locaux des Archives et Musée de la Littérature jusqu’en septembre 2015. Elle s’intitule « Jean Muno et l’ironie » XX : juste regard sur celui qui feignait de s’excuser : « Est-ce ma faute si le rire existe ? » XX Saskya Burens Muno (Jean), « Le blanc cassé », dans Le Groupe du Roman, cahier 1, 1967, p. 38. Muno (Jean), « J’habite Malaise, Belgique », dans Le Groupe du Roman, cahier 23, 1989, p. 141. Jean Muno cité dans Denis (Marie), « Le Vampirologue », dans Le Groupe du Roman, cahier 23, op. cit., p. 77. Titre inspiré par l’essai de Moreels (Isabelle), Jean Muno. La subversion souriante de l’ironie, Bruxelles, Bern, Berlin, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Wien, pie-Peter Lang, 2015. Muno (Jean), Histoire exécrable d’un héros brabançon,…

Réponse de Françoise Lempereur. Hommage à Jean-Jacques Gaziaux

Monsieur le Président, Messieurs les Sociétaires, Je tiens tout d’abord à vous remercier pour votre chaleureux accueil et vous dire combien je suis ravie de succéder à Jean-Jacques Gaziaux, ethnolinguiste exemplaire que j'ai eu la chance de côtoyer durant les années 1993 à 2007 au Conseil supérieur de l’Ethnologie de la Communauté française Wallonie-Bruxelles. Il avait lui-même remplacé, en 1986, Maurice Piron qui fut mon professeur de «français de Belgique» et de littérature française à l’Université de Liège en 1970 et 1971. * C’est en ouvrant la chronique Wallonnes du 1er trimestre 2022 que j’ai appris le décès de Jean-Jacques Gaziaux, quelques semaines auparavant, le 31 janvier. Je le savais malade mais ne pensais pas que la Grande Faucheuse l’emporterait si tôt, à 79 ans, car j’avais gardé de lui l’image d’un homme grand et fort qui n’épargnait ni son temps ni ses forces pour conjuguer un métier d’enseignant, une vie d’époux et de père, un goût pour les voyages ‒ le Portugal et surtout l’Irlande avaient sa préférence pour les vacances familiales ‒, une passion pour la recherche et la publication de nombreux travaux, très chronophages à n’en pas douter. L’In memoriam publié sous la plume de son ami Jean-Marie Pierret me fit découvrir des facettes méconnues de sa personnalité hors normes. À vrai dire, je n’avais jusqu’alors pas réellement pris conscience du caractère exceptionnel de ce chercheur infatigable et auteur prolifique, tant son talent était caché sous une modestie et une discrétion peu communes. J’avais, par exemple, acquis une dizaine de ses ouvrages mais n’imaginais pas qu’ils ne constituaient qu’une part réduite de son œuvre. * Lorsque, le 18 octobre dernier, je reçus un message du Président de la Société, Patrick Delcour, m’annonçant que celle-ci désirait me voir reprendre le siège de Jean-Jacques Gaziaux, j’en fus à la fois très heureuse et quelque peu mal à l’aise car j’estimais que je ne maîtrisais pas suffisamment le wallon pour remplacer un incontestable expert de l’ethnolinguistique. Mins, våt mîs tård qui måy et si, en trois mois, je n’ai guère amélioré ma connaissance de la langue, j’ai pu au moins en apprendre davantage sur celui qui a notamment rédigé une thèse de doctorat de 1791 pages manuscrites, calligraphiées et sans rature, intitulée "La Vie agricole à Jauchelette". Étude dialectologique et ethnographique… un travail de titan qui sera remanié ultérieurement pour donner naissance à cinq gros ouvrages publiés entre 1982 et 2003. Grâce au gestionnaire efficace de la Bibliothèque des Dialectes de Wallonie, Baptiste Frankinet, j’ai pu consulter l’ensemble de ses publications. Ma curiosité a alors cédé la place à une réelle sidération, à la fois devant son extraordinaire empathie avec le monde rural et devant sa rigueur scientifique. *   L’art de l’enquête Ne jugeant pas utile de reprendre ici les éléments biographiques et bibliographiques excellemment évoqués par Jean-Marie Pierret dans Wallonnes 2022/1, je voudrais, dans le présent hommage, faire ressortir l’intelligence et le savoir-faire de Jean-Jacques Gaziaux à travers sa maîtrise de l’art de l’enquête et celle de l’organisation et de la valorisation des éléments collectés. Un réel modèle à suivre. À la différence de bon nombre de chercheurs contemporains, il a toujours aspiré à développer ses connaissances non pas en élargissant son terrain d’enquête initial mais bien en le cernant avec précision et en l’approfondissant. Après une enfance à Jauchelette, il vécut, jusqu’à son décès, à Jodoigne, ville de 15 000 habitants aux confins du Brabant et de la Hesbaye et jeta son dévolu sur une zone rurale d’une superficie d’environ 60 km², au sud et à l’ouest de cette ville. Il est, à ma connaissance, un des rares collecteurs wallons à avoir sillonné durant plus de quarante ans le même territoire, pour en explorer les moindres recoins et y interroger un maximum de témoins différents. * Jean-Jacques Gaziaux définissait le parler brabançon comme une variété de dialecte namurois et, lorsqu’il recueillait des termes ou des expressions qui dépassaient le cadre initialement défini (le seul village de Jauchelette, par exemple), il prenait soin d’indiquer si la forme recueillie existait dans un dictionnaire publié et si elle était «largement», «partiellement» ou «très localement» répandue. Ainsi, dans son article «À propos de quelques mots de l’est du Brabant wallon», il analyse, p. 58-64, les appellations locales des fanes de pommes de terre et de betteraves et «tente de délimiter avec le plus de précision possible les aires de répartition des différents mots», selon le modèle de l’Atlas linguistique de Wallonie. Pour ce faire, il ira jusqu’à entreprendre des enquêtes systématiques dans 43 anciennes communes des cantons de Jodoigne et de Perwez, plus Longueville, à raison de deux ou trois témoins dans chacune d’elles …amon Gaziaux, on n’ mache nin lès scwaces, lès cwasses, lès cwades, lès ranches èt lès trḗts (dès canadas) avou lès fouyes, lès cheûves et lès chėmes (dès pétrâles)! Dans le même article, alors qu’il examine, p. 48-50, le mot wastia, qui désigne un gros bâton ou un gourdin, il introduit d’autres acceptions, disparues ou éloignées, liées, selon les villages ‒ dûment précisés ‒, au djeu do wastia, jeu de décapitation de l’oie ou jeu de quilles, ou au grand gâteau, aujourd’hui remplacé par des pains fleuris, porté et bénit lors du « pèlerinage annuel du Wastia » à Basse-Wavre. Pour tenter d’expliquer le lien entre ces appellations, il renvoie non seulement au FEW et à plusieurs dictionnaires wallons mais aussi à des travaux d’historiens et de folkloristes, désavouant même, grâce à ces sources, une proposition d’étymologie qu’il avait formulée une dizaine d’années plus tôt dans sa thèse de doctorat. C’est peu dire en effet que J.-J. Gaziaux linguiste se doublait d’un J.-J. Gaziaux ethnographe. Le Conseil supérieur de l’Ethnologie ne s’était pas trompé en l’intégrant en son sein car il alliait mieux que quiconque le sens de l’observation de terrain, le contact avec le témoin et la volonté de circonscrire la matière en organisant avec habileté les données récoltées. La collection Tradition wallonne – hélas disparue! ‒ peut se féliciter d’avoir publié deux de ses meilleures monographies ethnographiques: Des gens et des bêtes (1995) et De quoi nourrir gens et bêtes (2003), ainsi que plusieurs articles, notamment: «Échos du carnaval à Jodoigne au XXe siècle» et «Le temps qu’il fait à Jauchelette». Dans ce dernier, il recense, en près de 100 pages, l’ensemble des termes et des expressions qu’utilisent lès vîyès djins pour décrire les phénomènes météorologiques locaux. Comme à l’ordinaire, il s’efforce de vérifier chaque information et demande à sa tante Maria Léonard, ancienne cultivatrice née en 1915, de noter en wallon le temps de chaque jour, d’avril 1982 à mars 1983, soit durant une année entière. Il s’assure ainsi de traiter toutes les situations possibles et de recouper efficacement les enquêtes déjà réalisées auprès d’autres témoins du village. * Jean-Jacques Gaziaux sait que la langue vernaculaire est menacée et qu’elle constitue «un vecteur du patrimoine culturel immatériel», pour reprendre la formule utilisée par l’UNESCO, patrimoine qui ne cesse d’évoluer car tributaire des modes de vie, des mutations sociales et des contraintes environnementales et climatiques. Il intègre donc cette problématique dans son œuvre et, après chaque enquête, s’efforce de comparer l’état contemporain de la question avec les données récoltées auparavant. Ainsi, lorsqu’il termine la rédaction de sa thèse de doctorat, en 1981, après vingt ans de collectes de témoignages, il fait le point sur l’évolution…

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